Jean Teulé raconte avec son écriture reconnaissable entre mille un épisode peu glorieux de la guerre de cent ans

La guerre de cent ans, il y a bien longtemps que je l’avais oubliée tant le programme scolaire est loin ! Jean Teulé raconte dans ce roman l’échec sanglant des français face aux anglais en ce 25 octobre 1415, sur le champ de bataille situé tout près de la commune d’Azincourt, dans le nord de la France.
Les anglais avaient débarqué en août de la même année avec plus de 9000 hommes et pour asseoir leurs prétention à la couronne de France, fait le siège de Harfleur. Après plus de deux mois, ses troupes étant affaiblies, Henry V décide de rejoindre le port de Calais et d’embarquer pour l’Angleterre. Entre temps, plus de 12 000 hommes côté français se sont lancés à leur poursuite et ont bloqué toutes les issues maritimes possibles jusqu’à la Somme. Trempés, affamés et surtout malades de dysenterie, (ah ces moules ! Ils les ont voulues, elles les ont eus), ils sont finalement bloqués par les français du coté d’Azincourt.
C’est une armée dépenaillée, en déroute, malade, que doivent affronter alors les fringants et valeureux chevaliers français. Seigneurs de haut rang, princes de sang, hauts dignitaires ou rejetons des plus grandes familles du royaume, tout ce que le royaume de France compte comme élite est présent à Azincourt.
Le 24 octobre, il n’ont plus d’autre issue que de se battre, les troupes en déroute du roi Henri V doivent affronter celles de Charles VI.
Après une nuit de beuverie et de disputes pour savoir qui de tel ou tel noble va constituer l’avant-garde, et donc en retirer toute la gloire, les chevaliers s’apprêtent à combattre. Mais alourdis par leurs armures métalliques ornées comme à la parade, ils vont s’embourber. Le champ récemment labouré, fortement détrempé par les pluies qui s’abattent sans interruption, s’est transformé en véritable piège. Bloqués, alourdis, mal préparés, trop sûr d’eux, plus de 6000 hommes meurent là, sous des pluies de flèches pour la plupart, étouffés sous la masse des hommes et des chevaux en armures, incapables de bouger, mais aussi exécutés sur ordre du roi Henri V alors qu’ils avaient été faits prisonniers. Les combats sont intenses et la défaite écrasante malgré le nombre inégal de part et d’autre.
Pourquoi j’ai aimé ?
Jean Teulé, avec sa verve et son ironie inimitable, montre ici toute l’absurdité de ces combattants valeureux sans doute, mais si mal préparés. Les armures et les lances totalement hors de propos, les chevaux caparaçonnés qui s’embourbent et tombent sous le poids des hommes qu’ils doivent transporter. L’armée française compte alors un grand nombre de morts, et surtout déplore la disparition quasi complète de l’élite de la chevalerie. Un comble.
J’ai aimé ces images, ce vocabulaire, ces personnages truculents, cette fleur de Lys au châle jaune (apparemment synonyme de fille à soldat) qui dans sa simplicité et sa logique toute paysanne est aussi la voix de la sagesse, chose impossible à comprendre ou simplement entendre pour ces nobles si sûrs d’eux-mêmes. Même si parfois la violence des combats, des représailles, le vocabulaire cru et imagé, fait frémir, on s’y croit et on la sent si bien dégouliner sur les épaules des hommes, les armures, la terre déjà bien imbibée, cette pluie qui n’en fini pas de tomber sur les champs de bataille d’Azincourt, dans un nord de la France au ciel bas et gris.
Catalogue éditeur : J’ai lu, Mialet-Barrault
Azincourt, un joli nom de village, le vague souvenir d’une bataille perdue. Ce 25 octobre 1415, il pleut dru sur l’Artois. Quelques milliers de soldats anglais se retrouvent pris au piège par des Français en surnombre. Bottés, casqués, cuirassés, armés jusqu’aux dents, brandissant fièrement leurs étendards, tout ce que la cour de France compte d’aristocrates se précipite pour participer à la curée. Ils ont bien l’intention de se couvrir de gloire, dans la grande tradition de la chevalerie française. Aucun n’en reviendra vivant. Un désastre grandiose !
Avec la verve qu’on lui connaît et son sens du détail qui tue, Jean Teulé nous raconte ces trois jours dantesques où, sous une pluie battante, des milliers d’hommes se sont massacrés dans un affrontement sanglant d’autant plus désastreux que cette bataille était parfaitement inutile.
Paru le 04/01/2023 / 7,80€ / 224 pages / EAN : 9782290377048