New York esquisses nocturnes. Molly Prentiss. #MRL16

De Buenos Aire à New York, le destin et la rencontre d’une peintre et d’un critique d’art dans le foisonnement artistique des années 80.

DomiCLire_newyork_esquisses_nocturnes.jpegMolly Prentiss nous entraine sur les traces de Raul Engales. Arrivé d’Argentine, fuyant le pays et surtout la répression qui fait des ravages, dans l’opposition en particulier, il a abandonné sa sœur pour aller vivre ses rêves d’artiste à New York. Raul est un artiste peintre qui cherche la reconnaissance de son art et rêve d’une première exposition qui le fera connaître au monde de l’art New Yorkais.
Nous rencontrons ensuite James, un homme étonnant et décalé qui toute sa vie a ressenti les personnes et les choses par des couleurs, des odeurs, des lumières, une musique, car il est atteint de Synesthésie. Il trouve finalement une issue à sa maladie en devenant critique d’art. Car lui seul sait décrire autrement ce que les autres ressentent mais en savent pas exprimer. Il fait et défait tout ce qui compte ou espère compter dans le milieu artistique new-yorkais.

Winona George, une galeriste célèbre, décide de lancer Raul lors d’une grande exposition dans sa galerie. Pour créer le buzz, elle vend une première toile qui sera achetée par James. Tout semble aller pour le mieux, l’avenir est souriant pour chacun d’eux. Mais deux évènements dramatiques vont les frapper tour à tour. Peu à peu, un lien d’abord invisible et ténu va se tisser entre les deux hommes.

En effet, James reconnait en la blonde et naïve Lucie, la compagne de Raul, le sujet de sa toile et s’en rapproche.  Mais rapidement l’amour naissant et obsessionnel pour le sujet de sa toile se transforme lorsque James comprend que ce coup de foudre est en fait celui qu’il a pour les couleurs, les lumières, les fulgurances de cet artiste dont il ne sait rien. Lucie, tombée amoureux de Raul, cet homme si différent capable de créer, peindre, avec acharnement et obsession, des couleurs et des lumières qui la transporte. Lucie va être la charnière, celle qui éloigne et celle qui rapproche, celle qu’on aime et qu’on abandonne, rejetée et incomprise, aimante et blessée.

Les personnages féminins ont bien peu de chance dans l’univers de Molly Prentiss, comme c’est également le cas pour Marge, la femme de James. Élément solide du foyer, c’est elle qui fait vivre son couple et qui sera à ses côtés quand James va partir dans des délires pour tenter de retrouver sa créativité.

Malgré tout, tant Raul que James sont deux personnages intéressants par leur singularité et leur créativité débordante. Mais j’aurais aimé les trouver dans la  description d’un environnement plus vivant, plus représentatif de ce foisonnement artistique du NY des années 80. Je me suis sentie un peu frustrée, les quelques mentions à Jean-Michel…Basquiat, ou Keith Haring, m’ont intriguée et j’aurais bien aimé qu’ils ne fassent pas que traverser l’intrigue ! Même si je dois reconnaitre que les descriptions de ce foisonnement artistique, totalement marginal, la vie des squats, la misère, la faim et la drogue parfois, souvent, et de la créativité et de la nuit, sont bien exprimés et participent de l’envie de lire ce roman jusqu’au bout.

#MRL16


Catalogue éditeur : Calmann-Lévy

Au début des années 80, le downtown de New York est le centre de l’univers, un terrain de jeu revêche, encore hermétique à la menace de l’embourgeoisement. Artistes et écrivains s’y mêlent dans des squats  insalubres où leurs rêves de reconnaissance prennent des formes multiples. Parmi eux, Raul Engales, un peintre argentin en exil, fuyant son passé et la « guerre sale » qui a enflammé son pays. S’affamant pour payer son matériel, il peint le jour d’immenses toiles mettant en scène les spectres qu’il croise la nuit. Un soir, il attire l’attention de James Bennett, critique d’art en vogue du New York Times, proche de Basquiat, Warhol et Keith Haring. Tandis que l’ascension fulgurante de l’un entraîne l’autre sous les projecteurs, une double tragédie les frappe. Dans ce chaos, Lucy, l’amante enjouée de Raul, échappée d’une obscure banlieue de l’Idaho, tente de les extraire de leur détresse. Entre peintre, critique et muse se dessine alors un triptyque
amoureux étourdissant.

Avec une écriture inventive d’une grande force poétique, Molly Prentiss explore la nécessité de beauté, de partage, de création et d’amour dans un paysage urbain et mouvant.

Prix TTC : 21.50 € / EAN : 9782702159569 / Format : 135 x 215 mm / 416 pages / Parution : 17 août 2016

Tabous. Danielle Thiéry

Le Tabou absolu, celui qui touche aux enfants, est l’objet du dernier roman de Danielle Thiéry, comme pour nous rappeler que cette violence n’est pas une utopie, mais qu’elle est là, tout près, à notre porte…

domiclire_tabous_danielle_thieryPour ceux qui la suivent comme moi depuis quelques années, Danielle Thiéry nous entraine en général dans les pas d’Edwige Marion, sa flic fétiche. Mais Marion a été gravement blessée dans une de ses précédentes aventures, pour ceux qui s’en souviennent, elle a quand même pris une balle dans la tête ! Aussi dans ce nouvel opus, la brillante et emblématique commissaire commence-t-elle doucement à s’effacer au profit d’autres personnages jusque-là secondaires, et qui prennent ici toute leur envergure, en particulier la capitaine Valentine Cara, ses compétences et son mauvais caractère ; ou cette petite nouvelle, la psycho-criminologue Alix de Clavery.

Dans la région de Bordeaux (région chère à l’auteur) une mère, Celia Meddi, et son bébé, Roxane, viennent de disparaitre de la maternité de l’hôpital d’Arcachon. Le père du bébé, fils d’un riche homme d’affaires iranien, est introuvable, sa vie et ses agissements intriguent les enquêteurs. La famille de Celia s’inquiète, la PJ de Bordeaux appelle rapidement en renfort l’OCRVP, cette brigade compétente dans la résolution des affaires portant sur les violences faites aux personnes, aux enfants et aux femmes en particulier.
Dans la forêt landaise, un marginal, Truc, s’enfuit de l’hôpital sur un scooter volé, et percute une vieille femme… pas d’autres issue que d’aller se réfugier chez cette dernière, habitant un petit village tranquille et paisible.
Je ne vous en dis pas plus, ce serait trop en dévoiler… Mais voilà un pitch à faire saliver tous les amateurs de polar, et ils auront raison ! Deux affaires menées en parallèle, des destins à comprendre, des intrigues à démêler, la vie des policiers et enquêteurs en somme ! Jusqu’à un certain paroxysme, car en cette semaine de Noël, la tempête sévit dans les Landes, et quand elle déclenche les réactions en chaine, elle impose son rythme aux humains.

Danielle Thiéry, forte de son expérience et de sa plume vive à la gouaille alerte et réaliste, nous régale et nous emporte dans une intrigue à tiroir. Là où le vrai est souvent insoutenable, où les tabous seront levés avec difficulté, car ceux qui enquêtent devront se mettre à la place des coupables, et parce que visualiser l’indicible est parfois bien difficile.

Il y a comme toujours une trame intelligente qui fait appel à des évènements ou des faits de sociétés très actuels, violence faites aux enfants, difficulté d’assumer sa sexualité, poids des traditions et de l’obéissance familiale, par exemple. Mais il y a également cette équipe de flics qui parle comme on l’imagine, à la fois avec le langage policé qu’il se doivent d’avoir lorsqu’ils mènent une enquête et rencontrent les suspects, la hiérarchie ou la Presse, et celui plus familier que l’on peut tous avoir dans le feu de l’action. Il y a enfin une connaissance fine du métier qui n’est cependant jamais envahissante au point de perdre le lecteur, et de cela on peut remercier l’auteur qui pense à tous ses lecteurs amateurs de polars et non spécialistes des arcanes de notre police.

La structure en chapitres courts, le rythme soutenu, donnent envie de finir ce livre à peine les premières pages ouvertes, et nous tient en haleine tout au long de cette semaine pendant laquelle se déroule l’action. Enfin, si la vie de Valentine Cara n’est pas tout à fait une énigme pour les habitués des polars de Danielle Thiéry, et si malgré tout celui-ci, comme tous les autres romans de l’auteur (ou presque) se lit indépendamment des autres, nous découvrons Alix de Clavery pour laquelle un certain mystère semble planer… Alors, sera-t-elle le sujet d’un nouvel opus ?

Note : OCRVP est L’office central pour la répression des violences aux personnes. information à consulter sur le site du ministère de l’Intérieur.

Retrouvez mon avis sur Dérapages.


Catalogue éditeur : Flammarion / Ombres Noires

À quelques jours de Noël, Celia Laporte et son bébé de quatre mois disparaissent brutalement d’une maternité. Le père de l’enfant, issu d’une puissante famille iranienne, est introuvable. L’affaire est complexe. La PJ de Bordeaux décide d’appeler en renfort l’OCRVP de Paris. Edwige Marion, la directrice du service, se rend immédiatement sur place avec son équipe et la jeune psycho-criminologue Alix de Clavery. C’est l’occasion pour la nouvelle recrue, spécialiste des crimes sur enfants, de s’imposer face aux a priori, et de faire ses preuves sur le terrain.

Alors que l’enquête des forces de police se heurte à la puissance des tabous, Alix va découvrir une vérité plus terrifiante encore.

ISBN : 978-2-08-137713-4 / Éditeur Ombres Noires / Date de publication 21/09/2016 / Nombre de pages : 352 / Dimensions : 21 x 14 x 3 cm

Lithium. Aurélien Gougaud

Lithium, le premier roman d’Aurélien Gougaud, nous entraine pendant une semaine à la suite de ses deux personnages désenchantés dans un univers typiquement parisien.

Domi_C_Lire_Lithium.jpgIl y a Il, il y a Elle, il y a Paris, la ville. Deux trajectoires, deux jeunes gens de cette génération Y née avec les smartphones et les réseaux sociaux, légèrement décalés, blasés, par la vie qui ne leur promet pas grand-chose d’excitant et ni de vraiment nouveau…

Il se lève tous les matins pour regagner les tours de la Défense où il exerce un emploi qui n’a vraiment rien de glorieux, partage son appartement avec Édouard, son colocataire, sa vie parfois avec Sofia, la petite amie qu’il n’aime pas mais dont l’existence le rassure et lui permet de ne pas se sentir totalement seul.
Elle se lève chaque jour à l’heure où les autres rentrent de boite de nuit, pour se rendre à la radio, ce lieu quasi mythique dont elle a rêvé plus jeune, mais où elle traine un ennui mortel à préparer les répliques d’un animateur radio star de l’audiovisuel, pédant, désobligeant, incompétent. Désenchantement, désillusion, contact froid avec le monde égocentré et souvent faux du travail et des relations entre collègues.
Leurs seuls échappatoires, chacun de son côté, l’alcool, les soirées avec les potes, les joints qu’on fume et qu’on se passe, les filles qu’on note ou qu’on critique, les mecs qu’on juge ou qu’on jette. Chronique parfois grinçante d’une jeunesse en mal de repères qui s’oublie dans l’alcool et la drogue pour arrêter de penser à tous ses rêves de réussite et de bonheur. Rêves qui semblent le plus souvent inatteignables et totalement utopiques. Jeunesse qui parle, rencontre, écoute, au travers de son smartphone et des réseaux sociaux, là où chacun s’expose, se découvre, se cherche et se retrouve.

La structure du roman, une semaine égrenée jour par jour, deux personnages, deux points de vue, pour une rencontre, est intéressante. Même si à certains moments ce côté blasé et désespéré est un peu déprimant, il est sans doute également le reflet d’une société qui n’a pas grand espoir à donner à sa jeunesse. Premier roman attachant d’un jeune auteur qui semble raccord avec ses personnages tant il nous fait vivre dans leurs têtes et leurs sentiments.

Quelques extraits :

  • La sortie du bureau de la Défense ressemble à un exode urbain. Chacun se hâte porté par l’espoir illusoire d’éviter une foule inévitable.
  • Il n’y a pas de meilleur confident que la parfait inconnu, celui qui s’en fout, sans attentes ni jugement.
  • « Bon courage » car il est invité à la pendaison de crémaillère d’un couple d’amis fraichement propriétaire d’une maison en banlieue. Or, pour un vrai Parisien, tout trajet impliquant un changement de département s’apparente forcément à une expédition. La banlieue ce n’est pas Paris. Si ce n’est pas Paris, c’est la province. La province, c’est loin. Raisonnement implacable.

 #RL2016


Catalogue éditeur : Albin Michel

Elle, vingt-trois ans, enfant de la consommation et des réseaux sociaux, noie ses craintes dans l’alcool, le sexe et la fête, sans se préoccuper du lendemain, un principe de vie. Il vient de terminer ses études et travaille sans passion dans une société où l’argent est roi. Pour eux, ni passé ni avenir. Perdus et désenchantés, deux jeunes d’aujourd’hui qui cherchent à se réinventer.

Dans un texte crépusculaire, Aurélien Gougaud entremêle leurs voix, leurs errances, leur soif de vivre, touchant au plus près la vérité d’une génération en quête de repères. Un premier roman d’une surprenante maturité, qui révèle le talent d’un jeune auteur de vingt-cinq ans.

Édition brochée 16.00 € / 17 Août 2016 / 140mm x 205mm/ 192 pages /EAN13 : 9782226329752

Désorientale. Négar Djavadi

Que dire, et surtout qu’écrire, quand on aime un roman qui a déjà été brillamment chroniqué  par d’autres ? Ce qui est certain, c’est que Négar Djavadi est une des belles plumes de cette rentrée littéraire, et Désorientale, son premier roman, une pépite à découvrir sans faute.

Wet Eye Glasses

Dans Désorientale, le très beau  roman de Négar Djavadi, il y a la vie, celle qui passe et celle qu’on donne, il y a des femmes et des hommes, des convictions, politiques ou religieuses, il y a deux pays et parfois une seule Histoire, il y a une quête d’identité, qu’elle soit personnelle ou à travers l’histoire de son pays, celui qu’on aime et qu’on quitte, celui qu’on découvre et qu’on adopte.

Dès les premiers chapitres, le lecteur part à la rencontre de Kimiâ, dans une salle d’attente à l’hôpital, où elle patiente pour une des dernières étapes d’une PMA, insémination artificielle qui est l’aboutissement d’un long parcours à la fois administratif et personnel. Enfanter semble être le passage obligé pour évoluer et aboutir, mais à quoi et pourquoi ? Nous allons la suivre dans ses pensées, ses flashback, ses interrogations, prétextes à évoquer les aventures et la vie d’une famille Iranienne, les Sadr, sur plusieurs générations, de la naissance de l’arrière-grand-mère dans un harem d’un autre temps, aux révoltes des parents de Kimiâ dans les années 70, d’hier à aujourd’hui, de l’Iran à la France.

A l’instar de son auteur, Kimiâ, l’héroïne de Désorientale, est née de parents progressistes et donc hors normes. Lui, Darius, est journaliste, elle, Sara, est professeur d’histoire, tous deux sont des intellectuels et des sympathisants communistes dans un Iran où le Shah et sa police contrôlent ce pays qui se modernise à un rythme effréné, parfois au détriment de l’humain, puis où dès 1979, la révolution islamique, d’abord acceptée comme salutaire (et c’est bien souvent le cas, on se souviendra de l’accueil fait par Cuba à Castro …) se trouve au final être pire qu’avant, car il s’avère que la police des ayatollahs n’a rien à envier à celle du Shah. Fuyant les milices politiques, l’enfermement et la répression, autant que la contrainte religieuse, la famille de Kimiâ (comme celle de l’auteur) va fuir le pays. Passage obligé d’abord par le Kurdistan, puis par la Turquie, où quelques scènes du roman sont particulièrement significatives, en particulier sur l’amour idéalisé qui est porté par les intellectuels iraniens à la France, pays des lumières, de Rousseau et des droits de l’Homme, puis arrivée à Paris, pays de l’exil. Viendront ensuite les années d’adolescence de Kimiâ, difficiles, compliquées et contestataires, alcool, drogue, fuite, recherche identitaire pour une jeune femme issue d’un pays où la détermination du genre est une obligation et l’homosexualité un délit passible de la peine de mort, puis un retour plus apaisé vers la famille, au moment où se pose la question de devenir mère.

La parentèle de Kimiâ est multiple, les oncles aussi d’ailleurs, de oncle 1 à oncle 6 ; si si ! Les récits seront à son image, enjoués et amusés, graves et tristes, intimistes et historiques, décrivant la vie de cette famille sur quasiment un siècle ; prétexte à décrire avant tout des conditions de vie, une politique, une culture, et l’évolution de l’Iran ; rappels parfois utiles (et que l’on appréciera, en notes de bas de page évitant la recherche Wikipédia, souvent piqués d’une pointe d’humour parfois grinçant) du rôle des pays tel que la France et l’aide apportée à Khomeiny, ou celui plus complexe des États Unis, à l’origine entre autre de la montée au pouvoir de la lignée des Pahlavi dans les années cinquante . Tout en nous amenant à réfléchir sur la vie et sur l’exil vers ces pays où doivent vivre ceux qui ont tout quitté, un pays, une culture, pour adopter la culture, les us et les coutumes d’un pays qui, lui par contre, ne les a pas forcément adoptés.

C’est un roman vivant, gai, un véritable hymne à la vie et à l’amour, qui dégage une liberté, une force, une vivacité et un optimisme qui font tourner les pages avec avidité et gourmandise. Premier roman qui foisonne, dérange, rassure, interpelle, et ne laisse jamais indifférent. Et ce qui est sûr, dont on ressort un peu moins ignorant, un peu moins bête, un peu plus humain une fois qu’on l’a refermé.

#rl2016 Rencontre Négar Djavadi Gaël Faye, les Correspondances de Manosque 2016


Catalogue éditeur : Liana Levi

Si nous étions en Iran, cette salle d’attente d’hôpital ressemblerait à un caravansérail, songe Kimiâ. Un joyeux foutoir où s’enchaîneraient bavardages, confidences et anecdotes en cascade. Née à Téhéran, exilée à Paris depuis ses dix ans, Kimiâ a toujours essayé de tenir à distance son pays, sa culture, sa famille. Mais les djinns échappés du passé la rattrapent pour faire défiler l’étourdissant diaporama de l’histoire des Sadr sur trois générations: les tribulations des ancêtres, une décennie de révolution politique, les chemins de traverse de l’adolescence, l’ivresse du rock, le sourire voyou d’une bassiste blonde…
Une fresque flamboyante sur la mémoire et l’identité; un grand roman sur l’Iran d’hier et la France d’aujourd’hui.

Négar Djavadi naît en Iran en 1969 dans une famille d’intellectuels opposants au Shah puis à Khomeiny. Elle a onze ans lorsqu’elle arrive clandestinement en France. Diplômée de l’INSAS, une école de cinéma bruxelloise, elle travaille plusieurs années derrière la caméra avant de se consacrer à l’écriture de scénarios. Elle vit à Paris. Désorientale est son premier roman.

Littérature française / Date de parution : 25-08-2016 / 14 x 21 cm – 352 pages / 22 € / ISBN : 9782867468346

Passages, les Pyrénées du nord au sud et réciproquement. Marie Bruneau, Bertrand Genier

Parce que ce sont ceux des Pyrénées, ces montagnes que je connais depuis toujours, j’ai eu envie de mieux connaitre ces « Passages » dont nous parlent Marie Bruneau et Bertrand Genier.

Domi_C_Lire_passages.jpegDans leur ouvrage, Marie Bruneau et Bertrand Genier ont décidé de nous raconter au fil de leurs randonnées d’Hendaye à Port-Bou les histoires pittoresques des « Passages » ces chemins qui mènent aux cols ou ports reliant les versants Nord et Sud de la cordillère Pyrénéennes.

Les auteurs ont complété leurs notes de randonnées par des recherches bibliographiques et historiographiques sérieuses. Les propos sont illustrés de photos récentes et de documents d’époque.

Chaque étape est différente, le regard y est parfois éthologique, quelques fois géographique ou économique, souvent historique ; les sujets abordés collent aux lieux et se renouvellent au fils des pages et des itinéraires. Le lecteur, jamais lassé, aborde chaque nouvelle étape avec envie comme le randonneur qui se presse vers le sommet pour découvrir un panorama nouveau.

Si nous ne sommes que rarement portés par une émotion poétique de la montagne mais plus sur un regard analytique, le propos est cependant toujours illustré de citations qui rendent l’ouvrage certes un peu savant mais néanmoins jamais lassant.

Seul petit bémol, la qualité médiocre des photos et leur impression low cost desservent un peu l’ouvrage.

Au final, même si le style semble de prime abord très universitaire, ce livre destiné à tous les publics ravira les passionnés des Pyrénées qui ont toujours quelque chose à apprendre. Un livre à poser, à reprendre, à partager, à consulter avant ou après quelques balades ou randonnées dans ces Pyrénées toujours aussi magiques quel que soit le passage que l’on prend pour les traverser !


Catalogue éditeur : éditions Cairn

Nous aimons les Pyrénées pour leurs paysages,
l’air de liberté qu’on y respire et leur beauté sauvage.
Pour autant, ces montagnes ne sont pas en dehors du monde,
elles sont parcourues, habitées, aménagées, et l’humain occupe une place importante dans cet écosystème complexe.
Il est question ici de quelques-uns des passages qui relient entre eux le nord et le sud, en quelques points particuliers de la chaîne pyrénéenne.
Histoires de traités et de frontière, de tourisme et de panoramas, de brèches et de refuges, de pèlerins, de troupeaux, d’espadrilles, d’hirondelles… et d’éléphants.
Histoires d’exils, aussi, d’hospices, de sources et d’enclave, de passage à niveau, de géologie et de chemins.
Récits d’espaces ou chroniques géographiques, chacun de ces textes prend à partie une situation précise, de notre double point de vue de marcheurs et de designers, intéressés par la manière dont une société produit et s’inscrit (dans) les espaces qu’elle habite.
Les Pyrénées sont nos montagnes.
Définitivement.
Nous n’en aurons sans doute jamais fini avec elles.

Ouvrage des Éditions CAIRN / Marie Bruneau et Bertrand Genier / Nombre de pages : 288 / Code ISBN/EAN : 9782350683614 / Date de parution : novembre 2014

Treize. Aurore Bègue

Treize, c’est une chronique réaliste et acerbe sur les premiers émois de l’adolescence, sur les exigences et les affres de cette période difficile mais indispensable pour grandir.

domi_c_lire_treizeAlice à treize ans. Treize ans, c’est l’âge de l’adolescence dans tout ce qu’elle a de plus énigmatique, émotion, attirance, premiers émois, premières amours ; de plus interpellant, naissance à l’état de femme, bouleversement des corps ; de plus individualiste, jalousie envers l’ainée, celle qui sait, qui a déjà « un peu » vécu, qui a l’expérience et qui plait aux garçons ; de plus intransigeant envers les parents dont on exige l’amour, total, absolu.
Alice à un père qui ne sait pas quoi faire pour plaire à ses filles, une mère bipolaire, malade et fragile, et Marie, sa grande sœur de 16 ans, si jolie, si sure d’elle. Comme tous les ans pour les vacances d’été, Alice part au bord de la mer dans la maison familiale avec ses parents et sa sœur. Cette année, Paul, le collègue de son père, sera là aussi, et comme souvent, malgré la différence d’âge, c’est de lui qu’Alice va tomber amoureuse pour la première fois.
Mais les enfants de cet âge sont exclusifs, exigeants, sans pitié pour ceux qui se mettent en travers de leur route. Forte de ses convictions d’enfants, Alice va provoquer un drame dont elle ne se remettra sans doute jamais.

Construit en flashback entre cet été là et Alice aujourd’hui, à la fois étrange et étouffant de culpabilité, Treize est un roman sur la fin de l’enfance, sur la trahison, l’égoïsme des enfants, la maladie aussi, ici celle de la mère, qui fait que l’enfance des filles ne pourra jamais être celle d’enfants ayant des parents équilibrés. Failles profondes, déséquilibre, manque d’amour et de compréhension, vont s’ajouter au caractère intransigeant des ados, pour aboutir au drame dont on sait dès les premières pages qu’il va arriver, chronique annoncée du malheur, mais intrigue à l’atmosphère parfois lourde qui nous maintient en haleine jusqu’au bout.

 les 68 premieres fois DomiClire


Catalogue éditeur : Rue fromentin

Alice, treize ans, part en vacances en famille sur la côte méditerranéenne.
Durant cet été, elle observe sa sœur aînée, Marie et son comportement face aux hommes. Les trois ans qui les séparent lui semblent être désormais un fossé infranchissable.
Elle porte aussi un regard lucide sur sa mère fragile psychologiquement et son père qui surjoue la normalité pour rassurer ses filles.
A treize ans, on est parfois plus réaliste que les autres. Alice sent avant tout le monde le drame qui se noue pendant ces vacances et va bouleverser toute son existence.

Un premier roman à l’atmosphère tendue et envoûtante. Un texte poignant et juste sur la collision entre les attentes de l’adolescence et les lâchetés du monde adulte.

Prix : 16 € ISBN : 9782919547487

Les Brasseurs de la ville. Evains Wêche

« Les Brasseurs de la ville », ce sont des brasseurs… de bière ? Non, Brasseurs de ville, de vent, de vie, Evains Wêche nous entraine à leur suite dans les rues misérables de Port au Prince en Haïti, à la recherche de jours meilleurs.

 domi_c_lire_les_brasseurs_de_la_villeUn premier roman au style étonnant qui nous fait vivre dans les pas d’un couple, à Haïti, au milieu des bidonvilles et de la misère. Tantôt il, tantôt elle, sans transition, le narrateur est les deux en même temps et s’adresse directement au lecteur, lui exposant sa vie, ses problème, ses amours, ses souffrances, ses espoirs, d’une vie meilleure, d’un emploi plus stable et moins fatiguant, de recevoir la manne financière promise par les pays riches et qui devrait s’abattre sur le pays, mais qui va moins vite que les ouragans ou les tremblements de terre !

Roman très étonnant donc, par sa construction qui du coup peut le rendre quelque peu rébarbatif, mais tellement émouvant aussi pas sa justesse de narration. Et qui parle si bien de la difficulté d’être au jour le jour. La mère qui a fait le choix d’un amoureux plutôt que d’un homme riche, ce qui a entrainé la séparation d’avec sa famille. Le marché où le femmes brassent la ville, brassent le béton, vendent des serviettes, de l’eau, ou même quand il le faut, leur corps, pour survivre et nourrir la famille un jour de plus. Les sentiment mitigés des parents, leur espoir d’une vie meilleure grâce à Babette, la fille ainée, si jolie, bien éduquée, instruite, qui pourrait épouser un homme riche ou du moins trouver un diaspora, un « pied de riz » diraient certains et son indispensable porte-monnaie. Le seul espoir réside donc cette fille qui trouve en Mr. Erickson, un homme riche mais marié, un protecteur qui va mettre à l’abri toute la famille. Mais à quel prix ! Difficile choix, continuer et laisser sa fille se perdre dans une vie sans avenir qu’elle n’a pas choisie, ou écouter ses remords, ses craintes, sa honte, et laisser sa famille et ses enfants mourir de faim, son homme mourir de fatigue.

J’ai aimé ce roman, malgré son style déroutant, pour sa verve, son réalisme qui peut nous sembler irréel, mais dont on peut malgré tout imaginer toute l’authenticité, la banalité, celle qui nous atteint et nous touche parfois lorsqu’on regarde les images d’un journal télévisé, mais qu’on oublie bien vite dans le confort de notre quotidien.

 les 68 premieres fois DomiClire


Catalogue éditeur : Philippe Rey

Port-au-Prince. Une famille négocie sa survie au jour le jour : il est maître pelle sur un chantier ; elle est repasseuse chez les messieurs célibataires du quartier, n’hésitant pas à se donner à eux car sinon « la chaudière ne monterait pas le feu ». Cinq enfants. Leur fille aînée, Babette, adolescente, est leur seul espoir : elle a son brevet, et sa beauté leur offrira un gendre riche. Sa mère la rêve en Shakira.
Un certain M. Erickson se présente un jour, bien plus âgé qu’elle, généreux pour la famille qu’il installe dans une confortable maison. Mais qui est-il réellement, cet homme mystérieux aux trois maîtresses, vivant dans le luxe, entouré de gardes du corps ? Pourquoi métamorphose-t-il Babette en blonde au point que le quartier la nomme dorénavant la Barbie d’Erickson ?
Sa mère constate, désolée : « Ma fille n’est plus ma fille ». En « putanisant » Babette, ses parents semblent s’être engagés sur une voie aux multiples périls, dont ils pressentent avec effroi qu’elle est sans retour.
Dans Les brasseurs de la ville, épopée à travers les quartiers pauvres de Port-au-Prince, chaque personnage invente ses propres pas pour danser avec sa croix. Evains Wêche signe un talentueux premier roman qui met en lumière la lutte du peuple haïtien contre la déchéance et la mort, un peuple qui brasse la ville entre les bruits et les fureurs où s’entremêlent des histoires de courage, d’amour et de folie.

Date de parution : 07/01/2016 / ISBN : 978-2-84876-506-8 / Format : 14,5 x 22 cm Pages : 192 / Prix : 17.00 €

 

I love Dick. Chris Kraus

Sulfureux « I love Dick » ? Ce roman écrit par Chris Kraus à la première personne est avant tout la  revendication féministe d’une femme qui s’affirme dans un monde d’hommes.

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D’abord publié en 1997, le roman a reçu un accueil mitigé, et pourtant il est aujourd’hui traduit dans plusieurs pays. Assez étonnant, troublant par sa construction, il peut rebuter un lecteur par toutes ces mentions d’auteurs anglo-saxons et parce qu’il est très ancré dans les années soixante-dix et quatre-vingt, qu’il faut avoir connues pour ne pas être parfois perdu. De plus, l’impression que Chris a fait tomber les barrières entre l’écriture et la vie privée, la réalité et la fiction, tout en écrivant malgré tout un roman, place parfois le lecteur en porte-à-faux. Et pourtant « I love Dick » parle essentiellement de la difficulté d’être une femme dans un monde d’hommes, celui des affaires, celui de l’art, du cinéma, de l’écriture, où les femmes sont souvent vues comme secondaires et peu intéressantes, insignifiantes, faibles, trouvant leur place uniquement par rapport aux hommes auprès de qui elles évoluent.

La première partie de roman se présente comme un journal. Chris Kraus et son mari, Silvère Lotringer, sont au restaurant avec Dick. Le temps est menaçant, aussi Dick leur propose de les héberger pour une nuit. Dès cette scène, le lecteur connait alors tout ce qu’il faut savoir sur les trois personnages, situation, âge, profession, et le fait qu’ils se connaissent finalement très peu. Au lendemain de cette soirée, Chris est persuadée que la nuit passé sous le même toit que Dick a été comme une rencontre intime et qu’il s’est passé une connexion entre eux, une sorte de « baise conceptuelle » et qu’elle est désormais amoureuse de Dick.
Silvère, jaloux à sa façon, va pourtant rentrer dans le jeu de Chris, et tous deux vont lui écrire des centaines de lettres, produisant ainsi une étrange réalisation artistique à quatre mains. Que faire, les envoyer ? Les publier en un roman ? En parler à Dick ? Attendre sa réponse ?
Pour Chris, c’est un peu comme si elle rédigeait un journal …. Et petit à petit cela devient une véritable introspection pour cette femme tentée par un changement de vie, elle se rend compte que si elle reste auprès de son mari, elle ne sera jamais que sa femme, son accompagnatrice, et n’aura pas de réalité en tant que Chris, aussi elle décide de le quitter.

La deuxième partie du roman nous fait d’abord suivre Chris dans sa traversée des États Unis seule en voiture. Elle tente de revoir Dick, le poursuit de ses assiduités, le harcèle. Mais toute cette partie est aussi un long plaidoyer pour toutes les femmes artistes si peu comprises, si peu appréciées tout au long des années, autrement que par rapport aux hommes qui les ont accompagnées. Et Chris défend la cause de ces femmes, leur talent, réel, méconnu, mal compris. Défend le fait d’être une femme, artiste, talentueuse, révolutionnaire, contestataire ou avant-gardiste, et surtout le droit à l’expression au même titre que les hommes.

Voici donc un roman très déroutant et qui loin d’être aussi sulfureux que le laissait présager son titre, et sa double signification en argot, nous entraine à la suite des délires et des pensées de Chris, aux limites de la fiction et de la réalité, et qui cherche à faire entendre les voix féminines si souvent oubliées et si peu soutenues par la société, en particulier dans les années 80, dans le monde de l’art et de la littérature.

💙💙💙

Quelques extraits :

« Nous étions deux électrons qui se tournaient autour dans une circuit fermé. Sans issue, huis clos. J’avais pensé à toi, rêvé de toi chaque jour depuis décembre. T’aimer m’avait permis d’accepter l’échec de mon film, de mon mariage et de mes ambitions. La route 126, l’autoroute de Damas. Comme saint Paul et Bouddha qui firent l’expérience d’une conversation grandiose à l’âge de 40 ans, j’étais re-née en Dick. Mais était-ce une bonne chose pour moi ?
Voilà la façon dont j’ai compris les règles.
Si l’on veut quelque chose très fort, on peut continuer à chercher à l’obtenir jusqu’à ce que l’autre dise Non. »

« Tout ceci était d‘une grande cruauté mais t’aimer était devenu un boulot à plein temps et je n’étais pas prête à me retrouver au chômage. »

« Qu’est-ce qui est selon vous la plus grande réussite de votre vie ? a demandé un adolescent du Thurman Youth Group à George Mosher, un trappeur, fermier, homme à tout faire et bucheron de 72 ans. « Être resté ici » a dit George. « A 3 kilomètres de l’endroit où je suis né ». Cher Dick, le sud des Adirondack permet de comprendre le Moyen Age. »

Catalogue éditeur : Flammarion

 Chris Kraus, une jeune femme, raconte son amour à sens unique pour un critique d’art prénommé Dick. Entre obsession, désir féminin et quête à travers les Etats-Unis, elle s’éloigne de son mari Sylvère et comprend que tout n’était que prétexte à la méditation et à la réflexion sur la place des femmes dans le couple et dans le monde.

Littérature étrangère / Traduit de l’anglais (États-Unis) par Alice Zeniter / Parution : 24/08/2016 / Prix : 20 €

Le monde entier. François Bugeon

Chronique d’une vie annoncée, banale, ordinaire, mais tellement poétique dans sa simplicité et son humanité. « Le monde entier » de François Bugeon est une étonnante surprise.

Domi_C_Lire_Le_monde_entier.jpgPersonnage principal du roman de François Bugeon, Chevalier travaille à l’usine et s’est toujours contenté de peu. Il s’en satisfait pleinement, trouvant son bonheur essentiellement dans le fait que l’on ait besoin de lui et qu’on le lui fasse sentir. Un soir en rentrant chez lui à mobylette, il sauve presque par réflexe trois personnes en les extrayant d’une voiture accidentée. Il se blesse en dégageant la voiture, est conduit à l’hôpital, mais en repart aussitôt, c’est un taiseux sauvage et solitaire qui ne se sent bien que chez lui. Il aura juste le temps d’apprendre que les secours ont trouvé non pas trois, mais deux blessés. Or il en est certain, il a sauvé trois personnes. Puis les événements vont s’enchainer, disparition puis réapparition de sa mobylette, réapparition de la mystérieuse troisième personne, une jeune fille qui s’installe chez lui pour quelques jours. Dans sa vie, il y a également Ségur son ami réputé volage ; les voisins, lui, taciturne et peu causant, elle, qui l’épie de sa fenêtre ; Sidonie, la patronne du bistrot, lieu de rendez-vous du village ; et Claudie, l’amie d’enfance dont il aurait certainement été amoureux si seulement…

Description de vie banale, mais pages qui tournent seules car le lecteur est intrigué par cet homme si ordinaire et ce « monde entier » tout autour de lui, ce Chevalier capable de se blesser par altruisme, de tout quitter par amitié, et qui pourtant semble parfois ne vivre qu’à moitié. Il y a une grande justesse de sentiments, de situations, de vie, dans les lignes attachantes et poétiques de François Bugeon.

Livre étonnant que je n’aurais jamais ouvert s’il n’avait pas été sélectionné par les 68 ! Je n’aimais pas du tout cette couverture austère et triste qui me laissait présager un récit conforme à cette image. Il est d’ailleurs resté bien longtemps sur ma table de chevet. S’il ne nous emporte pas dans un univers insolite et irréel, mais au contraire nous ancre dans un quotidien et une réalité palpables, d’une grande banalité finalement, il est également d‘une grande poésie et tout en finesse. En particulier dans la description des sentiments, de la vie, des habitudes, des solitudes, des amitiés, non-dits, beuveries, causeries de villages, dans une réalité du quotidien que l’on occulte souvent, mais qui est pourtant bien réelle pour la plupart d’entre nous.

les 68 premieres fois DomiClire


Catalogue éditeur : Le Rouergue

« Chevalier préférait aller à son travail en Mobylette quand il faisait beau, et il portait toujours le même casque, orange, sans visière. Ce jour-là, il avait sur le dos une chemise à manches courtes que le vent de la course faisait flotter autour d’un genre de bermuda. De loin, on voyait d’abord le blanc livide de ses mollets, puis son ventre laiteux que la chemise découvrait par saccades. »
Il n’y a pas de femme dans la vie de Chevalier, pas qu’on sache en tout cas. De même qu’il n’y a pas beaucoup de tendresse entre sa mère et lui. Pourtant, il n’a jamais eu l’envie d’aller s’installer ailleurs que dans ce village où il a grandi, où il aime aller pêcher dans les étangs, avec son vieux copain Ségur. Jusqu’à ce soir d’août où son chemin a croisé une voiture renversée sur le bord de la route…
Dans ce premier roman d’une grande délicatesse, François Bugeon saisit une vie au moment où elle bascule.

mars 2016 / 176 pages / 17,80 € / ISBN 978-2-8126-1031-8

Nos âmes la nuit. Kent Haruf

Avec « Nos âmes la nuit », Kent Haruf nous entraine dans les pas de deux veufs qui rapprochent leurs solitudes le temps que quelques nuits, faisant fi du quand dira-t-on, de l’avis de leurs familles respectives, des voisins, jusqu’au moment où…

couverture

Dans la petite ville de Holt, la solitude est pesante pour Addie Moore qui a perdu son mari depuis longtemps, et dont le fils vit bien loin. Jusqu’au jour où elle décide d’aller voir Louis Waters, son voisin depuis des années, veuf lui aussi, et à qui elle propose, oui, carrément et tout simplement, de venir passer les nuits allongé près d’elle à bavarder, à dormir, pour repartir au petit matin. Un peu surpris, louis va pourtant se faire un plaisir de tenter l‘aventure, et de nuit en nuit, une complicité et une forme d’amour va rapprocher les deux solitaires.
Jusqu’au jour où Gene, le fils d’Addie, va lui confier pour quelques semaines la garde de son fils. Et le petit fils va trouver sa place entre ces deux anciens qui se font grands-parents de substitution. Mais dans une petite ville de province, où qu’elle soit, tout se sait, les bavardages, les commérages, vont bon train, les jalousies ont vite fait de s’exacerber. Louis et Addie n’en ont que faire, eux qui trouvent dans cette présence incongrue au plus noir de la nuit, un réconfort, une écoute, mais aussi un dynamisme et une énergie qu’ils avaient perdus depuis longtemps.

Un joli roman qui se lit comme un conte et qui fait bien évidemment penser au roman Sur la route de Madison, et surtout à Clint Eastwood et Meryl Streep dans le film éponyme, quand la famille, la bienséance prédominent sur l’amour, la tendresse, le bonheur individuels. Egoïsme des familles, manque de courage pour braver les interdits, si on est conquis par ces lignes, par leur tendresse et la joie qui s’en dégage, on reste frustré malgré tout devant le gâchis qu’engendrent les convenances. Où l’on se rend compte que l’âge ne rend pas plus libre pour autant !

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Catalogue éditeur : Robert Laffont, Pavillons    

Traduit par Anouk NEUHOFF

Addie, soixante-quinze ans, veuve depuis des décennies, fait une étrange demande à son voisin, Louis : voudrait-il bien passer de temps à autre la nuit avec elle, simplement pour se parler, se tenir compagnie ? La solitude est parfois si dure… Bientôt, bravant les cancans de la petite ville de Holt ou ils vivent depuis toujours, Addie et Louis se retrouvent presque chaque soir.
Ainsi commence une belle histoire d’amour, lente et paisible, faite de confidences chuchotées dans le noir, de mots de réconfort et d’encouragement. Mais très vite, les enfants d’Addie et de Louis s’en mêlent, par égoïsme et, surtout, par peur du qu’en-dira-t-on.
Ce livre-testament, publié quelques mois après la mort de l’auteur, est une célébration de la joie, de la tendresse et de la liberté. De l’âge, aussi, qui devrait permettre de s’affranchir des conventions, pour être heureux, tout simplement.
« Nombre de romans évoquent la quête de l’amour, mais celui-ci est illuminé par sa présence. » The Guardian

Parution : 1 Septembre 2016 / Format : 135 x 215 mm / Nombre de pages : 180 / Prix : 18,00 € / ISBN : 9782221-187845