Lire le château, c’est pénétrer dans un univers obsessionnel et surnaturel
« Notre bibliothèque est notre bien le plus important »
« Et le libraire, un homme passionné, et certainement passionnant si je prenais le temps de parler un peu avec lui, a toujours les livres que ma sœur désire ardemment lire ».
« Une maison qui contient beaucoup de livres est une maison ouverte au monde, est une maison qui laisse entrer le monde »
Octave et Véra sont les occupants de « Notre château ». Leur père a hérité de cette vaste demeure dans laquelle il n’avait pas le droit d’y habiter. Octave et Véra y habitent depuis vingt-ans, depuis la mort des parents dans un terrible accident de voiture. Là, sans jamais sortir, ils passent leur journées à lire, ont un relation frère-sœur plutôt singulière, et personne, jamais personne ne vient sonner à leur porte.
Il y a du délire dans ces lignes, mais un doux délire, de ceux que l’on a lorsque l’on laisse vagabonder nos pensées, et qu’elles nous entraînent au loin, dans les souvenirs, dans la folie de nos rêves d’enfant. Il y a de l’obsession, celle de savoir ce qu’il a bien pu se passer pour que Véra, qui ne prend jamais le bus, soit ce jeudi 31 mars dans le bus 39. Et en même temps, ce livre m’a fait instantanément penser au film « les autres » avec Nicole Kidman, par son côté irréel et mystérieux. Impression fortement appuyée par les photos insérées en fin du roman, et dans lesquelles on projette les personnages.
Quel livre étrange. Au premier abord, je n’ai pas du tout accroché, exaspérée par les multiples répétitions. Puis j’ai décidé d’abandonner mes repères, ma logique et je suis rentrée peu à peu dans l’apparente folie douce d’Octave, le narrateur, dans sa relation avec sa sœur Véra, et surtout, surtout, avec les livres dans leur belle, très belle maison, dans leur château. Car bien évidement, c’est un rêve ce roman, puisque dans « Notre château » la vie tourne autour des livres. Et un lecteur compulsif s’y retrouve forcément un peu, dans ces fauteuils moelleux à souhait pour y passer des heures à lire, dans ces bibliothèques, avec ce libraire qui possède toujours les livres que l’on souhaite ardemment lire.
Comme j’ai lu « Notre château » dans le cadre des 68 premiers romans, je me suis refusée à lire la quatrième de couverture avant de l’avoir fini, pour avoir une surprise complète. Il est également dans la sélection du prix orange du livre, sinon je n’aurai pas tenté l’aventure. Et cela aurait été dommage, même si je pense qu’il peut surprendre et ne pas séduire tous ses lecteurs.
Catalogue éditeur : le Tripode
Un frère et une sœur vivent reclus depuis des années dans leur maison familiale, qu’ils ont baptisée « Notre château ». Seule la visite hebdomadaire du frère à la librairie du centre-ville fait exception à leur isolement volontaire. Et c’est au cours de l’une ces sorties rituelles qu’il aperçoit un jour, stupéfait, sa sœur dans un bus de la ligne 39. C’est inexplicable, il ne peut se l’expliquer. Le cocon protecteur dans lequel ils se sont enfermés depuis vingt ans commence à se fissurer.
On pourrait penser aux films Les Autres de Alejandro Amenábar, Shining de Kubrick, ou à La Maison des feuilles de Danielewski. En reprenant à son compte l’héritage de la littérature gothique et l’épure de certains auteurs du nouveau roman, Emmanuel Régniez réussit un roman ciselé et singulier, qui comblera les amateurs d’étrange.

Je soigne ma mélancolie en me racontant des histoires qui pourraient me faire peur.
Emmanuel Régniez
128 pages / 9782370550781 / Prix : 15,00 € / Parution : 21 janvier 2016