Dans les yeux d’Anouch, Arménie 1915. Roland Godel.

Ce livre a reçu le prix Gulli du roman 2015, il s’adresse aux ados à partir de 11 ans et évoque avec justesse et mesure le génocide arménien, il y a tout juste 100 ans.

Nous sommes pendant l’été de 1915, en Turquie, Anouch et sa famille vivent tranquillement en province dans la ville de Bursa. A la nuit, la police fait irruption dans leur maison et leur ordonne de prendre la route. C’est la début de l’exode, de la déportation.

A travers les yeux de cette jeune fille, Anouch, nous vivons de l’intérieur la fuite des familles, la peur, les tensions, la faim, le froid, la mort et les massacre, sur les routes, dans le trains. Mais nous avons également une vision de la solidarité, de l’entraide, du partage, des soutiens si faibles et disparates soient-ils, qui vont permettent à certaines familles de s’en sortir. Et malgré les difficultés, malgré les traumatismes de l’Histoire, les amours adolescentes, le partage des sentiments, les premiers émois, la fidélité dans l’amitié. Autant de moments qui montrent que la vie est également quelque chose de beau qu’il faut vivre à fond.

Ce roman évoque cette période dramatique et souvent passée sous silence de l’histoire de la Turquie, la déportation de milliers d’Arméniens, et leur mort programmée. Il y a cent ans, le premier génocide de masse d’un peuple, anéanti pour sa religion, ses croyances, par un autre peuple avec qui il avait vécu jusque-là en bonne intelligence. Il y a beaucoup d’intelligence, de sentiment, et parfois de la joie dans ce récit, il nous monte qu’on doit toujours croire en l’homme, qu’il faut garder espoir et avoir foi en l’avenir.

💙💙💙💙

Catalogue éditeur : Gallimard jeunesse

Anouch, treize ans, est Arménienne et vit en Turquie. En 1915, la population arménienne est chassée de chez elle, entassée dans des camps et exterminée massivement. Pour Anouch et sa famille commence un long et terrible exode. Ils parviennent à demeurer clandestinement en Turquie et s’organisent tant bien que mal pour survivre. Seul rayon de lumière dans cette terrible épreuve, Anouch rencontre Dikan, un garçon avec lequel elle se lie. Mais les deux amoureux sont bientôt séparés : Dikan et les siens sont arrêtés et déportés… Anouch s’accroche au fol espoir qu’il est toujours vivant et qu’elle le reverra un jour.

Parution : 19-03-2015

Je me souviens, Martin Michaud

« Le tabarnac ! Y est parti avec mon char ! » Ça vous dit de partir au Québec ? Alors embarquez dans ce polar intense et dépaysant, vous ne serez pas déçus !

https://i0.wp.com/static1.lecteurs.com/files/books-covers/678/9782875801678_1_75.jpg

En voyant Je me souviens de Martin Michaud, j’ai pensé à mes cousins canadiens, à cette phrase longtemps inscrite sur la plaque de leurs voitures au Québec, et j’ai eu envie de découvrir ce maitre du polar proposé par les éditions Kennes. Apparemment un auteur qui marche bien chez nos cousins, et comme je les comprends. On a vraiment du mal à lâcher ce lourd et imposant pavé, et si le format peut laisser dubitatif face à l’effort qui s’annonce, j’avoue, je l’ai un peu laissé de côté, me demandant comment l’aborder ! En fait les pages tournent seules et il bien difficile de s’arrêter.

Montréal, à la veille des fêtes de fin d’année, la neige a commencé à recouvrir les rues et les paysages, habillant le récit d’une atmosphère particulière dont on s’imprègne au fil des pages. Le sergent-détective Victor Lessard est de retour à la Section des crimes majeurs, après quelques péripéties et un accident (à aller explorer dans les opus précédents pour ceux qui comme moi découvrent la série, mais sans que cela gêne la lecture). Il a une coéquipière, Jacynthe Taillon, forte femme au caractère bien trempé avec laquelle il forme un duo totalement désassorti mais qui fonctionne, nous faisant penser à Adamsberg et Rétancourt ou à l’inspecteur Thomas Lynley et à sa fidèle adjointe Barbara Havers.

L’enquête est multiforme, l’auteur nous plonge, après quelques scènes de meurtre assez sordides à la Jean-Christophe Grangé (et moi qui ne voulais plus en lire !) mais en légèrement plus soft, dans toutes sortes d’ambiances, meurtres au relents moyenâgeux, recherche d’un tueur en série, assassinat et enlèvement politiques, enquête dans un hôpital psychiatrique où se seraient pratiquées des recherches plutôt louches des années en arrière, recherche et expérimentations qui n’auraient pas été sans risques pour les cobayes, résurgences des théories du complot de l’assassinat de Kennedy, tout y est. Nous suivons Victor Lessard alors qu’il cherche à assembler les pièces du puzzle avec son équipe de choc. Personnalités décalées et complémentaires, une équipe de flics comme on l’imagine, en cohérence avec des caractères et des relations de travail classiques.

Et bien sûr, en parallèle sa vie n’est ni calme ni sereine, divorcé, une petite amie plus jeune avec qui il faut assurer, des enfants qui s’embraquent sur des chemins un peu tordus, des collègues perturbés, il a malgré tout de l’empathie pour son supérieur dont la femme est gravement malade, il assure sur tous les fronts. Au début, j’ai eu un peu de mal à plonger dans sa vie privée qui me paraissait peu réaliste, comme s’il fallait meubler , mais finalement tout s’imbrique parfaitement.

Au final, un très bon polar, une écriture qui sait faire monter le suspense, découpé en chapitres courts qui font facilement intégrer la taille du bouquin. J’ai adoré les formules, les tournures, le langage, dans lesquelles je retrouvai avec un bonheur total les expressions entendues lors de rencontres avec ma famille canadienne, un régal !

quebecbis

Du même auteur, retrouvez ma chronique de Violence à l’origine

Catalogue éditeur : Kennes

À Montréal, juste avant Noël, un homme et une femme meurent le cou transpercé par ce qui semble être un instrument de torture sorti tout droit du Moyen Âge. Auparavant, ils ont entendu la voix de Lee Harvey Oswald, l’assassin présumé du président Kennedy.
Un sans-abri se jette du haut d’un édifice de la place d’Armes.

Ayant séjourné à plusieurs reprises en psychiatrie, il prétendait avoir participé, avec le FLQ, à l’assassinat de Pierre Laporte. Sur le toit, avant de sauter, il laisse deux portefeuilles, ceux des victimes. La série de meurtres se poursuit, les cadavres s’empilent…
De retour à la section des crimes majeurs, le sergent-détective Victor Lessard mène l’enquête avec, pour le meilleur et pour le pire, la colorée Jacinthe Taillon.
Je me souviens parle d’identité à bâtir, de mémoire à reconstituer et de soif d’honneur.

Date de parution : 30/09/2015 / EAN : 9782875801678  / Nombre de page : 634

Les vieux fourneaux 3 celui qui part. Lupano. Cauuet

Dans « celui qui part », le tome 3 des vieux fourneaux, on retrouve avec plaisir les vieux râleurs aux répliques toujours tellement truculentes, et on en redemande.

Un tome 3 très attendu, où nous retrouvons Antoine et sa mauvaise humeur, Mimile et son traitement, et Pierrot qui utilise l’argent d’Ann Bony pour lutter avec son groupe « ni yeux, ni maitre » de façon héroïque et particulièrement originale pour la sauvegarde des abeilles. Où nous rencontrons aussi Errol, un ancien rugbyman éclopé et dépenaillé, la vengeance douce-amère de Berthe, une voisine abandonnée par tous, des combats écologiques menés avec des moyens d’arrière-garde mais qui sont pourtant tellement d’actualité. Et Sophie, prête à mettre les points sur le I et à taper sur la tête de ses sublimes anciens.

Bref, ce tome-là est un vrai régal, c’est enlevé, drôle et touchant, sincère et contestataire, j’ai vraiment aimé et retrouvé le plaisir du premier. J’ai déjà hâte de lire la suite.

Catalogue éditeur : Dargaud

Après deux albums en 2014, voici le troisième tome, très attendu, des Vieux Fourneaux ! Lupano et Cauuet se penchent cette fois sur le cas de Mimile, qui a passé sa vie à bourlinguer dans le Pacifique, entre bourre-pifs, rugby et amitiés au long court. Pirate un jour, pirate toujours ! En parallèle : Pierrot et son collectif « Ni Yeux Ni Maître » jouent les abeilles tueuses, et Sophie apprend qu’à la campagne, on ne prend pas ses oeufs de poule chez les vieilles chouettes. Bref, les « vieux fourneaux » sont de retour, pétant la forme ! Pagination : 64 pages / Format : 225×298 / EAN : 9782505063520

D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds, Jon Kalman Stefansson

Partir à la découverte de l’Islande, de son histoire et de son climat rigoureux, avec le très beau roman de Jon Kalman Stefansson, « D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds » est une expérience à la fois étrange et enrichissante.

Quel livre étrange, à la fois beau et triste, dense par son écriture. Pourtant, si dans ces lignes, la vie passe, des vies passent, j’ai eu souvent l’impression qu’il se passait peu de choses.
Le narrateur est le meilleur ami d’Ari. Dans son récit, les époques se côtoient rendant parfois difficile la compréhension du texte. Nous découvrons Ari alors qu’il quitte le Danemark, il vient de recevoir un paquet étrange de son père, dont on comprend qu’il est gravement malade, mort peut être. Puis viennent les récits sur ses grands-parents, Oddur le capitaine d’un bateau de pêche, et Margrét, la femme à qui il est lié depuis l’enfance, leur rencontre fulgurante, puis la vie à deux, les enfants, la lassitude et la difficulté de vivre intensément et dans la durée malgré un tel amour, la perte d’un enfant, la vie en somme . Le narrateur alterne avec l’évocation des parents d’Ari, plus précisément de son père, dont il n’est absolument pas proche, et de sa belle-mère, puisque sa mère est morte quand il était enfant. Enfin voici Ari avec sa femme et ses enfants, Ari qui part un jour de chez lui, sur un coup de tête et s’installe deux ans au Danemark.
Nous découvrons un pays qui vit intensément de la pêche et des conserveries de poisson, quand la base américaine apporte une certaine aisance à l’ile, malgré son isolement, les conserveries de poissons fonctionnent, pourvoyeuses d’emploi pour les iliens. Puis l’arrivée de quotas, la perte des emplois, la fin de la prépondérance des marins pêcheurs islandais, les ravages du chômage et de l’alcool.

Au fil des pages, nous découvrons des tranches de vie, des événements qui font que tout n’est plus comme avant, sans qu’on sache vraiment ni pourquoi ni comment, mais après tout là n’est pas l’essentiel. Il y a un mardi qui n’est tout d’un coup plus comme les autres, une jeune fille dont on est amoureux, et rien ne se passe comme prévu, et un jour, longtemps après, on comprend que l’on avait tout faux, des grands parents, amoureux, une vie ensemble, difficile, rude, comme le paysage et le climat islandais. Froid, venteux,  aride. On ressent bien au fil des pages le climat, les paysages, la vie rude de ces régions hostiles et pourtant chaleureuses. L’écriture est belle et dense, poétique parfois, dans ses descriptions de la vie, d’époques qui ne sont plus. C’est un livre qui ne laisse pas indifférent et une expérience de lecture intéressante. J’imagine aussi un très grand travail de traduction pour rendre cette façon très particulière qu’à l’auteur de poser ses mots, de composer ses phrases, pour nous faire entrer de plain-pied, par la description de l’intime, dans l’histoire de son pays.

💙💙💙💙

Catalogue éditeur : Gallimard

«Elle est plus belle que tout ce qu’il a pu voir et rêver jusque-là, à cet instant, il ne se souvient de rien qui puisse soutenir la comparaison, sans doute devrait-il couper court à tout ça, faire preuve d’un peu de courage et de virilité, pourtant il ne fait rien, comme s’il se débattait avec un ennemi plus grand que lui, plus fort aussi, c’est insupportable, il serre à nouveau les poings, récitant inconsciemment son poème d’amour. Elle s’en rend compte et lui dit, si je dénoue mes cheveux, alors tu sauras que je suis nue sous ma robe, alors tu sauras que je t’aime.»
Ari regarde le diplôme d’honneur décerné à son grand-père, le célèbre capitaine et armateur Oddur, alors que son avion entame sa descente vers l’aéroport de Keflavík. Son père lui a fait parvenir un colis plein de souvenirs qui le poussent à quitter sa maison d’édition danoise pour rentrer en Islande. Mais s’il ne le sait pas encore, c’est vers sa mémoire qu’Ari se dirige, la mémoire de ses grands-parents et de leur vie de pêcheurs du Norðfjörður, de son enfance à Keflavík, dans cette ville «qui n’existe pas», et vers le souvenir de sa mère décédée.
Jón Kalman Stefánsson entremêle trois époques et trois générations qui condensent un siècle d’histoire islandaise. Lire la suite…

448 pages, 140 x 205 mm / ISBN : 9782070145959 / Parution : 20-08-2015

La dernière nuit du Raïs. Yasmina Khadra.

Entrer dans la tête d’un tyran, exercice difficile, mais avec « La dernière nuit du Raïs », Yasmina Khadra nous embarque dans les pensées complexes de Kadhafi lors de la chute du dictateur Libyen.

khadra brive
Yasmina Khadra à la Foire du Livre de Brive © DCL DS 2015

Comme toujours avec les romans de Yasmina Khadra, j’ai eu du mal à lâcher « la nuit du Raïs » que j’ai lu d’une traite, alors que j’étais à demi réfractaire au sujet. Mais inconditionnelle de l’auteur, je ne pouvais pas le laisser passer.
Dès le début, le ton est donné puisque l’auteur s’exprime à la première personne. On s’engouffre alors au plus complexe et au plus sombre des pensées de Mouammar Kadhafi, pendant cette nuit du 19 au 20 octobre 2011, alors qu’il s’est réfugié avec sa garde rapprochée dans une école à l’abandon de la ville de Syrte, et que son pays est à feu et à sang. Difficile d’imaginer les idées de ce chef d’état, le frère guide de son peuple, ce mégalo qui a su à la fois rassembler un pays fait de tribus disparates et qui s’affrontaient sans relâche, et dictateur sanguinaire prêt à anéantir tous ceux qui se mettaient en travers de son chemin.

Issu du clan de Ghous,  Bédouin né de père inconnu dans la tribu des Kadhafa, Mouammar Kadhafi a régné en maître sur la Lybie pendant plus de quarante ans. En 1969, alors qu’il est encore très jeune, il renverse le pouvoir en place, arrive rapidement au plus haut niveau de l’état, et prend sa revanche sur une enfance qui l’a laissé amer et assoiffé de vengeance et de reconnaissance. Imposant ses idées au monde, reçu par les grands de ce monde, arrogant et fier, c’est aussi un homme qui n’hésite pas à financer et encourager les actes terroristes, prédateur sexuel sans limite ni morale, il emprisonne ou fait exécuter ses opposants, il a régné en dictateur sur son peuple qui en cette nuit de 2011 le traque sans relâche.

Difficile de se mettre dans la tête d’un tyran. Pourtant l’auteur y réussit à merveille. Rien n’est de trop, rien n’est dit qui n’aurait pas dû être. Aucun jugement, aucun à priori, juste les souvenirs qui s’égrènent, les pensées que l’on imagine rapidement être réellement celles du Raïs, tant elles paraissent crédibles, la peur, l’arrogance, la colère, le mépris, la haine parfois, pour ceux qu’il a conquis, pour ceux qui le servent, ceux qui lui sont fidèles, ceux qui le craignent, ceux qui le trahissent, cette fierté, cette supériorité, cette assurance d’avoir rempli sa mission, assuré son devoir de chef d’état, même lorsqu’il ordonnait les pires massacres. Et puis les souvenirs de son enfance, qui font parfois de lui un homme comme un autre, qui le rendent presque humain et non dictateur sanguinaire aux yeux du lecteur, proche d’un Dieu qui serait son guide, aimant son pays, fier d’avoir réussi l’unification de cette Lybie peuplée de tribus guerrières rivales.

Une fois de plus, Yasmina Khadra nous embarque dans ce court roman qui laisse un goût étrange, l’image d’un homme qu’il est impossible d’aimer, mais qui devient pourtant à travers ces lignes à nouveau presque humain.

💙💙💙

Catalogue éditeur : Julliard

« Longtemps j’ai cru incarner une nation et mettre les puissants de ce monde à genoux. J’étais la légende faite homme. Les idoles et les poètes me mangeaient dans la main. Aujourd’hui, je n’ai à léguer à mes héritiers que ce livre qui relate les dernières heures de ma fabuleuse existence.
Lequel, du visionnaire tyrannique ou du Bédouin indomptable, l’Histoire retiendra-t-elle ? Pour moi, la question ne se pose même pas puisque l’on n’est que ce que les autres voudraient que l’on soit. »
Avec cette plongée vertigineuse dans la tête d’un tyran sanguinaire et mégalomane, Yasmina Khadra dresse le portrait universel de tous les dictateurs déchus et dévoile les ressorts les plus secrets de la barbarie humaine.

Parution : 20 Août 2015 / Format : 130 x 205 mm / Nombre de pages : 216 / Prix : 18,00 € / ISBN : 2-260-02418-1

Les Sirènes noires. Jean-Marc Souvira

Dans le Paris de la prostitution, des sorciers et des rites Vaudou, une enquête sordide de tueur en série

DomiCLire_les_sirenes_noires_souvira.jpg

Alors que ses équipes perquisitionnent chez un meurtrier en série placé en garde à vue, Mistral est confronté à un meurtre insolite et mystérieux où les corps retrouvés s’avèrent difficilement identifiables. Une suite d’événements place ses équipes face aux filières africaines de prostitution.
De toutes jeunes africaines se retrouvent sous la contrainte sur les trottoirs de Paris, alors que toute leur famille a placé ses espoirs en elles. Officiellement, ces belles jeunes femmes partent travailler en France d’où elles pourront envoyer l’argent qui fera vivre ceux qui restent en Afrique. Avant de quitter leurs villages, de grandes cérémonies impressionnantes sont pratiquées. Le recours au sorcier, en apparence pour protéger les filles, mais surtout pour avoir la matière qui permettra de les menacer et les tenir sous emprise, les placent dans une prison mentale contraignante qui, en dehors de toute logique cartésienne, s’avère terriblement efficace pour éviter leur fuite. Ces croyances issues de coutumes que nous avons le plus souvent du mal à entendre et à comprendre, car elles sortent de notre cadre de référence, vont être partie prenante de l’enquête, et Mistral devra sortir de son propre cadre et de sa logique, pour comprendre et avancer.

Entremêlant avec adresse les recherches, les échecs et les avancées de ces trois enquêtes, nous suivons Mistral et ses équipes dans le quotidien des enquêteurs de la police judiciaire. L’intrigue se tient, les évènements s’enchaînent, le rythme est soutenu. On suit  Mistral dans son enquête, mais on est aussi avec lui dans sa voiture. D’ailleurs j’avais parfois l’impression d’entendre les mêmes airs qui lui en tournant les pages. On le suit jusque dans ses nuits blanches, quand une enquête non résolue le tient en éveil, attentif, inquiet. On le suit enfin jusqu’au 36, lieu mythique s’il en est, qui confère implicitement aux hommes qui l’occupent un sérieux et une rigueur qu’ils appliquent dans leur travail quel que soit le lieu où il se trouvent.

souvira
Jean-Marc Souvira à la Foire du livre de Brive © DCL DS2015

Jean-Marc Souvira connaît son métier et cela se sent avec bonheur  dans ses polars. Il a dirigé l’Office Central de la Traite des Êtres Humains, et le lecteur pressent bien ce fond de vérité qui émerge de l’intrigue, mais sans jamais empiéter ni gâcher le plaisir de la lecture. Les spécificités des différents services de police sont présentes et ajoutent à l’intrigue sans l’alourdir, le réalisme est servi par l’écriture et c’est un véritable plaisir de tourner ces pages. J’ai déjà hâte de lire le prochain, comme à chaque fois avec cet auteur !

Vous pouvez aussi faire un tour sur le blog Arthémiss et découvrir son avis sur ce roman.


Catalogue éditeur : Fleuve noir

souvirathilliez
Jean-Marc Souvira et Franck Thilliez à la Foire du Livre de Brive © DCL DS 2015

03 h 20 du matin, Ouest parisien. Le commissaire Mistral écoute un morceau de jazz, son humeur à l’unisson. Les lumières de la ville défilent à travers la vitre. Plongée en apnée dans son âme. Il ne le sait pas encore mais le compte à rebours a commencé.
Plein jour, sud-est du Nigeria. Les tambours résonnent. Margaret, 17 ans, corps de déesse et cœur sur le point d’imploser d’émotion, s’avance sous la tente. La cérémonie débute. Elle ne le sait pas encore mais son destin, et celui de sa famille, sont sur le point de basculer.
Retour à Paris. Un homme guette, attend, les sens en alerte dans l’obscurité. Il n’en peut plus. Il fredonne comme une litanie sans fin son morceau culte d’AC/DC. Il savoure par avance le moment ou il possédera sa proie.
Le tic-tac s’égrène. Le point d’impact de ces trajectoires humaines est imminent.

Parution : 12 Novembre 2015 / Nombre de pages : 448 p./ EAN : 9782265099302

à la rencontre de Danielle Thiéry

DANIELLEDERAPAGES

Retour sur une rencontre avec Danielle Thiéry autour de ses romans, en particulier Dérapages et de ses projets.
Danielle, comment imagines-tu les personnages de tes romans ? Est-ce que tu t’appuies sur des personnes que tu connais
 ?
Oui, j’imagine quasiment toujours un homme ou une femme derrière les personnages, quelqu’un qui existe ou qui a existé. J’ai besoin de visualiser la personne pour que le rôle soit incarné, y compris pour écrire un scénario, il m’est impossible de créer un personnage au doigt mouillé, j’ai besoin de remonter très loin en arrière et de travailler sur son histoire, sur sa légende, pour lui donner de l’épaisseur.  C’est particulièrement important pour l’écrit.  Et notamment pour les descriptions physiques. Dans un film on a l’image, on est obligé de faire avec ce qu’on nous montre, dans un livre on peut faire comme on veut. Pour autant, je me contente souvent d’une description laminaire pour que le lecteur imagine son propre personnage, je donne seulement quelques clefs pour le définir et le situer « un grand brun fatigué, la quarantaine » ça suffit, on a compris. Sauf, bien entendu, si le détail sert l’histoire.

Mais alors, certains grands flics se sont-ils reconnus par exemple ?
Non, pas vraiment, pourtant certains auraient dû, mais peut-être ne sont-ils pas lucides sur eux-mêmes ? Parfois d’autres croient reconnaitre un tel ou un tel, et pourtant ce n’est pas celui qui a inspiré le personnage. Il faut toujours laisser un écran de fumée, ne pas être trop réaliste pour que le lecteur ne soit ni coincé ni verrouillé. Il doit respirer, même si le chemin qu’on lui fait prendre est assez balisé. La première règle c’est de s’amuser quand on écrit des polars et d’emmener son lecteur là où l’on souhaite…

Quand tu écris, tu sais où tu vas, tu connais la fin ?
Oui, c’est indispensable. Le polar a des exigences de construction et il faut savoir où on va d’emblée faute de devoir tout refaire parfois en cours de route ! En revanche, il m’est impossible de commencer à écrire sans un déclic fort. Je peux avoir une idée par minute et mille sujets en tête, ce n’est pas suffisant car l’envie d’écrire naît toujours d’un déclic. Pour Dérapages par exemple, c’est un rêve qui m’a trotté dans la tête longtemps : moi dans une voiture, un bébé sur le siège arrière, arrive un incident, et quand je me retourne, plus de bébé. C’était fort et troublant. Ce rêve me dérange mais je ne me livre pas à une introspection à son sujet. Je me demande seulement où il peut me mener. Et je réfléchis, je mouline, les idées, les scènes. Une chose en amène une autre, ce n’est pas forcément à partir du rêve que je tire le fil, mais je le garde quelque part dans ma tête pour le jour où ! Je creuse des pistes, je me documente, je prends des notes. J’abandonne des pistes, en ouvre d’autres. Pour  Dérapages j’ai été amenée à m’intéresser au lait maternel, puis à une découverte des années 1950 en Russie… Et peu à peu la mayonnaise prend. Chaque ingrédient en soi n’est rien sans les autres. Le rêve va prendre place parmi eux. De même, le lait maternel,  le seul élément qu’on ne sait pas reproduire… On sait faire des yeux, de la peau, un cœur, même si ce n’est pas parfait, mais le lait maternel on ne sait pas faire. Ce sujet m’a passionnée et une intrigue a émergé autour. Mais ça ne suffisait pas, il fallait construire une histoire pour embarquer le lecteur, le bluffer. A partir d’un rêve… qui va être le fond, le terreau dans lequel je vais semer mes graines mais il faut que je trouve une harmonie, que ça prenne.
Donc je n’écris pas d’emblée, sauf quelques scènes, pages, chapitres, vers lesquels je retourne – ou pas – ensuite, comme la scène de départ de Dérapages , jetée sur le papier sous le coup du rêve mais qui, à l’issue va complétement changer.  Et au fur et à mesure que j’avance dans la construction mentale de l’histoire, les personnages, les situations évoluent. Je ne commence à écrire vraiment que lorsque je sais exactement l’histoire que je veux raconter. C’est encore plus vrai pour Dérapages où de nombreux points exigeaient de me documenter, de faire des recherches, puis de rendre ces éléments accessibles au lecteur. Alors bien sûr, les tatillons vont trouver que c’est une science de comptoir, mais c’est volontaire : je dois d’abord comprendre pour rendre mon sujet totalement abordable, ne pas être dans l’exigence scientifique mais bien m’adresser au lecteur qui ne veut pas connaitre l’exposé scientifique, il faut lui exposer le but recherché en utilisant des mots simples. Je me sers d’ailleurs souvent d’un de mes personnages comme vecteur : il ne comprend pas, il demande la vulgarisation du propos scientifique, et cela va servir au lecteur qui se moque un peu de l’expertise scientifique pour s’attacher à l’histoire.
Dans ce roman, une partie de l’histoire se passe à Lille, je suis allée voir les différents services. Je  connais aussi l’Eurostar pour avoir passé quelques années dans la police ferroviaire. J’ai également voulu positionner la commissaire Marion dans un service moins connu que le 36 quai des orfèvres. Même si le 36, évidemment, ça parle à tout le monde… On voit d’emblée la tour pointue, l’escalier, le bureau de Maigret et son fauteuil, on sait implicitement de quoi on parle, il y a eu tant de descriptions, de films… Mais peut-être un peu trop, justement. D’où l’idée de mettre l’accent sur un service spécialisé dans les affaires les plus dures car il est intéressant d’en parler pour le faire connaitre. Ce service (l’Office de répression des violences faites aux personnes)  travaille avec des psycho-criminologues, ce qui est une donnée nouvelle et intéressante car ces spécialistes aident à l’enquête, ils apportent une véritable expertise psy, notamment sur des affaires anciennes ou non élucidées. Ils établissent des profils d’auteurs de crimes, mais ce n’est pas un « profilage » de cinéma, ils essaient de trouver une ligne directrice, des éléments formels, de croiser des éléments, de retrouver des constantes dans certains dossiers, etc. Un esprit de flic enquêteur renâcle parfois à ce type de prestation, mais c’est intéressant – passionnant – de voir comment ils travaillent. Au moment de mes recherches, ils travaillaient sur l’affaire de Berck-plage – une fillette noyée dans la Manche par sa propre mère – et cela m’a donné l’envie d’y situer une partie de mon histoire.

La fin de « Dérapages » semble introduire une suite, est-ce possible ?
Non, il n’y en aura pas, a priori. A la fin de l’histoire, les lecteurs pensent ne pas avoir toutes les réponses et c’est logique puisque c’est voulu ! J’aime laisser planer quelques mystères et ne rien décider de définitif pour un personnage ou un autre. Une personne a disparu, personne ne sait ni ne saura, dans ce livre en tout cas, où et comment. Mais qui sait si, dans quelques années, je n’aurai pas envie de la faire revenir dans une histoire ? Alors oui, le lecteur veut une suite, mais pas moi !  Ce serait comme faire du réchauffé, non ?

Mais pourtant il y a eu Crimes de Seine et  Jour de gloire
En effet, la fin de Crimes de Seine est un cliff-hanger. On pense avoir résolu tout le problème et… on s’est trompé. Cette fin, arrivée tout spontanément en cours d’écriture, m’a poussée à écrire une suite. Mais ce n’est jamais obligatoire et je dirais même que c’est risqué.  Car d’une part, l’honnêteté oblige à le préciser au lecteur qui, du coup, se sent obligé de lire un livre qui ne l’attire pas  forcément ou en tout cas moins que l’autre et d’autre part, bien qu’il soit en demande sur le coup, le lecteur oublie vite ce qu’il a lu de l’histoire. Il ne retient généralement que ce qui concerne les personnages lorsqu’ils sont récurrents comme c’est le cas de Marion.
Moi, j’avoue, dans Dérapages, j’ai bien aimé le clin d’œil final ! Oui, bien sûr, mais c’est surtout une métaphore, un moyen de montrer que rien ne change, qu’il y aura toujours des manipulateurs, des gens qui veulent se servir du reste de l’humanité à leur propre bénéfice. La vie est un éternel recommencement, non ?

Danielle, avec Dérapages, tu signes ton onzième roman avec Edwige Marion. La question qui me taraude, c’est : as-tu parfois envie de la laisser tomber, et d’ailleurs, c’est ce que tu as fait avec Des clous dans le cœur …
Des clous dans le cœur était une expérience particulière. Pour concourir pour le Prix du quai des Orfèvres, il faut envoyer un manuscrit original et anonyme. Personne, dans le jury ne doit identifier  l’auteur sinon il est rejeté. Il me fallait donc mettre en scène des personnages sans Marion qui, elle, est assez connue maintenant. Des clous dans le cœur se passe à Versailles, j’avais passé trois mois avec la PJ de Versailles pour écrire l’histoire de ce service et l’idée d’écrire aussi un roman qui se passerait là-bas m’est venue naturellement au contact des enquêteurs et de leurs histoires. J’ai fait ce roman et me suis demandé ce que j’allais en faire. J’ai envoyé le manuscrit au 36 (qui assure le secrétariat  de l’opération) et j’ai reçu le prix !!  C’est un moment merveilleux, tout auteur qui concourt a toujours un espoir bien sûr mais celui-là je l’ai vécu comme un rêve. J’ai surtout aimé écrire ce livre et mes lecteurs ne m’ont pas tenu rigueur d’avoir mis en scène des personnages différents, cette fois. Pour être honnête, mes lecteurs habituels ne sont pas forcément les mêmes que les lecteurs du prix du quai des Orfèvres. Et, parfois, dans les salons, les uns comme les autres étaient surpris car ils n’avaient pas fait la relation !
Je pensais que pour ce prix il ne fallait pas être déjà connu ou que c’était un prix de premier roman…En plus, des livres primés certaines années ressemblent à des premiers romans, je trouve… d’où peut-être la confusion ! C’est ce que pensent beaucoup de lecteurs, en tout cas.
Eh bien non, pas du tout ! Tout le monde peut concourir pour ce prix, la preuve, même un auteur qui a de la « bouteille » et de nombreux livres à son actif… Il suffit d’envoyer un manuscrit ! Bien sûr, les critères d’attribution – hormis les exigences littéraires – reposent sur la connaissance de la procédure, des pratiques policières ou judiciaires mais c’est tout. Et quand on regarde bien, il n’y a pas tant de flics que cela qui l’ont eu.
Pour ce qui concerne Marion, oui, j’ai essayé de la faire disparaître ! Un personnage récurent est lourd à trainer et on a l’impression parfois de tourner en rond. Il faut la faire évoluer, il faut parler de son entourage, mettre en scène de nouvelles têtes pour éviter l’ennui. Et même si je la place dans une situation critique le lecteur n’a pas peur pour Marion car il sait qu’elle revient… Le premier titre où Marion apparaît (le Sang du bourreau, aux Éditions JC Lattès, en 1996)  était au départ un livre unitaire. Marion est une jeune commissaire, une femme dans un métier d’homme… Elle est sans famille, n’a ni mère ni père ni sœur ni frère, parce que je voulais mettre l’accent sur sa famille de substitution : ses flics. Puis l’éditeur a demandé un autre opus avec elle, et de fil en aiguille c’est devenu compliqué car on me demandait toujours quelle était son histoire. D’où le livre Origine inconnue qui est un éclairage sur l’histoire de mon personnage. Il va être réédité aux Éditions J’ai Lu, début novembre 2015.

C’est difficile pour un lecteur qui est attaché à son personnage, par exemple quand Elisabeth George, a fait disparaitre, non pas son flic fétiche, Linley, mais Helen, sa femme, j’ai arrêté de lire ses polars ! Par contre Henning Mankell avait eu la finesse de rendre son flic fétiche malade d’Alzheimer, il pouvait donc encore exister, sinon le lecteur est déçu en général, non ?
Quand Conan Doyle a décidé de tuer Sherlock Holmes, il y a eu des manifs sous ses fenêtres pour exiger son retour ! Pour l’auteur l’envie de se séparer de son héros survient forcément un jour ou l’autre. Edwige Marion a reçu une balle dans la tête dans Crimes de Seine mais j’ai eu des réactions de lecteurs qui voulaient « sauver Marion », ce n’était donc pas possible de l’éliminer. Mon éditeur allemand, et pas seulement lui, ne voulaient pas  que Marion disparaisse. Alors, je l’avoue, j’ai cédé, je l’ai juste mise un peu à l’écart dans les deux romans suivants. Et dans Dérapages, elle reprend du service. Elle n’est plus au placard, mais son aventure – une balle dans la tête ce n’est pas rien – en a fait un nouveau personnage. Elle a changé de personnalité, et comme elle a beaucoup de séquelles, elle est devenue une autre. Elle s’efface, progressivement, en se modifiant. Et, c’est vrai, Marion, j’en ai fait le tour ! La colocation, c’était bien un temps, mais il faut savoir en définir les limites !  (Tiens, c’est un peu comme si Danielle vivait avec Marion !) Car j’use parfois d’artifices pour la garder présente.

Imagines-tu que des personnages secondaires, comme Abadie ou Valentine prennent de l’importance ? Oui, mais non !! Marion sera encore présente dans mes livres mais elle va sans doute s’estomper ! Et ce ne sera pas forcément eux qui prendront le relais car ils sont, comme elle, un peu usés aussi !
Ce qui veut dire que le suivant est déjà commencé ? Oui bien sûr, la trame est prête, le texte, l’histoire.

Mais je croyais que tu faisais une pause, momentanément, dans le roman ?
Oui, je voulais souffler car Dérapages M’a donné du fil à retordre, nécessité des recherches à l’Institut Pasteur, à cause des aspects scientifiques, je me suis bien pris la tête comme on dit. Et puis, j’ai d’autres ouvrages en cours, un livre jeunesse (Panique au grand stade, aux éditions Syros, sortie en janvier 2016), un livre en collaboration avec un psy, Le souffleur, sortie en mars 2016 chez Mareuil Editions… Un projet d’autobiographie aussi, une reprise de la Petite fille de Marie Gare, en fait… qui évoquera mon expérience de femme-flic,  mais aussi quelques considérations sur le monde, sur la police, des anecdotes… Donc j’avais besoin d’une pause et  envie d’arrêter, très provisoirement, les romans. Et puis un matin, dans le métro, je suis tombée sur un fait divers. Et là, le déclic, une fois de plus… Une histoire de fou ! La vie d’un écrivain est ainsi faite que rien ne s’arrête jamais…

Daniellebis


Danielle Thiéry  a été une des premières femmes commissaires de police en 1976. Puis, la première à décrocher le grade de divisionnaire, en 1991.  Elle a écrit un livre inspiré de la vie de son arrière-grand-mère. La petite-fille de Marie-Gare relate l’histoire d’une enfant abandonnée dans une gare en 1873 et qui dut à un commissaire de police de s’appeler Marie, Joséphine, Gare… Le livre nous entraîne aussi sur le parcours de ces pionnières de la police française, dans son expérience du transport aérien et de la Police ferroviaire. Mais l’histoire s’arrête il y a 20 ans, au moment du détournement de l’airbus d’Air France à Alger, en 1994. Si l’on en croit l’auteur, la suite est en cours d’écriture et sera publiée en 2015 ou 2016.
Danielle écrit des romans, et également des documents tels que L’histoire de la BRI de Paris, la fameuse brigade antigangs, et Police Judiciaire, Cent ans avec la Crim de Versailles. Ce service, grande sœur de la Crim du 36,  fut la première brigade mobile – les fameuses Brigades du Tigre de Clémenceau – devenue à l’époque contemporaine la DRPJ de Versailles. Un véritable travail d’enquêtes, de recherches et de compilation d’évènements criminels où il faut certes raconter des histoires, mais surtout éclairer l’histoire criminelle par l’histoire tout court.

Un mot sur Irène, Anne Akrich

Dans ce premier roman, Anne Akrich plonge dans l’intimité du couple et tente de nous embarquer dans les arcances de la vie d’Irène, intellectuelle et féministe.

couverture

Irène Montès, intellectuelle spécialiste du sujet des femmes, vient d’être retrouvée morte à New York. Un enquête commence, et le lecteur se voit propulsé vers le passé, dans la relation complexe et ambiguë du couple qu’Irène forme avec Léon.
L’histoire se situe en même temps que les aventures rocambolesques d’un de nos célèbres hommes politiques français à New York, cela aurait pu interpeller la lectrice que je suis et me faire comprendre dès lors le ton du livre. Car d’aventures en divagations, en particulier sur le sexe, tout le roman tourne autour de la relation malsaine de ce couple. Léon Gary, un éminent professeur à la Sorbonne, en passe d’en devenir le président (tiens, lui aussi devrait devenir président ?) écrit un livre sur la personnalité ambiguë d’Althusser qui assassina sa femme, et en parallèle il essaye désespérément d’écrire Le livre qui sera l’œuvre de sa vie. Il est marié depuis plus de vingt ans à Irène, cette intellectuelle flamboyante à la réussite incontestable, davantage attirée par les femmes que par les hommes, et qui toute sa vie aura rendu son mari jaloux de ses relations amoureuses, de ses trahisons, pour ses étudiantes, ces femmes jeunes et belles qui deviendront ses maitresses ou ses conquêtes d’un soir.

Relation intellectuelle à la Beauvoir /Sartre ? mais en bien plus sordide, car ici rien n’est simple, Léon est jaloux, Léon est perdu, Léon cherche à écrire le roman qui sera l’œuvre de sa vie, et Léon sombre dans la folie. Nous essayons de suivre tout au long de ces deux cent pages ses divagations schizophréniques , mais j’avoue que malgré une écriture travaillée t réaliste, qui nous emmène au bord de la folie, j’ai eu beaucoup de mal à accrocher.

💙💙💙


Catalogue éditeur : Julliard

Un parfum de scandale sexuel flotte dans le milieu universitaire depuis la mort, à New York, d’Irène Montès, une intellectuelle de renom. Alors qu’elle devait donner une importante conférence sur les gender studies, son cadavre a été retrouvé nu dans une chambre d’hôtel, au côté d’une poupée gonflable. Mais qui était-elle vraiment ?
À travers les yeux de son mari, Léon Garry, professeur à la Sorbonne, la flamboyante personnalité d’Irène nous est peu à peu dévoilée, tout comme la relation trouble qui unissait les deux époux. Jadis mentor d’Irène, Léon était devenu son pantin, dans un théâtre de la cruauté qui le condamnait au rôle de voyeur. Jusqu’où peut dériver un homme dont les fantasmes inassouvis brouillent la perception du réel et de l’imaginaire ?
Porté par une écriture et un érotisme vibrants, ce récit crépusculaire fouille les arcanes du couple dans ses replis les plus intimes.

Date de parution : 20/08/2015 / Nombre de pages : 216 / Format : 1 x 205 mm / EAN : 9782260029021

Le cœur du Pélican. Cécile Coulon

Le cœur du pélican, c’est celui d’Anthime, celui qui court et fuit ses peurs et ses espoirs déçus pour se retrouver, ou se perdre.

 « Le cœur du Pélican », c’est l’histoire d’Anthime, un jeune garçon qui vient d’aménager avec ses parents dans une nouvelle ville. Lors d’un piquenique bien peu fraternel, par peur de paraitre pleutre ou faible, il va courir de toutes ses forces et se découvrir des appétences et un talent insoupçonné pour la course.  Brice, ancien coach un peu alcolo sur le retour, décide de le prendre en main et de l’emmener à la victoire. Admiré au lycée comme sur la piste, Anthime se laisse griser par le succès, les garçons le respectent, les filles l’adulent, en particulier sa voisine Johanna. Il partage un amour ambigu et fraternel avec Helena, sa sœur, sa moitié, celle qu’il admire et qui le comprend sans qu’il ait besoin de parler. Mais Anthime est jeune, son entraineur le pousse au-delà de ses capacités d’adolescent, trahit pas ses tendons, il s’écroule lors d’une course primordiale pour le reste de sa jeune carrière. Ses rêves et son aura s’effondrent aussi vite qu’ils s’étaient formés. Ses espoirs de victoire anéantis à jamais, il se terre, et finalement épouse Johanna, sa voisine amoureuse, envahissante et fade, il est l’homme de sa vie, mais elle n’est pas la femme de la sienne. Vingt ans plus tard, Anthime, père de famille, époux blasé et amer, a pris du gras et du ventre. Des réflexions désobligeantes déclenchent un sursaut dans son quotidien triste et résigné. Le voilà qui s’entraine, puis qui part dans une course éperdue à travers le pays, à la façon d’un  Forest Gump, ou d’un Harold Fry (La lettre qui allait changer le destin d’Harold Fry). Il court ! Il court vers sa vie, son passé, ses échecs, ses espoirs et ses questionnement, vers tout ce qu’il n’a jamais su accomplir, vers ce qu’il aurait dû être, il court pour se retrouver. A la façon de ces marcheurs qui sur le chemin de saint Jacques cherchent non pas la foi, mais bien leur propre être intérieur, qui cherchent à se comprendre et à mieux se connaitre. Il y a une extraordinaire dose de désespoir dans sa course. Il court longtemps, il court loin, sans espoir de retour, il fuit sa femme, ses enfants, sa sœur, son passé.

J’avais entendu et lu beaucoup de bien de ce roman d’une auteure particulièrement jeune, mais je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. Le texte est particulièrement bien écrit, et j’ai particulièrement apprécié la première partie, pourtant certaines incohérences ne m’ont pas permis d’y adhérer entièrement. Car comment imaginer des parents incapables de suivre l’entrainement de leur gamin et de le protéger, laissant faire l’impossible qui le mène à l’échec d’une vie ? Comment imaginer cet homme médiocre à la colère rentrée pendant vingt ans, assis à faire du gras sur sa terrasse, vivant à côté de sa femme et de ses enfants, sans arriver à dépasser l’échec de son adolescence ? Comment imaginer un homme de 40 ans aussi plein de rage rentrée, soudain capable de se relever seulement pour faire autant de mal à tous ceux qui l’entourent, avec autant de colère et de violence. Malgré tout l’écriture est belle et maitrisée, gravée au scalpel sur les muscles et les douleurs retrouvées d’Anthime, on devine ses peurs et ses tourments, sa fuite et ses espoirs, on y ressent cette fatalité qui le frappe,  inéluctable, même si on n’y adhère pas toujours.

💙💙💙💙

Catalogue éditeur : Viviane Hamy

Porté par une extrême émotion, Le Cœur du Pélican nous parle de la gloire et de sa fragilité, du sport et de sa souffrance. Il raconte le courage et la destinée à la fois banale et extraordinaire d’un homme qui réussit, connaît le succès, tombe et se relève. Cécile Coulon parvient formidablement à incarner ses personnages aux prises avec leurs désirs et aveuglés par les non-dits.

Parution : 15/01/2015 / ISBN : 9782878586015 / Pages : 240 p.