Les lettres d’Esther, Cécile Pivot

Petit éloge de la lenteur et du regard porté à l’autre

Esther, libraire à Lille, organise un atelier d’écriture épistolaire. Les lettres, elle connaît bien, car elle en a rédigé des milliers qu’elle a échangé avec son père, un auteur connu qui vivait à quelques rues de chez elle.
Des lettres comme un pont, une porte ouverte entre eux, ces mots couchés sur ce papier qui permet de dire tout ce que l’on ne peut échanger par la parole. Manque de temps, mauvais moment, pas la bonne attitude, qu’importe les raisons, les mots dits ne sont pas les mots écrits, n’ont pas la même pondération, la même portée sur celui qui les émets comme celui qui les reçoit.

Dans cet atelier d’écriture, les participants ont tous les âges, tous les passés et tous un avenir, mais ils sont à un croisement de leur vie. Et cet échange aussi bouleversant que sincère et ouvert, va aider chacun à avancer.

On y trouve Juliette et Nicolas, un couple qui se déchire depuis la naissance de leur fille. Juliette ne se sent absolument pas mère et les angoisses causées par la naissance de sa fille vont peut-être briser son couple. Nicolas essaie de tenir, d’élever sa fille dans l’amour de cette mère en pleine dépression post-partum qui tente de mettre des mots sur le mal qui la ronge. Samuel, un adolescent qui cherche sa place dans sa famille anéantie par le décès de son frère mort d’un cancer, mais aussi Jeanne, une dame âgée veuve qui n’en peut plus de sa solitude. Et enfin Jean, un homme d’affaires hyper actif qui semble avoir perdu le goût des affaires, et cherche sans doute à donner un nouvel élan à son existence.

À travers les exercices donnés par Esther, chacun avance à petit pas sur le chemin du mieux-être. Ce regard posé sur eux-mêmes, ces pensées intimes qu’ils s’avouent puis dévoilent, sont aussi des moyens de progresser vers une introspection thérapeutique et salvatrice.

Petit éloge de la lenteur, de la pensée structurée, du regard porté à l’autre. Il y a beaucoup de sincérité et de douceur, un brin de nostalgie peut-être, et un grand bonheur à se poser, loin de l’immédiateté de notre monde en perpétuel mouvement, où chacun réagit à la seconde sans prendre le temps de vivre réellement avec cet autre que l’on côtoie trop souvent sans même le regarder ni l’écouter.

J’ai beaucoup aimé ce roman empreint d’humanité et de sincérité. J’apprécie également l’écriture de Cécile Pivot que je découvre avec « Les lettres d’Esther ».

On ne manquera pas de lire également les chroniques des blogs Les livres de K79, Doucettement et Encres vagabondes

Catalogue éditeur : Calmann-Levy

« Cet atelier était leur bouée de sauvetage. Il allait les sauver de l’incompréhension d’un deuil qu’ils ne faisaient pas, d’une vie à l’arrêt, d’un amour mis à mal. Quand j’en ai pris conscience, il était trop tard, j’étais déjà plongée dans l’intimité et l’histoire de chacun d’eux. »

En souvenir de son père, Esther, une libraire du nord de la France, ouvre un atelier d’écriture épistolaire. Ses cinq élèves composent un équipage hétéroclite : une vieille dame isolée, un couple confronté à une sévère dépression post-partum, un homme d’affaires en quête de sens et un adolescent perdu.
À travers leurs lettres, des liens se nouent, des cœurs s’ouvrent. L’exercice littéraire se transforme peu à peu en une leçon de vie dont tous les participants sortiront transformés.
Roman initiatique, pétri de tendresse et d’humanité, ces Lettres sont un éloge de la lenteur, une ode au pouvoir des mots.

EAN : 9782702169070 / Prix : 19.50 € / Pages : 320 / 135 x 215 mm / Parution : 19/08/2020 / EAN numérique : 9782702169452 / Prix Numérique : 13.99 €

Toboggan, Jean-Jacques Beineix

Se laisser glisser sur le Toboggan de la vie, émotion garantie avec l’excellent roman d’un cinéaste de talent

Découvrir que Jean-Jacques Beineix vient d’écrire un roman, à coup sûr cela donne envie de le lire. Surtout quand on se souvient de l’effet de 37,2 le matin sur la jeunesse qui découvrait ce film. Cette façon très personnelle de mettre en scène et en lumière ses personnages. Vais-je être autant bouleversée et séduite, intriguée et intéressée ?

Alors qu’il file depuis sept ans le parfait amour avec Solène, trente ans à peine, le narrateur se fait larguer par sa belle. Elle a rencontré un bellâtre marchand de voitures et photographe à ses heures, à New-York où elle était partie quelques mois. Elle le quitte sans plus d’explications pour cet homme bien plus jeune.

Si pendant des années de bonheur et de passion, leur différence d’âge était importante, elle ne semblait pas être un obstacle, aujourd’hui elle semble rédhibitoire. L’ancien cinéaste repasse en boucle le film des années de bonheur avec celle qui avait tout pour être La femme de sa vie. Car depuis elle, finies les conquêtes d’une nuit ou de quelques jours, Solène lui a révélé l’amour avec un grand A. Solène et leur rencontre improbable, leurs grandes discussions interminables, leur passion commune pour la musique et le piano, et la fusion des corps, incandescente et flamboyante.

Il écrit dans des carnets, et de souvenirs heureux en idées noires, le soixantenaire éconduit refait le parcours de cet amour dont il sait déjà qu’il sera le dernier. A cette rupture vient s’ajouter la découverte d’une maladie. Comme pour confirmer que le temps passe inexorablement, son corps l’abandonne, malgré ses efforts, malgré le yoga, les traitements, la volonté de guérir. Mais si l’on peut guérir un cœur brisé par une rupture, il n’est pas aussi facile de guérir un corps usé. Les questionnements du narrateur interrogent notre capacité à décider de notre fin de vie avec réalisme et une grande humanité. Un sujet aussi sensible et difficile qu’actuel.

Jean-Jacques Beineix  signe un premier roman sur le temps qui passe et la peur de vieillir. L’écriture très descriptive permet au lecteur de s’emparer facilement des situations, des paysages. Les scènes sont comme photographiées, les phrases et les mots comme posés sur les émotions, les sentiments. Les personnages ne sont pas forcément très attachants, mais on imagine aisément le désespoir de cet homme que l’on suit avec un intérêt grandissant à mesure que se dessine son projet.

Catalogue éditeur : Michel Lafon

Il y en a toujours un qui aime moins que l’autre, malheur au perdant.

Toboggan est le récit poignant d’une rupture entre une jeune femme dans la trentaine et un homme, cinéaste en panne de création, qui en a le double. Alors que l’homme ne cesse de rejouer le film de cette histoire d’amour qui lui a échappé, il réalise aussi que ses plus belles années sont derrière lui. La femme aimée prend successivement les visages de l’amante solaire et ingénue ou de l’infidèle cruelle. Au terme de l’autopsie du couple, y aura-t-il une renaissance pour l’homme blessé ?

Parution : 20/02/20 / Prix : 19.95 €  / ISBN : 9782749930794

Le fou de Hind, Bertille Dutheil

Un premier roman qui parle d’amour fou, d’émigration et de secrets de famille, Le fou de Hind, une belle réussite qui ne laisse pas indifférent.

couverture du roman le fou de Hind de Bertille Dutheil photo Domi  C Lire

Lydia découvre la lettre et les photos que lui a laissées Moshin, son père qui vient de décéder. Ces différents éléments soulèvent une étrange question : Qui est Hind ? Qui est cette jeune fille que l’on trouve aux côtés de Moshin ? Quelle est cette vie dont elle n’a jamais entendu parler ?

Après le choc et la surprise, vient le temps de remonter les années, depuis l’arrivée de son père en France et son installation au château une maison quasi abandonnée à Créteil. Avec d’autres familles, émigrées comme lui, ils transforment cette maison en espace de vie communautaire avant l’heure. Bien que souvent diplômés dans leurs pays, ces maghrébins doivent trouver des emplois qui leur permettent pourtant difficilement de faire vivre leurs familles.

Mais Lydia veut comprendre jusqu’à quand son père est resté là, avec qui il vivait à l’époque, et pourquoi il en est parti. De fil en aiguille, ses recherches vont l’entrainer dans le sillage de Mohammed, Ali, Luna, Marqus et Sakina, tous des anciens du Château. Chacun à son tour va parler, peu, se souvenir, beaucoup, et grâce à ces points de vue successifs, permettre au lecteur de remonter le temps, de comprendre l’amour fou entre un père et sa fille, cette jeune fille secrète et lumineuse, mais surtout explorer tant la beauté que la complexité des relations entre les différents protagonistes.

Ce premier roman est une belle surprise, qui révèle un style totalement maitrisé, à la fois clair et mystérieux, vivant et émouvant. Il y a beaucoup de poésie dans les mots et les personnages, mais aussi beaucoup d’émotion et de mélancolie à l’évocation du passé. L’écriture déjà très mûre dépeint des relations humaines, des sentiments forts, l’amour et l’amitié, la culpabilité et l’oubli, et des personnages étonnants de profondeur. L’intrigue familiale absolument romanesque est portée par un socle historique et social qui ancre ce roman dans une réalité oubliée. J’ai apprécié cette analyse fine des difficultés de l’immigration, placée dans les années 60, 70, au moment de l’arrivée de nombreux ouvriers algériens, en particulier dans les usines automobiles de la région parisienne, et de ces banlieues dans lesquelles le logement est encore plus qu’approximatif. Cela m’a permis de revisiter ces grands ensembles de région parisienne des années 70, élucubrations de quelques architectes novateurs, comme les choux de Créteil ou les arènes de Picasso.

Roman lu dans le cadre de ma participation au jury du prix littéraire de la Vocation 2019.

Catalogue éditeur : Belfond

Un premier roman qui s’empare avec brio de la question de l’immigration et de l’intégration en France.

« La maison avait fait le tour du monde. C’était le navire de Sindbad. Elle avait roulé jusqu’à la rive et elle avait dormi jusqu’à ce que nous, les Arabes, qui n’avions rien, décidions de la retaper. Nous, les champions de la récup et des chansons d’amour, de la colle industrielle et du voyage au long cours, nous avions traversé la mer pour échouer ici, aux accents d’une poésie imparfaite mais vivante, quotidienne, qui donnait à l’exil de nos pères une saveur moins amère. »
Mohsin, un immigré algérien, vient de décéder. Il laisse derrière lui une lettre dans laquelle il s’accuse de la mort d’un être innocent, ainsi qu’une série de vieilles photos où il apparaît
avec une enfant brune, omniprésente, Hind.
Sa fille, Lydia, interroge alors ceux qui ont autrefois connu son père, à Créteil, à la fin des années 1970… Lire la suite

EAN : 9782714479716 / Date de parution : 16/08/2018

Une sirène à Paris, Mathias Malzieu

Le plaisir de lire « Une sirène à Paris » de Mathias Malzieu, et de découvrir un conte poétique et singulier.

couv une sirène à Paris de Mathias Malzieu, éditions Albin-Michel, blog Domi C Lire

Depuis son grand chagrin d’amour, Gaspard n’est plus le même. Il se complaît dans le passé, dans ses souvenirs, et veut garder à flot le flowerburger, cette péniche que lui a léguée sa grand-mère récemment décédée. Mais même si les concerts secrets des Surprisiers continuent dans l’arrière salle pour quelques privilégiés avertis, les affaires ne sont plus vraiment florissantes et Camille, son père, lui conseille de vendre. Gaspard n’est absolument pas d’accord. L’entente est difficile entre le père et son fils.
Alors qu’il traîne sa mélancolie et son désespoir sur les bords de la Seine en crue, il découvre une jeune femme inanimée… Et décide de la ramener chez lui.
Gaspard ne le sait pas encore, mais celle qu’il veut sauver n’est rien de moins que la dernière sirène…
Mais comment peut-on sauver une sirène ? Et peut-on seulement sauver une sirène. Surtout lorsque celle-ci, par crainte de l’action des hommes à son encontre, leur chante sa mélodie envoutante et mortelle. Une véritable course contre la montre va alors s’engager, dans laquelle les protagonistes n’ont pas tous envie de la même issue.

Tout au long du roman on retrouve l’amour, la mort, la vie, mais aussi le don de soi, l’altruisme et l’empathie, et toute la poésie de Mathias Malzieu pour faire battre les cœurs de tous ses lecteurs et faire briller la lumière dans leurs yeux émerveillés. Ma première lecture de cet auteur dont j’avais souvent lu d’excellentes critiques, cela donne envie d’aller plus loin et d’en lire d’autres.

Catalogue éditeur : Albin-Michel

« Surprisiers : ceux dont l’imagination est si puissante qu’elle peut changer le monde – du moins le leur, ce qui constitue un excellent début. »

Après le bouleversant Journal d’un vampire en pyjama, Mathias Malzieu retrouve la veine du merveilleux de La Mécanique du cœur avec cette Sirène à ParisLire la suite

18.00 € / 6 Février 2019 / 140mm x 205mm  / 240 pages / EAN13 : 9782226439772

La mer monte, Aude Le Corff

Dans ce roman à la fois intimiste et lanceur d’alerte écologique, entre espoir et profonde désillusion, Aude Le Corff interroge avec intelligence l’avenir de la planète.

Depuis que la terre a connu de grandes catastrophes climatiques, les gouvernants des pays développés ont pris des mesures drastiques pour tenter d’enrayer l’évolution du dérèglement. En  2042, dans son appartement parisien et sa vie totalement connectés, Lisa n’a plus vraiment de latitude, tout est réglé, précis, fait pour qu’elle vive au mieux. Ne pas prendre trop de poids pour une meilleure santé, un peu d’exercice programmé chaque jour, plus personne ne peut souffrir de solitude puisque même l’ascenseur s’adresse à vous en rentrant. Et l’on retrouve à la maison un animal de compagnie qui a tout du Tamagotchi des années 2000. Enfin, dans le ciel, des drones surveillent les habitants qui pourraient être tentés de sortir de ces normes édictées pour le bien commun par une société bienpensante. Chaque individu a même un interlocuteur virtuel qui lui indique toutes les données personnelles enregistrées chaque jour, en particulier pour sa santé.

Bien évidemment, les habitants ne peuvent être que satisfaits de savoir que tout va bien pour eux, qu’ils sont dans le droit chemin vers une meilleure santé, sérénité, bonheur, tout est programmé pour leur plus grand bien… Et si c’était au contraire trop triste une vie formatée, sans surprise, sans excès, sans dérapage.

En se basant sur des découvertes ou recherches actuelles, l’auteur invente le monde connecté que l’on nous promet chaque jour, le frigo qui commande tout seul, les informations médicales transmises automatiquement aux médecins virtuels consultés à travers des écrans, les plats tout prêts livrés directement… on n’est pas si loin de ce monde dans lequel évolue Lisa. Tout cela sur fond de catastrophe climatique avec une chaleur écrasante, un manque d’eau, un bouleversement des côtes maritimes avec la montée tant annoncée du niveau de la mer et la disparition des terres, les flux de migrants climatiques.

Un jour Lisa décide de lire les journaux intimes de sa mère pour tenter de comprendre ce qui a bouleversé sa vie dans ses années de jeunesse. Elle découvre le départ du fiancé tant aimé, sa disparition soudaine et inexpliquée, disparition a meurtri sa mère de façon indélébile. Lisa décide de mener une enquête avec les moyens des années 2042, et tente de savoir pourquoi il est parti. Cette recherche dans le passé apporte un profond sentiment d’humanité dans ce monde désolé et aseptisé dans lequel elle évolue.

En mêlant ces deux époques, et en confrontant les bouleversements de l’intime aux bouleversements climatiques inéluctables qui ont transformé la vie des terriens, Aude le Corff nous pousse à nous interroger sur l’avenir de notre planète. Sur ce que nous souhaitons ou risquons d’en faire si nous continuons au même rythme. Il s’agit de ce que des parents transmettent à leurs enfants, mais aussi de cette terre, ce patrimoine si fragile que nous devons transmettre à nos enfants. Alors même si les Thrillers écologiques, ces romans qui font la part belle aux problématiques sociales et environnementales, fleurissent de plus en plus, ici le sujet est très habilement mené jusqu’au bout, pour le plus grand plaisir du lecteur.

💙💙💙💙

Catalogue éditeur : Stock

Lisa vit seule à Paris dans un appartement connecté. Dehors, le chant des cigales est aussi accablant que la chaleur, les drones filent entre les immeubles et surveillent les habitants, des créatures virtuelles parlent aux piétons. Nous sommes en 2042. Des catastrophes naturelles ont frappé le monde, forçant les dirigeants à entamer une transition écologique radicale. La jeune femme participe à cette nouvelle société mais aspire à plus de liberté. Quant à Laure, sa mère, elle cherche des remèdes à son anxiété. Depuis l’enfance, Lisa s’interroge. Quel évènement a bouleversé sa mère dans les années 90 ? Pourquoi un tel silence autour ? Le journal de Laure et l’enquête de Lisa en dévoileront peu à peu les clés.

Parution : 13/03/2019 / 252 pages / Format : 135 x 215 mm / EAN : 9782234087187 / Prix : 19.50 €

Seule la nuit tombe dans ses bras, Philippe Annocque

Faire l’amour sans le faire, se rencontrer sans se connaitre, se voir sans se toucher, c’est la magie, ou le mystère des réseaux sociaux, avec « Seule la nuit tombe dans ses bras »  Philippe Annocque explore ces rencontres d’un x.ième type.

Herbert est prof et écrivain, mais Hebert s’ennuie, il cherche sur le web la rencontre qui va changer sa vie… Un jour, il croise Coline, et cette rencontre-là est une révélation, l’amour, le sexe, l’échange, tout est possible, tout est permis, mais aucune rencontre réelle ne viendra cependant conclure cette belle parenthèse amoureuse, intime, amicale. Jusqu’à ce jour où Herbert essaie de se souvenir de tous ces échanges, ces mots, ces photos, lus et vus avec avidité, avec bonheur, aussi vite effacés que reçus d’ailleurs. Car l’amour, celui qui explose en vous, qui vous rend conquérant, sur de vous, heureux, est venu finalement aussi vite qu’il est reparti, l’amour vrai ou l’amour virtuel ? Seuls Herbert et Coline pourraient le dire, mais si fort, si intimement ressenti qu’il est au moins aussi vrai que celui qu’Herbert fait avec Marie, que Coline fait avec Jules.

L’auteur décortique avec une grande justesse et aucun jugement cette l’intimité, ces élans des cœurs, ces élans des corps rendus possible par la liberté que crée la distance, l’inconnu, l’écran comme protection absolue, qui permet tout, puisqu’il n’y a rien à juger, rien à regretter… Mais ces échanges ont aussi des limites, l’amour sans le faire est-ce vraiment l’amour, et comment peut-il se nourrir de cet autre qu’il ne connait pas, dont il ne touchera jamais la peau, dont il ne sentira jamais le parfum, la chaleur.

Philippe Annocque explore les méandres des sentiments amoureux distendus par la distance et l’inconnu. Car qu’existe-t-il de plus étrange que ces relations clandestines qui peuvent se tisser entre deux inconnus qu’un réseaux internet a rapprochés un soir, une nuit, et qui se racontent toute une vie, des envies, de sentiments, des impulsions, qu’ils n’oseraient dire à personne, en tout cas à personne qui serait en chair et en vrai devant eux. La liberté qu’implique la distance, le sexe cru, les geste, les mots, les images, que l’on projette sur cet écran qui serait comme un paravent derrière lequel on ne risque rien, même pas à se révéler, se dévoiler, au plus profond, au plus secret, mais au plus virtuel aussi peut-être ?… Comme à l’abri d’une armure qui vous protège, vous cache et libère vos pulsions plus surement que n’importe quelle révolution ?

J’ai trouvé dans ce roman un grand réalisme et une véritable image de notre société d’écrans et de relation factices et protégée.. aucun risque n’est pris ni par l’une, ni par l’autre partie, tant que la rencontre n’est pas avérée. J’ai aimé suivre et découvrir les méandres de cette relation épistolaire d’un nouveau genre, moderne et froide finalement… Allez, rien ne vaut la vie en vrai , non ?

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Catalogue éditeur : Quidam

Coucher par écrit, est-ce que c’est tromper ? pourrait écrire Herbert puisqu’il est écrivain. Car Herbert ne couche pas avec Coline,qui ne couche pas avec Herbert. Facebook est l’univers parallèle où se joue l’aventure de leurs doubles virtuels, qui ressemble à une histoire de fesses ou à une histoire d’amour, comment savoir dans un monde où apparemment rien n’est grave. A moins que les mots eux-mêmes ne puissent donner corps à leur étreinte imaginaire…

Pas bien sûr d’être un, dubitatif quant à la mention« Du même auteur » qui commence à accompagner ses livres, Philippe Annocque répond cependant quand on l’appelle par son nom, par souci de commodité. Ses papiers le disent né en 1963, il veut bien les croire. D’origines variées, animé de passions diverses et hétéroclites, il écrit des livres qui lui ressemblent sans pour autant se ressembler entre eux : disparates et convergents, nés de la question de l’identité. Il est l’auteur chez Quidam de Liquide (2009), Monsieur le Comte au pied de la lettre(2010), RIEN — qu’une affaire de regard(2014) et Pas Liev (2015) et de Elise et Lise (2017).

152 pages 16 € / août 2018 / 140 x 210mm / ISBN : 9782374910857