JazzMan, Jop

Dans une New Story City qui pourrait être NewYork City, Tony Scrump le nouveau et jeune maire de la ville a tous les pouvoirs sur ses administrés, qu’il tient sous sa coupe grâce à des ondes diffusées par sa radio, One FM.

Il a même décidé de raser tout un quartier de la ville, et depuis il ne fait vraiment pas bon s’y aventurer. Pourtant, c’est là que se trouvaient les clubs de Jazz, l’animation et surtout la vie, la vraie, artistique en particulier. C’est là qu’arrive un peu par hasard Edward Renard par une soirée glaciale et sombre.

Dès lors, par un concours de circonstances, c’est aussi dans ces bas fonds en démolition que vont se retrouver sans vraiment l’avoir choisi Birdy Jones Carter, un saxophoniste totalement désabusé, Edward Renard, un drôle de barman qui ne sait plus vraiment d’où il vient et pourquoi il est là, et Billie, qui n’est autre que la fille de Birdy et de son ex, Lady Taylor, c’est un génie de l’électronique qui sait tout ou presque sur la propagation de ces fameuses ondes radio.
Ensemble, ils vont tenter de pirater One FM, la radio à la fréquence unique de Tony Scrump, fréquence hypnotique qui fait tout oublier aux habitants qui l’écoutent.

Et l’on retrouve pèle-mêle la nouvelle génération qui impulse la démolition des quartiers et l’expulsion de ses habitants sans aucun scrupule, et sans même les reloger, la présence de la mafia, celle des anciens musiciens de jazz des vieux quartiers, tous se côtoient pour rendre l’ensemble cohérent et attachant.

Une BD toute en noir, bleu et blanc, assez hypnotique d’ailleurs dans son graphisme et par l’impression qui s’en dégage, à l’atmosphère glacée de fin d’un monde, celui de ceux qui pensent par eux-même, vivent, jouent de la musique et aiment la vie. La couverture cartonnée et le papier sont superbes et font de cette BD un très bel objet.

Catalogue éditeur : Albin-Michel

Le maire Tony Scrump a hypnotisé sa ville.
Mais un trio insolite formé par un barman amnésique, un saxophoniste dépressif et une jeune prodige de l’électronique, compte bien réveiller la population.
Des décombres du Old Square aux sommets du High District. Jop signe un premier roman graphique syncopé et envoûtant.

Date de parution 02 mars 2022 / prix 23,90 €

Quand sonne l’heure, Kirby Williams

De l’Amérique ségrégationniste à la France occupée, suivre Urby, un talentueux jazzman

Alors que les Allemands entrent dans Paris, en ce mois de juin 1940, les habitants tentent par tous les moyens de quitter la ville. C’est aussi ce que veulent faire Urby Brown, un jazzman noir qui avait déjà quitté La Nouvelle-Orléans pour échapper à la ségrégation raciale quelques années auparavant, et Hannah Korngold, une pianiste juive, sa compagne. Ils n’ont qu’un seul et même but, échapper aux nazis. Musiciens en sursit, ils doivent trouver un moyen de quitter la capitale, et c’est Stanley, l’ami de toujours qui va pouvoir les aider.

Urby Brown a été abandonné à sa naissance dans un foyer pour jeune noirs à La Nouvelle-Orléans. Son parcours a été suivi en secret par les hommes de main de son père, un aristocrate français qui avait abandonné sa mère au moment de sa naissance. Urby l’a découvert lorsqu’il est arrivé en France, mais ce dernier est un activiste fasciste aux idéaux et aux actions bien éloignées de celles d’Urby et Hannah. La relation entre les deux hommes est complexe et malsaine. Pourtant, fort de sa puissance malfaisante, il tient sous sa coupe ce fils qui ne veut pas de lui, en le menaçant de faire disparaître Hannah.

Fort heureusement, le vieux Stanley, un musicien de jazz qui a prêté à Urby ses premiers instruments et lui a permis de faire ses premiers pas de jazzman à la nouvelle-Orléans est toujours là, à Paris, pour protéger le jeune couple. Ses nombreuses connections lui permettent de les aider de loin sur le chemin semé d’embûches et de trahisons pour rejoindre le sud de la France et échapper à la déportation.

Un roman qui promettait de beaux moments de lecture, suspense, amour, intrigue complexe à souhait dans la relation entre les différents personnages en ces périodes d’avant-guerre et de débâcle, et un rappel de ces périodes troubles de notre Histoire. Pourtant, sans doute du fait des invraisemblances un peu trop nombreuses, il m’a manqué un petit quelque chose en plus pour être totalement emballée. Peut être faut-il lire avant Les enragés de Paris ce roman précédent dans lequel l’auteur plante le décor et fait connaître à ses lecteurs son personnage principal.

Catalogue éditeur : Baker Street

Le 14 juin 1940, les Allemands entrent dans Paris. En quelques jours, ils posent leur empreinte sur une ville déjà désertée de près de deux tiers de ses habitants. Parmi ceux-ci, le jazzman noir Urby Brown, exilé quelques années plus tôt de La Nouvelle-Orléans, et sa compagne juive Hannah Korngold qui s’efforcent eux aussi par tous les moyens d’échapper à l’oppression nazie.
Confrontés à l’antisémitisme et au racisme, poursuivis par un groupe de néo-fascistes, ils se lancent dans un périple qui manque à plusieurs reprises de leur être fatal. Il leur réserve, de Paris à Bordeaux, d’étonnantes rencontres, jusqu’à un éphémère échange avec le général de Gaulle qui leur propose de les embarquer dans son avion pour Londres…
Thriller historique et politique haletant, aux multiples péripéties, ce roman inventif nous offre, à travers une chronique saisissante de la période précédant l’arrivée des Allemands dans Paris et de la panique qui s’ensuit, précipitant sur les routes des milliers de gens, l’occasion d’une réflexion sur l’intolérance et la haine raciales.

Traduction SOPHIE GUYON  / parution 18 Janvier 2022 / 21.00 €

Elles disent, Léonora Miano

D’Olympe de Gouges à Toni Morisson
De Barbara à Erica Jong
D’Anaïs Nin à Jeanne Moreau
De Delphine Horvileur à Marguerite Yourcenar
De Gisele Halimi à Winnie Mandela
Léonora Miano les convoque toutes et rassemble ici leurs mots pour nous les proposer à son tour.

À travers ces citations, qu’elles soient intellectuelle, révolutionnaire, avocate, chanteuse, écrivain ou visionnaire, chacune nous offre ses pensées, ses paroles, ses idées dans ce recueil construit comme une harmonie musicale.

Exactement le genre de recueil que l’on a envie d’avoir avec soi, et de lire et relire de temps à temps. À offrir et/ou à s’offrir, ou les deux !

« Ma revendication en temps que femme c’est que ma différence soit prise en compte, que je ne sois pas contrainte de m’adapter au modèle masculin » Simone Veil.

Catalogue éditeur : Grasset

« Des femmes d’horizons différents parlent, se parlent. Parfois  de manière frontale, parfois en se tournant le dos ou en se  prenant par la main.
Celles dont les mots composent cette mélopée sont spirituelles,  politiques, cérébrales, sensuelles, visionnaires, enragées,  mystiques, torturées, espiègles.
Leurs citations s’organisent en une manière de conversation  qui emprunte au jazz avec ses harmonies et dissonances, à  l’emphase d’antiques prêtresses, à diverses modalités du chant.
Ce n’est pas le testament des femmes qui est ici proposé,  mais une déambulation rythmée dans leurs paroles. » L.M.

Léonora Miano est née en 1973 à Douala, au Cameroun.
Prix Goncourt des lycéens pour Contours du jour qui vient en 2006, Grand prix littéraire d’Afrique noire en 2011 pour l’ensemble de son œuvre, Prix Femina pour La saison de l’ombre en 2013, elle est l’auteur d’une œuvre forte d’une vingtaine de titres en fiction et non-fiction. Son dernier essai : Afropea. Utopie post-occidentale et post-raciste, Grasset, 2020.

Parution : 29 Septembre 2021 / Format : 120 x 185 mm / Pages : 56 / EAN : 9782246824619 prix 6.00€ / EAN numérique: 9782246824626 prix 4.49€

Je te verrai dans mon rêve, Julie Bonnie

Même sans même sang… ou comment devenir père sans l’être vraiment

Une ville de province, quelque part au seuil des années 70. Gérard a trente ans, il vient de sortir de prison ; des années à galérer avec des potes pas très recommandables lui ont coûté dix ans de vie derrière les barreaux. À la sortie, il retrouve le café de ses parents aujourd’hui disparus, ce bien qu’a gardé pour lui Nana, la tante fidèle qui ne l’a jamais abandonné.

Nouvelle vie, nouveau prénom, c’est donc Blaise qui rénove le café pour le transformer et créer le lieu de ses rêves, un café concert pour les musiciens de jazz de la région.

Un matin, il croise une jeune femme. Josée a vingt ans et sa fille Nour quelques jours à peine. Josée dans laquelle il se retrouve, paumée, en marge, fragile et déjà bien abîmée par la vie. Car la galère, il connaît, et dans cette ville comme dans tant d’autres, les mauvaises fréquentations et les dangers ne sont jamais loin. Immédiatement, alors qu’il n’a jamais été père, Baise ressent une profonde affection pour ce tout petit bébé né de père inconnu.

L’auteur alterne les récits de Nour puis de Blaise. Nour que l’on voir grandir à la fois dans ses souvenirs et dans ceux de Blaise. Blaise qui s’est un peu trop assagit sans doute aux yeux d’une jeune fille de seize ans qui rêve d’émancipation, de modernité, d’un peu de folie. Ni Blaise ni Josée ne la voient devenir jeune fille puis presque femme, et ni l’un ni l’autre ne comprennent ses tourments et ses envies d’autre chose, d’ailleurs.

Ce que j’ai aimé ?

À l’heure où les romans nous parlent si souvent de relation toxiques ou bancales entre homme et femme, l’amour paternel aussi platonique qu’inconditionnel qu’éprouve Blaise pour Nour, cette relation qui apaise, qui aide à grandir nous fait du bien à nous aussi lecteurs.

La vie n’est ni simple ni linéaire. La rédemption de Blaise dont on devine le passé complexe à peine esquissé mais très habilement suggéré, les embûches les chausses trappes dans lesquelles tombe Josée, les hésitations et les erreurs de jeunesse de Nour sont aussi la vraie vie, celle des jeunes autour de nous, celle que l’on ne voit pas toujours. Mais il y a une telle force d’amour, d’émotion, de sincérité, que l’on ne peut qu’aimer les différents protagonistes, avec leurs défauts, leurs erreur, leurs faux-pas et leurs espoirs.

L’écriture est sobre, intimiste, réaliste aussi. On s’y laisse prendre et il en ressort à la fois douceur et sérénité à voir que l’on peut aussi croire en ces rêves qui parfois nous portent.

Du même auteur, javais lu et particulièrement aimé Barbara, roman, dont vous pouvez retrouver la chronique ici.

Catalogue éditeur : Grasset

1971. Tout juste sorti de prison, Gégé, dit Blaise, retrouve le bar familial dont il a hérité à la mort de son père. Son rêve  de toujours  : le transformer en café-concert pour en faire un rendez-vous incontournable de la scène jazz. Il se lance, résolu à faire bouger sa ville terne et sans âme.
Mais un bébé, la petite Nour, et sa mère défaillante arrivent par effraction dans sa vie solitaire. Blaise fait tout pour les garder à distance. Hanté par son passé, il craint plus que tout de s’attacher… Mais d’un regard, l’enfant fait tomber ses résistances, et il va désormais veiller sur elle à sa façon. Ce faux père la protège tant bien que mal, l’initie à la musique, lui offre sa première guitare et son premier concert. Il la regarde grandir, adolescente écorchée vive qui se brûle aux accidents de la vie, ceux qui menacent à coup sûr les gamines sans repères.
En ville règne une atmosphère de perdus, d’à quoi bon, alcoolisée et souvent brutale. Au milieu de tous les dangers, Nour chante. Et entre deux concerts de jazz mythiques dans le bar de Blaise, elle compose, pour fuir son enfance, tracer son destin, tenter de défier la mort.
Blaise, l’ancien taulard paumé et farouche, s’est mis à aimer. Et parce qu’il est la victime d’un secret de famille, il va tout faire pour sauver Nour. Jusqu’à la dernière page, nous respirons avec eux et tremblons pour eux. Romanesque, haletant, sensible et bouleversant.

Née à Tours, Julie Bonnie a donné son premier concert à 14 ans et chanté dans toute l’Europe pendant dix ans avant de travailler en maternité jusqu’en 2013. Elle est l’auteur de Chambre 2 (Belfond, 2013 ; Pocket, 2014), lauréat du prix du roman Fnac 2013, adapté au cinéma sous le titre Voir le jour, avec Sandrine Bonnaire. Chez Grasset, elle a publié Mon amour (2015 ; Pocket, 2017), Alice et les orties (2016) et Barbara, roman (2017 ; Pocket, 2019 ). Elle publie chez Albin Michel une série pour adolescents à succès, L’internat de l’île aux cigales et crée des spectacles musicaux pour les tout-petits.

Paru le 10 Mars 2021 / Format : 131 x 205 mm / Pages : 180 / EAN : 9782246826279 prix 18.00€ / EAN numérique : 9782246826286 prix 12.99€

La femme révélée, Gaëlle Nohant

La femme révélée nous embarque entre Paris et Chicago, des années 50 à la fin des années 60

En 1950, à Paris, une jeune femme vient de débarquer avec pour seul viatique son appareil photo Rolleiflex. Une situation surprenante car jusqu’alors elle vivait confortablement à New-York avec son époux et son petit garçon. Elle n’a emporté que quelques bijoux, témoins de l’aisance de sa vie passée. Hébergée dans un clandé plutôt louche, elle se fait dévaliser.

Désormais fauchée, elle se retrouve à la merci de la patronne de cet hôtel de passe. Aidée de Rose, une prostituée au grand cœur, elle trouve refuge dans un foyer pour jeunes femmes et tente de vivre grâce à de petits boulots. Elle découvre aussi St-Germain-des-prés et les soirées Jazz. A la façon de Vivian Maier, elle prend plaisir à parcourir les rues de Paris toujours armée de son appareil photo pour y saisir des scènes de vie que son talent sait mettre en valeur. Elle a fui on ne sait qui ni quoi, et si le mystère est d’abord épais, les raisons de sa fuite deviennent de plus en plus évidentes à mesure que se dévoile son passé.

Dans ce roman construit en deux parties assez différentes l’auteur nous entraîne par son écriture à la fois réaliste et poétique et son talent de conteuse dans les pas de Violet-Eliza, personnage mystérieux et très attachant.

Avec Violet, le lecteur découvre le Paris des années 50 où tout est à reconstruire sur les ruines de la seconde guerre mondiale. Puis les années 60/70, avec la crise immobilière aux États-Unis, mais surtout les différences de traitement entre blancs et noirs, jusque dans les états du nord prétendument moins racistes. Car si les problèmes de racisme n’y sont pas aussi ouvertement déclarés que dans le sud, ils régissent les lois du marché et de la politique plus sûrement que s’ils étaient verbalisés. Ce sont les prémices de la fin de la ségrégation raciale, mais aussi les assassinats de Martin Luther King et Robert Kennedy, puis la révolte grandissante de la jeunesse contre la guerre du Vietnam pendant la présidence de Nixon.

Une fois de plus, Gaëlle Nohant a su me séduire et me convaincre avec son personnage. Cette femme émouvante, attachante et combative, qui lutte pour vivre libre et suivre ses convictions les plus intimes, au risque d’y perdre sa vie, et surtout de perdre ce qu’elle a de plus cher, son fils.

Gaëlle Nohant parle de liberté, de soif de vivre, et d’exil, mais aussi de ce bonheur qu’il peut y avoir à se réaliser pleinement en accord avec ses convictions les plus profondes.

Du même auteur, lire aussi l’émouvant roman Légende d’un dormeur éveillé qui évoque si bien le poète Robert Desnos.

Catalogue éditeur : Grasset

Paris, 1950. Eliza Donneley se cache sous un nom d’emprunt dans un hôtel miteux. Elle a abandonné brusquement une vie dorée à Chicago, un mari fortuné et un enfant chéri, emportant quelques affaires, son Rolleiflex et la photo de son petit garçon. Pourquoi la jeune femme s’est-elle enfuie au risque de tout perdre ?
Vite dépouillée de toutes ressources, désorientée, seule dans une ville inconnue, Eliza devenue Violet doit se réinventer. Au fil des rencontres, elle trouve un job de garde d’enfants et part à la découverte d’un Paris où la grisaille de l’après-guerre s’éclaire d’un désir de vie retrouvé, au son des clubs de jazz de Saint-Germain-des-Prés. A travers l’objectif de son appareil photo, Violet apprivoise la ville, saisit l’humanité des humbles et des invisibles.

Dans cette vie précaire et encombrée de secrets, elle se découvre des forces et une liberté nouvelle, tisse des amitiés profondes et se laisse traverser par le souffle d’une passion amoureuse.
Mais comment vivre traquée, déchirée par le manque de son fils et la douleur de l’exil ? Comment apaiser les terreurs qui l’ont poussée à fuir son pays et les siens ?  Et comment, surtout, se pardonner d’être partie ?

Vingt ans plus tard, au printemps 1968, Violet peut enfin revenir à Chicago. Elle retrouve une ville chauffée à blanc par le mouvement des droits civiques, l’opposition à la guerre du Vietnam et l’assassinat de Martin Luther King. Partie à la recherche de son fils, elle est entraînée au plus près des émeutes qui font rage au cœur de la cité. Une fois encore, Violet prend tous les risques et suit avec détermination son destin, quels que soient les sacrifices.
Au fil du chemin, elle aura gagné sa liberté, le droit de vivre en artiste et en accord avec ses convictions. Et, peut-être, la possibilité d’apaiser les blessures du passé. Aucun lecteur ne pourra oublier Violet-Eliza, héroïne en route vers la modernité, vibrant à chaque page d’une troublante intensité, habitée par la grâce d’une écriture ample et sensible.

Format : 141 x 206 mm / Pages : 384 / EAN : 9782246819318  / Prix : 22.00 / Parution : 2 Janvier 2020

Boris Vian, le sourire créateur, Valère-Marie Marchand

Dans « Boris Vian. Le sourire créateur » Valère-Marie Marchand retrace la vie de Boris Vian alias Vernon Sullivan, sublime artiste talentueux et singulier disparu en 1959.

Chanteur, polémiste, libertaire mais pas contestataire, scénariste, traducteur, interprète, auteur, trompettiste, et passionné, Boris Vian est un touche-à-tout de talent.

Né en mars 1920 à Ville d’Avray, banlieue chic de Paris, ce pilier du saint Germain des Près de l’après-guerre va connaître la seconde guerre mondiale et fera ses études et ses débuts sous l’Occupation. Ce génie des mots et des notes est avant tout un être singulier. Ingénieur de formation et de métier, c’est un artiste à la créativité débordante. C’est un littéraire aussi éclectique que talentueux, un timide pourtant contestataire, un amoureux toujours passionné, un traducteur de génie, un musicien en sursit puisqu’une malformation cardiaque aurait dû l’empêcher de jouer de la trompette.

Boudé par les professionnels et les critiques en particulier, il écrit « des histoires que personne n’a songé à écrire » et produit de nombreux textes et romans, poésies, essais, chansons. Il touche même au cinéma. Il écrit et joue contre le temps, contre la maladie qui l’emportera comme il l’avait prédit à l’aube de ses quarante ans.

Bien sûr ici aucune surprise, l’homme, sa passion du jazz, ses chansons, ses écrits, sont connus. Mais voilà assurément un document complet et dense, foisonnant de témoignages, qui éclaire l’image que l’on a de lui et va permettre de le faire découvrir au plus grand nombre.

Boris Vian ou Vernon Sullivan, un auteur que j’ai aimé passionnément dans ma jeunesse et dont j’ai lu quasiment toute l’œuvre, aussi bien les romans que les différents textes et chansons. Je ne pouvais donc qu’être intéressée et intriguée par un nouveau texte sur cet auteur emblématique d’une époque qui nous a quittés il y a soixante ans.

Boris Vian, le sourire créateur est un livre dense, hyper documenté parfois jusqu’à saturation pour un lecteur qui ne serait pas passionné. Mais tellement complet qu’il est indispensable pour bien comprendre l’homme et l’artiste qui se cachent derrière ce nom connu de tous : Boris Vian. Et pour compléter le tout, on trouve à la fin du livre un lexique des mots et expressions emblématiques de l’auteur, sa biographie en quelques dates, ses différentes adresses, sa bibliographie, les titres des principales chansons qu’il a écrites, ses apparitions au cinéma, et un index qui répertorie les noms de ceux qui l’on côtoyé… toute une époque défile dans ces quelques pages.

Catalogue éditeur : Écriture, éditions de L’Archipel

Le 23 juin 1959, Boris Vian est terrassé par une attaque pendant la projection de J’irai cracher sur vos tombes, film tiré de son roman. Il disparaît avant d’avoir eu 40 ans, comme il l’avait lui-même prédit.

« Né sous le signe du poisson-volant », l’inventeur de la roue élastique était imprévisible. Chanteur et polémiste, libertaire mais non contestataire, classique sans cesser d’être d’avant-garde. Mais aussi scénariste, traducteur, bricoleur, peintre, trompettiste, amateur de cylindrées, interprète, fabuliste, acteur, pataphysicien, objecteur de conscience, poète… Et, bien sûr, romancier : le prince de Saint- Germain-des-Prés, alias Vernon Sullivan, avait autant d’identités que de pseudonymes.
Fuyant le « grelot funèbre des prophètes », les musiciens à théories comme les romanciers à  thèses, que pouvait bien cacher l’énigmatique Bison Ravi, ingénieur du verbe, du swing et de la vie ? Quatre-vingts de ses proches, à commencer par Michelle Vian, répondent dans ce livre, dont certains n’avaient jamais témoigné : Guy Béart, Claude Bolling, Juliette Gréco, le maquettiste Massin, Georges Moustaki, J.-B. Pontalis, Jean-Jacques Pauvert, Nadine de Rothschild…
Enrichie de documents rares ou inédits, cette biographie est aussi le portrait d’une époque. Jamais le singulier auteur de L’Ecume des jours et de L’Arrache-cœur n’avait paru si pluriel.

22.00 € / EAN : 9782359052992 / juin 2019

K.O. Hector Mathis

K.O. ou chaos ? Et si c’était la question que pose finalement ce premier roman d’Hector Mathis…

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Par un soir étrange, dans la cabane du garde-chasse en bordure d’un château tout au fond de la forêt, au son d’un saxo joué ou imaginé par le vieux Archibald, qui tousse et écoute, écoute et tousse, le lecteur emboite le pas de Sitam. Le narrateur est un jeune homme amateur de jazz, poète à ses heures – un double romancé de l’auteur peut-être ? – tout comme Sitam pourrait être un double imparfait et inversé de Mathis ?

Avant cette cabane, avant cette rencontre, il y a eu Paris, un logement prêté, une vie de bohème. Sitam et sa môme Capu,  fauchés comme les blés, s’aiment en musique en savourant chaque seconde. Puis survient le chaos, les coups de feu, les attentats, les bombes et la ville qui bientôt  pourrait se refermer sur eux. Ils partent, vite, loin, vers Grisaille, l’ancienne ville de Sitam…

Cette fuite sonne le début de leur longue marche à travers la campagne vers la zone, la banlieue, puis l’autre ville. Rejoints par Benji, amoureux fou d’une aubergiste folle, la vie passe loin du vacarme. Jusqu’au jour où… Là ce sera non pas seulement la banlieue, mais Amsterdam, une autre ville, une autre langue, un autre pays.

Au même moment, Sitam ressent d’étranges douleurs. Examens, hôpital, personnel soignant débordé, la maladie est là, sournoise, qui va le détruire peu à peu. Une fois de plus, il quitte tout.

Dans le rythme et le style du personnage principal, il y a un soupçon de la course effrénée du voyageur au bout de la nuit… Dans cette fuite, dans la maladie, la folie, la pauvreté, mais aussi la solidarité des va-nu-pieds, l’amitié, la poésie parfois. C’est écrit dans un style étonnant, mais qui m’a rapidement lassée, surtout dans la relation avec Archibald. Car cette écriture m’a comment dire, fatiguée. Il m’a manqué quelque chose, un je ne sais qui qui m’aurait rendu attachants ces différents personnages. Là je les ai à peine survolés, sans pouvoir réellement ni les entendre, ni les comprendre, ni les aimer ou les haïr d’ailleurs.

Dans ce texte il y a la musicalité des mots, l’écriture et la poésie, c’est rythmé et ça balance parfois comme la vie, bercé par l’éphémère et le provisoire. Même s’il m’a manqué un je ne sais quoi, peut-être parce que ce rythme m’a rappelé d’autres auteurs et surtout m’a embarquée dans trop de situations, un bon souvenir de lecture.

Roman lu également dans le cadre de ma participation au jury du prix littéraire de la Vocation 2019.


Catalogue éditeur : Buchet-Chastel

Sitam, jeune homme fou de jazz et de littérature, tombe amoureux de la môme Capu. Elle a un toit temporaire, prêté par un ami d’ami. Lui est fauché comme les blés. Ils vivent quelques premiers jours merveilleux mais un soir, sirènes, explosions, coups de feu, policiers et militaires envahissent la capitale. La ville devient terrifiante…

Bouleversés, Sitam et Capu décident de déguerpir et montent in extremis dans le dernier train de nuit en partance. Direction la zone – « la grisâtre », le pays natal de Sitam. C’est le début de leur odyssée. Ensemble ils vont traverser la banlieue, l’Europe et la précarité…

Nerveux, incisif, musical, K.O. est un incroyable voyage au bout de la nuit. Ce premier roman, né d’un sentiment d’urgence radical, traite de thèmes tels que la poésie, la maladie, la mort, l’amitié et l’errance. Il s’y côtoie garçons de café, musiciens sans abris et imprimeurs oulipiens. Splendide et fantastique, enfin, y règne le chaos.

Date de parution : 16/08/2018 / Format : 11,5 x 19,0 cm / 208 p. / 15,00 € / ISBN 978-2-283-03148-3

Joséphine Baker. Catel & Bocquet

Pourquoi j’ai adoré ce roman graphique de Catel & Bocquet : une façon extraordinaire de redécouvrir une vie hors norme, celle de Joséphine Baker

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Joséphine est née à Saint louis, dans le Missouri en 1906, à une époque où la ségrégation veut dire quelque chose, où tout semblait possible et où pourtant la vie était si difficile. Très jeune, elle aime faire la rigolote, et surtout, surtout, danser… elle a des jambes longues comme un jour sans pain, et sa mère ne les aime pas beaucoup, ces jambes-là. Mais elles feront sa gloire lorsqu’elle descendra comme une reine l’escalier des folies bergères. Pour arriver jusque-là, il lui aura fallu des maris, plusieurs, des amants, beaucoup, de l’audace, du courage et de l’ingéniosité, et du talent, forcément. C’est aussi beaucoup de travail, danser pendant des heures, apprendre à chanter, à marcher, à parler français, puisqu’elle arrive à Paris en 1925. Elle adoptera la France, comme elle adoptera plus tard une tribu de douze enfants venus de tous les continents, de toutes les couleurs, de toutes les religions et qu’elle les abritera au château des Milandes dans le Périgord.

Joséphine se battra également pour lutter contre la ségrégation, elle qui a su très vite ce que c’est d’être traitée de négresse dans son propre pays, ou au contraire d’être acceptée et acclamée malgré sa couleur de peau, lorsqu’elle arrive en France.

Joséphine, c’est aussi cette femme qui chante pour les soldats, qui passe des documents secrets d’un pays à l’autre pendant  la guerre, qui fera la résistance  et sera remerciée pour son action par le général de Gaulle.

C’est une vie intense, joyeuse, d’amour donné et pas si bien reçu, de partage et de courage, de dépression et de maladie aussi. Acclamée, regrettée, Joséphine Baker est une figure talentueuse d’une époque révolue. Elle meurt en 1975, tombée dans le coma à la suite d’une représentation à Bobino.

Le graphisme est vraiment intéressant. Entièrement en noir et blanc, comme un vieux film d’époque peut-être. La chronologie en fin du volume est complète et riche de nombreux détails. Enfin, les personnages secondaires qu’elle croise tout au long de sa vie sont également détaillés, expliqués, nous donnant à revoir une partie de notre histoire. Bravo !

J’avais très envie de découvrir cette BD grâce à Pénelope Bagieu qui parle si bien de Joséphine Baker dans son album « Les Culottées« tome 1, que je vous conseille vivement !


Catalogue éditeur : Casterman

Entre glamour et humanisme, la vie tumultueuse de la première star mondiale noire.

Joséphine Baker a 20 ans quand elle débarque à Paris en 1925. En une seule nuit, la petite danseuse américaine devient l’idole des Années Folles, fascinant Picasso, Cocteau, Le Corbusier ou Simenon. Dans le parfum de liberté des années 1930, Joséphine s’impose comme la première star noire à l’échelle mondiale, de Buenos Aires à Vienne, d’Alexandrie à Londres.
Après la guerre et son engagement dans le camp de la résistance française, Joséphine décide de se vouer à la lutte contre la ségrégation raciale. La preuve par l’exemple : au cours des années 1950, dans son château des Milandes, elle adopte douze orphelins d’origines différentes, la tribu arc-en-ciel.
Elle chantera l’amour et la liberté jusqu’à son dernier souffle.

568 pages – 17.2 x 24.2 cm / Noir et blanc / ISBN : 9782203088405

Zazous. Gérard de Cortanze

Les Zazous, c’est l’affirmation d’une jeunesse contestataire aux cheveux longs et aux tenues excentriques, qui écoute du swing et qui enflamme la France des années 40 en refusant l’ordre établi.

« Le Zazou refuse l’ordre nouveau qui lui est imposé. C’est une attitude politique qui dicte le comportement du zazou, un peu comme les incroyables ou les muscadins…. »

Ils sont nombreux les Zazous du café Eva, on a parfois un peu de mal à les reconnaitre au début du roman. Il y a Odette, Marie, l’artiste qui chante dans les cabarets, Lucienne, modiste, Sarah la jeune fille juive, Josette, Jean et Pierre les lycéens, Charlie, l’américain qui devient français-antillais pour survivre, et Gerhard, le soldat allemand qui aime tant la musique. Ils vivent tous les maux des jeunes grandis trop vite dans les tourments de l’histoire. Qu’il s’agisse d’amour ou d’amitié, leurs aventures sont celles des jeunes de leur âge, relations torturées, compliquées ou évidentes, heureuses ou tristes, mais souvent réalistes. Et ce malgré tous les interdits, qui paraissent tellement incroyables, énormes ou dérisoires, mais qui lorsqu’on les brave chaque jour deviennent mortellement dangereux.

Au fil des pages l’auteur nous présente un panorama très complet de la vie artistique, de la musique, de la mode, de la vie en somme, de cette jeunesse qui vit dans un Paris occupé mais pas vaincu. Vision que l’on trouve rarement dans les romans traitant de cette époque. C’est étonnant et permet de comprendre comment chacun a réussi à se débrouiller pour vivre, s’habiller, faire bonne figure, pour trouver ce semblant de normalité qui même dans l’excès prouve que l’on existe.
Petit bémol peut être, au fil de la lecture, on se demande d’où viennent ces jeunes qui vont si souvent au cinéma et au concert l’après-midi – puisqu’il faut rentrer avant le couvre-feu et parce que tout s’arrête le soir- et qui chaque jour ou presque se retrouvent au café Eva. Quand vont-ils au travail, quelle est leur vie, où sont leurs familles et que fait leur entourage, sont-ils des étudiants sans parents, qu’elle est donc leur réalité dans ce monde des années 40 ?

Dans ce roman de Gérard de Cortanze, l’occupation et les années sombres de la seconde guerre mondiale sont décrites en musique et avec beaucoup d’originalité, car le phénomène Zazous est peu connu et peu décrit finalement. Tout le monde à plus ou moins entendu le mot sans toujours savoir ce qu’il recouvre. Nous voilà donc un peu moins ignorants, et sans doute un peu admiratifs de ces jeunes de 15 à 20 ans qui, sous couvert d’insouciance, cherchaient malgré tout à montrer leur refus de vivre sans agir dans un Paris aux mains de l’ennemi, après l’armistice signée par un général Pétain collaborateur et tellement décevant.

Le texte est parsemé de très nombreuses anecdotes et de faits historiques, j’aurais presque souhaité un deuxième tome, rendant ainsi plus fluide l’histoire de cette bande de zazous auxquels on met un peu de temps à s’attacher. C’est cependant un roman très complet, intéressant et passionnant surtout lorsqu’on s’intéresse à la petite histoire, celle qui par ses actions combinées forme la grande Histoire. Et qui nous donne très certainement envie d’aller écouter un air de swing !

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Catalogue éditeur : Albin Michel

On n’est pas sérieux quand on a quinze ans – même en pleine Occupation. Chaque jour, au café Eva, une bande de zazous se retrouve pour écouter du jazz. Josette, Pierre et Jean sont lycéens, Sarah est coiffeuse, Charlie trompettiste, Marie danseuse, Lucienne apprentie mannequin. Dans un Paris morose, ils appliquent à la lettre les mots d’ordre zazous : danser le swing, boire de la bière à la grenadine, lire des livres interdits, chausser en toutes circonstances des lunettes de soleil et enfiler de longues vestes à carreaux. Lire la suite

mars 2016 / Format : 220 mm x 150 mm / 544 pages / EAN : 9782226324047 / Prix : 22.50 €