Sa préférée, Sarah Jollien-Fardel

Le roman noir des violences intrafamiliales et de leurs répercutions sur la vie d’adulte

Vivre son enfance sous le joug d’un tyran domestique violent, cela laisse des traces. C’est ce qui est arrivé à Jeanne, la petite dernière d’un famille vivant dans le canton du Valais. Sa mère a enduré les coups, les insultes, d’un époux tyrannique sans jamais chercher à fuir.

Sa sœur aînée a tout subi elle aussi, mais si elle était Sa préférée, nul ne saura vraiment ce qu’elle a vécu, si ce n’est les quelques révélations faites à sa jeune sœur, puis sa disparition, inacceptable pour les femmes de la famille qui s’interrogeront sans fin, incapables de trouver la moindre réponse à leurs questionnements.

Jeanne enfant subit les violences du père, sa brutalité quasi quotidienne envers ses filles et son épouse, qui lui laissent à jamais un goût amer et provoque en elle une antipathie physique envers les hommes. Et qui dit accepter ces violences dans l’intimité du foyer implique souvent une forme de soumission aux autres maltraitances. Celles des garçons du village, de la cour de récréation, petite fille perdue, moquée, frappée, mais toujours en mal d’amour, de signe de sympathie, d’amitié.

Alors Jeanne grandit, quitte le foyer familial, celui de tous les malheurs, de toutes les questions, pour vivre à Lausanne. Elle reviendra très peu dans son Valais natal, seulement pour y retrouver sa mère, son seul refuge. Trouvera une forme de stabilité dans l’amour, la douceur, la compréhension des femmes qui lui ressemblent parfois si peu mais qui l’attirent. Mais toujours reste en elle la douleur initiale, celle de ces violences à la fois physiques et morales qui détruisent les vies à jamais. Car il ne suffit pas de partir pour oublier, difficile de trouver une forme de résilience dans l’oubli et le silence de ce qui a été. Bien sûr, l’apaisement et la douceur sont là, mais les traumatismes du passé aussi, tapis, prêts à ressurgir au moindre moment de faiblesse.

Roman souvent glacial et perturbant lorsqu’il évoque le foyer, cette violence intrafamiliale et les silences, les mots et les gestes du père, ses colères et ses coups, tous les traumatismes de l’enfance. Émouvant aussi, puissant lorsque l’autrice évoque de deuil, l’enfance, les douleurs et les coups. Le silence des voisins, celui du médecin, sont autant de coups portés aux femmes victimes de violences. Et pourtant, j’ai trouvé difficile d’entrer en communion avec Jeanne, de la plaindre ou de la comprendre tant son personnage m’a paru froid, elle en qui la violence du père à fait sourdre une autre forme de violence, celle qui lui est indispensable pour tenir, se défendre, continuer à vivre et à exister. Une fin ouverte qui laisse tout envisager, mais surtout le pire.

Ce roman est lu par Lola Naymark. Sa voix est à la fois douce et forte, hésitante et décidée. A l’image de Jeanne qui se cherche et reste si fortement en colère tant la douleur et les blessures de l’enfance sont prégnantes, toujours vivantes en elle. Si j’ai aimé cette écoute et la voix de la lectrice, la violence qui est en filigrane du roman et qui explose à chaque chapitre le rend parfois difficile à écouter, trop d’émotion, de douleur, de doute. Et pourtant, j’avais l’impression d’être une oreille attentive aux confidences de Jeanne, d’être à ses côtés, mais incapable de l’aider ou de la sauver des réminiscences destructrices de ces violences subies.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2023

Catalogue éditeur : Sabine Wespieser, Audiolib

Lu par Lola Naymark

Dans ce village haut perché des montagnes valaisannes, tout se sait, et personne ne dit rien. Jeanne, la narratrice, apprend tôt à esquiver la brutalité perverse de son père. Un jour, pour une réponse péremptoire prononcée avec l’assurance de ses huit ans, il la tabasse. Convaincue que le médecin du village, appelé à son chevet, va mettre fin au cauchemar, elle est sidérée par son silence.
Dès lors, la haine de son père et le dégoût face à tant de lâcheté vont servir de viatique à Jeanne. À l’École normale d’instituteurs de Sion, puis à Lausanne, la jeune femme, que le moindre bruit fait toujours sursauter, trouve enfin une forme d’apaisement. Le plaisir de nager dans le lac Léman est le seul qu’elle s’accorde.
Habitée par sa rage d’oublier et de vivre, elle se laisse pourtant approcher par un cercle d’êtres bienveillants que sa sauvagerie n’effraie pas, s’essayant même à une vie amoureuse.

Née en 1971, Sarah Jollien-Fardel a grandi dans un village du district d’Hérens, en Valais. Elle a vécu plusieurs années à Lausanne, avant de se réinstaller dans son canton d’origine avec son mari et ses deux fils. Devenue journaliste à plus de trente ans, elle a écrit pour bon nombre de titres. Les lieux qu’elle connaît et chérit sont les points cardinaux de son premier roman.

Sabine Wespieser : Parution : Août 2022 / 20 € / 208 p. / ISBN : 978-2-84805-456-8

Lauréat du Prix du Roman FNAC 2022

Audiolib : Parution : 18/01/2023 / Durée : 4h37 / EAN 9791035412418 Prix du format cd 22,50 € / EAN numérique 9791035412623 Prix du format numérique 20,45 €

Blizzard, Marie Vintgras

Se perdre dans le blizzard pour mieux se retrouver

Dans ce coin perdu de l’Alaska, il fait un froid à ne pas mettre le nez dehors. Pourtant Bess et l’enfant sont sortis dans le blizzard ; une minute d’inattention et Bess a lâché la main de l’enfant de Benedict. Elle part droit devant elle pour tenter de le retrouver avant le retour de Benedict. Bess est une jeune femme un peu paumée qui a débarqué dans ce coin d’hiver avec Benedict, un jeune homme taiseux, bourru, mais cependant très attachant, c’est surtout le père de Thomas.

Chacun des protagonistes révèle une partie de son histoire. Cole et Clifford, les hommes du village qui ont connu Benedict et son frère Thomas enfants ; Benedict qui n’a jamais compris pourquoi Thomas avait quitté sa maison sans espoir de retour ; Bess et ses blessures d’enfance, ses échecs, ses doutes et ses regrets ; Freeman dont personne ne sait pourquoi il a atterri dans ce trou paumé.

Dans le froid et la neige, au cours de cette quête où chacun espère retrouver l’enfant et celle qui l’a laissé partir vivants, la tension monte, des secrets se dévoilent, des liens se nouent, laissant la place à l’imagination, aux souvenirs, aux regrets, aux questionnements. Et les pièces d’un puzzle bien plus sordide qu’il ne paraissait de prime abord se mettent en place, les liens se créent, des secrets sont révélés. Dans ce huis-clos sous un ciel immense, les hommes pris dans le blizzard se retrouvent face à leurs révélations, à leurs pensées, à leurs actes.

Ce que j’ai aimé ?

La façon de présenter les personnages, de les isoler dans cette immensité blanche et glacée qui par ce blizzard devient un huis-clos oppressant, seuls face à eux même. L’écriture et le rythme, les chapitre courts qui donnent la cadence, font monter la tension, et attendre un dénouement digne d’un roman noir américain. Face au drame qui se noue, la disparition d’un enfant, les caractères, les émotions, les sentiments se dévoilent pour le pire comme pour le meilleur.

Un roman qui s’écoute d’une traite, court, cela permet de se mettre au rythme voulu par l’autrice. De nombreux thèmes sont abordés et parfois seulement suggérés par petites touches, mais toujours de façon à être compris par le lecteur en priorité, lui qui a toutes les versions, et donc toutes les clés, pour dénouer l’intrigue.

Blizzard est un roman choral dans lequel les personnages prennent la parole tour à tour. Dans cette version audio, quatre lecteurs tiennent chacun leur rôle, ce qui rend l’écoute particulièrement agréable et facilite la compréhension. Les voix sont adaptées à chacun. J’ai apprécié cette multiplicité de lecteurs. Cela donne vie à chacun, et rend l’écoute vivante et rythmée plus seulement par le blizzard, mais bien par le passé et les pensées de chacun. Cette lecture audio est ma deuxième lecture de ce roman, elle m’a permis de m’immerger encore d’avantage dans la tête de chacun des personnages principaux.

Un seul bémol à mon avis, il m’a semblé qu’il y avait des incohérences et des lacunes sur la connaissance du pays, du climat, de New-York. Mais dans cette version, les voix de chacun ont porté le texte, lui donnant une autre dimension, plus personnelle, plus intime.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2023

On ne manquera pas de lire les avis de Caroline Le murmure des âmes livres , Aude Bouquine , Les lectures de Claudia , Carobouquine

Catalogue éditeur : Audiolib, éditions de L’Olivier

Le blizzard fait rage en Alaska. Au cœur de la tempête, un jeune garçon disparaît.
Il n’aura fallu que quelques secondes, le temps de refaire ses lacets, pour que Bess lâche la main de l’enfant et le perde de vue. Elle se lance à sa recherche, suivie de près par les rares habitants de ce bout du monde. Une course effrénée contre la mort s’engage alors, où la destinée de chacun, face aux éléments, se dévoile.

Un premier roman à quatre voix, prix des Libraires 2022.

Lu par Stéphane Boucher, Alice de Lencquesaing, Patrick Mille, Sébastien Pouderoux

Parution : 10/08/2022 / Durée : 3h28 / EAN 9791035410070 Prix du format cd 19,50 € / EAN numérique 9791035410308 Prix du format numérique 17,45 €

Thelma, Caroline Bouffault

Comment vivre son adolescence lorsque l’on se sent si différent

Thelma est une jeune fille de 15 ans qui pense être bien dans sa peau. Elle écoute chaque jour les conseils, non, les ordres de l’entraîneur pour tenir la ligne qu’elle s’est fixée, ne pas se laisser envahir de disgracieux bourrelets, et toujours courir, éliminer, afin de ne jamais prendre un gramme de trop. Thelma connaît toutes les astuces qui donnent l’illusion qu’elle a pris un peu de poids en particulier lorsqu’elle doit monter sur la balance du docteur. Il suffit parfois de boire des litres d’eau avant la visite hebdomadaire et tout va tellement vite qu’il ne se rendra compte de rien. Une seule obsession, rester en permanence à la limite de la barre fatidique qui pourrait l’envoyer directement à l’hôpital.

Thelma vit dans une famille aisée, parents aimants, petite sœur docile. Chez elle, plus personne ne vit normalement, les parents sont à l’affût, sa petite sœur Billie doit suivre les consignes pour tenter d’endiguer cette vague qui un jour va tous les emporter. Car il est si difficile de vivre auprès du adolescente qui se détruit à petit feu sans que personne ne puisse démêler l’origine de son mal, comprendre son but, ni savoir que faire pour que tout rentre dans l’ordre.

Seules quelques rare personnes la considèrent comme un être normal. Dans ceux-là il y a surtout son amie Violette, mais aussi Justin ou encore le prof de sport remplaçant.

Thelma est une brindille fragile que tous protègent comme si elle était en verre. Aussi lorsque le prof lui propose de s’entraîner pour un marathon, sa vie s’illumine. Est-ce enfin le moyen de faire définitivement taire l’entraîneur ? De rentrer dans le monde des autres, le monde normal ?

Le lecteur suit alors la progression de ce mal insidieux, sans que cela ne le mette jamais dans une position de voyeur. Thelma est forte, intelligente, déterminée, mais son entourage est aussi pugnace qu’elle. L’amitié, le sport, la famille tiennent une vraie place pour tenter d’endiguer cette destruction au quotidien.

J’ai vraiment aimé ce premier roman. Le style direct, la sensibilité, le réalisme qui ne s’apitoie jamais sur le sort de cette jeune femme anorexique qui vit en marge des autres mais cherche sa place. Intelligente, forte, combative, on ne peut qu’avoir envie de l’aider, mais pas de la plaindre, de la soutenir et d’essayer de comprendre l’incompréhensible. Et c’est justement ce qui est bien présenté tout au long du roman, jamais l’autrice ne cherche les origines du mal dont souffre Thelma, comme s’il était impossible de savoir, mais peut-être malgré cela, toujours possible de s’en sortir.

Catalogue éditeur : Fugue

Certains ont des amis imaginaires ; d’autres, des tyrans intérieurs. Celui de Thelma s’appelle l’Entraîneur. Il règne sur son quotidien, lui enjoint de compter les calories et lui impose une discipline de fer. Soumise à sa loi, la lycéenne épuise son entourage et flirte avec l’abîme. Mais avec l’appui de son amie Violette, une issue se dessine : du marathon ou de la séduction de son professeur de sport, quel projet déraisonnable saura la tirer des griffes de l’Entraîneur ?

Combative et lucide, fragile et ironique, Thelma tâche de s’inventer un chemin parmi des adultes aussi désorientés que leurs cadets.

La trajectoire de la jeune fille s’entrechoque à celle de ses proches, et le roman nous plonge tour à tour dans les aléas de la vie de couple, les passions des amitiés adolescentes, les paradoxes des fratries… Avec empathie, justesse et une irrésistible drôlerie, Caroline Bouffault signe avec Thelma une comédie dramatique intergénérationnelle, qui est aussi un premier roman émouvant et solaire.

256 pages / 20,00 € / 978-2-494062-03-0 / paru le 6 janvier 2023

La mémoire de nos rêves, Quentin Charrier

Un roman de vie et de regrets, de souvenirs et de rencontres

Le jour où Simon apprend le décès de Franck, c’est sa jeunesse qui lui revient en mémoire. L’enfance avec ses bons et ses mauvais moments, Simon, Franck, et Clarisse. Et le chassé croisé de leurs rencontres et de leurs séparations pendant toutes ses années.

Aujourd’hui, Simon a trente deux ans et doit aller reconnaître le corps de Franck à la morgue. Un décès tristement solitaire, brutal, banal. Mais impossible de rester indifférent à cette perte ; car même si rien ne les rapprochait au départ, ils étaient amis. Depuis l’école, l’enfance, les quatre-cent coups, les accidents de la vie, les joies et les peines, les échecs pour l’un, la triste banalité du quotidien pour l’autre.

Simon, fils de bonne famille, relativement aisée, et Franck, le demi-gitan un peu voyou sur les bords que la vie n’a décidément pas gâté, et pour compléter le trio, Clarisse qui tente par les études de se sortir de sa condition. Chacun va poursuivre sa route, et leurs trajectoires vont se croiser et se séparer au fil des ans. Bien sûr, des garçons amoureux de Clarisse, bien sûr Clarisse amoureuse mais qui n’ose rien avouer, bien sûr la vie qui en décide autrement.

Mais avec le décès de Franck, Simon retrouve Clarisse et tous les deux embarquent presque par hasard pour un mini roadtrip qui les entraîne vers le passé de Franck, à la rencontre des questions sans réponses de leur propre passé.

J’ai aimé découvrir à la fois le rythme et les protagonistes principaux de ce premier roman. La singularité de chacun des personnages d’abord, leur milieu, leur éducation, leurs aspirations, le poids de la famille et du déterminisme social, difficile de se comprendre lorsque l’on n’est pas « du même monde », tous ces éléments sont plutôt bien mis en scène.

L’auteur n’a pas utilisé de chronologie pour évoquer les événements du passé. Un peu comme si les souvenirs affleuraient au hasard des rencontres, des conversations, des personnages retrouvés. Les révélations permettent peu à peu au lecteur de découvrir la complexité des relations entre chacun. Trois jeunes gens noyés sous les non-dits, empêchés par leurs silences et leur timidité, par leur manque de confiance aussi sans doute. Des destins finalement pas aussi brillants que ce qu’ils avaient imaginé, des rêves loin d’être réalisés, et la banalité du quotidien pour meubler les jours de solitude. La vie, en somme.

Catalogue éditeur : Grasset

Simon, la trentaine, prof en banlieue parisienne, reçoit un appel de la morgue. Franck Aubert est mort, il faut identifier le corps. Vingt ans d’une amitié étrange défilent soudain  : celle qui, depuis l’enfance, l’aura tenu lié à ce gamin frondeur, demi-gitan et orphelin de père devenu délinquant puis caïd. Franck, auquel tout l’opposait, lui, le fils de médecin à l’avenir serein. En même temps que remontent les souvenirs, reviennent les sentiments. Notamment ceux qu’il garde pour Clarisse, son premier amour et ultime pièce de cet impossible trio amical. Les funérailles de Franck lui permettent de la revoir. Ensemble, ils partent dans le centre de la France prévenir la fille et l’ex-compagne de leur ami. Un voyage au cœur de leur mémoire et des rêves qu’ils avaient.

Parution : 11 Janvier 2023 / Pages : 320 / EAN : 9782246832041 prix :22.00€ / EAN numérique: 9782246832058 prix : 15.99€

Garçon au coq noir, Stefanie vor Schulte

Un conte singulier, une dystopie sur le bien et le mal

Dans un monde et une époque qui ne seront jamais cités, Martin est un enfant différent, brillant, intelligent, et doté d’une humanité hors du commun. Il a survécu miraculeusement au massacre de sa famille, et erre dans le village en guenilles, souvent affamé. Il est tellement plus intelligent que tous les villageois qui l’entourent qu’il le craignent tous.

Il vit avec un coq noir toujours fiché sur son épaule, et nul ne sait lequel protège l’autre de l’enfant ou de la volaille. En tout cas chacun soutient l’autre face à la cruauté du monde qui les entoure.

Un jour, un peintre arrive au village. Il est venu répondre à une commande, peindre un retable dans l’église. L’homme et l’enfant se prennent d’amitié. Aussi Martin n’hésite pas une seconde pour emboîter le pas du peintre lorsqu’il quitte le village pour poursuivre son itinérance. Il peint la beauté du monde dans des lieux où elle est pourtant bien cachée.

L’homme et l’enfant déjouent tous les pièges qui s’offrent à eux, méchanceté humaine, bêtes sauvages, froid, épuisement ou famine, rien ne leur sera épargné.

Pourtant, l’enfant qui a été témoin de l’enlèvement d’une petite fille par de sombres cavaliers ne rêve que de venger celle-ci, de la retrouver pour la ramener à sa mère. Ses errances le mènent enfin là où tout commence, là où tout pourrait se terminer. Car Martin est devenu un jeune homme droit, juste, au destin unique et extraordinaire.

Une dystopie qui évoque la méchanceté des hommes, la bonté et la force de certains face à l’adversité. Mais aussi la folie des hommes, la guerre, la famine, les destructions, la force des puissants et leur manque d’humanité. Tout au long de ce roman à l’atmosphère pour le moins originale, les hommes s’affrontent, le mal est partout, mais ce jeune garçon au cœur pur et à la force hors du commun, secondé par son coq saura parvenir à ses fins, envers et contre tous.

Un premier roman à l’écriture à la fois limpide et romanesque, sombre et lumineuse, qui invente des mondes et des époques mais qui pourtant pourraient être notre présent. Le personnages sont atypiques, attachants ou repoussants, et semblent vraiment emblématiques des populations rencontrées par Martin et le peintre.

Catalogue éditeur : Héloïse d’Ormesson

Traduit par Nicolas Véron

Martin, onze ans, n’a qu’une chemise sur le dos et un coq noir sur l’épaule lorsqu’il emboîte le pas d’un peintre itinérant pour fuir le village où, depuis toujours, on se méfie de lui. Aux côtés de cet homme qui ne dessine que le beau, il déjoue les complots, traverse les rivières, se confronte aux loups, à la faim, à l’épuisement. Fort de sa ruse et de la complicité de son ami à plumes, le garçon secourt ceux qui, plus vulnérables encore, se laissent submerger par les ténèbres. Au terme de cette quête, parviendra-t-il à percer le mystère qui se dissimule derrière la légende du cavalier noir, ravisseur d’enfants ?
Grâce à une écriture simple et captivante, Stefanie vor Schulte entoure chacun de ses mots d’une atmosphère saisissante. Brutale et merveilleuse, cette fable gothique ancrée dans un folklore lointain montre à chacun de nous que l’espoir perce partout, même au cœur de la nuit.

Née à Hanovre, en Allemagne, en 1974, Stefanie vor Schulte a étudié le théâtre et la conception de costumes. Garçon au coq noir est son premier roman. Elle a déjà remporté le prix Mara Cassens du meilleur premier roman de l’année en Allemagne, ainsi que le prix du Festival du premier roman de Chambéry.

EAN : 9782350878188 / Nombre de pages : 208 / 19.00 € / Date de parution : 25/08/2022

Laissez-moi vous rejoindre, Amina Damerdji

Cuba, une histoire d’amour, de révolution et de deuil

Grâce à ce premier roman, je découvre une figure féminise emblématique de la révolution cubaine largement passée sous silence à la suite de son suicide jugé contre révolutionnaire par Fidel Castro. En 1980, Haydée Santamaría se souvient de tout. Elle sait déjà que sa vie va s’arrêter là, et revit pour nous les années les plus fortes de sa jeunesse. Son amour pour son frère Abel, pour le grand Boris, pour la révolution et la lutte. Mais aussi l’amitié, les amours, les combats, les deuils.

Ce personnage que l’autrice place adroitement au seuil de sa vie a du coup assez de recul pour nous en parler avec justesse, et pas comme cela aurait pu être avec la fougue de la jeunesse ou dans la violence du feu de l’action. Dans les années 50, les jeunes idéalistes se révoltent contre la dictature de Batista, arrivé au pouvoir en 52 grâce au soutien des américains. Haydée Santamaría est issue d’un famille relativement aisée. Avec son frère Abel, ils prennent part aux réunions, aux meetings qui ont lieu souvent dans leur appartement, au réveil révolutionnaire, et même créer un journal. Si sa participation est d’avantage issue d’une envie d’être comme les autres amis de son frère, de s’intégrer dans sa bande de copains, rapidement le souci d’égalité, la passion révolutionnaire s’emparent d’Haydée.

Viennent les soirées entre amis, le longue discussions, la rencontre avec Boris, la naissance d’un amour, leur relation plus intime, la présentation du fiancé aux parents circonspects.
Viennent surtout les préparatifs de l’attaque de la caserne de la Moncada à Santiago de Cuba, pour lesquels elle a une tache importante à accomplir.
Mais ce 26 juillet 1953 marque d’une pierre noire le destin d’Haydée, lorsque certain hommes sont arrêtés, torturés, exécutés. Boris et Abel seront de ceux-là.

C’est une femme meurtrie, amère, blasée, qui se retourne sur son passé et sa jeunesse au seuil de la mort. Les années ont passé, et malgré la vie qu’elle a eu depuis, les blessures ouvertes en 1953 ne se sont jamais refermées, et occupent toute la place en cette année 1980.

J’ai aimé découvrir ce personnage, retrouver le prémices de la révolution chez ces jeunes combatifs et engagés. Cela m’a donné envie de me plonger à nouveau dans l’histoire de Cuba. Et m’a rappelé avec plaisir ma lecture de Le jour se lève et ce n’est pas le tien, le roman de Frédéric Couderc sur cette même période de l’historie de Cuba.

Un roman de la sélection 2022 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Gallimard

« Je ne peux pas dire que nous ayons pris les armes pour ça. Bien sûr que nous voulions un changement. Mais nous n’avions qu’une silhouette vague sur la rétine. Pas cette dame en manteau rouge, pas une révolution socialiste. C’est seulement après, bien après que, pour moi en tout cas, la silhouette s’est précisée. »
Cuba, juillet 1980. En cette veille de fête nationale, Haydée Santamaría, grande figure de la Révolution, proche de Fidel Castro, plonge dans ses souvenirs. À quelques heures de son suicide, elle raconte sa jeunesse, en particulier les années 1951-1953 qui se sont conclues par l’exécution de son frère Abel, après l’échec de l’attaque de la caserne de la Moncada.
L’histoire d’Haydée nous plonge dans des événements devenus légendaires. Mais ils sont redessinés ici du point de vue d’une femme, passionnément engagée en politique, restée dans l’ombre des hommes charismatiques. Ce premier roman offre le récit intime et pudique d’une grande dame de la révolution cubaine gagnée par la lassitude et le désenchantement, au seuil de l’ultime sacrifice.

320 pages, 140 x 205 mm / Parution : 26-08-2021 / ISBN : 9782072940439 / 20,00 €

Tout doit disparaître, Laurent Maillard

Et si la vie était aussi dans les cimetières

Toussaint, n’est-ce pas un prénom prédestiné pour un gardien de cimetière ? Toussaint a la belle quarantaine d’un homme qui aime son village, sa terre, son cimetière. Car c’est le métier de ce Toussaint là, surveiller, préparer, nettoyer, parler aux morts et leur faire écouter la radio pour qu’ils ne s’ennuient pas trop dans leur si long sommeil.

Un jour arrive dans son cimetière de Charmont une vielle dame prénommée Marguerite. Inconnue au bataillon, et pourtant Marguerite est une enfant du pays, ce pays qu’elle a abandonné plus de soixante ans plus tôt. Peu à peu, Toussaint apprivoise la vieille dame et découvre qu’elle est la fille d’un couple d’armuriers décédés depuis bien longtemps. D’ailleurs leur chapelle mortuaire est quasiment en ruine. Marguerite sait que son heure va bientôt arriver et décide de restaurer la dite chapelle, après tout ce sera sa dernière demeure, autant la faire à son goût.

Le vieux garçon bourru et tendre et la vieille Marguerite solitaire s’apprivoisent peu à peu. Difficile de connaître le secret de la dame, mais les langues se délient, les souvenirs s’égrènent, le malheur est enfin dit, les mots sont posés sur les souffrances qui ont changé une vie. Enfin, quelques secrets gardent encore leur mystère.

Un joli roman d’amitié et d’amour, de vie paisible et calme, dans une France des années 60 plus paysanne que citadine. Si au départ j’ai eu la crainte de lire un fade remarque en plus court de Changer l’eau des fleurs de Valérie Perrin, j’ai rapidement pris plaisir à découvrir la vie de Toussaint et de Marguerite. L’humanité des personnages, leur humour, leur goût pour la vie et l’amitié qui se dessine entre eux à mesure des chapitres les rend particulièrement attachants. Décidément, je n’aurai sans doute plus la même vision des cimetières après cette nouvelle lecture.

Catalogue éditeur : Macha Publishing

Une histoire de cimetière, au cœur d’un village français, paradoxalement pleine de vie et de lumière… 
Toussaint, un quadragénaire solitaire, est le gardien de ce lieu. Il passe ses journées à parler aux absents, à veiller sur les tombes, radio allumée, pour tenir l’au-delà au courant de ce qui se déroule sur Terre. Mais voilà que surgit Marguerite, de retour dans son village après soixante ans d’absence. Elle cherche à retrouver un passé qu’elle a fui toute sa vie. Leur rencontre et l’amitié qui en découle constituent la colonne vertébrale de ce roman. 

Entre drames, rancœurs et petits secrets, Toussaint se voit contraint de sortir de sa réserve et de son cimetière si protecteur. 
Qui est Marguerite ? Et en quoi cela le concerne-t-il, lui ? 

Laurent Maillard est né en 1964 à Longwy, au cœur de la Lorraine sidérurgique. Il est aujourd’hui consultant en communication éditoriale. À travers les mots, et non le dessin, il se plaît à « croquer » les passants qu’il croise dans sa vie quotidienne, leur inventant, le temps d’un trajet en train, une vie de quelques lignes… Tout doit disparaître est son premier roman.

Paru le 22 mars 2022 / ISBN: 978-2-37437-406-2 / 220 pages

Trois sœurs, Laura Poggioli

Passionnant, émouvant, et si tristement instructif

Elles sont trois, elles ont de 17 à 19 ans, elles sont sœurs, ce sont les filles de Mikhaïl Khatchatourian. Lorsque la police arrive, Krestina, Angelina et Maria se tiennent près du cadavre de leur père sur le palier qui mène à leur appartement. Accident ou assassinat, aucun doute n’est permis puisqu’elles expliquent rapidement les événements qui ont précédé le décès du bourreau.

Lorsque leur mère Aurelia rencontre Mikaël elle a 17 ans à peine. Plus âgé, plus affirmé, sûr de lui et de son pouvoir d’homme, mais déjà violent, celui qui la viole dans les toilettes du bar où ils se rencontrent sera le père de ses quatre enfants. Un fils et trois filles plus tard, celle qui subit quotidiennement des violences physiques et psychologiques de cet homme à qui personne ne résiste doit quitter le foyer. C’est une question de vie ou de mort.

A compter de ce jour, et même si c’était déjà le cas avant, Krestina, Angelina et Maria sont à la merci de Mikhaïl. Violence, tortures psychologiques, privations, viols, tout lui est permis, puisque ce sont ses filles, elles lui appartiennent. Et la famille paternelle entre dans le jeu pervers des violences et du silence. Et même si des déclarations ont été faites auprès des autorités ou de la police, en Russie ce qu’il se passe dans la famille doit rester secret et se régler en famille. Personne jamais ne prendra soin de ces trois jeunes femmes. Quand on sait qu’une loi a été promulguée qui permet d’arrêter et de punir toute femme qui se plaindrait de violence intra-familliale on peut s’interroger sur la valeur de la vie d’une femme ou d’une fille dans ce pays.

Laura Poggioli alterne le récit de ce drame familial avec sa propre expérience. Amoureuse de la Russie, elle y a passé de nombreuses années. Étudiante étrangère, elle y a rencontré Mitia. Amoureux prévenant et attentionné au début de leur relation, il est rapidement devenu violent, exerçant sur elle un harcèlement destructeur auquel elle s’est soumise pendant des années.

C’est cette réflexion sur sa propre soumission et l’acceptation de ces relations qui émaille le récit autour des trois sœurs. Un peu trop car on s’y perd parfois, mais le récit est passionnant en particulier en ce qu’il nous présente la condition des femmes en Russie et le plein pouvoir accordé aux hommes sans condition par l’état complice, en vertu sans doute du sacro-saint proverbe russe « S’il te bat c’est qu’il t’aime ».

J’ai lu ce roman d’une traite, impossible à lâcher malgré quelques défauts, cette introspection un peu trop prégnante parfois, comme si l’autrice avait hésité entre deux récits, le personnel et intime et le public avec les trois sœurs. Un formidable premier roman que je vous conseille sans hésiter.

Catalogue éditeur : L’Iconoclaste

Assises côte à côte dans l’entrée d’un appartement moscovite, trois jeunes filles, âgées de dix-sept, dix-huit et dix-neuf ans, attendent l’arrivée de la police, à quelques mètres du corps inerte de leur père, Mikhaïl Khatchatourian. Depuis des années, il s’en prenait à elles, les insultait, les frappait, nuit et jour. « S’il te bat, c’est qu’il t’aime », dit un proverbe russe. Alors, en juillet 2018, les trois sœurs l’ont tué. Une vague d’indignation inédite déferle, les médias s’enflamment.

Les visages insouciants des trois gamines, dissimulant les supplices endurés pendant des années, questionnent l’autrice. Elle se souvient de sa jeunesse moscovite où elle rencontra Marina, son amie la plus chère, et Mitia, son amour. Il lui donnait parfois des coups, mais elle pensait que c’était peut-être aussi de sa faute. Laura Poggioli reconstitue la vie de ces trois sœurs, et son histoire personnelle ressurgit.

320 pages / 20,00 € / EAN 9782378803018 / paru le 18/08/2022

Les gens de Bilbao naissent où ils veulent, Maria Larrea

Une histoire de vie et d’amour, où tout est inventé, où tout est vrai

À Bilbao en 1943 naît Julian, hijo de puta au vrai sens de l’expression, mais hijo abandonné par cette mère qui l’a enfanté sans désir. C’est à l’orphelinat chez les jésuites qu’il va vivre désormais. En Galice naît Victoria, déposée à l’orphelinat d’un couvent de bonnes sœurs par Dolorès, cette mère qui ne veut pas de sa fille mais ne l’abandonne pas vraiment. Elle ne sera jamais adoptée et sera « récupérée » à dix ans par une mère ingrate et peu ou pas aimante. Les enfants peuvent travailler et faire vivre certains parents, c’est cette vie là qui est désormais dévolue à Victoria.

Un jour, le destin fait se rencontrer ces deux orphelins. Amoureux, ils se marient, quittent Bilbao et partent vivre à Paris.

Julian est concierge au théâtre de la Michodière. Passionné et excessif, l’alcool est son meilleur ami, même s’il rencontre et devient l’ami de tous ces grands noms qui fréquentent le théâtre.
Victoria ne sait ni lire ni écrire, on se demande bien qui aurait bien pu lui apprendre entre l’orphelinat et une mère aussi peu mère, aussi peu attentive et si peu aimante. Elle sera femme de ménage et secondera son mari concierge.

L’amour entre ces deux là est une réalité, mais il leur est si difficile d’avoir un enfant. Heureusement dans ces années 70 a Bilbao des gynécologues peuvent aider les femmes infertiles à avoir des enfants. Cela s’est pratiqué au bon temps du franquisme pour de bien mauvaises raisons, cela se pratique encore en ces années là pour d’aussi obscures raisons, l’appât du gain en particulier.

C’est dans ces conditions que naît Maria, mais elle ne le sait pas encore. La jeune femme a toujours senti une sorte de flou autour de sa naissance sans en comprendre la raison, la future naissance de son premier enfant et la rencontre avec une cartomancienne vont déclencher une quête de quatorze longues années pour découvrir d’où elle vient.

Une quête longue et éprouvante, non pas pour connaître ses parents biologiques, mais plutôt la genèse de sa vie, l’histoire avant la naissance, le pourquoi et le comment de ce qui a permis qu’elle vienne au monde.

Un roman incroyable, dans lequel comme disait Boris Vian, « tout est vrai puisque je l’ai écrit » . Mais ici, tout est romancé, et tout est vrai. Je ne veux pas vous en dire plus si ce n’est lisez-le !

La rencontre avec l’autrice à Manosque puis à la librairie Tonnet de Pau m’a donné un bel éclairage sur la genèse du roman, mais il n’est pas besoin de trop en savoir pour lire avec bonheur et intérêt ce magnifique premier roman.

Un roman de la sélection 2023 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Grasset

L’histoire commence en Espagne, par deux naissances et deux abandons. En juin 1943, une prostituée obèse de Bilbao donne vie à un garçon qu’elle confie aux jésuites. Un peu plus tard, en Galice, une femme accouche d’une fille et la laisse aux sœurs d’un couvent. Elle revient la chercher dix ans après. L’enfant est belle comme le diable, jamais elle ne l’aimera.
Le garçon, c’est Julian. La fille, Victoria. Ce sont le père et la mère de Maria, notre narratrice.
Dans la première partie du roman, celle-ci déroule en parallèle l’enfance de ses parents et la sienne. Dans un montage serré champ contre champ, elle fait défiler les scènes et les années : Victoria et ses dix frères et sœurs, l’équipe de foot du malheur  ; Julian fuyant l’orphelinat pour s’embarquer en mer. Puis leur rencontre, leur amour et leur départ vers la France. La galicienne y sera femme de ménage, le fils de pute, gardien du théâtre de la Michodière. Maria grandit là, parmi les acteurs, les décors, les armes à feu de son père, basque et révolutionnaire, buveur souvent violent, les silences de sa mère et les moqueries de ses amies. Mais la fille d’immigrés coude son destin. Elle devient réalisatrice, tombe amoureuse, fonde un foyer, s’extirpe de ses origines. Jusqu’à ce que le sort l’y ramène brutalement. A vingt-sept ans, une tarologue prétend qu’elle ne serait pas la fille de ses parents. Pour trouver la vérité, il lui faudra retourner à Bilbao, la ville où elle est née. C’est la seconde partie du livre, où se révèle le versant secret de la vie des protagonistes au fil de l’enquête de la narratrice.  

Pages : 224 / EAN : 9782246831969 prix : 20.00€ / EAN numérique: 9782246831976 prix :

14.99€ Parution : 17 Août 2022

Patte blanche, Kinga Wyrzykowska

Manipulation et survie, ou l’aventure extra-ordinaire d’un famille ordinaire

Si les Simart-Duteil ont marqué notre esprit, c’est parce que cette famille est une caricature de la famille typiquement française vivant dans une maison bourgeoise. Elle cristallise à la fois nos ambitions et nos rêves. Et pourtant, si nous savions ce qui se cache derrière le vernis.

Chez les Simart-Duteil il y a Claude le patriarche, disparu depuis peu victime d’un cancer. Ce bâtisseur non pas de cathédrale mais d’autoroute, en particulier au Moyen Orient, a su mener sa famille à la baguette ; Isabella la mère, italienne belle et racée sur le retour ; Paul, Clotilde et Samuel, la fratrie pas toujours aussi solidaire qu’elle le laisse à penser. Mais à la disparition du patriarche, un frère inconnu vient se manifester et réclamer sa place.

Cet étrange courrier arrive dans les boites mails de chacun, faisant planer une ombre malveillante sur la famille. Issu d’un mariage illégal en Syrie, il veut connaître ses frères et sa sœur. Tant qu’il vit en Syrie, tout va bien. Mais si les routes sont dangereuses et souvent mortelles pour les migrants, le chemin vers une famille parisienne aisée est bien tentant.

Commence alors de la part de Paul un véritable travail pour souder la famille contre l’intrus. Paul qui avait été rejeté par tous du fait de son homosexualité avouée lorsqu’il était plus jeune cherche aujourd’hui à reprendre sa place d’aîné. Il devient l’unique conseiller et le soutient de la famille. C’est ainsi que chacun des membres de la famille va se terrer pendant des mois, loin de l’intrus, dans une résidence secondaire en Normandie.

Questionnements sur l’immigration, sur notre façon d’accueillir l’autre, celui que l’on ne connaît pas, mais aussi sur les attentats de 2015 et la façon dont ils ont transformé la société française. Enfin, sur les relations parfois délétères des familles, le pouvoir de la séduction, de la manipulation, la jalousie, le pouvoir, le doute, les craintes, l’aplomb et l’assurance de certains et cette capacité à convaincre envers et contre toute logique.

Intriguant et perturbant, voilà un roman qui se lit jusqu’au bout avec circonspection, puis à la fin avec comme une envie de tout reprendre depuis le début avec un nouvel éclairage projeté sur les membres de cette famille pour le moins déjantée.

Inspiré d’un fait divers réel, mais posé ici de façon intelligente et tout à fait singulière, Kinga Wyrzykowska sait nous tenir en haleine et nous faire douter. Un excellent premier roman, et une autrice que l’on a immédiatement envie de suivre.

Alors, et vous, l’avez vous déjà lu ? Intriguant à souhait, qu’en pensez-vous ?

Un roman de la sélection 2023 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Seuil

Les Simart-Duteil ont marqué votre enfance. Leur nom si français, leur maison flanquée d’une tourelle – comme dans les contes –, leur allure bon chic bon genre ont imprimé sur le papier glacé de votre mémoire l’image d’une famille parfaite.
Un jour, pourtant, vous les retrouvez à la page des faits divers, reclus dans un manoir normand aux volets fermés. Les souvenirs remontent et, par écran interposé, vous plongez dans la généalogie d’un huis clos.
Paul, Clothilde, Samuel ont été des enfants rois. Leur père, magnat des autoroutes au Moyen-Orient, leur mère, Italienne flamboyante, leur ont tout donné. Quand un frère caché écrit de Syrie pour réclamer sa part de l’héritage, la façade se lézarde. Les failles intimes se réveillent.
Paul, dont la notoriété d’influenceur politique commence à exploser, décide de prendre en main le salut de son clan. Une lutte pour la survie de la cellule familiale se met en branle. Et l’« étranger » a beau montrer patte blanche… il n’est pas le bienvenu. Lire la suite….

Date de parution 19/08/2022 / 20.00 € / 320 pages / EAN 9782021514087