Vivre avec nos morts, Delphine Horvilleur

Un livre lumineux et indispensable pour trouver le chemin vers notre propre finalité

La mort, comme une fin inéluctable, mais la mort parfois comme une angoisse, un abandon, une fuite, une absence ou peut-être même un soulagement. Delphine Horvilleur la connaît mieux que quiconque tant elle a accompagné de perdants vers la dernière demeure de leurs proches.

Rabbin laïc comme on a pu la présenter lorsqu’elle préparait les obsèques d’Elsa Cayat, elle accepte à la fois le sens et l’image que ces deux mots accolés renvoient à ceux qui les entendent. Par des mots à la fois simples et chargés de sens, par une intelligence et une compréhension de l’autre qui transpirent à chaque ligne, elle nous montre un chemin vers ce qui nous angoisse le plus, le décès de nos proches et notre propre finalité.

Parler d’eux pour nous parler de nous en quelque sorte, pour nous aider à faire un premier pas vers le deuil.

Le recours aux textes, leurs explications ou au contraire les déchirement qu’il y a eu à travers l’histoire pour les interpréter sont là pour ponctuer tous ces témoignages et alléger le chagrin de l’absence inéluctable et définitive. Sarah, Elsa et Marc, Ilan Halimi ou Itzak Rabin, Simone et Marceline, et tous les anonymes qui se présentent à nous le temps de quelques mots, à travers les souvenirs de ceux qui les ont côtoyés, disent à la fois cette absence et l’amour des vivants pour leurs disparus.

L’écriture est brillante mais jamais ostentatoire, émouvante mais jamais larmoyante. Un livre important, à lire, relire et partager.

Catalogue éditeur : Grasset

« Tant de fois je me suis tenue avec des mourants et avec leurs familles. Tant de fois j’ai pris la parole à des enterrements, puis entendu les hommages de fils et de filles endeuillés, de parents dévastés, de conjoints détruits, d’amis anéantis… »

Être rabbin, c’est vivre avec la mort : celle des autres, celle des vôtres. Mais c’est surtout transmuer cette mort en leçon de vie pour ceux qui restent : « Savoir raconter ce qui fut mille fois dit, mais donner à celui qui entend l’histoire pour la première fois des clefs inédites pour appréhender la sienne. Telle est ma fonction. Je me tiens aux côtés d’hommes et de femmes qui, aux moments charnières de leurs vies, ont besoin de récits. »

A travers onze chapitres, Delphine Horvilleur superpose trois dimensions, comme trois fils étroitement tressés : le récit, la réflexion et la confession. Le récit d’une vie interrompue (célèbre ou anonyme), la manière de donner sens à cette mort à travers telle ou telle exégèse des textes sacrés, et l’évocation d’une blessure intime ou la remémoration d’un épisode autobiographique dont elle a réveillé le souvenir enseveli. Nous vivons tous avec des fantômes : « Ceux de nos histoires personnelles, familiales ou collectives, ceux des nations qui nous ont vu naître, des cultures qui nous abritent, des histoires qu’on nous a racontées ou tues, et parfois des langues que nous parlons.» Les récits sacrés ouvrent un passage entre les vivants et les morts. « Le rôle d’un conteur est de se tenir à la porte pour s’assurer qu’elle reste ouverte » et de permettre à chacun de faire la paix avec ses fantômes…

Parution : 3 Mars 2021/ Format : 133 x 205 MM / Pages : 234 / EAN : 9782246826941 prix 19,50€ / EAN numérique: 9782246826958 prix 13, 99€

Rhapsodie des oubliés, Sofia Aouine

Grandir dans les rues de la Goutte d’Or, pour le meilleur ou pour le pire

Abad, jeune émigré libanais, est à l’âge de tous les possibles, celui où tout commence. Il a comme les gamins de son âge des envies de sexe et d’amour, de voyages et de découvertes. Mais avec père quasi absent, une mère toujours débordée et soumise, il est facile de se laisser tenter lorsque les copains vous promettent la lune. Et une fois tombé dans le piège, il a affaire à une justice qui n’entend pas ces jeunes qui espèrent, attendent, et parfois tombent.

À partir de ce jour, il doit aller voir Madame Futterman, la dame qui ouvre dedans, celle qui malgré sa vie de petite fille juive triste, sait écouter et parfois rire aux éclats. Il croise la route de Gervaise, la belle prostituée noire qui contrainte par les sorciers ne quittera jamais cette condition avilissante qui l’attendait à Paris, alors qu’on lui avait fait miroiter un vrai métier qui lui aurait permis d’élever sa fille. Puis Odette, la voisine accueillante qui lui offre rêve et douceur au pays des sucreries et de la musique. Il y a enfin Bat-man, la jeune fille voilée tenue enfermée par les hommes de sa famille autant chez elle que sous son voile, celle qui rêve de s’échapper et pour laquelle Abad aura son premier coup de foudre.

Premiers amours, premiers émois, premières grosses bêtises, quitter la rue Léon et la Goutte d’Or, quitter encore une fois ceux qu’on aime, partir encore pour grandir.

L’écriture, vivante et violente, utilise l’argot et le langage des rues pour faire passer les émotions, la vie qui brûle et bouleverse Abad et ses copains. Quelle énergie, quel humour, quel tourment dans ces mots, ces rencontres, ces aventures amères et douloureuses. Il se dégage de ce roman une rage de vivre, d’être, d’exister, qui prend le lecteur et ne le lâche pas. Abad m’a fait penser au petit Momo de Romain Gary, d’ailleurs présent en exergue d’un chapitre. L’auteur fait vivre par ses mots, son rythme, cette ville qui perd ses jeunes dans les quartiers où la violence, la drogue et la misère ne sont jamais loin, malgré leur rage de vivre, leurs rêves et leur droit au bonheur. Et où l’on constate une fois de plus que la volonté et l’intelligence ne favorisent pas toujours l’intégration des émigrés jeunes ou moins jeunes. J’ai apprécié aussi les rôles et les personnalités des personnages secondaires qui donnent rythme et vie au roman.

Si j’ai apprécié écouter ce roman que j’avais déjà aimé lors de sa sortie, la voix d’Ariane Ascaride ne m’a pas convaincue lorsqu’elle incarne Abad. Il m’apparaît difficile d’être à la fois ce gamin des rues et toutes les femmes qui gravitent autour de lui. Dès qu’elle aborde les autres personnages par contre, elle les incarne avec une émotion que le lecteur ne peut que ressentir à son tour. Mais malgré ce bémol, l’écoute de ce roman m’a fait passer un excellent moment, j’ai aimé en retrouver tous les personnages et la belle écriture de l’autrice.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2021

Catalogue éditeur : Audiolib, Éditions de la Martinière

« Ma rue raconte l’histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s’appelle rue Léon, un nom de bon Français avec que des métèques et des visages bruns dedans. »
Abad, treize ans, vit dans le quartier de Barbès, la Goutte d’Or, Paris XVIIIe. C’est l’âge des possibles : la sève coule, le cœur est plein de ronces, l’amour et le sexe torturent la tête. Pour arracher ses désirs au destin, Abad devra briser les règles. À la manière d’un Antoine Doinel, qui veut réaliser ses 400 coups à lui.
Rhapsodie des oubliés raconte sans concession le quotidien d’un quartier et l’odyssée de ses habitants. Derrière les clichés, le crack, les putes, la violence, le désir de vie, l’amour et l’enfance ne sont jamais loin.
Dans une langue explosive, influencée par le roman noir, la littérature naturaliste, le hip-hop et la soul music, Sofia Aouine nous livre un premier roman éblouissant.
Il fallait le talent d’Ariane Ascaride pour incarner avec autant de justesse cette écriture qui allie humour et drame, et ces « oubliés » que sa lecture nous rend inoubliables.


Avec la participation de l’auteur pour la lecture du chapitre 9.

Suivi d’un entretien avec l’auteur

Date de parution : 16 Septembre 2020 / Durée : 4h43 / Prix public conseillé: 21.50 € / Format: Livre audio 1 CD MP3 / Poids (Mo): 647 / EAN Physique : 9791035403645

Avant le jour, Madeline Roth

Quand le voyage amoureux devient voyage intérieur

Elle a bientôt quarante ans, un amant plus jeune qu’elle, un enfant déjà adolescent. Divorcée alors que son fils Lucas n’était encore qu’un bébé de quelques mois, il a aujourd’hui treize ans. Elle a choisi de vivre seule, mais aujourd’hui elle attend Pierre. Pierre l’amant qui part toujours trop vite mais qui lui a promis ce long week-end en Italie. Partir à Turin tous les deux, comme un cadeau, une parenthèse.

Pourtant, il ne viendra pas, il reste auprès de sa femme qui vient de perdre son père. Alors, que faire, rester seule chez elle en sachant qu’il ne viendra pas ou partir sans lui pour rencontrer la ville qui devait abriter leur amour, pour s’y rencontrer elle-même.

Alors elle part, seule dans ce train, seule dans le lobby de l’hôtel, dans la chambre, les églises et les musées qu’ils auraient pu arpenter à deux, seule surtout avec ses interrogations, avec cette introspection utile et bienvenue. Qu’est-ce que l’amour, est-ce raisonnable d’attendre un homme que l’on n’aura jamais à soi, et pourquoi faut-il divorcer, pourquoi partir et se priver de son fils une semaine sur deux, le priver aussi de cet autre parent qui forcément va lui manquer.

Les questions arrivent au rythme de ses pas dans la ville qu’elle découvre, mais aussi au fil des souvenirs qui s’égrainent, quatre ans déjà avec Pierre, cet homme qu’elle aime même s’il ne sera jamais à elle.

Un court roman qui dit l’amour, l’attente, les questions que l’on se pose lorsque l’on voit filer les années et que l’on ne sait pas si l’on a fait les bons choix, les questions que l’on se pose aussi quand on comprend que l’on est exactement à la place où on souhaite être. Raconter et vivre l’amour interdit avec des mots simples et sincères, pour nous le faire comprendre et partager. Un premier roman lucide et vrai tout en finesse.

Lire également l’avis de The Fab’s blog

Un roman de la sélection 2021 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : La fosse aux ours

La narratrice avait prévu un court voyage à Turin avec son jeune amant. Au dernier moment, celui-ci annule sa participation pour raison familiale. Elle se retrouve seule dans la capitale du Piémont. Le voyage amoureux se transforme en un voyage intérieur qui lui permet de faire le point sur sa vie.

Date de parution : 07/01/2021 / EAN : 9782357071643 / pages 64

L’émouvante et singulière histoire du dernier des lecteurs, Daniel Fohr

Avant que le lecteur lambda ne devienne une espèce en voie d’extinction, protégeons les derniers hommes-lecteurs 

Si aujourd’hui 85% des lecteurs sont des lectrices, il existe de fait un certain nombre de lecteurs, et donc d’hommes qui apprécient la lecture et aiment en parler.

Mais dans ce roman tout à fait délicieux et parfois désarmant, l’auteur imagine un monde dans lequel le dernier des lecteurs devra faire un choix s’il ne veut pas que le goût de la lecture s’éteigne avec lui. Transmettre sa passion à d’autres hommes, à ce fils qu’il pourrait élever un jour, devenir auteur lui-même pour enfin voir chez les libraires des thèmes qui pourraient intéresser ses coreligionnaires ?

Difficile de trouver la bonne solution même si toutes les options restent possibles. Enfin, s’il est encore temps, car rien n’est moins sûr. Dans le monde de notre narrateur, les hommes regardent les écrans, font du sport ou en parlent beaucoup, ont un travail et des responsabilités, et laissent la lecture et les rêveries qu’elle implique aux femmes.

Mais sont-elles seulement plus enclines à la rêverie, à la romance ou à l’évasion. Seraient-elles plutôt curieuses et surtout capables de s’intéresser à tous les sujets, tous les domaines, tous les voyages dans le temps ou dans l’espace, prêtes à comprendre, analyser, compatir, avoir de l’empathie pour les personnages et les situations qu’elles rencontrent dans les livres ? Capables d’échanger avec d’autres lectrices et de s’enrichir de ces échanges ? Car là est la question, que nous apporte la lecture ?

Ce que j’ai aimé ?

Voilà un auteur qui nous parle de littérature, du plaisir et du bonheur de lire, de la découverte, du partage et de l’échange, le tout avec un humour parfois grinçant, mais qui éveille nos consciences à réaliser que quelques poncifs éculés sur la lecture et les lecteurs (ou lectrices ?) sont bien trop souvent véhiculés sans que l’on s’en offusque ou que l’on tente de les contredire.

La façon dont il analyse les rôle des marqueteurs et des sondages pour adapter les sujets aux typologies de lecteurs, comme savent si bien le faire ces réseaux sociaux qu nous gouvernent déjà dans nos choix, quelle tristesse.

La lecture comme un moyen commun d’analyse des sociétés, des sentiments, comme guide, à prendre en exemple ou au contraire à rejeter, mais que l’on peut utiliser comme modèle ou référence, indispensable à nos sociétés.

Un regard satyrique, joyeux et parfois grinçant à souhait pour éveiller notre conscience aux bienfaits de la lecture, cette passion que certains d’entre pratiquent de manière intensive il faut bien l’avouer. Alors lisons et faisons lire les hommes autour de nous pour que ce roman ne deviennent pas une prophétie du XXIe.

On ne manquera pas d’aller lire l’article du blog de Daniel Forh sur ce roman.

Catalogue éditeur : Slatkine et Cie

2021 : 85% des lecteurs sont des lectrices.
Sans qu’on puisse l’expliquer, jour après jour, l’écart continue de se creuser et une projection raisonnable permet même d’affirmer que les lecteurs masculins auront totalement disparu en 2046. Peut-être avant. Ce roman raconte l’histoire du dernier homme qui lisait. Comment a-t-il vécu cette situation inédite, seul au milieu des femmes qui le comprennent encore et partagent sa passion ? Son destin est-il une impasse et saura-t-il renverser la situation ? Qu’en disent les autres hommes ? Un roman-manifeste, aussi drôle qu’inquiétant, que les femmes devraient faire lire d’urgence aux hommes avant qu’il soit trop tard.

Paru le 28 janvier 2021 / 160 pages / Prix : 12€ / ISBN : 978-2-88944-173-0

Le bûcher des certitudes, Bernadette Pecassou

Quand on immole les femmes aux bûchers pour servir le pouvoir politique et l’ambition des puissants

Depuis La belle Chocolatière j’apprécie les romans de Bernadette Pecassou, car elle entraîne ses lecteurs dans ce sud-ouest que j’aime tant. Après être allés à Lourdes, Biarritz, Bagnères-de-Bigorre ou même sur Le paquebot France, nous voilà de nouveau au Pays-Basque pour un voyage dans le temps au plus près de celles qui font l’Histoire.

En 1609 le roi Henri IV, huguenot fraîchement converti au catholicisme, envoie Pierre de Lancre dans ce Pays-Basque qui pratique depuis toujours les rites anciens. L’inquisition fait des ravages de chaque côté des Pyrénées, les horreurs de la saint Barthélémy sont présentes dans toutes les mémoires et la sorcellerie est le nouveau fléau qu’il convient d’éradiquer. Pierre de Lancre est un passionné, érudit et sûr de lui : les malheurs qui gangrènent le monde sont le fait du diable, et ses messagères doivent être passées par les flammes.

Les destinées de quatre femmes au parcours très différents vont alors se rejoindre pour le pire sans le meilleur hélas. Amalia est une guérisseuse au savoir que l’on se transmet de génération en génération, Murji une fille sauvage qui aime en silence un beau charbonnier, Graciane la sœur du prêtre attend son promis parti à la chasse à la baleine, Lina est prête à tout tenter pour sortir de sa condition misérable.

Il faut savoir qu’en quatre mois à peine soit cent vingt jours, Pierre de Lancre a érigé quatre-vingt bûcher et brûlé quatre-vingt femmes, sans compter qu’il en a arrêté ou torturé des centaines d’autres.

Ce que j’ai aimé ?

L’auteur une fois de plus nous décrit la région de l’intérieur. À travers les grandes familles qui exercent leur pouvoir dans les provinces. Toutes se soutiennent y compris lorsqu’il faut se liguer contre la justice du Roi.
La façon dont elle nous parle du sort fait à ces pauvres femmes accusées de sorcellerie et brûlées en place publique après tortures et violences pour obtenir d’improbables aveux sans véritable procès.
Sa connaissance des traditions de la région à travers les pratiques animistes, les guérisseuses, le pouvoir des plantes et des croyances ancestrales, celle des sorcières par exemple.
La complexité des relations entre l’Espagne et la France, et les stratégies politiques mises en œuvre par Henri IV pour conserver son royaume.
Enfin, comprendre aussi comment les hommes, partis de longs mois vers Terre-Neuve à la chasse à la baleine, abandonnaient leurs familles et laissaient aux femmes la tâche immense de tenir les foyers pendant leur absence.

Ce que j’aime aussi avant tout, c’est cette façon de nous présenter l’histoire à partir des êtres humains qui la font, que l’on oublie souvent, et qui sont tout simplement « à hauteur d’homme » comme vous ou moi en quelque sorte.

Un roman que l’on peut qualifier de régional, mais qui aborde un sujet universel. J’ai apprécié ce retour dans le passé pour évoquer une fois de plus la fragilité de la place des femmes dans les sociétés, à quel point elles peuvent servir de détonateur dans les conflits, et leur vie n’avoir aucun valeur face aux ambitions politiques, religieuses ou économiques.

Du même auteur, lire aussi L’hôtel du Gallia-Londres

Catalogue éditeur : Albin-Michel

1609. Au cœur du Pays Basque, encore imprégné de rites et de mythes païens, un homme est chargé par Henri IV d’une mission : éradiquer la sorcellerie. Dévoré par la foi, le goût du pouvoir, et plein de certitudes, Pierre de Lancre a pour ce faire une méthode imparable : purifier les âmes en brûlant les corps.
Sur ces terres rudes à la langue impénétrable, désertées par les hommes partis en mer, les destins de quatre femmes vont s’entrecroiser. Amalia, la guérisseuse au cœur pur, Murgui, une adolescente à la beauté du diable éprise d’un jeune charbonnier, Graciane, la marguillière de l’église qui attend le retour de son marin, et Lina, prête à tout pour fuir la pauvreté et le mépris. Échapperont-elles à la folie de ce chasseur de sorcières ?

Passionnée par l’histoire des femmes, Bernadette Pécassou, auteure de nombreux romans à succès dont La Belle Chocolatière, L’Impératrice des Roses ou La Passagère du France, ressuscite ici la cruelle figure de Pierre de Langre et nous entraîne au cœur d’une épopée sanglante, où des femmes furent sacrifiées au nom de la raison et de la religion.

Après une carrière de journaliste et de réalisatrice pour la télévision, Bernadette Pécassou se consacre à l’écriture. Elle vit au Pays Basque dont elle est originaire.

19.90 € / 28 Avril 2021 / 150mm x 220mm / 256 pages / EAN13 : 9782226446466

Les orageuses, Marcia Burnier

Comment se reconstruire après les violences et malgré le silence de la justice ?

Elles sont jeunes, fragiles, solitaires, mais au fond ce sont des femmes fortes et déterminées. Elles se sont reconnues, car elles ont été victimes de harcèlement ou de viol. Pourtant aucune n’a osé déposer plainte. A quoi bon si c’est pour ne pas être écoutée, pour être moquée, soupçonnée, dénigrée. Cela, elles ne l’auraient pas supporté, pas après ce qu’elles ont subi. Mais c’est l’orage qui gronde dans leurs têtes et dans leurs corps. Car comment se remet-on d’une agression. Que peut-on faire si l’on est tiraillée entre honte et culpabilité, dégoût et colère, quand on ne sait même plus si l’on a envie de se terrer ou de répondre par la violence.

Un jour ces orageuses décident de se venger et de donner ensemble la réponse qu’elles attendaient d’une société qui s’avère aussi muette que transparente face aux violences faites aux femmes. Oh, leur violence n’est pas celle des hommes qui les ont blessées car elles ont intégré l’idée qu’il y a des limites à ne pas franchir. Le gang de filles décide de frapper ceux qui les ont blessées au plus profond d’elles-mêmes en exerçant cette vengeance qui permettra enfin de parvenir à une forme de résilience.

Est-ce seulement réalisable dans une société qui n’attend des femmes qu’une forme de soumission et d’effacement, qui leur demande de ne faire ni vague ni révolution, de rester avec leurs peurs et leurs angoisses, en espérant qu’à la longue tout rentrera dans l’ordre.

Les orageuses est un court roman aux personnages pas forcément crédibles, mais qui a l’avantage de démontrer la force de celles qui parce qu’elles sont soudées et ensemble, cherchent et trouvent une réponse. Mais si cette forme de vengeance est salvatrice, l’impossibilité de la voir appliquer aux autres victimes rend encore plus désespérant le manque de réaction de notre justice face aux violences faites aux femmes, sans parler du silence assourdissant face aux féminicides. Malgré certaines imperfections, ce premier roman résistant et vindicatif éveille nos consciences sur les dégâts qu’entraîne l’absence de réponse de la justice pour les victimes.

On ne manquera pas de lire sur le sujet Femmes en colère de Mathieu Ménégaux et De mon plein gré de Mathilde Forget.

Un roman de la sélection 2021 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : éditions Cambourakis

« Depuis qu’elle avait revu Mia, l’histoire de vengeance, non, de “rendre justice”, lui trottait dans la tête. On dit pas vengeance, lui avait dit Mia, c’est pas la même chose, là on se répare, on se rend justice parce que personne d’autre n’est disposé à le faire. Lucie n’avait pas été très convaincue par le choix de mot, mais ça ne changeait pas grand-chose. En écoutant ces récits dans son bureau, son cœur s’emballe, elle aurait envie de crier, de diffuser à toute heure dans le pays un message qui dirait On vous retrouvera. Chacun d’entre vous. On sonnera à vos portes, on viendra à votre travail, chez vos parents, même des années après, même lorsque vous nous aurez oubliées, on sera là et on vous détruira. »

Un premier roman qui dépeint un gang de filles décidant un jour de reprendre comme elles peuvent le contrôle de leur vie.

Marcia Burnier est une autrice franco-suisse. Elle a co-créé le zine littéraire féministe It’s Been Lovely but I have to Scream Now et a publié différents textes dans les revues Retard Magazine, Terrain vague et Art/iculation. Née à Genève, elle a grandi dans les montagnes de Haute-Savoie. Elle a notamment suivi des études de photographie et cinéma à Lyon 2. Les Orageuses est son premier roman, et le premier de la collection Sorcières.

illustration de couverture : Marianne Acqua
144 pages / 130 x 210 mm / parution : 2 septembre 2020 / 15€ / ISBN 9782366245189

Carrefour des veuves, Monique Ilboudo

Une réflexion contemporaine sur la place des femmes face au terrorisme et aux traditions en Afrique subsaharienne

Depuis toujours les femmes sont les premières victimes de la barbarie et du terrorisme. L’auteur pose un regard critique et bienveillant sur celles qui sont victimes et que l’on fait passer pour les bourreaux ou les responsables de tous les maux de l’humanité. Elle parle sans concession du terrorisme et des conflits qui endeuillent la région du Sahel, mais que l’on trouve dans de nombreuses région du globe aujourd’hui.

Tilaine vient de perdre son mari. Isma était douanier, mais il critiquait un peu trop ouvertement l’incurie des institutions en place, malgré les avertissements de sa famille. En représailles mais sous couvert de promotion, il a été envoyé sur la frontière nord du pays. Il a été tué par les djihadistes.

Tout la pousse à se lamenter sur son sort. Mais si elle est triste et affligée par ce deuil, Tilaine est avant tout courageuse et combative. Malgré sa douleur et son chagrin, elle décide de créer urne association pour aider les jeunes femmes victimes comme elle du terrorisme.

C’est pendant une mission pour son association qu’elle rencontre Noura, une fillette brillante mais victime tant du terrorisme que des traditions de pays dans lesquels les filles n’ont nul besoin d’aller à l’école ou de s’instruire. Mais Nora à soif de connaissance, de vie, d’instruction. La rencontre avec cette fillette sera déterminante pour Tilaine qui rêve de lui offrir un avenir à la mesure de sa détermination.

Voilà un roman sans concession qui ose dire qu’elle peut être la vie des hommes et des femmes qui s’insurgent contre le pouvoir en place lorsque celui-ci ne rempli pas sa mission. Qui évoque la dure réalité de certaines vies, la fragilité et l’impuissance des populations et de certains gouvernements face au fléau djihadiste qui tient en coupe réglée de nombreuses régions d’Afrique. Une analyse contemporaine et objective du terrorisme en Afrique sub-saharienne, de la situation politique et de ses compromissions, mais avant tout de l’insécurité permanente et de la place des femmes premières victimes du terrorisme et des traditions.

L’écriture est concise, de qualité, les mots sont justes et précis pour décrire ces situations si complexes. Une lecture très intéressante.

Catalogue éditeur : Les Lettres Mouchetées

Tilaine vient de perdre son mari, Isma, tué par les djihadistes alors qu’il est en poste au nord du pays. Résolue à lutter contre la fatalité qui endeuille son pays, Tilaine décide de créer une association pour venir en aide aux femmes victimes du terrorisme. Un jour, elle croise le chemin de Noura, une petite fille qui va bouleverser sa vie.

Le Carrefour des veuves apparaît comme le triangle de la mort de cette région du Sahel où s’entremêlent confusément les conflits communautaires, le fléau djihadiste et l’impuissance des dirigeants de la région et du monde. Monique Ilboudo décrit avec force et lucidité ce monde qui confine à la folie et dans lequel œuvrent sans relâche des héroïnes du quotidien.

Universitaire et femme de lettres burkinabé, Monique Ilboudo est engagée dans la promotion de la citoyenneté des femmes dans son pays. Éloignée un temps de l’écriture, elle a renoué avec sa passion et publié en 2018, Si loin de ma vie aux éd. Le Serpent à Plumes. Carrefour des veuves marque son retour sur la scène littéraire.

Une maison d’éditions basée à Pointe-Noire, au Congo. Paru septembre 2020 / 160 pages

Taqawan, Eric Plamondon

Prise de vue à focale multiple sur la politique du Québec envers ses peuples autochtones

Du côté de la Gaspésie, en ce 11 juin 1981, les policiers ont investi la réserve de Restigouche. Ils s’en prennent violemment aux indiens Micmac qui tentent de se rebeller alors qu’une loi veut leur imposer des quotas de pêche. Il faut rappeler que les indiens Mig’maq sont les Premières Nations du Québec, cette région du Canada où ils vivent désormais cantonnés dans les réserves. Alors qu’ils comptent uniquement sur leur environnement pour survivre, cette nouvelle loi totalement inique veut leur faire abandonner la pêche au saumon qu’ils pratiquent depuis toujours.

Océane disparaît ce jour-là. La jeune indienne vient de subir un viol, mais craint de revenir dans sa tribu. Elle est découverte quelques jours après par Yves, un agent de conservation de la faune. Yves vient de donner sa démission, écœuré par la politique menée par le gouvernement et par la violence gratuite exercée par les policiers ce 11 juin. Il va se faire aider par l’institutrice française en poste dans le coin pour s’occuper d’Océane, même si cela s’avère très risqué lorsqu’il découvre le profil des agresseurs.

Tout au long de cette intrigue noire mais relativement classique, viennent s’intercaler de nombreux autres récits. La vie et la mort du saumon, son parcours migratoire et ses différents noms. L’histoire indienne avec la vie et les origines des Micmac, les discriminations subies pendant des années pour leur faire perdre leur singularité, leurs rites et leurs légendes. Puis la politique du Canada des années 80, avec ce mémorable référendum pour l’indépendance du Québec.

Ce que j’ai aimé ?

Taqawan est un livre passionnant qui avec des airs de ne pas y toucher englobe tant de sujets. Écologie, économie, politique, social, et légendes se mêlent avec une grande justesse non dénuée de profondeur. Le tout donne au lecteur une vue panoramique de l’histoire et de la complexité des effets de la politique du Canada envers ses peuples autochtones. Un livre plaidoyer pour la cause amérindienne qui se lit (ou s’écoute!) d’une traite et se savoure pour ce qu’il est, éclectique, politique, et novateur dans sa construction. A se demander d’ailleurs quel est le texte qui draine l’autre, l’intrigue ou tout le reste ?

J’ai apprécié ces chapitres courts et si différents de l’un à l’autre mais qui bizarrement ne perdent pas le lecteur. François-Eric Gendron donne tout le sérieux nécessaire au roman, à son sujet et à l’intrigue. Et ce, même si sa voix n’est pas toujours convaincante quand elle prend des intonations québécoises qui ne me semblent jamais aussi réussies que lorsque j’écoute mes cousins canadiens.

Pour aller plus loin : Premières Nations est le terme utilisé pour désigner les peuples autochtones du Canada autres que les Métis et les Inuits. Les membres des Premières Nations sont les premiers occupants des territoires qui constituent aujourd’hui le Canada et ce sont les premiers Autochtones à être entrés en contact soutenu avec les Européens. (L’encyclopédie canadienne)

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2021

Catalogue éditeur : Quidam et Audiolib

Un livre audio lu par François-Éric Gendron

« Ici, on a tous du sang indien et quand ce n’est pas dans les veines, c’est sur les mains. »
Le 11 juin 1981, trois cents policiers de la sûreté du Québec débarquent sur la réserve de Restigouche pour s’emparer des filets des Indiens mig’maq. Émeutes, répression et crise d’ampleur : le pays découvre son angle mort.
Une adolescente en révolte disparaît, un agent de la faune démissionne, un vieil Indien sort du bois et une jeune enseignante française découvre l’immensité d’un territoire et toutes ses contradictions. Comme le saumon devenu taqawan remonte la rivière vers son origine, il faut aller à la source…
Histoire de luttes et de pêche, d’amour tout autant que de meurtres et de rêves brisés, Taqawan se nourrit de légendes comme de réalités, du passé et du présent, celui notamment d’un peuple millénaire bafoué dans ses droits.

Né au Québec en 1969, Éric Plamondon a étudié le journalisme à l’université Laval et la littérature à l’UQÀM (Université du Québec à Montréal). Il vit dans la région de Bordeaux depuis 1996 où il a longtemps travaillé dans la communication. Il a publié au Quartanier (Canada) le recueil de nouvelles Donnacona et la trilogie 1984 : Hongrie-Hollywood Express, Mayonnaise et Pomme S, publiée aussi en France aux éditions Phébus. 
Taqawan (Quidam 2018) reçu les éloges tant de la presse que des libraires et obtenu le prix France-Québec 2018 et le prix des chroniqueurs Toulouse Polars du Sud.

Retrouvez ici le blog d’Eric Plamondon

Quidam janv. 2018 /140 x 210mm / ISBN : 978-2-37491-078-9 / 208 pages 20€
Audiolib Date de parution : 14 Octobre 2020 / Durée : 4h08 / Prix public conseillé: 21.90 € / Format: Livre audio 1 CD MP3 Poids (Mo): 569 / EAN Physique: 9791035401245

Le Dit du Vivant, Denis Drummond

Quand une découverte incroyable bouleverse et interroge notre civilisation

La terre a tremblé une fois de plus au japon. Il n’y a pas eu de réplique mais le village d’Atsuma, sur l’île d’Hokkaïdo est entièrement enseveli. La coulée de terrain qui a englouti les villageois a aussi dégagé une nécropole impressionnante et insoupçonnée.

Immédiatement, des scientifiques de tous pays se rendent sur place à la demande des autorités pour examiner la nécropole. Laura, une paléontologiste reconnue de ses pairs, est du voyage. Elle est accompagnée de Tom, son fils autiste, qui a ressenti le cataclysme au plus profond de son être et fait comprendre à sa mère qu’il devait aller sur place avec elle vivre cette incroyable expérience.

Dès qu’une datation est possible, le monde entier est plongé dans l’incrédulité et la stupeur. Il semble bien que les corps et éléments enfouis là bouleversent toutes les connaissances humaines sur l’apparition de l’homme sur terre.

Denis Drummond nous propose une dystopie humaniste, scientifique et riche de questionnements. Comment tourne cette planète que nous détériorons chaque jour un peu plus ? Et si le dernier homme d’une civilisation perdue était là pour nous montrer le chemin ? Six parties constituent ce roman à la structure étonnante, comme les six éléments de l’ADN, proposés de façon répétitive : après une définition viennent Récit, Le journal de Sandra, Chroniques-articles-correspondances, Le Dit de Tom, Le Dit du Vivant.

De nombreux thèmes sont abordés. D’abord la différence, avec Tom, le fils autiste de Laura. Son comportement, l’évolution de sa différence, de sa relation au monde, aux autres, aux bruits et aux événements perturbants qu’il a du mal à accepter mais que peu à peu il réussit à accepter, à intégrer. Une façon de montrer que l’autisme a tellement de facettes et de caractéristiques différentes en fonction de ceux que cela touche.

L’étude paléontologique, la science, la recherche et les conflits autour des découvertes au niveau mondial, avec cet aréopage de scientifiques venus des plus grandes universités ou centres de recherches basés sur les six continents ; et les bagarres de ceux qui ne sont pas inclus dans le sérail des sachant.

L’immuabilité de la civilisation japonaise, à travers en particulier l’exemple de la réparation d’une céramique cassée à laide de poudre d’or pour en faire un autre objet, différent mais ayant toujours autant de valeur, ou encore la façon de reconstruire à l’identique y compris des sites millénaires et de les considérer toujours de la même façon, enfin la magie du travail d’Akira Ito. Cet artiste de la lignée des plus grands maîtres de l’estampe japonaise, d’Hiroshige à Hokusai, qui réalise lui aussi estampes et calligraphies et est considéré par tous comme un dieu vivant.

Le réchauffement climatique, la destructions des espèces d’animaux, de plantes, la raréfaction des ressources, les céréales génétiquement modifiées pour résister à l’appauvrissement en eau et continuer à nourrir les populations toujours plus nombreuses, l’appauvrissement des civilisations et leur destruction à plus ou moins long terme, autant d’éléments abordés ici et qui sont cruellement d’actualité.

Et bien sûr, nous suivons en parallèle le récit du Vivant et le décryptage des nombreuses pièces découvertes dans la nécropole, qui montrent la fragilité des différentes civilisations et la fugacité de l’existence de l’Homme sur terre.

Si ces thèmes sont foison, ce n’est ni fastidieux ni moralisateur. On est dans une posture de questionnement sur le devenir de la planète à travers l’étude des civilisations perdues. Ce kaléidoscope de personnages attachants et singuliers fourmille d’interrogations et de mystère, et donne sa force au récit. J’ai forcément pensé par moments au roman La nuit des temps, de Barjavel.

Vous aimez les dystopies, les romans d’anticipation, les récits qui interrogent, alors le Dit du Vivant est pour vous.

Catalogue éditeur : Le Cherche Midi

Je suis le Vivant. Le dernier d’entre nous. Quand j’aurai terminé mon ouvrage, je quitterai ce monde, laissant une trace secrète dans un repli du temps.

Un séisme au Japon met au jour une vaste sépulture. Sandra Blake, paléogénéticienne, se rend sur les lieux, avec Tom, son petit garçon, autiste.
La datation du site archéologique plonge la communauté internationale dans la stupeur. Une civilisation jusqu’alors inconnue se révèle peu à peu, et met à bas toutes les connaissances acquises. Sandra et l’équipe de recherche qu’elle a constituée sont prises dans un suspense scientifique qui les dépasse…
Construit en six parties, comme une séquence d’ADN – réunissant récits, journaux, chroniques, articles de presse et correspondances –, ce roman-monde est écrit à la manière d’une odyssée.

Denis Drummond, d’origine franco-écossaise, est l’auteur de trois recueils de poésie et de cinq romans. La Vie silencieuse de la guerre (le cherche midi, 2019) a été distingué par le prix Révélation de la Société des gens de lettres.

EAN : 9782749166896 / pages : 288 / format : 140 x 220 mm / prix : 19.00 €

Âme stram gram, Christiane Legris-Desportes

Une comptine populaire pour parler d’amour, de vengeance, d’oubli et de pardon

Alors qu’il reçoit un appel lui annonçant le décès imminent de sa sœur, François comprend qu’il va être enfin libéré de ce poids qui l’oppresse depuis tant d’années. Car après le décès brutal de Marie, le seul véritable amour de sa vie, et parce que selon lui sa sœur en a été l’instigatrice, il a pris ses distances avec la famille, avec sa sœur, ses nièces. Et même l’annonce de ce deuil ne saurait le faire revenir sur sa décision de couper les ponts.

Pourtant, un courrier envoyé peu de temps après par la mère de Marie va bouleverser l’équilibre instable qu’il a instauré pour survivre à la douleur. Et cette révélation vient mettre à mal ses certitudes. Et si le décès de Marie avait une autre origine, et si, et si…

Chaque chapitre alterne les voix de différents personnages, sans jamais les faire interagir, chacun s’adresse à nous à la première personne du singulier pour nous dire le silence, les secrets, les difficultés à écouter et se comprendre, quand chacun, et François en particulier, s’enlise dans son incompréhension jusqu’au point de non retour. Où et comment trouver le pardon quand ceux que l’on a rejeté sont morts, quand le dialogue n’est plus possible. Pourtant, le bonheur, ou du moins une forme de sérénité et de résilience peuvent être au bout du chemin pour qui ouvre enfin son cœur et son esprit au pardon et à l’oubli, même après des années de silence et de ressentiment.

Sous une forme très singulière, ces différents textes, lettres, mails, post-it parlent au lecteur et à lui seul pour lui révéler les moments de vie, d’hésitation, de rancœur, de pardon, de résilience et de rechute face à la complexité des sentiments et des émotions qui surviennent lorsque François comprend qu’il s’est fourvoyé à jamais et n’a aucune possibilité de retour arrière.

Un roman court mais dense, qui est construit avec une précision et une économie de mots qui touchent au cœur par leur justesse et leur vérité. Et si l’on ne devait retenir que ça, Christiane Legris-Desportes nous montre à quel point il faut toujours communiquer, parler, s’ouvrir aux autres, au dialogue, ne jamais s’enliser dans le silence et l’incompréhension… Que l’on peut mettre en œuvre le pardon, la confiance en l’autre et en soi-même, l’écoute et le soutien. Tous ces mots que l’on oublie trop souvent et derrière lesquels il y a des actes et des sentiments si importants. Âme Stram Gram est une véritable leçon de vie.

J’avais lu ce roman une première fois en 2014, je le lis de nouveau avec plaisir dans cette version retravaillée par l’autrice et publiée par Les éditions d’Avallon.

Catalogue éditeur : Les éditions d’Avallon

Lorsque Marie, l’amour de sa vie, meurt dans des circonstances dramatiques, François rompt avec son passé, son milieu, sa famille, et surtout avec sa sœur qu’il tient pour responsable de cette disparition.
Persuadé qu’aucune femme ne pourra jamais remplacer Marie, François se jette à corps perdu dans les études. Il devient écrivain. Marie hante chacun de ses romans.
Un jour, une lettre lui parvient et le plonge dans l’incompréhension. Ses certitudes vacillent. Se serait-il trompé ?

Christiane Legris-Desportes, sémiologue et linguiste, est spécialisée dans l’analyse des tendances sociétales. Elle dirige une collection de sciences humaines et collabore à un magazine culturel. Elle a publié de nombreux articles universitaires et plusieurs essais.
Âme Stram Gram est son premier roman. Il a été, lors de sa première sortie, sélectionné au Salon du Livre et du Premier Roman de Draveil.

142 pages / ISBN : 9782491996277 / Date de parution : 11/02/2021 / 12,00 €