L’archiviste, Alexandra Koszelyk

Je suis attirée par la couleur pure, couleurs de mon enfance, de l’Ukraine, Sonia Delaunay

Alexandra K est une passeuse de mots, d’âmes, d’histoires, celles d’un peuple qui depuis trop longtemps doit plier face à l’envahisseur. Ce peuple qui a été contraint d’abandonner sa langue déjà depuis les années 1930, et donc sa mémoire, son histoire. Ce peuple aujourd’hui encore envahi et meurtri par la puissance soviétique qui rêve de l’anéantir.

K vit avec une montre arrêtée à 19h06, l’heure de l’invasion, de la guerre, de la défaite. Elle s’occupe de sa mère malade à qui elle ne dit rien de la situation en ville et dans le pays. Elle a une sœur jumelle, Mila, partie photographier les combats, dont elle est sans nouvelle.
K est archiviste. Elle a refusé de fuir. Les œuvres d’art, livres, sculptures, tableaux majeurs du pays ont été mis à l’abri dans sa bibliothèque aux sous-sols infinis. Chaque jour elle protège ces richesses, accompagnée d’ombres invisibles et protectrices qui veillent avec elles. Mais c’est sans compter sur la visite de l’homme au chapeau qui doit mener à bien un grand projet de révisionnisme d’état. Il représente l’envahisseur et demande à K d’annihiler les traditions et la culture de son pays en falsifiant et en détournant un certain nombre d’œuvres majeures. K peut-elle se soustraire à ses ordres alors qu’il détient sa sœur jumelle sur qui il a droit de vie ou de mort.

De chapitre en chapitre, l’homme au chapeau lui présente les œuvres ou les artistes sur lesquels elle doit travailler. Et chacun est prétexte à nous parler avec poésie et dans une atmosphère fantastique et envoûtante qui allège les douleurs, de la culture et des traditions de l’Ukraine, ce pays cher au cœur d’Alexandra Koszelyk.

J’y retrouve ce qui constitue un pays, ses traditions, son histoire, sa culture, et découvre ces artistes qui ont agit pour que vive et survive leur art.

Si le tournesol est l’une des fleurs emblématiques de l’Ukraine, ici ce sont les soucis qui fleurissent. Cette fleur orange appelée la chornobryvtsi est plantée partout et prolifère dans les jardins et au bord des routes ;
L’hymne national créé par Mukhailo Verbytsky en souvenir de l’Hematat, premier état ukrainien fondé par les cosaques en 1649, et les coutumes des cosaques ;
Mais aussi Kharkiv et les tentatives de faire taire à jamais les joueurs de bandoura, l’instrument de musique traditionnel de l’Ukraine ;
Les vitraux d’Alla Horska, artiste assassinée comme tant d’autres dans les années 70, et la poésie de Taras Chevchenko ou de Lessia Oukraïnka ;
Les peintures naïves de Maria Primatchenko, dénigrée et rejetée par l’académie mais certaine d’être dans la bonne voie ;
La littérature de Mykola Gogol et son envie de parler de son pays même en exil à Paris ;
L’artiste peintre Sonia Delaunay et ses magnifiques œuvres colorées pour peindre les sentiments les émotions ;

Chacun à sa manière donne sa force à K, lui montre le chemin, ombres bénéfiques qui veillent sur elle et sur la culture et les traditions d’un pays meurtri.

Comment ne pas évoquer enfin les grands événements qui ont marqué le pays. L’Holodomor, la grande famine orchestrée par Staline pour vider l’Ukraine de ses habitants, mais aussi Tchernobyl ou la révolution de Maïdan. Ces événements meurtriers que l’on peut rapprocher de ce que vit l’Ukraine aujourd’hui.

Ce que j’ai aimé ?

Découvrir cette culture que je connais trop peu et bien mal, et j’ai vraiment envie de m’y plonger plus avant pour mieux découvrir les œuvres et les artistes. D’ailleurs, si j’ai mis quelques jours à le lire, c’est surtout par envie de noter des noms, de les chercher sur internet pour commencer à mieux connaître ces artistes. Merci Alexandra K pour ce magnifique roman, l’écriture est vraiment la plus belle façon de prendre les armes. A vous maintenant de lire L’Archiviste ce roman qui nous fait mieux comprendre le pouvoir que détiennent les livres et la culture pour forger une nation.

Catalogue éditeur : Aux forges de Vulcain

K est archiviste dans une ville détruite par la guerre, en Ukraine. Le jour, elle veille sur sa mère mourante. La nuit, elle veille sur des œuvres d’art. Lors de l’évacuation, elles ont été entassées dans la bibliothèque dont elle a la charge. Un soir, elle reçoit la visite d’un des envahisseurs, qui lui demande d’aider les vainqueurs à détruire ce qu’il reste de son pays : ses tableaux, ses poèmes et ses chansons. Il lui demande de falsifier les œuvres sur lesquelles elle doit veiller. En échange, sa famille aura la vie sauve. Commence alors un jeu de dupes entre le bourreau et sa victime, dont l’enjeu est l’espoir, espoir d’un peuple à survivre toujours, malgré la barbarie.

18.00 € / 272 pages / ISBN : 978-2-373-05655-6 / Date de parution : 07 Octobre 2022

La porte du vent, Jean-Marc Souvira

Quand le vent de l’Histoire souffle sur le présent, un polar humain et intelligent

Dans ce nouveau roman tant attendu, Jean-Marc Souvira nous entraîne auprès de clans mafieux qui réalisent ensemble des opérations financières frauduleuses à grande échelle, alors que tout devrait les séparer, culture, origine, religion.

D’un côté le clan Nathan, ce sont des juifs qui habitent du côté de Saint Mandé et aiment faire démonstration de leur force et de leur richesse.
De l’autre côté l’empire du chinois Shen Li. Le patriarche prend soin de gérer son empire sans jamais montrer son immense fortune. Une vieille voiture, des gardes du corps habillés comme de simple travailleurs, une société du côté d’Aubervilliers, il habite avec sa famille en Seine et Marne. Il ne se mêle jamais de trafic de drogue, c’est trop risqué à tout point de vue pour toute sa famille, c’est même absolument interdit.
Pourtant, à la suite de l’exécution en pleine rue de Richard Nathan, de son chauffeur et du garde du corps, que les bruits imputent à Shen Li, puis en représailles celle de son ami Sun Hao exécuté devant chez lui, il semble évident que quelqu’un parmi les siens a franchi la limite. Les morts violentes ne s’arrêtent pas là et bientôt les mafieux et les flics sont confrontés à une véritable hécatombe.

L’enquêteur en charge de ces affaires est Paul Dalmate, il doit tout mettre en œuvre pour élucider ces meurtres. Ancien séminariste, ce flic solitaire aime la musique, surtout depuis que Mistral (ceux qui ont lu les précédents roman de l’auteur apprécieront) lui a fait découvrir autre chose que les musiques sacrées. Dalmate traîne aussi quelques traumatismes venus d’une enfance difficile et qui vont se dévoiler peu à peu.

Tout le 36 est sur le pont, il ne faudrait pas que tout Paris s’embrase. Mais le mystère s’épaissit lorsque Avi Richter et Guo Tran, deux puissants responsables d’organisations criminelles débarquent à Paris. Ces vieillards sont des chefs incontestés qui ne se déplacent jamais. L’un arrive d’Israël l’autre de Chine. Ils partent se recueillir devant une tombe chinoise du plus grand cimetière de guerre du Commonwealth en France, et emmènent avec eux un fils Nathan et un fils Shen.

La suite du roman bascule alors dans le passé et nous propulse en automne 1916, en France, au plus près des combats. On y rencontre de nouveaux personnages, d’abord en Chine dans le village de Kaifeng, puis à Boulogne-sur-mer et à l’arrière de la ligne de front. Un retour en arrière qui éclaire d’un jour nouveau les liens entre les différents protagonistes.

Dans ces années 1916/1917, on compte déjà des milliers de pertes humaines. Les femmes ont remplacé les hommes dans les usines, mais on manque encore de bras. Les gouvernements de la France et de l’Angleterre, deux pays présents en Chine, ont l’idée d’enrôler des paysans chinois pour aller faire les manutentionnaires à l’arrière du front, ou dans le port de Boulogne-sur-mer. Il est indispensable de pallier à la logistique défaillante pour apporter le soutien nécessaire aux soldats qui se battent sans relâche dans les tranchées. Payés une misère, ces quelques 140 000 chinois ont signé un contrat de plusieurs années, ils reçoivent un salaire de misère, mais peuvent ainsi envoyer de l’argent au pays.

C’est dans ce passé et sur ces zones de guerre que se trouvent les racines de la fraternité aujourd’hui en miette entre les deux clans, celui des Nathan et celui des chinois de Shen Li. Là aussi que l’on comprend le pourquoi de la venue des deux chefs de guerre Avi Richter et Guo Tran.

Un thriller qui m’a entraînée bien au-delà de ce que j’imaginais. Merci Jean-Marc Souvira d’être allé chercher ces histoires oubliées, pour les mêler à celles des violence d’aujourd’hui, et surtout d’en faire un polar aussi intelligent, instructif, que passionnant, mêlant habilement une intrigue policière actuelle à un véritable roman historique. J’ai aimé découvrir la vie de ces chinois sur le front, dans les tranchées de la première guerre mondiale. Mais aussi retrouver les coins que Paris que je connais et les voir ainsi d’une tout autre façon. Tout au long du roman, on sent la maîtrise à la fois des métiers de la police et de ceux qu’elle doit combattre. Jean-Marc Souvira est un commissaire divisionnaire qui a exercé pendant trente ans dans la police judiciaire. Ce grand flic possède une excellente connaissance de l’institution mais aussi de ceux contre lesquels elle doit lutter.

Merci d’avoir réveillé pour nous cet épisode méconnu de l’Histoire, d’avoir donné une âme et une profonde humanité à ces personnages capables aussi de bienveillance et de solidarité.

Catalogue éditeur : Fleuve éditions

Pourquoi ces deux vieillards, venus l’un de Chine et l’autre d’Israël, ont-ils décidé de se recueillir ensemble sur cette mystérieuse tombe chinoise d’un cimetière militaire picard de la Première Guerre mondiale ? Pour le commandant Dalmate, la présence de ces personnages sur le territoire national n’augure rien de bon. En effet, ils sont, chacun dans leur pays, à la tête d’organisations criminelles dont les ramifications s’étendent jusqu’en France.
Or, depuis peu, les règlements de comptes entre ces communautés s’intensifient ; une escalade de violence qui semble échapper au contrôle des forces de l’ordre. Mais le monde ne date pas d’aujourd’hui, et c’est peut-être dans le passé que se trouvent les réponses capables d’apaiser les esprits. Dans des amitiés nées il y a bien longtemps, au cœur des tranchées…

Date de parution : 05/01/2023 / EAN : 9782265156623 / Nombre de pages : 592 / 22.90 €

Aquitania La vengeance d’Aliénor d’Aquitaine, Eva García Saenz de Urturi

Aliénor d’Aquitaine, ou la jeunesse d’une souveraine courageuse et volontaire

Aliénor d’Aquitaine, sans savoir qui elle était, chacun d’entre nous connaît pourtant au moins son nom. Ce roman au souffle picaresque retrace une partie de la jeunesse de l’héritière de la couronne de cette région tant convoitée qu’était l’Aquitaine au XIIe siècle.

Petite fille de Guillaume IX le Troubadour, Aliénor a treize ans lorsque son père Guillaume X décède mystérieusement à Compostelle le jour du Vendredi Saint en 1137. Sur son corps s’affichent les marques d’une horrible torture nommée l’aigle de sang. Aliénor n’accepte pas ce qui lui est rapporté comme étant les cause de cette mort étrange et décide de venger son père.

Pour arriver à ses fins, elle n’hésite pas à faire bouger les lignes en influençant le conseil elle obtient le droit d’épouser le futur Louis VII, fils de Louis Le Gros, le rival de son père. Ce digne descendant de la lignée des capétiens est aussi l’héritier du royaume de France.

Quand le jour de la noce Louis VI dit Le Gros décède à son tour, le mystère s’épaissit. Le couple commence à mieux se connaître, et les sentiments d’Aliénor pour son époux changent au fil des ans. C’est donc avec son époux qu’elle va tenter de faire la lumière sur ces deux morts suspectes. Pendant toutes ces années, rien ne lui sera épargné. La jeune femme n’arrive pas à donner un héritier aux capétiens, ni à se faire une place au Conseil, et ses manœuvres ne sont pas toujours de francs succès.

Tour à tour, Aliénor, Louis, et l’enfant vont exposer leur vision des faits tout au long de ces années. De 1137 à 1149, de Bordeaux à Poitiers, de Normandie à Paris, et jusqu’en terre sainte lors de la croisade menée par Louis VII, Aliénor sait tenir sa place et son rang. Issue de la région la plus prospère du territoire, sa richesse lui donne un pouvoir et un attrait irrésistibles. Le royaume de France cherche à faire les alliances et à gagner les guerres qui lui permettront de gouverner les Comté et Seigneuries dont il a besoin pour étendre son pouvoir. Douze années pendant lesquelles aquitains et capétiens luttent pour le pouvoir. Aux côtés d’Aliénor et de Louis, apparaissent tour à tour son oncle Raymond de Poitiers qui deviendra prince d’Antioche, puis l’abbé Suger en sa basilique Saint Denis, enfin Bernard de Clairvaux, ainsi que quelques chats aquitains qui rôdent dans les couloirs des sombres châteaux parisiens.

Je n’ai pas eu envie d’aller vérifier tous les détails historiques du roman, même si je suppose que l’autrice a su parfois laisser libre court à son imagination. J’ai eu envie de me laisser porter par l’énergie qui s’en dégage, par cette Aliénor que nous découvrons dans sa jeunesse auprès d’un époux sans doute mieux assorti que ce qu’elle avait pu imaginer de prime abord. Un roman comme on les aime, intelligent, vivant, rythmé, qui nous entraîne dans un souffle picaresque à travers batailles, jalousies, incestes, deuils, trahisons, amour, haine, regrets, sans que l’on ait envie de le refermer avant la fin.

Catalogue éditeur : Fleuve

Compostelle, 1137. Le duc d’Aquitaine – territoire convoité par la France pour ses richesses – est retrouvé mort, le corps bleu et portant la marque de l’« aigle de sang », une effroyable torture normande. La jeune Aliénor, portée par sa soif de vengeance, décide d’épouser le fils du roi Louis VI le Gros qu’elle croit être le meurtrier de son père. Son objectif : décimer la lignée des Capétiens et imposer le sang aquitain. Mais, le jour des noces, Louis VI est assassiné à son tour.
Les époux, Aliénor et Louis VII devront alors apprendre à se connaître afin d’infiltrer le royaume de France et démasquer l’instigateur de cette machination. Quel qu’en soit le prix à payer…

Traduit par Judith Vernant

21.90 € / EAN : 9782265155527 / Nombre de pages : 384 / Date de parution : 20/10/2022

Le Petit Théâtre des opérations, tome 3 : Faits d’armes incroyables mais bien réels…

La Guerre et ses héros méconnus racontés autrement

Comment imaginer que les aventures décrites ici aient pu être réelles ? Car tout nous incite à penser que nous sommes carrément dans un film loufoque ou dans l’exagération. Pourtant, hélas, tout est vrai. Enfin, hélas ou fort heureusement ?

On y trouve au hasard Jean de Selys Longchamps, c’est un officier aviateur. Stakanoviste du combat il n’a jamais abandonné, il est l’auteur de faits de guerre dignes d’une histoire belge, dont la destruction ciblée d’un bâtiment de neuf étages occupé par la Gestapo.

Les marins de l’USS William D.Porter, une équipe de bras cassées qui aidés par la malchance ont été capable des pires bourdes qui peuvent être dramatiques en temps de guerre.

Jules Verne le corsaire des airs, un banal avion de transport sans blindage transformé en citadelle volante dont les pilotes tiraient à vue en larguant leurs bombes sur Berlin.

Ou encore Lachhiman Gurung, un soldat birman d’un mètre cinquante à tout casser, qui s’est battu jusqu’au bout, y compris lorsqu’une terrible blessure aurait arrêté n’importe quel autre soldat.

Et au fil des pages les exploits de Charles Nungesser ou Léo Major le québecois.

J’ai aimé découvrir ces faits d’histoire dont personne ne parle, qui balaient toute la période des deux guerres et de nombreux pays, sur un ton totalement iconoclaste et farfelu, mais en ayant un fonds aussi sérieux que véridique. Bien évidement, tout l’art des auteurs est de savoir rendre intéressants des personnages précis avec leurs anecdotes et les faits accomplis.

Le graphisme, les couleurs, le ton employé, en font une lecture à la fois improbable et réjouissante, et ce malgré la période et les faits évoqués. Une réussite et un excellent moment de lecture. J’espère que cette BD est largement proposée par les professeurs d’histoire, pour que leur élèves puissent aussi voir enfin les choses autrement.

Catalogue éditeur : Fluide Glacial

Après le succès des deux premiers tomes, Julien Hervieux (alias l’Odieux Connard) et monsieur le chien reviennent pour un troisième opus consacré aux histoires improbables des deux Guerres mondiales.

Saviez-vous qu’en 1945, un soldat québecois reprit seul une ville entière aux Allemands ? Que durant la Première Guerre mondiale, une offensive échoua à cause de supposés zombies ? Ou encore qu’une bande de marins américains maladroits a réussi l’exploit de tirer par erreur une torpille sur leur propre Président ? Et saviez-vous que le cheval du général Leclerc fut fusillé pour acte de résistance ?

Anecdotes absurdes, héroïques mais toujours incroyables, Le Petit Théâtre des Opérations est de retour. Avec sa formule désormais lue et approuvée par des milliers de lecteurs : des histoires longues suivies de textes documentés appuyant leur véracité, ainsi que de courtes anecdotes sur la perte d’un sous-marin causée par ses toilettes, la résistance d’animaux, ou encore l’art contemporain utilisé contre l’ennemi. 

Scénariste : Julien HERVIEUX / Dessinateur : MONSIEUR LE CHIEN / Coloriste : Olivier TROCKLÉ

Prix 15,90 € / 56 pages / ISBN 979 1 0382 0457 7 / Paru le : 02/11/2022

GIGN, tome 3, Laurent André, Pascal Pelletier

Une BD qui retrace une des premières actions du GIGN


En février 1976, à Djibouti, un car scolaire d’enfants de militaires est pris en otage. C’est l’intervention du GIGN, alors commandé par le lieutenant Prouteau et de la légion étrangère qui permettra de les libérer, mais hélas deux enfants y ont laissé la vie.

Si elle se lit très facilement, le graphisme et les textes m’ont semblé cependant assez basiques.

Cet aspect de l’histoire du GIGN et donc de la Gendarmerie nationale est intéressant car sans doute méconnu aujourd’hui, et assez bien retracé pour les amateurs qui s’intéressent au sujet.

Catalogue éditeur : éditions A & H

Laurent ANDRÉ (Scénariste) – Pascal PELLETIER (Dessinateur) 
à retrouver sur le site GIGN
Album: 52 pages / Editions A&H BD (11.2021 ) / ISBN : 979-10-95857-87-7  

Que faire en Béarn pendant les vacances scolaires ? Visiter le musée Gallo-Romain de Claracq



Quand les romains et la période Gallo-romaine sont au programme des révisions des petits enfants, c’est le moment d’en profiter pour découvrir le musée Gallo-Romain de Claracq et le site de la villa de Lalonquette.


Situés dans la vallée du Gabas, à trente minutes de voiture au nord de Pau, cette villa vieille de 2000 ans est emblématique des riches demeures patriciennes de l’époque.
Par contre, inutile d’y chercher murs ou fondations, seuls les contours sont matérialisés par des murets de pierre, donnant ainsi à voir aux visiteurs l’exacte majesté de ses dimensions.
Les panneaux d’interprétation bien visibles permettent de se faire une idée de la grandeur du lieu à n’importe quel moment de la journée et de l’année puisque c’est en accès libre.

Dans le musée, essentiellement composé des vestiges trouvés à la villa gallo-romaine de Lalonquette, nous avons pu admirer en particulier les superbes mosaïques qui pavaient le sol.
Quelques vestiges, mais surtout un parcours pédagogique qui permet à chacun de se faire une idée du travail des archéologues sur les sites de fouilles.

Un accueil chaleureux, des présentations écrites claires, un audioguide et les explications des personnes présentes en ont fait une visite réussie pour les enfants.

La saison, et l’heure de notre visite ne s’y prêtaient pas, mais un sentier pédagogique permet de rejoindre à pied le site de la villa située à moins de deux kilomètres.

MUSEE GALLO-ROMAIN Route du Château 64 330 CLARACQ

36 heures dans la brume, Nathalie Somers

la folle aventure de deux adolescents dans le San Francisco des années 30

Quand San Francisco s’embrume nous chantait Maxime Le Forestier dans les années 70. Ici, nous voici plongés dans les années 1930, en 1937 exactement, quand le Golden Gate Bridge qui enjambe majestueusement la baie de sa belle couleur orange vient tout juste d’être construit.

Un adolescent est miraculeusement sauvé par des pêcheurs alors qu’il flottait accroché à un vieux pneu malencontreusement jeté dans la baie (prétexte à évoquer les dégâts de la pollution, déjà à cette époque). Mais Matt, puisque s’est son prénom, souffre d’une amnésie passagère et ne sait pas ce qu’il fait là. Peu à peu, la mémoire lui revient. Malgré ses blessures, intrépide et décidé, il sait qu’il doit absolument sauver une jeune fille en détresse.

Sa quête va le ramener dans le quartier du port, à la rencontre d’une jeune chinoise qui va l’aider à retrouver celle qui n’est autre que sa sœur jumelle, Mary.
C’est donc avec l’aide de Jiao qu’il va affronter les hommes d’Al Capone, alors incarcéré à Alcatraz, la célèbre prison dont on ne s’évade jamais, mais également les bandes rivales, gangs de petits blancs oisifs et belliqueux ou tongs des jeunes chinois qui tiennent eux aussi en coupe réglée le quartier de chinatown.
Toute l’intrigue est prétexte à évoquer les différents quartiers de San Francisco, les conflits entre communautés, la spécificité de chinatown ou encore une allusion à la pègre avec l’arrestation du grand Al Capone, une courte plongée dans la ville des années 20.

Bien sûr, je ne correspond pas au public auquel est destiné ce roman, 12 ans et plus, et donc j’ai parfois trouvé que quelques explications n’étaient pas assez poussées ou détaillées. Mais l’impression générale est bien rendue. Les principaux protagonistes vont rapidement se rapprocher pour réussir leur folle entreprise de sauvetage. Le rythme est soutenu, peu de temps mort, une lecture agréable qui devrait séduire les amateurs de thriller en herbe.

Catalogue éditeur : Fayard

1937. Matt est repêché, à moitié noyé, dans la baie de San Francisco.
À son réveil, l’adolescent est amnésique. Son seul souvenir : une jeune fille désespérée, cheveux au vent, qui s’apprête à sauter du Golden Gate Bridge. Matt ignore qui elle est. Pourtant, il sait qu’il doit la sauver à tout prix.
Mais par où doit-il commencer, lui qui se souvient à peine de son propre nom ?
Une course effrénée dans les rues de San Francisco, dans l’ombre du plus grand gangster de tous les temps.

À partir de 12 ans / Date de parution 06/09/2022 / Prix 13,90 €

La danse de l’eau, Ta-Nehisi Coates

Quand fantastique et Histoire s’entremêlent pour raconter l’esclavage dans l’Amérique d’avant la guerre de sécession

Ta-Nehisi Coates situe son roman vers 1850/1860, à la veille de la guerre de sécession (1861 à 1865) en Virginie. Comme tant d’autres autour d’elle, la plantation de tabac Lockless, qui appartient à Mr Walker est déclinante, car la terre exploitée de façon intensive depuis trop d’années est désormais exsangue. Les petits propriétaires terriens souhaitent maintenir leur train de vie et garder leurs domaines. Mais cela se fait souvent au prix de la vente d’esclaves. C’est ainsi que la mère d’Hiram a été vendue à une autre plantation. Mais lui reste à Lockless, car il est aussi le fils du maître.

Hiram Walker devient le gardien de son frère. Mais pas de n’importe quel frère. Si Hiram Walker est un esclave fils d’une esclave et du maître, son frère Maynard est l’héritier de la maison Walker.

Hiram a des dons et en particulier une mémoire photographique prodigieuse. Il lui suffit d’entendre ou de voir une fois, et tout est gravé à jamais dans sa mémoire. Éduqué avec le fil du maître, il devient très vite son gardien et son protecteur. Même s’il reste à jamais un asservi, alors que Maynard est un distingué.

Car ici, l’auteur ne parle pas de maître ou d’esclaves, de blanc ou de noir, mais de distingués, ce sont les plus ou moins riches propriétaires des plantations ; de blancs inférieurs, ce sont ceux qui supervisent et contrôlent les esclaves pour les blancs supérieurs ; d’affranchis, ce sont d’anciens esclaves, et enfin d’asservis.

Hiram comprend à l’adolescence qu’il a également un pouvoir très particulier, celui de la conduction. C’est la capacité à se déplacer d’un endroit à l’autre en faisant uniquement appel aux souvenirs. Si les premières années ce pouvoir apparaît lorsqu’il est dans des situations dangereuses ou dramatiques, par la suite il se rend compte qu’il est intiment lié à l’eau, cet élément que domptait déjà sa mère lorsqu’elle pratiquait La Danse de l’eau.

Hiram doit apprivoiser ce don mystérieux lié à l’eau : grâce à la Conduction il peut se transporter d’un endroit à un autre. Mais pour que cela fonctionne, il doit se remémorer les souvenirs traumatiques de son enfance et les moments le plus douloureux de son passé, par exemple à chaque fois lui revient le souvenir de sa mère disparue lorsqu’il avait neuf ans, cette mère qu’il voit pratiquer la danse de l’eau.

L’auteur nous propose un roman initiatique d’un genre tout à fait singulier. Un texte hybride entre récit initiatique, histoire de l’esclavage traitée par le point de vue d’un esclave, mais aussi roman qui montre la puissance de la liberté quand elle permet d’échapper à sa condition.

Ta-Nehisi Coates évoque le mythe des Africains marcheurs sur l’eau, ces esclaves dont on pensait qu’ils avaient sauté des bateaux, ou plus tard s’étaient échappés des plantations, pour se transporter par la force de la volonté sains et saufs vers l’Afrique des origines.

De même il fait allusion à l’Undergournd railroad, que l’on retrouve dans le roman de Colson Withehead, avec ces hommes et ces femmes blancs ou noirs qui aident Hiram, en Virginie, en Pennsylvanie, où qu’il aille, et lui permettent d’intégrer le réseau pour en devenir un membre actif.

J’ai retrouvé également dans ce texte l’allusion à La fièvre qu’évoquait si bien le roman de Sébastien Spitzer (même si là c’était en 1870 à Memphis). Cette fièvre qui dans l’esprit tordu des blancs ne touchait pas les noirs, pauvres noirs qui du coup étaient envoyés au contact des malades et mourraient par milliers.

Enfin, une part importante est donnée à la force de la mémoire, celle de Hiram qui est prodigieuse mais dont pourtant certains souvenirs douloureux se sont effacés, comme pour lui permettre d’avancer malgré tout ; celle qui lui permet de réussir à se déplacer là où d’autres ne peuvent aller, grâce à la conduction ; celle des esclaves avec leurs pratiques, leur magie et leurs croyances d’origine, cette mémoire d’un peuple qui se transmet par delà le temps et l’espace, avec une grande place laissée au surnaturel et à la magie.

Un roman singulier, qui m’a perturbée par moments par ce côté fantastique et magique, mais qui aborde des thèmes passionnants avec une humanité et une maîtrise tout à fait intéressantes.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2022

Catalogue éditeur : Audiolib, Fayard

Le jeune Hiram Walker est né dans les fers. Le jour où sa mère a été vendue, Hiram s’est vu voler les souvenirs qu’il avait d’elle. Tout ce qui lui est resté, c’est un pouvoir mystérieux que sa mère lui a laissé en héritage. Des années plus tard, quand Hiram manque se noyer dans une rivière, c’est ce même pouvoir qui lui sauve la vie. Après avoir frôlé la mort, il décide de s’enfuir, loin du seul monde qu’il ait jamais connu.
Ainsi débute un périple plein de surprises, qui va entraîner Hiram de la splendeur décadente des plantations de Virginie aux bastions d’une guérilla acharnée au cœur des grands espaces américains, du cercueil esclavagiste du Sud profond aux mouvements dangereusement idéalistes du Nord.

Ta-Nehisi Coates est l’auteur d’Une colère noire (Autrement, 2016 ; J’ai lu, 2017 ; lauréat du National Book Award 2015) ; Le Grand Combat (Autrement, 2017 ; J’ai lu, 2018) ; et Huit ans au pouvoir : une tragédie américaine (Présence africaine, 2020). Il est également lauréat d’une bourse MacArthur. La Danse de l’eau, son premier roman, a rencontré un grand succès critique et commercial aux États-Unis, et a été traduit dans quatorze langues. Ta-Nehisi Coates vit à New York avec sa femme et son fils.

Fayard : Parution 18/08/2021 Audiolib Parution le 13/04/2022 Durée : 15h22 lu par Alex Fondja Traduit par Pierre Demarty EAN 9791035408138 Prix 27,50 €

Alsace, rêver la province perdue 1871-1914, Musée national Jean-Jacques Henner

A la suite de la guerre de 1870 et du traité de Francfort la France doit céder l’Alsace et une partie de la Lorraine à l’Allemagne. Cela va durer 47 ans. Ces territoires qui sont alors nommés les « Provinces perdues » vont dès lors faire l’objet d’un véritable culte dans le reste du pays.

Jean-Jacques Henner en fera un tableau emblématique « L’Alsace, elle attend » ainsi que de nombreux autres visibles dans le musée.
De l’Alsace pittoresque à l’image des provinces perdues, des alsaciens exilés à Paris au culte populaire et à la revanche, l’exposition fait un tour des productions diverses et variées que les provinces ont inspiré.

On y retrouve Jean-Jacques Henner bien sûr, lui même alsacien, mais aussi Auguste Bartoli et son lion de Belfort ou sa statue « frontière », ainsi que d’autres artistes de l’époque.
Des femmes aux coiffes typiques au nœud bleu ou brodé qui devient noir en signe de deuil, image iconique et mélancolique qui a grandement aidé à diffuser le mythe de la province perdue à reconquérir.

Le panorama offert par le musée nous entraîne dans plusieurs décennies de regrets et de souhait de revanche, mais aussi de création artistique sur ce thème. Sont présentés dans l’exposition peintures, sculptures, objets d’art et du quotidien (j’ai apprécié découvrir les différentes coiffes des alsaciennes), dessins, affiches, estampes…

J’aime beaucoup ce musée situé dans cet hôtel particulier emblématique des maisons d’artistes de la plaine Monceau, qui était la demeure et l’atelier du peintre Guillaume Dubufe (1853-1909). Le musée Jean-Jacques Henner est un peu trop confidentiel à mon goût, il mérite vraiment la visite. Cette exposition est proposée en partenariat avec le musée Alsacien de Strasbourg.

Où : Musée national Jean-Jacques Henner, 43 av de Villiers Paris 17 billets : Plein tarif : 6 €
Quand : jusqu’au 7 février 2022

Sangoma, les Damnés de Cape Town, Caryl Férey, Corentin Rouge

Même vingt ans après sa fin annoncée, l’apartheid laisse des traces dans la population d’Afrique du Sud. Les afrikaners propriétaires terriens représentent encore une minorité de la population mais ils détiennent toujours la majorité des terres. Ces terres exploitées depuis des centaines d’années par leurs ancêtres, grâce au travail des esclaves. Si aujourd’hui ce sont des salariés qui travaillent les vignes et les terres agricoles, la famine et les privations sont toujours là, et la révolte gronde parmi ces travailleurs qui réclament la restitution des terres volées à leurs ascendants.

C’est dans ce contexte que l’on découvre l’exploitation viticole de la famille Pienaar. Sam, l’un des ouvriers, est retrouvé mort dans les vignes. L’inspecteur Shane Shepperd, un policier au comportement pour le moins singulier, est chargé de l’enquête.

Mais les langues ont du mal à se délier, surtout quand l’enquête touche aux secrets de famille, aux croyances religieuses et animistes, à la sorcellerie. Shepperd devra s’armer de courage pour affronter les bandes hostiles des township, les secrets des sorciers, les conflits politiques qui gangrènent le pays et les discussions au parlement.

Voici une excellente BD qui allie le scénario de Caryl Ferey, un auteur que j’apprécie pour ses romans, et Corentin Rouge aux dessins. C’est particulièrement réussi, le graphisme, les couleurs vives ou au contraires très emblématiques des paysages de la région, donnent le rythme. Il y a une véritable intensité dans ce récit qui tient les lecteurs en haleine, que l’on connaisse bien ou pas la situation de l’Afrique du Sud à cette l’époque ou même depuis. Une BD tout à fait à l’image des romans de Caryl Ferey, un intérêt historico-politique mêlé à une intrigue haletante.

Catalogue éditeur : Glénat

En Afrique du Sud, une vingtaine d’années après l’Apartheid, les cicatrices laissées par l’ancien système peinent à se refermer. Le racisme n’est plus institutionnalisé mais les inégalités toujours présentes et la population divisée entre les propriétaires blancs et les ouvriers noirs. Dans ce contexte, Sam est retrouvé mort sur les terres de la ferme des Pienaar, ses employeurs. Le lieutenant Shepperd – esprit léger, avisé autant que séducteur et tête brûlée – est chargé de saisir les enjeux qui auront mené au drame.

Scénariste Caryl Férey / Dessinateur Corentin Rouge Paru le 03.11.2021 / 240 x 320 mm / Pages : 152