La belle lumière, Angélique Villeneuve

Le magnifique parcours d’une mère pour sauver sa fille, un roman inoubliable

L’auteur porte un regard émouvant et réaliste sur la vie de Kate Keller, la mère passionnée et attentive d’Helen, cette enfant sauvage et folle, sourde muette et aveugle que tous lui conseillent de placer à l’asile.

Cette enfant c’est Helen Keller, devenue la première femme handicapée à réussir un diplôme universitaire, auteure prolifique, elle crée une fondation pour personnes handicapées et milite au sein de mouvements socialistes, féministes et pacifistes, elle voyage dans le monde entier pour défendre les personnes handicapées.

En Alabama en 1880, Kate a quitté ses parents pour suivre Arthur, ce veuf de vingt ans son ainé. Mais la vie n’est pas facile pour cette jeune femme qui sait bien qu’elle ne prendra jamais la place de la première épouse trop tôt disparue. La naissance de son premier enfant est vécue comme une fête. Helen est un bébé comme les autres, aimée de ses parents, élevée dans cette grande maison au bord de la rivière. Jusqu’à ces journées de fièvre qui  laissent la mère et la fille exsangues et changent à jamais le cours de leurs vies. Helen a dix-neuf mois.

Vont suivre des années de recherche tous azimuts pour cette mère aussi obstinée que pugnace, médecins, oculistes, médecines alternative, eaux miraculeuses ou plantes qui guérissent, tout y passe, rien n’y fait. L’enfant grandit, sauvage, exigeante, indocile.

La relation quasi-charnelle et si forte qu’elle a avec sa fille lui dit qu’elle peut faire quelque chose pour elle. Alors Kate s’obstine, laisse Helen vivre, toucher, crier, mordre, blesser, fuir. Kate cherche et trouve enfin une école pour malentendants et aveugles, l’école Perkins à Boston et convainc son époux de faire venir Ann Sullivan, une jeune femme qui prend en charge l’éducation d’Helen. Plus qu’éduquer, il lui faudra dompter la jeune Helen, et soumettre à rude épreuve ces parents aimants qui ne comprennent pas forcément la difficulté et l’exigence de cette éducation.

Le difficile parcours de cette mère qui aime sa fille et se bat contre tous pour lui donner une vie « normale » est magnifiquement dépeint par les mots, la force et la douceur de l’écriture de l’auteur. Une écriture qui touche le lecteur au cœur et à l’âme. Bien sûr, comme elle le dit, peu de documents existent sur la réalité de la vie de Kate, mais Angélique Villeneuve la fait vivre sous nos yeux avec intelligence et sincérité, c’est particulièrement réussi et terriblement émouvant

La beauté, la complexité, la dualité des sentiments de cette mère, les difficultés qu’elle doit affronter, l’isolation face à une société qui n’est pas prête à accepter ces enfants si différents. Mais aussi la complexité de cette Amérique qui sort de la guerre de sécession, les conflits latents entre le nord et le sud, malgré la fin de l’esclavage une réalité qui veut que ces hommes et ces femmes qui ne sont plus esclaves n’ont pas pour autant leur place dans la société, sont également traduits avec finesse. Tout y est. C’est émouvant, beau, triste et magnifique à la fois.

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Catalogue éditeur : Le Passage

Alabama, 1880. Dans une plantation du sud des États-Unis, la naissance d’Helen console sa mère d’un mariage bancal. Un monde s’ouvre entre Kate et sa fille, et puis tout bascule : les fièvres féroces ravagent l’enfant adorée.
Cette fillette à la destinée extraordinaire, beaucoup la connaissent. La renommée d’Helen Keller, aveugle, sourde et muette, enfant farouche tenue pour folle et puis surdouée, a franchi frontières et années.
Kate Keller, que La Belle Lumière éclaire aujourd’hui, semblait en revanche repoussée dans l’ombre à jamais. Sans elle, pourtant, sa fille aurait-elle pu accéder au miracle de la connaissance ?
Comme glissée au cœur de son héroïne, tant vibre dans ces pages le corps déchiré de Kate, Angélique Villeneuve restitue, de son écriture sensuelle et précise, la complexité d’une femme blessée et dévorée par l’amour. Dans ce Sud encore marqué par la guerre de Sécession et les tensions raciales, le lecteur traverse avec elle une décennie de sauvagerie, de culpabilité et de nuit. Mais découvre aussi, et c’est là la force du livre, un temps de clarté et de grâce.

ISBN: 978-2-84742-447-8 / Date de publication: Août 2020 / pages: 240 / Prix : 18 €

6 réflexions sur “La belle lumière, Angélique Villeneuve

  1. Angélique Villeneuve août 31, 2020 / 15:04

    Quel magnifique billet. Je le dis souvent, le soutien des blogueuses est tellement précieux pour moi! 💚 Merci pour cette lecture fine et sensible
    Angélique Villeneuve

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  2. tapissiere août 31, 2020 / 15:39

    Chère amie, juste pour un peu de vérité : Là aussi il s’agit d’un objet de littérature recréé . Car autrefois il pouvait se dire qu’Ann Sullivan, exceptionnelle éducatrice avait, pour et à la place des parents , conçu le projet de sauver Helen Keller . Et l’avait réalisé avec la grande reconnaissance de la bénéficiaire .La méritante précurseuse est bien dépossédée de sa valeur ! Mais à notre époque, il convient de louer l’instinct maternel et ses miracles . Tant mieux sans doute si cela peut aider les parents d’enfants actuellement handicapés . Mais je regrette les dix petits nègres et le premier « Autant en emporte le vent ». Et la mise en lumière des obscures travailleuses de l’époque . Amitiés . Hélène Couderc .

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    • Domi août 31, 2020 / 16:02

      chère Hélène,
      il me semble bien que dans ce roman la place de Ann Sullivan est intacte, et l’incompréhension des parents face à l’éducation qu’elle va donner à Helen y compris contre leur volonté mais pour le bien de leur fille a aussi toute sa place.
      Ici l’auteur montre comment Kate a su trouver l’école qui pouvait sauver sa fille, y compris au delà de ses espérances, et envers et contre tous, puisqu’on lui conseillait de mettre sa fille à l’asile tout simplement.

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    • angelique VILLENEUVE septembre 1, 2020 / 08:07

      bonjour Hélène
      Vous avez tout à fait raison, c’est d’Ann Sullivan, la jeune professeure inexpérimentée venue de Boston, qui a réussi à mener Helen à la lumière des mots, ce n’était pas du tout mon propos de remettre en cause ce qu’elle a fait pour l’enfant, puis pour la femme tout au long de sa vie. La modernité de son approche pédagogique, sa ténacité hors du commun et son caractère bien trempé m’ont impressionnée l’année entière de mes recherches.
      Mon idée était plutôt d’aller explorer « à côté », cherchant à me glisser dans le corps de l’une des obscures travailleuses, justement, la mère. Kate n’a pas fait de « miracle », non. Elle a juste essayé de faire au mieux, et ses tentatives m’ont passionnée. Merci beaucoup de votre commentaire, j’aime toujours discuter des ressentis de lecture!
      Angélique

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