Le cas Victor Sommer, Vincent Delareux

Journal d’une émancipation inquiétante

Victor Sommer a trente-trois ans, l’age du christ. Sa mère a soixante-six ans. C’est son seul univers, sa vie, son horizon. Après lui avoir permis de faire des études, cette femme a réussi le prodige, enfin, plutôt le maléfice de soumettre son fils à sa seule volonté. C’est l’archétype de la mère possessive, exigeante, autoritaire, elle exige sa présence au quotidien, heure par heure, avec elle, et en échange lui offre le gîte, le couvert, et des émoluments qui suffisent à combler ce semblant de vie qu’elle lui autorise.

Elle prend soin de son fils qu’elle couve, embrasse, enlace, au delà du raisonnable. Elle lui a même trouvé un psy chez qui il peut aller exposer ses états d’âme une fois par semaine. Mais en dehors du psy et du marchand de journaux chez qui il va docilement chaque matin acheter le journal pour sa mère, sa vie est solitaire et soumise.

Une seule fois, lors d’un anniversaire, elle lui a montré une vieille photo de celui qui devait être son père. Mais n’a jamais plus évoqué ce géniteur totalement inconnu du fils.

À chacun de ses anniversaires elle ne souhaite qu’un seul et unique cadeau, une photo encadrée de son fils, qu’ils accrochent quasi religieusement au mur de la chambre maternelle. Et aujourd’hui, ce dernier anniversaire ne fait pas exception à cette règle immuable.

Pourtant c’est précisément ce jour là que Victor montre des velléités de vouloir travailler à l’extérieur, de voir le monde, de s’émanciper de cette mère trop possessive, de rencontrer une femme. Et Vincent ose braver l’interdit. Dès lors, le monde de sa mère s’écroule et celle-ci disparaît.

Punition, disparition inquiétante, le lecteur va devoir attendre et pour comprendre, tenter de soulever le voile de quelques scènes pour le moins étranges. Mais Victor souffre de cette incertitude, de cette solitude, de cette incompréhension. Victor, ce jeune homme ni vraiment sympathique ni tout à fait antipathique. Victor et ses inquiétudes, sa solitude, ses velléités de vivre enfin, mais sa peur de décevoir cette mère aussi possessive que castratrice.

Je me suis laissée embarquer dans ce roman à côtoyer un Victor aussi étrange que paumé, au caractère particulier ni vraiment attachant, ni vraiment détestable que l’on a envie de sauver de cette prison affective. Puis à comprendre sans vouloir le découvrir trop vite ce qu’il a bien pu se passer tout en ayant envie de voir où cette relation toxique entre une mère et son fils pouvait les mener. J’ai aimé l’écriture et le style de Vincent Delareux, et cette façon singulière d’envisager le désir d’enfant, le besoin et sa signification pour une mère ou un individu quel qu’il soit. Pourquoi fait-on des enfants, pour eux ou pour soi ?

Roman lu dans le cadre de ma participation au jury du Prix littéraire de la Vocation 2022

Catalogue éditeur : L’Archipel

À 33 ans, Victor Sommer mène une vie monotone qui lui pèse. Secrètement, il aspire à devenir quelqu’un. Une ambition entravée par sa mère, infirme autoritaire et possessive qui l’empêche de prendre son envol.
Le jour où celle-ci disparaît de façon mystérieuse, Victor est confronté à un monde qu’il n’a jamais appris à connaître…

Après des études littéraires à Paris, Vincent Delareux s’installe en Normandie et commence à écrire. À 25 ans, il signe Le Cas Victor Sommer, premier roman d’une série où les tourments de l’âme côtoient les secrets de famille.

EAN : 9782809844177 / Nombre de pages : 208 / 18.00 € / Date de parution : 25/05/2022

On pourrait croire que ce sont des larmes, Eric Genetet

Après les années de silence, la rencontre d’un fils et de sa mère, émotion garantie

Lorsque Genio Tardelly, le voisin de Louise, averti Julien que sa mère à disparu, il n’a d’autre choix que de venir le retrouver. Portant, voilà trente cinq ans qu’il n’est pas revenu à Argelès-sur-mer, la station balnéaire où sa mère a posé ses valises lorsqu’elle a enfin accepté de prendre sa retraite.

Tout au long du voyage, les souvenirs l’assaillent, ces trajets qu’ils refaisaient chaque année pour passer les grandes vacances en bord de mer. Louise, sa mère, une femme très amoureuse de son mari, une comédienne qui a attendu toute sa vie le rôle qui allait faire démarrer sa carrière. Serge, son père, un bel homme très secret qui a disparu un jour de l’été 1986 pour ne jamais revenir.

Julien est photographe. Après s’être essayé aux paysages pendant des journées et des nuits, parcourant l’Europe au volant de la vieille Mercedes de son père, il a compris que ce qui l’anime, c’est sa relation aux autres, son regard posé sur eux, que son point fort c’est les portraits.

La relation entre la mère et le fils n’a jamais été facile et s’est détériorée depuis des années. Car Julien en veut à Louise, la seule responsable à ses yeux du départ du père. Et donc la seul responsable de ses échecs amoureux, de son instabilité, de son inadaptation au monde qui l’entoure.

Mais le retour vers Argelès-sur-mer s’avère être aussi un retour vers les années d’enfance, vers la relation qui l’unit à sa mère, vers le manque du père. Car ils parlent, elle l’écoute, elle a enfin envie de lui dire tant de choses, mais elle se tait…

Il y a des familles qui portent des mystères trop lourds pour s’aimer.

Ce que j’ai aimé ?

Le style de l’auteur, cette simplicité apparente de l’écriture, toute en émotion, en silences et en non-dits qui pourtant parlent au lecteur. Entendre les regrets et les silences d’une mère et de son fils qui auraient tant à se dire pour se comprendre. Ces silences que l’on s’impose alors qu’il faudrait parler, ces rancœurs que l’on refuse d’éteindre, les souvenirs que l’on a transformé pour qu’ils ne fassent plus souffrir, le passé que l’on modifie comme on s’arrange parfois avec la vie.

L’absence d’un père, violente, incompréhensible, sur laquelle il faut construire sa vie. Le silence de la mère, comme un refuge à sa douleur, mais dressé comme une palissade face aux questions et aux attentes d’un fils. Cette mère qui écrit pour se retrouver, pour dire son manque à elle, pour dire l’amour absent et celui jamais exprimé, pour dire la peine, la solitude. Les mots posés sur le papier en exutoire à la douleur, comme un point final. Et ce fils qui doit se construire seul, dans l’indifférence et l’absence d’amour maternel, sur le manque.

Beaucoup d’humanité et d’amour entourent chacun de ces personnages. Le roman est court, mais d’une densité telle que l’émotion est là, vibrante, touchante.

Catalogue éditeur : Héloïse d’Ormesson

Julien doit prendre la route pour Argelès-sur-Mer. Cela fait près de trente ans qu’il n’y est plus retourné. C’est là-bas, sur la plage, qu’il a abandonné son innocence, ses souvenirs d’une enfance heureuse et celui du visage de son père. C’est aussi là-bas que s’est installée sa mère, Louise, depuis plusieurs mois. Elle qui s’était promis de ne plus y remettre les pieds non plus. Ce trajet qui le ramène vers son passé, Julien n’a d’autre choix que de l’emprunter : sa mère a disparu. Du moins l’a-t-il cru, car elle est bien dans son appartement lorsqu’il arrive. À quoi joue-t-elle ? Louise veut lui parler. Elle doit lui parler. Mais après tant de silence, y a-t-il encore quelque chose à renouer ?

À travers le portrait de cet homme en route vers son passé, Éric Genetet raconte les silences infranchissables et les blessures vives de l’enfance. Mais au bout du voyage, la lumière inonde la plage entre les larmes et ouvre la voie de la renaissance. L’avenir est toujours à construire.

Né en 1967, Éric Genetet vit entre Strasbourg et Paris. Journaliste, il a travaillé dix ans dans le monde de la radio (notamment pour France Bleu Alsace). Il est l’auteur de plusieurs romans dont Le Fiancé de la lune, sélection Talents Cultura 2008, Tomber (2016), lauréat du prix Folire (Thuir, Pyrénées-Orientales), et Un bonheur sans pitié (2019).

EAN : 9782350877877 / Nombre de pages : 160 / 16.00 € / Date de parution : 27/01/2022

Les cœurs inquiets, Lucie Paye

Un beau roman qui déborde d’amour et d’espoir

Lui, artiste peintre qui excelle dans les paysages sans aucun personnage, a quitté l’île Maurice pour Paris. Son galeriste envisage une nouvelle expo en septembre, mais est-il capable de répondre à cette exigence.
Son inspiration du moment ? Une femme, pas un modèle, pas une amoureuse, pas une voisine, mais une femme surgie des limbes de son imaginaire sans qu’il arrive à comprendre l’urgence qui s’est emparée de lui.

Elle, on le comprend vite, est malade. Elle saisi les moments de sérénité et de lucidité qu’il lui reste pour écrire à l’amour de sa vie qui a disparu depuis si longtemps.
Qui est-il cet homme qu’elle a cherché pendant tant d’années, que veut-elle de lui, et pourquoi a-t-il disparu ?

Lui et elle, vont-ils être deux destins parallèles ou leurs trajectoires vont-elles se croiser un jour ?

Ce que j’ai aimé ?

L’auteur nous propose des tranches de vie qui émeuvent et bouleversent, mais qui en même temps nous procurent un sentiment de sérénité.
Ces lettres qui débordent d’amour, de regrets, mais qui sont tellement positives et généreuses envers celui qui devrait les recevoir. L’amour d’une mère, absolu et définitif.
Les secrets de famille et les silences qui détruisent inexorablement ceux qui les acceptent.
Cet homme qui trouve une inspiration dans une femme inconnue qui le bouleverse sans qu’il en connaisse la raison. La force de amour filial suggérée ainsi.
Cet amour de l’art et de la peinture qu’ils ont en commun, cette façon qu’à l’auteur de distiller la beauté des œuvres et de nous en faire apprécier le beauté et à parfois le sens.

Un premier roman particulièrement réussi que l’on n’arrive pas à lâcher avant la fin.

Un roman de la sélection 2021 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Gallimard

«J’ai lutté, pour te retrouver, de toutes mes forces. L’espoir m’a fait vivre. Mille fois je me suis levée convaincue que ce serait aujourd’hui. Mille fois mon cœur a bondi en croyant t’apercevoir. Mille fois je me suis couchée en voulant croire que ce serait demain. Le jour où je te reverrais.»

Un jeune peintre voit apparaître sur ses toiles un visage étrangement familier. Ailleurs, une femme écrit une ultime lettre à son amour perdu. Ils ont en commun l’absence qui hante le quotidien, la compagnie tenace des fantômes du passé. Au fil d’un jeu de miroirs subtil, leurs quêtes vont se rejoindre.
Ce roman parle d’amour inconditionnel et d’exigence de vérité. De sa plume singulière, à la fois vive, limpide et poétique, Lucie Paye nous entraîne dès les premières pages vers une énigme poignante.

Parution : 05-03-2020 / 52 pages, 140 x 205 mm / ISBN : 9782072847301 / 16,00 €

Comme des bêtes Violaine Bérot

Au pays des fées et des Ours, un roman émouvant et fort qui bouleverse nos certitudes

Mariette et son fils vivent dans la montagne, à l’orée du village. Un fils sans père, vite surnommé l’Ours par les enfants du village. Puisque dans ce coin reculé de montagne, c’est bien connu, les enfants sans père sont les enfants de l’ours. S’il est allé un temps à l’école, l’Ours n’a jamais réussi à s’intégrer ni à s’habituer aux contraintes. Lui qui ne s’exprime que par gestes ou grognements a besoin de l’espace et de la sérénité de la nature et des animaux pour vivre.

La mère et ce fils que d’aucuns trouvent différent, vivent en paix depuis des années près du village, au flanc de cette montagne sauvage et isolée. Jusqu’au jour où un randonneur plus curieux que les autres dénonce ce qu’il a découvert, et qui jusqu’alors ne faisait de mal à personne, une enfant qui vit nue dans la montagne, auprès d’un âne et de l’Ours. .

Le lecteur entre dans leur histoire à travers les interrogatoires de divers villageois, l’institutrice, le facteur, la pharmacienne, un voisin, Luc le coureur, et quelques autres. Mais aussi Mariette qui tente de faire comprendre à cette maréchaussée obtuse et bornée que les différences et un handicap ne sont pas forcément synonymes de dangerosité. Que son fils est un homme bon qui a eu peur du déploiement de force de ceux qui sont venus l’arrêter, qu’il ne peut pas s’exprimer ni comprendre. Mais surtout, tente de montrer que l’on peut accepter les différences, que le bonheur et la justice ne sont pas toujours où on croit.

Violaine Bérot nous propose là un roman choral subtil, qui déroule peu à peu une intrigue forte en émotion. La différence, le handicap, le viol, les peurs enfantines, les croyances, les fées protectrices, chaque élément qui compose cette intrigue apparaît peu à peu, le mystère se dévoile et nous montre qu’il faut ouvrir son cœur à l’autre pour l’accepter tel qu’il est.

J’ai aimé cette écriture et cette façon si poétique et en même temps si sobre de dire la douleur, la différence. Mais aussi de mettre en avant notre manière d’appréhender ces autres que l’on veut tellement conformes à nos idées, notre cadre de référence, notre propre façon de vivre et de penser. Comme des bêtes, un titre à double sens particulièrement bien trouvé. Car ici on peut se demander qui sont les bêtes, qui juge qui, et de quel droit ?

Du même auteur j’avais déjà apprécié le roman Nue, sous la lune et cette façon bien à elle appréhender de vrais sujets de société avec force et en si peu de pages.

Lire également la chronique de Joëlle du blog Les livres de Joëlle.

Catalogue éditeur : Buchet-Chastel

La montagne. Un village isolé. Dans les parois rocheuses qui le surplombent, se trouve une grotte appelée ’la grotte aux fées’. On dit que, jadis, les fées y cachaient les bébés qu’elles volaient.

A l’écart des autres habitations, Mariette et son fils ont construit leur vie, il y a des années. Ce fils, étonnante force de la nature, n’a jamais prononcé un seul mot. S’il éprouve une peur viscérale des hommes, il possède un véritable don avec les bêtes.

En marge du village, chacun mène sa vie librement jusqu’au jour où, au cours d’une randonnée dans ce pays perdu, un touriste découvre une petite fille nue. Cette rencontre va bouleverser la vie de tous…

Violaine Bérot, dans ce nouveau roman à l’écriture poétique, décrit une autre vie possible, loin des dérives toujours plus hygiénistes et sécuritaires de notre société. Un retour à la nature qu’elle-même expérimente depuis vingt ans dans la montagne pyrénéenne

Retrouvez également le blog de Violaine Berot

Parution : 01/04/2021 / Format : 13 x 19 cm, 160 p., / 14,00 EUR € / ISBN 9782283034873

Rosa Dolorosa, Caroline Dorka-Fenech

L’amour d’une mère, aveuglant et inconditionnel

Ils se promènent dans le vieux Nice. Rosa et Lino, la mère et le fils, sont inséparables depuis toujours. Surtout depuis qu’elle a chassé le père. Elle veille comme une louve sur sa merveille. Même si parfois Lino se perd dans l’alcool des nuits entières et a quelques accès de violence.

Ensemble, ils ont un rêve. Quitter le restaurant Le petit soleil et rénover un hôtel dans le quartier. Les plans sont faits, ne manquent que les financements. Avec l’aide de Marc, son ami de cœur, et grâce à son dynamisme et sa fougue Rosa séduit les investisseurs potentiels. Le rêve est enfin à leur portée. Lino le plongeur amoureux de la mer sait déjà qu’il installera dans le hall de leur hôtel trois-étoiles un immense aquarium rempli de méduses.

Mais c’est sans compter sur un événement dramatique, une mort inexplicable et l’arrestation au petit matin de Lino, le fils chéri.

Cette mère passionnée le sait, son fils est innocent ; alors elle doit tout faire pour le faire sortir de prison. La bataille ne fait que commencer pour cette mère inquiète et malade, mais surtout combative et pugnace. Rien ne peut l’arrêter. Pas même les doutes, les questionnements de son entourage, les affirmations des enquêteurs.

L’auteur déroule ici un scénario aussi plausible que tragique. C’est un étonnant questionnement sur le vrai rôle d’une mère, sur la connaissance que les parents ont de leurs enfants, sur le silence et l’éducation, la confiance et le partage, l’amour maternel incandescent et aveuglant. L’obstination d’une mère, ses sentiments les plus profonds, son assurance et son jusque-boutisme sont maîtrisés, pesés et réalistes jusque dans leur folle concrétisation.

L’amour absolu, la confiance, le désespoir dont elle fait preuve prennent le lecteur dans leurs filets pour l’amener vers un dénouement aussi dramatique qu’inéluctable. Un roman bouleversant que l’on ne lâche pas avant d’avoir tourné la dernière page.

Catalogue éditeur : éditions de La Martinière

Un premier roman magnétique, sombre et lumineux, dont l’héroïne rappelle la Gloria de John Cassavetes et la Mamma Roma de Pasolini. Nourri d’images organiques, charnelles, poétiques, ce livre retrace le parcours d’une mater dolorosa prise dans une quête obsédante et dévorante pour prouver l’innocence de son fils.

« Elles étaient au nombre de douze. Douze méduses qui plongèrent parmi les bulles éclairées au néon dans l’aquarium. Leurs tentacules flottant comme des fourreaux de fantômes. »

Dans les rues serpentines du Vieux-Nice, Rosa déambule au bras de son fils, Lino. Ensemble ils rêvent de posséder un hôtel dans lequel un immense aquarium accueillerait des méduses. À peine dix-neuf ans d’écart, ils forment un duo inséparable. Jusqu’au jour où Lino est arrêté et emprisonné pour le meurtre d’un enfant.
Pour Rosa, l’innocence de son fils est incontestable. Dans un ballet d’images charnelles, poétiques, la mater dolorosa se lance dans une quête sublime et dévorante. Mais jusqu’où l’amour maternel peut-il conduire ?

Née en 1975, Caroline Dorka-Fenech, diplômée de lettres modernes et de l’Atelier scénario de la FEMIS, a travaillé comme lectrice de scénarios, script doctor et enseignante. Rosa dolorosa, son premier roman, est le fruit d’un travail de dix ans.

27 août 2020 / 130 x 205 mm / 288 pages / ISBN : 9782732494258

Vanda, Marion Brunet

Vanda, un roman qui happe ses lecteurs. Un drame contemporain au pays de l’amour fou

On y découvre l’amour absolu et possessif d’une mère pour son fils de six ans, son petit bulot qu’elle couve comme une louve.

A Marseille, Vanda subsiste en faisant le ménage à l’hôpital psychiatrique, avec un contrat précaire. Celle qui a eu plus jeune des rêves d’artiste vit aujourd’hui en marge de la société dans un cabanon sur la plage. Cette jeune femme aux tatouages fleuris élève tant bien que mal, mais avec une énorme tendresse, l’amour de sa vie, sa passion, son fils Noé. Bien sûr dans la vie de Vanda il y a aussi les sorties, un peu d’alcool, les hommes de temps en temps et un peu de drogue, mais surtout une grande précarité.

Jusqu’au jour où Simon revient au pays pour l’enterrement de sa mère. Simon qu’elle avait quitté sept ans plus tôt et qui découvre ce fils dont il ne soupçonnait même pas l’existence. Aujourd’hui, Simon est en couple avec Chloé, et justement, cette dernière ne veut pas d’enfant, malgré les tentatives de Simon. Alors ce petit tombé du ciel est un miracle pour ce le papa tout neuf se sent une âme de protecteur, de papa poule. Au grand dam de Vanda la louve, fusionnelle avec son bébé, son petit bulot, qu’elle abrite dans le creux ses bras, sur son cœur, et qu’elle ne laisserait partir pour rien au monde.

Alors nous suivons alternativement Vanda, dans ses souvenirs et dans sa vie avec son Bulot, puis Simon, ses souvenirs, ses regrets et la façon dont il va se projeter dans ce rôle de père tellement inespéré, pour lequel il pourrait peut-être changer de vie.

La suite ? Pour la connaître il faut lire ce roman émouvant et débordant d’un amour exclusif et dévastateur. Roman qui dit l’amour, la complexité du quotidien pour ces marginaux qui n’ont pas toujours choisi de l’être, la différence de vie des classes sociales qui se côtoient sans se rapprocher vraiment. Roman qui dit les combats et les rêves de vie meilleure, mais aussi l’amour d’une mère qui fait tout ce qu’elle peut pour son enfant.  

Nerveuse, rythmé, réduite au strict minimum, l’écriture est adaptée aux moments, au milieu social, aux différents protagonistes. Ce double langage à un impact fort sur le lecteur. L’auteur place son roman dans une actualité brulante, manifestations de gilets jaunes, violences policières fantasmées ou pas, précarité, chômage, difficulté du milieu hospitalier avec son manque cruel de personnel, solitude. Mais l’auteur aborde aussi avec le personnage de Chloé la situation d’une femme qui ne veut pas d’enfants, et la façon dont la société a du mal à accepter ce choix, comme si c’était un monstre d’égoïsme, lui niant le droit à déterminer sa vie de femme. Un drame contemporain au pays de l’amour fou.

Catalogue éditeur : Albin-Michel

Personne ne connaît vraiment Vanda, cette fille un peu paumée qui vit seule avec son fils Noé dans un cabanon au bord de l’eau, en marge de la ville. Une dizaine d’année plus tôt elle se rêvait artiste, mais elle est devenue femme de ménage en hôpital psychiatrique. Entre Vanda et son gamin de six ans, qu’elle protège comme une louve, couve un amour fou qui exclut tout compromis. Alors quand Simon, le père de l’enfant, fait soudain irruption dans leur vie après sept ans d’absence, l’univers instable que Vanda s’est construit vacille. Et la rage qu’elle retient menace d’exploser.

Marion Brunet a 43 ans et vit actuellement à Marseille. Après des études de Lettres, elle a travaillé comme éducatrice spécialisée dans différents secteurs, notamment en psychiatrie. Reconnue pour ses romans « young adults » (Dans le désordre, 2016 ; Sans foi ni loi, 2019), elle a été fortement remarquée avec la parution aux éditions Albin Michel de L’été circulaire, Grand Prix de littérature policière 2018 et Prix des libraires du Livre de Poche 2019.

18.00 € / 26 Février 2020 / 140mm x 205mm / 240 pages / EAN13 : 9782226449573

Jiazoku, Maëlle Lefèvre

Avec Jiazoku, roman de la sélection du prix littéraire de la Vocation, Maëlle Lefèvre entraîne ses lecteurs à Tokyo dans le quartier de Kabukichō, le territoire des Yakusas.

Les jeunes prostituées de Kabukichō n’ont pas la vie facile. Lorsque Guan Yin a choisi d’émigrer à Tokyo, c’était pour y réussir sa vie et aider ses parents restés en Chine. Mais tout comme pour Bo, son amie de galère, la vie ne lui a fait aucun cadeau. Désespérée, elle accepte de devenir mère-porteuse pour de riches chinois. La fin de la loi sur l’enfant unique a créé des besoins et des exigences qui ont accéléré le trafic d’enfants mis en place pour les Yakusas.

Kei, l’enfant « porté » par Guan Yin, ne connaitra jamais ses parents morts dans un accident de voiture. Élevé d’abord dans un orphelinat, puis par sa mère porteuse et Daisuke, un yakusa repenti, il découvre ses origines sur le tard…

Le récit de la vie Guan Yi et de Kei alterne avec celui de Fen à Shanghai. A la mort de ses riches parents, elle est élevée par une tante aussi exigeante qu’acariâtre. Mais si pour elle la vie est facile, la solitude auprès de cette tante qui ne sait pas exprimer ses sentiments et la perte de ses parents lui pèsent profondément…

Maëlle Lefèvre nous fait voyager de 2016 à 2035 dans un univers à la fois sordide et fascinant. Émotion garantie avec ce premier roman qui parle de trafic d’enfants entre le Japon et la chine, de mères porteuses dans le milieu de la prostitution, mais avant tout de l’amour qui existe entre parents et enfants. Cet amour qui manque tant à certains pour grandir dans la confiance et la sérénité, amour inconditionnel des mères pour leurs enfants qui les aide à grandir dans la confiance, ou même manque d’amour qui handicape aussi surement qu’une blessure physique.

J’ai été impressionnée par l’écriture de Maëlle Lefèvre, par sa connaissance du Japon et de ses coutumes, mais aussi par la psychologie de ses personnages. Son texte foisonne de nombreux détails, langage, habitudes, qui montrent à quel point elle s’est imprégnée des différentes mœurs et coutumes du Japon, y compris jusqu’au vocabulaire. Cette immersion dans une culture si différente de la nôtre rend ce voyage encore plus intéressant. Le contrôle de soi, des sentiments, l’image que l’on se doit de donner aux autres, sans cesse présents dans la vie des personnages sont un des aspects de cette société japonaise que nous avons parfois tant de mal à comprendre.

Roman lu dans le cadre de ma participation au jury du prix littéraire de la Vocation 2019.

Catalogue éditeur : Albin-Michel

Kabuchiko, le quartier le plus dangereux de Tokyo, territoire des yakusas. Daisuke, membre du redoutable clan Kobayashi, dirige un vaste réseau de mères porteuses vouées à approvisionner de riches chinois en mal d’enfants.
Kei, qui a été conçu pour un couple de Shanghaiens, n’a pas connu ses parents, morts accidentellement avant sa naissance. Il a grandi entre l’affection de sa mère porteuse et la défiance de Daisuke, qu’il considère comme son père. Jusqu’au jour où ce dernier lui révèle le secret de sa naissance et l’existence de sa sœur, restée en Chine. Kei entreprend dès lors de partir pour Shanghai, décidé à relier le fil de ses origines. Jiazoku : de « jia » en chinois et « kazoku » en japonais, deux mots qui signifient « famille ».

Sur fond de trafics et d’exploitation humaine, Maëlle Lefèvre, dix-neuf ans, explore dans ce premier roman émouvant l’amour idéal qui unit parents et enfants.

Prix 20.00 € / 2 Janvier 2019 / 140mm x 205mm / 352 pages / EAN : 9782226403148

L’attrape-soucis. Catherine Faye

Chercher l’amour d’une mère, chercher l’absente, et se trouver soi-même. C’est le chemin que va suivre Lucien, le jeune héros de « l’attrape-souci » le premier roman de Catherine Faye.

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L’histoire débute à Buenos Aire, dans une librairie. Le jeune Lucien, onze ans, est tellement ému et interpellé par les « attrape-souci » que vient de lui promettre sa mère, qu’il la perd de vue lorsqu’elle sort regarder la vitrine. Il l’attend pendant des heures, puis fini par errer dans les rues, d’abord à la recherche de sa mère, puis finalement d’un abri pour la nuit, pour quelques jours, pour plus longtemps peut-être. Car il est bien difficile lorsque vous venez de débarquer dans une ville inconnue – ils arrivent de Paris- de savoir se repérer et de pouvoir retrouver cette mère perdue.

Lucien est à la rue. Il partage ses nuits avec un clochard qui le prend sous son aile, puis avec Solana, une jeune femme qui se transforme en belle de nuit à la tombée du jour. Là, il va rester quelque temps, mais comment avouer et expliquer qu’il est perdu, qu’il n’a pas fugué, que sa mère adorée ne l’a pas retrouvé et que lui non plus ne sait pas où ni comment la chercher ? Difficile de savoir ce qu’il est possible de dire ou pas sans créer la confusion et risquer d’être embarqué par la police.

De vagabondage en exil forcé dans les quartiers interlopes ou perdus de Buenos Aire, il se retrouve chez Arrigo, un homme qui s’occupe d’une jardinerie et lui apprend quelques rudiments qui vont lui permettre de l’aider, de travailler, de cultiver la terre et les plantes avec lui. Il sera pris sous son aile et va s’y blottir, faute de retrouver celle qu’il aime plus que tout et qui lui manque tant, cette mère qui semblait toujours tellement lasse de ses erreurs, de ses problèmes, de ses échecs de gamins, et dont il guettait la moindre parcelle d’amour.

Étonnant roman sur l’amour d’un fils pour sa mère, sur la recherche de soi, sur l’exil aussi et sur la compassion, l’entre-aide, l’amitié parfois plus forts que l’amour que l’on trouve, ou pas, dans sa famille. Lucien est attachant, et on aimerait tant l’aider dans son malheur, ce manque d’amour et cette enfance déchirée sont très bien restitués par Catherine Faye, un joli, lumineux et émouvant premier roman dans un Buenos Aire parfaitement restitué par l’auteur.

Roman lu dans le cadre de ma participation au jury des lecteurs du Livre de Poche 2019

Catalogue éditeur : Mazarine

Décembre 2001. Lucien, onze ans, vient d’arriver à Buenos Aires avec sa mère. Dans une librairie, il est captivé par de mystérieuses petites boîtes jaunes. Dedans, de minuscules poupées. Selon une légende, si on leur confie ses soucis avant de s’endormir, le lendemain, ils se sont envolés.
Le temps  qu’il choisisse son attrape-souci, c’est sa mère qui s’est envolée. Disparue.
Lucien part à sa recherche. Se perd.
Au fil de  ses errances, il fait des rencontres singulières. Cartonniers, prostituées, gamins des rues avec qui il se lie, un temps. Et grâce à qui, envers et contre tout, il se construit, apprend à grandir. Autrement.
Rebaptisé  Lucio par ses compagnons de route, cet enfant rêveur et déterminé incarne ce possible porte-bonheur que chacun a en soi.

Parution : 17/01/2018 / EAN : 9782863744758 / EAN numérique : 9782863747582 / Pages : 300 / Format : 135 x 215 mm

David Bowie n’est pas mort. Sonia David

Sonia David l’affirme, « David Bowie n’est pas mort » pourtant dans son roman une mère, un père, et David Bowie lui-même quittent la scène. C’est alors aux vivants de se souvenir de ceux qui sont partis.

Domi_C_Lire_david_bowie_n_est_pas_mort.jpgHélène est la deuxième d’une fratrie de trois sœurs qui sont tout sauf inséparables. Lorsque nous faisons leur connaissance, leur mère vient de mourir. Cette mère à priori tant détestée par Hélène. Hélène a cinquante ans  passés, un âge auquel on pourrait penser que la relation avec sa mère n’a plus la même importance pour avancer dans sa vie, que cette relation soit heureuse ou chaotique, épanouie ou solitaire. Si à longueur de pages, Hélène parle de cette mère qu’elle déteste, on se rend vite compte que la découverte de ce qu’elle était vient perturber les idées reçues et préconçues, le manque et le refus d’amour.

Car chacune va parler à sa façon de cette mère qu’elle abhorre, va dénigrer celle qui l’a conçue mais qui n’aura jamais su l’aimer. Cette mère qui a vécu pour sa propre personne, sans savoir ou vouloir donner d’amour à ses filles qu’elle a conçues avec un homme dont elle s’est rapidement séparée. Et l’on découvre que si toutes les trois ont dû se construire non pas avec mais contre leur mère, chacune a une vision bien différente des autres de sa relation avec sa mère. L’une est devenue froide et distante, l’autre solitaire et éternelle victime d’une société qui ne pourra jamais la comprendre, Hélène quant à elle a dû suivre longtemps un traitement en psychiatrie pour se dégager de l’influence de cette mère toxique.

Un an plus tard, à la mort de leur père, les filles se retrouvent et retrouvent la demi-sœur et la nouvelle femme de leur père. Le deuil maternel ayant fait une partie de son chemin, c’est le moment pour elles de revivre l’enfance et de comprendre, de mettre un nom sur les fêlures et les blessures qui les ont construites. Leur façon d’appréhender l’obsession sur la Shoa de leur père par exemple. Ce père qu’elles ont toujours aimé pour ce qu’il était, et pour l’amour qu’il a toujours été capable de leur donner. Hélène et ses sœurs vont peu à peu parcourir leur difficile chemin de deuil.

Ici, ce qui est intéressant, c’est la place que chacun s’attribue dans la famille, ou au contraire refuse de prendre. Comment certains préfèrent s’isoler pour ne pas avoir à combattre ou à réclamer un amour qui ne viendra jamais, et l’importance que cette enfance va avoir sur une vie entière, les répercussions et les effets bien des années après, bien au-delà de l’âge adulte. Également intéressant de comprendre les effets que va avoir un décès, y compris celui d’un parent que l’on imagine ne pas aimer. Car la perte d’un parent, quel qu’il soit, remet en cause notre vision intime de la vie et de la mort. Dernier rempart face à l’oubli, à la mort, la perte d’une mère, d’un père, nous place face à l’inéluctable fin. Et cette mort, ces morts, sont parfois le ciment des relations d’une fratrie, ou au contraire l’élément perturbateur qui fera tout voler en éclats.

Mais David Bowie dans tout ça ! Que vient-il faire là ? Eh bien, lorsqu’elles étaient enfants les sœurs ont pu échanger leur passion et leur amour pour l’artiste, qui décède la même année que l’écriture du roman, et dont se souvient Hélène avec beaucoup d’émotion.

Forte d’une expérience dans laquelle il aura fallu commencer à vider la maison de parents qui n’étaient pas les miens mais dont je suis proche, je repense avec plus d’acuité à ce roman. La mort est un ciment qui s’il n’est pas évident au premier abord, ressoude les liens de l’enfance, dessille les fratries éloignées par la vie, et rapproche les vivants qui se souviennent de leur intimité avec les morts.

N’ayant pas lu la quatrième de couverture avant d’avoir commencé ce roman, j’ai lu les premières pages avec un peu d’appréhension. Puis le rythme, l’écriture, le style m’ont rapidement embarquée dans cette histoire qui, alors qu’elle aurait pu être triste, entraine son lecteur et lui fait tourner les pages, l’impliquant dans le chagrin, la découverte, la compréhension et la fraternité qui s’en dégagent.

💙💙💙

Retrouvez également l’avis de Joëlle du blog Les livres de Joëlle.


Catalogue éditeur : Robert Laffont

À un an d’intervalle, Hélène, Anne et Émilie perdent leur mère, puis leur père. Entre les deux, David Bowie lui aussi tire sa révérence. David Bowie a eu, dans l’adolescence d’Hélène, la « sœur du milieu », une importance toute particulière, qu’elle avait complètement oubliée, qu’elle n’avait peut-être même pas mesurée mais qui lui saute aux yeux, aujourd’hui. Dans toute sa violence, dans toute sa réconfortante douceur. Alors, Hélène commence à raconter… Trois parties, trois décès, trois moments, comme les trois mouvements d’une même symphonie intime où la mort, très impalpable, se mêle à la vie très pratique puisqu’il faut s’occuper de ce qui reste (l’enterrement, les biens, les papiers, la succession…), le passé au présent à mesure que les souvenirs remontent à la surface, et où la tristesse flirte en permanence avec l’humour, parce que telle est la nature d’Hélène.

Date de parution : 24/08/2017  / EAN : 9782221200285

Fugitive parce que reine, Violaine Huisman

Un premier roman qui a la force de l’amour et la puissance de la folie, à découvrir absolument !

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Le jour de la chute du mur de Berlin est aussi le jour de la chute de la mère de Violaine, 10 ans. Ce jour-là, Catherine est emportée dans une camisole de force et l’image se brise. Finie la mère extravagante, superbe, excessive, elle devient simplement une femme maniacodépressive. La vérité va peu à peu apparaitre de la vie de cette femme splendide, séductrice et fantasque, hors des clous, en marge d’une société qui ne pourra jamais la comprendre, mais qui sera à jamais adulée par ses filles.

Catherine porte en elle les plaies ouvertes de son enfance. Suite à un mariage qu’elle n’a pas voulu, Jacqueline, sa mère, n’acceptera jamais cette enfant qu’elle rejette et dépose comme un fardeau encombrant pendant quatre longues années à l’hôpital Necker. Pourtant, Catherine est belle, intelligente, impulsive et vive, mais aucune de ses qualités ne lui permettra jamais de gagner l’amour de sa mère.

Toute sa vie, elle noiera ses difficultés à vivre dans l’alcool, les cigarettes, les médicaments. Elle qui se brisera les pieds à danser et danser encore, pauvre ballerine bancale avec une jambe plus courte que l’autre qui la handicape, avec acharnement et constance elle montera avec succès une école de danse dans le sud. Elle qui conduit comme une folle, à contre sens ou sur les trottoirs, prenant tous les risque y compris quand ses filles sont dans la voiture, aura colères et élans d’amour envers ses filles adorées. Elle qui accumule et collectionne maris, amants, ou amantes, aimera pourtant d’un amour fou le père de ses filles, qui chaque jour sera présent malgré la rupture. Catherine et son langage de charretier, y compris envers ses filles, Catherine et ses manières de grande bourgeoise bien installée dans les codes de la haute société, Catherine et son amour inconditionnel pour ses filles qu’elle traite pourtant si souvent à la dure. Catherine femme, amante, mère, excessive et entière en tout, y compris dans la maladie.

Construit en trois parties, le roman explore les sentiments de Violaine, auteur et narratrice, l’amour fou qui cimente la vie de cette mère et ses deux filles, l’amour toujours entre les deux sœurs, quand l’une ne peut pas dormir sans tenir la main de l’autre. Puis la vie de Catherine, ses émotions, ses tentatives de vivre normalement, ses désespoirs et ses échecs qui la rendent encore plus émouvante à nos yeux de lecteurs. Enfin, la fin annoncée de celle que ses filles adulent et respectent, ayant à son égard des sentiments plus maternels que filiaux.

Fugitive, elle l’est cette femme, face à cette vie qui ne la comprend pas, Reine aussi,  pour ses filles et tous ceux qui l’aiment d’un amour inconditionnel, au-delà de la maladie et de la folie. Quelle puissance, quelle écriture ! Que d’émotions ressenties à la lecture de Fugitive, parce que reine, cette biographie romancée. Il se dégage une force de ce premier roman qui vous laisse un peu pantois. L’ écriture est vraiment étonnante, emplie de poésie et de violence, d’amour et de souffrance, l’auteur arrive à retranscrire avec justesse et en usant de degrés de langage très différents des sentiments antinomiques, la folie et l’amour, la solitude et le bonheur, la vie en somme.

Lire également la chronique de Virginie du blog Les lectures du mouton

Catalogue éditeur : Gallimard

 « Maman était une force de la nature et elle avait une patience très limitée pour les jérémiades de gamines douillettes. Nos plaies, elle les désinfectait à l’alcool à 90 °, le Mercurochrome apparemment était pour les enfants gâtés. Et puis il y avait l’éther, dans ce flacon d’un bleu céruléen comme la sphère vespérale. Cette couleur était la sienne, cette profondeur du bleu sombre où se perd le coup de poing lancé contre Dieu.»

Ce premier roman raconte l’amour inconditionnel liant une mère à ses filles, malgré ses fêlures et sa défaillance. Mais l’écriture poétique et sulfureuse de Violaine Huisman porte aussi la voix déchirante d’une femme, une femme avant tout, qui n’a jamais cessé d’affirmer son droit à une vie rêvée, à la liberté.

Parution : 11-01-2018 / 256 pages, 140 x 205 mm / ISBN : 9782072765629