Mademoiselle Papillon, Alia Cardyn

Un magnifique hommage aux infirmières

Dans les années 20 Thérèse Papillon est infirmière. Elle vient en aide aux plus malheureux. Il faut dire que l’on sort tout juste de la grande guerre dans laquelle elle s’était par ailleurs engagée. Elle est envoyée par la croix rouge dans le nord de la France, au dispensaire de Vraignes-en-Vermandois. Si son travail lui permet de venir en aide aux malades, chaque jour elle croise aussi la route d’enfants mal nourris, qui hantent les rues du village, jeunes pousses grandies avant l’heure. Ces petits, et un en particulier, l’émeuvent et la tourmentent, elle cherche comment leur venir en aide. Une idée germe, celle de créer un préventorium, pour nourrir et protéger les plus faibles, leur permettre de ne pas attraper la tuberculose, un mal sournois qui frappe enfants et adultes.

Avec pugnacité, elle va frapper aux portes des notables ou des institutionnels, et fini par obtenir de s’installer dans l’abbaye de Valloires, en baie de Somme. Un site qu’elle choisit entre trois propositions pour son toit en bon état, la sagesse paternelle ayant laissé des traces.

Dans ce préventorium, elle recueille et soigne des centaines d’enfants qui resteront là de nombreuses années. La guerre de 39/40 voit l’abbaye en partie investie par les soldats allemands. Elle réussira pourtant à y abriter aussi des enfants juifs.

De nos jours, Gabrielle est infirmière dans un service de néonatalogie intensive. Un travail difficile puisqu’il consiste la plupart du temps à essayer de sauver les grands prématurés et à soutenir mères et pères aussi désespérés que démunis. Il n’est pas toujours facile de se constituer une carapace et de ne pas souffrir des échecs. C’est un métier très lourd émotionnellement. Parfois Gabrielle se demande comment elle pourra le poursuivre. Tant elle se sent usée, abîmée.

Un jour, sa mère lui confie un manuscrit retraçant la vie de mademoiselle Papillon …

Le roman alterne les vies et les interrogations des deux infirmières, tout aussi attachantes et émouvantes l’une que l’autre dans la réalisation de leur métier, de leur passion, dans les questionnements qui leur permettent aussi d’avancer vers d’avantage d’humanité et d’empathie. Ce n’est jamais ni larmoyant, ni trop descriptif, malgré les circonstances évoquées, je pense en particulier aux salles de néonatalogie et à ces tous bébés prématurés qui s’accrochent à la vie.

J’y ai découvert avec Gabrielle l’approche du Nidcap pour prendre en charge ces grands prématurés. En quelque sorte, une attention que l’on porte aux émotions et au bébé lui-même, en limitant le stress causé par l’environnement hospitalier et par la façon de leur donner les soins, et en restituant leur place aux parents lors de l’hospitalisation des bébés.

Voilà un roman qui ne laisse pas ses lecteurs (lectrices) indifférents, c’est évident. L’auteur a su passer aisément d’une infirmière à l’autre, équilibrer son récit et nous faire entrer dans leurs vies, partager leurs espoirs et leurs émotions. Un magnifique hommage aux infirmières, à ces femmes (et ces hommes) qui font un métier difficile avec passion.

Thérèse Papillon née en 1886, à Saint-Germain-en-Laye, décédée en 1983, a reçu, à titre posthume, le diplome et la Médaille des Justes parmi les nations, remis aux personnes non juives, qui ont sauvé des Juifs sous l’Occupation, au péril de leur vie.

Le NIDCAP (Neonatal Individualized Developmental Care Assessment Program ou programme néonatal individualisé d’évaluation et de soins de développement) est une philosophie de soins crée en 1986 à Harvard par Heidelise Als, docteur en psychologie, qui a pour but de soutenir le développement des nouveau-nés prématurés ou vulnérables pendant leur hospitalisation.

Catalogue éditeur : Robert Laffont

Gabrielle, 30 ans, infirmière, s’occupe de grands prématurés dans un service de néonatologie intensive. L’univers de la jeune femme s’est réduit aux quelques mètres carrés de sa salle, la salle 79, où elle glisse lentement dans l’indifférence, lorsqu’elle découvre l’histoire de Mademoiselle Papillon.
En 1920, dans une France ravagée par la Première Guerre mondiale, cette infirmière de la Croix-Rouge est envoyée au dispensaire de Vraignes-en-Vermandois. Alors qu’elle tente de mener à bien sa mission, la vision des enfants qui succombent dans la rue l’obsède. Une ambition se forme et prend bientôt toute la place : elle doit bâtir une maison pour les protéger.
Lorsqu’elle franchit le seuil de la sublime abbaye de Valloires, Mademoiselle Papillon est convaincue d’approcher son rêve.

EAN : 9782221249352 / Nombre de pages : 272 / Format : 140 x 225 mm / Prix : 18.00 €

Toute la violence des hommes, Paul Colize

Un thriller palpitant qui nous entraîne de la Belgique d’aujourd’hui à la Croatie des années 90

Un roman inspiré par des fresques monumentales apparues sur les murs de Bruxelles. Peintes de nuit par un graffeur qui souhaite garder l’anonymat. Aujourd’hui, certaines fresques ont été recouvertes, mais la principale est toujours visible. Et si ces fresques avaient un sens secret, étaient comme une suite, racontaient une histoire ?

A Bruxelles, Nikola Stakovic est graffeur, un artiste solitaire qui vit très bien son anonymat. Ses fresques émeuvent autant qu’elles bouleversent par la violence qui s’en dégage. Mais aujourd’hui le jeune homme est au poste de police, prostré, mutique. Il est interrogé car il est le dernier à avoir vu vivante Ivanka, une jeune femme retrouvée chez elle criblée de coups de couteau. Sa seule réponse aux enquêteurs est un laconique « C’est pas moi ».

Que s’est-il passé ?
Qui est réellement Nikola ? Un génie, un assassin, un fou ? Impossible d’en savoir plus, son attitude interroge quant à ses capacités et sa responsabilité. Pour tenter de le comprendre, il est placé en observation dans un centre médical. Là, tant la directrice, qu’une partie du personnel et son avocat s’interrogent sur sa véritable personnalité. Présumant au fil des jours que sous ce silence s’abritent des démons venus de loin.

Car dans son enfance, Nikola a vécu à Vukovar  en Croatie.
Dans les années 90, les troupes Serbes de Slobodan Milosevic font le siège de Vukovar. Se battant à armes tout à fait inégales, la population tient plusieurs jours, mais la défaite est inéluctable. A ce moment-là, soldats et milices serbes se rendent coupables de nombreuses exactions sur la population. Crimes, viols, hommes, femmes, enfants, vieillards sans discrimination disparaissent en nombre. Nikola a huit ans. Devenu orphelin, il fuit vers l’ouest, vers l’Allemagne puis la Belgique. Pendant les mois de terreur, caché dans les abris souterrains, il a découvert qu’il pouvait évacuer sa terreur par le dessin. Dessin par lequel encore aujourd’hui il trouve un exutoire à ses traumatismes, pour atteindre une forme de délivrance, de liberté, tant par la création que par la libération de tous ses démons.

Le personnage totalement décalé de Nikola, qui souffre d’un trouble post traumatique dû à la guerre, est particulièrement émouvant. Son incapacité à communiquer, son silence, sa souffrance bouleversent. Le récit au présent alterne avec celui des années de guerre, de l’enfance puis de l’adolescence. Peu à peu le lecteur fait le lien, soulève le voile, décèle une part de vérité qu’il espère moins sombre, une lumière au bout  du chemin. Toutes la violence des hommes est un formidable roman à suspense et d’une grande créativité.

Aussi intéressant que passionnant, ce roman hommage au street art Bruxellois, nous dévoile une période de l’histoire récente méconnue et bouleversante. Le dosage entre l’intrigue et la partie historique est parfait, laissant ce qu’il faut de mystère et de justesse aux personnages. Et les personnages justement, et celui de Nikola en particulier, sont terriblement attachants. C’est un roman que je conseille à tous les amateurs du genre, un bon thriller psychologique appuyé par des faits historiques avérés.

Catalogue éditeur : Editions Hervé Chopin

Qui est Nikola Stankovic ?

Un graffeur de génie, assurant des performances insensées, la nuit, sur les lieux les plus improbables de la capitale belge, pour la seule gloire de l’adrénaline ?
Un peintre virtuose qui sème des messages profonds et cryptés dans ses fresques ultra-violentes ?
Un meurtrier ?
Un fou ?
Nikola est la dernière personne à avoir vu vivante une jeune femme criblée de coups de couteau dans son appartement. La police retrouve des croquis de la scène de crime dans son atelier.
Arrêté, interrogé, incarcéré puis confié à une expertise psychiatrique, Niko nie en bloc et ne sort de son mutisme que pour répéter une seule phrase : C’est pas moi.

Entre Bruxelles et Vukovar, Paul Colize recompose l’Histoire. Au-delà de l’enquête, c’est dans les replis les plus noirs de la mémoire, à travers les dédales de la psychologie et la subtilité des relations humaines qu’il construit son intrigue.

Paul Colize est né à Bruxelles, d’un père belge et d’une mère polonaise. Ses polars, à l’écriture aiguisée et au rythme singulier, sont ancrés dans le réel et flirtent avec la littérature générale.
Son œuvre (Back Up, Un long moment de silence, Concerto pour 4 mains…) a été récompensée par de nombreuses distinctions littéraires dont le prix Saint-Maur en poche, le prix Landerneau, le prix Polar pourpres, le prix Arsène Lupin et le prix Sang d’Encre des lecteurs.

14,5 X 22 cm / 320 pages / Paru le 05/03/2020 / ISBN 9782357205253 / Prix : 19€

Acide Sulfurique, Amélie Nothomb

Quand la téléréalité dépasse la fiction, jusqu’où l’homme peut-il aller…

Quand j’ai découvert Un samedi soir entre amis cela m’a fait penser à ce roman d’Amélie Nothomb dont j’avais posté la chronique sur lecteurs.com et Babelio en 2014. J’ai eu envie d’en parler à nouveau ici.

Amélie Nothomb fait une fois de plus très fort. Dans ce roman qui se lit d’une traite tant il est court, mais qui laisse un sentiment de malaise tant il est intense, elle nous raconte l’histoire poussé à l’extrême d’une émission de téléréalité.

Mais pas n’importe laquelle bien-sûr. Là les participants sont tout simplement enlevés dans les villes, et conduits dans un camp de concentration. Surveillés par des kapos à qui tout est permis surtout la plus grande violence, et sous l’œil de caméras postées partout dans le camp et qui filment tout et tout le monde 24h sur 24. L’horreur absolue des camps de concentration de la dernière guerre, pour le plaisir des téléspectateurs d’aujourd’hui ?

Les prisonniers sont des hommes et des femmes totalement déshumanisés. Comme dans les camps nazis on leur a simplement tatoué un chiffre sur le bras pour annihiler, en effaçant leur nom, jusqu’à leur personne. Et après tout, ignorer le nom de celui ou celle qui est face à soi permet d’agir avec plus de violence et sans aucune compassion, enlève toute proximité et réalité « humaine » à la personne car « le prénom est la clé de la personne. »

Ils sont prisonniers, ils vont subir l’arbitraire des gardiens, la faim, la soif, l’épuisement provoqué par des tâches difficiles, répétitives et parfaitement inutiles. Ils sont soumis au bon vouloir des kapos qui décident chaque matin qui doit mourir. Car de ce camp nul ne s’échappe et la seule issue est la mort. Horrible, filmée elle aussi, pour le plus grand plaisir des téléspectateurs toujours plus nombreux à faire de l’audience.

Nous suivons trois personnages en particulier : la kapo Zedna, une jeune femme de 20 qui avant d’être embauchée pour ce rôle n’avait rien réussi dans sa vie ; Pannonique, étudiante en paléontologie, jeune femme de 20 ans , si belle et lumineuse qu’elle attire le regard de tous et en particulier celui des caméras et des réalisateurs de l’émission, mais qui n’est plus que CKZ114 dans le camps ; EPJ327, professeur d’histoire dans la vraie vie, est très attiré par CKZ114.

CKZ114 fait figure de résistante, car elle comprend immédiatement qu’il faut être différente et ne pas flancher devant les caméras (même si celles-ci sont vite oubliées). Elle ne pleure pas, ne se désespère pas, en tout cas pas face aux caméras, et va au contraire les utiliser pour essayer de faire bouger les téléspectateurs, les faire réagir et leur demander d’arrêter d’être complices d’une telle horreur.

Des téléspectateurs justement, par leur simple présence devant les écrans font que cette horreur existe. Ils sont passifs, mais du coup terriblement acteurs, et pourtant noyés dans la masse des « transparents », des anonymes. Ils n’ont pas l’impression d’avoir une énorme part de responsabilité dans la vie et la mort des prisonniers. La puissance de la masse anonyme, cela fait peur ! La presse joue également un rôle, et quel rôle ! Des interventions inutiles, des condamnations timides et peu efficaces qui ont un effet contraire à celui souhaité et font monter l’audimat.

Mais comme toujours, les vraies personnalités, les sentiments nobles et courageux, émergent de toute cette horreur, et l’humanité qui est en chacun s’exprime là où on ne l’attend plus.

Bien sûr il y a là une satire des extrêmes de la téléréalité, mais se pose aussi la question de savoir comment on peut facilement retourner vers l’horreur avec tellement de laisser-faire, sans se sentir ni coupable ni acteur ! Comme une alerte, d’ailleurs mise en exergue du roman : « Vint le moment où la souffrance des autres ne leur suffit plus : il leur en fallu le spectacle ». Faisons tout pour ne jamais en arriver là !

Catalogue éditeur : Albin-Michel

« Vint le moment où la souffrance des autres ne leur suffit plus : il leur en fallut le spectacle. »

Édition brochée : 16.00 € / 24 Août 2005 / 130mm x 200mm / 198 pages / EAN13 : 9782226167224
EPub : 6.99 € / 14 Janvier 2009 / 198 pages / EAN13 : 9782226197535

Baïkonour, Odile d’Oultremont

Avec la mer pour seul horizon, qu’il est bon de tomber amoureux. Baïkonour, le roman sensible et poétique d’Odile d’Oultremont

A Kerlé, petit village du Morbihan, la jeune Anka est coiffeuse dans le salon de sa tante. Elle rêve pourtant d’océan, celui qui a emporté son père Vladimir, Marin pécheur perdu en mer sur le Baïkonour. Ce père qu’elle admirait par-dessus tout.

Édith, sa mère, espère encore, incapable de faire son deuil. Chaque jour elle préparait une soupe chaude qu’il emportait avec lui sur les flots, et elle continuera sans fin, jusqu’à son impossible retour. Car chaque jour elle l’attend et Anka souffre de son déni. Celle qui rêvait de prendre la suite du père sur son bateau de pêche prend désormais le chemin du salon de coiffure.

Marcus, un jeune grutier particulièrement habile et performant sur ces engins qui volent au-dessus des villes, répond à une mission d’un an et huit mois à Kerlé. Marcus et ses failles, son père éternel chômeur, sa mère disparue lorsqu’il était enfant. Du haut de sa cabine, il survole, il surplombe, il observe, le paysage, mais surtout les gens qui s’agitent en dessous, leurs vies, leurs trajets, il imagine des bonheurs et des ruptures, des joies et des chagrins. Jusqu’au jour où il découvre la beauté énigmatique d’Anka. Il n’aura de cesse dès lors de l’observer de loin, subitement et définitivement amoureux de cette inconnue qui illumine ses journées.

Mais ces deux trajectoires à deux hauteurs aussi différentes, l’une au bord de l’océan, l’autre dans les airs, sauront-elles se trouver ?

La magie opère à nouveau, même si le côté brin de folie du premier roman ne se retrouve pas ici, et c’est tant mieux, l’auteur sait se renouveler et nous surprendre. Des personnages attachants, tant par leurs faiblesses que leur désespoir, une écriture concise, sensible et délicate, qui donne le rythme et nous prend dans son tempo. Avec Odile D’Oultremont, le quotidien n’est plus banal, et l’on espère ! Car les rencontres improbables se réalisent, l’amour n’est plus tragique, et surtout la poésie des mots rend la vie plus belle, malgré la maladie, la mort, les faiblesses ou les désillusions, et les relations parents enfants parfois si difficiles.

Roman lu dans le cadre de ma participation aux 68 premières fois

Catalogue éditeur : L’Observatoire

Anka vit au bord du golfe de Gascogne, dans une petite ville de Bretagne offerte à la houle et aux rafales. Fascinée par l’océan, la jeune femme rêve depuis toujours de prendre le large. Jusqu’au jour où la mer lui ravit ce père qu’elle aimait tant : Vladimir, pêcheur aguerri et capitaine du Baïkonour.
Sur le chantier déployé un peu plus loin, Marcus est grutier. Depuis les hauteurs de sa cabine, à cinquante mètres du sol, il orchestre les travaux et observe, passionné, la vie qui se meut en contrebas. Chaque jour, il attend le passage d’une inconnue. Un matin, distrait par la contemplation de cette jeune femme, il chute depuis la flèche de sa grue et bascule dans le coma.
Quelque part entre ciel et mer, les destins de ces deux êtres que tout oppose se croiseront-ils enfin ?

Parution : 21/08/2019 / Nombre de pages : 224 / ISBN : 979-10-329-0432-9

Spirou, L’espoir malgré tout. Émile Bravo

Une BD qui reprend les codes classiques du genre pour le plus grand bonheur des amateurs et de tous les amoureux de Spirou.

Ce tome 1 de Spirou, L’espoir malgré tout, un mauvais départ, écrit par Émile Bravo commence à Bruxelles en janvier 1940. La Belgique est neutre dans ce conflit international qui frappe pourtant à ses portes. Spirou, le jeune Groom du Moustic hôtel se trouve bien désœuvré dans cette ville où plus personne ne vient. Fantasio quant à lui s’est engagé dans l’armée belge.

Spirou reçoit une lettre de son amoureuse allemande Kassandra. Elle est prisonnière des soviétiques qui veulent la renvoyer dans son pays, elle la juive qui s’était exilée comme tant d’autres pour fuir le régime nazi. Puis il rencontre un peintre juif allemand, Felix, et sa femme Felka, avec qui il sympathise. Il découvre avec eux la situation dramatique des juifs. C’est le moment que choisit Fantasio pour réapparaitre, dans sa tenue militaire, lui qui semble aussi perdu que les troupes en déroute…

Fuite des populations, invasion de la Belgique par les Allemands en 1940, réquisition du Moustic hôtel par les armées anglaises ou françaises, puis par les allemands, réactions des populations, qui passent de l’incrédulité au déni, de la passivité à la collaboration. Tout cela est évoqué avec subtilité et sans concession.

Le trait, évocateur du passé et d’anciennes BD, et en même temps plutôt moderne dans son rythme, est porté par des dialogues plutôt actuels, le tout fait de cette BD un véritable plaisir de lecture.

💙💙💙💙

Catalogue éditeur : Dupuis

Janvier 1940. Un hiver particulièrement rude s’est abattu sur Bruxelles. Alors que tout le monde attend avec appréhension l’arrivée imminente de la guerre, Fantasio s’est engagé dans l’armée belge. Dans la forteresse d’Ében-Émael, il est impatient d’en découdre et ne doute pas une seconde que les armées française et britannique écraseront l’armée allemande…

Quant à Spirou, il est toujours groom et continue de vivre le plus normalement possible. Sa rencontre avec Felix, un peintre juif allemand dont les nazis ont jugé l’œuvre « dégénérée », et Felka, sa femme, va lui faire découvrir la « question juive » et la complexité de la situation internationale.

Quand la guerre éclate, Fantasio cherche à servir la patrie le plus héroïquement possible. Spirou, lui, essaye de comprendre la complexité de la situation à travers des rencontres avec des personnages profondément humains et tente de se rendre utile en étant fidèle à ses valeurs.

 Age du lectorat : 9+ / Parution le 05/10/2018 / 88 pages en couleurs / Hauteur : 320 mm / Largeur : 240 mm / ISBN: 9782800160986 / PVP : 16.50EUR

La vraie vie, Adeline Dieudonné

La vrai vie, celle d’avant… Un premier roman intense et puissant.

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… Avant cette scène qui change tout dans la vie de Gilles et de sa grande sœur, il avait déjà une famille si terriblement « glaciale… »
Dans cette famille il y a le père, chasseur de gros gibier sur des terres lointaines, qui rapporte en conquérant les trophées, massacres et autres bêtes empaillées qui ornent la chambre des cadavres si justement nommée.
Il y a la mère, qualifiée d’amibe, quel surnom à la fois terrible et terriblement évocateur du dégoût que cette mère inspire à sa fille, femme soumise, acceptant les coups la peur au ventre et dans le regard, assouvissant son besoin d’amour avec sa perruche et ses chèvres, comme s’il était impossible d’accorder de l’amour à sa propre famille, à ses enfants.
Il y a le frère, Gilles, de trois ans plus jeune, il est le rayon de soleil, le petit qu’il faut aimer et protéger.
Il y a enfin cette fillette de dix ans qui raconte, qui nous raconte leur vie pendant six ans. Cette narratrice brillante et sensible, passionnée de mathématiques quantiques, et qui aime tant son petit frère qu’après l’accident, sa vie ne sera plus comme avant. Elle n’a plus dès lors qu’un rêve, qu’une seule ambition, revenir à avant, retrouver La vraie vie.

Dans ce premier roman qui se lit d’une traite, dans un souffle, l’amour et l’espoir viennent éclairer les temps sombres, ceux de l’innocence perdue, de la quête d’un passé qui ne reviendra plus jamais. Mais il s’agit aussi ici de maltraitance, parfois sans violence, enfin sans trop de violence, envers des enfants soumis à leurs parents, par amour, par obligation, par peur aussi sans doute. De maltraitance envers une femme, qui par crainte de voir cette violence changer de cible accepte tout, les mots qui tuent, les gestes qui blessent, les attitudes qui vous transforment en amibe justement. Pour ne pas éveiller la frustration de celui qui frappe ? Par peur, par lassitude, par soumission ? Et si c’était la violence au quotidien, si tristement réelle, le véritable sujet du roman ?
La violence au quotidien, celle qu’on accepte, celle qu’on combat, celle qui vous tue à petit feu dans l’indifférence…

Dans La vraie vie, il y a aussi la recherche désespérée d’une machine à remonter le temps, puis la révolte d’un frère que l’on imaginait passif, sursaut indispensable, absolument vital.

Par certains côtés, ce roman m’a fait penser à My absolut Darling… par la relation terrible entre un père et sa fille, ou comme ici entre un père et son fils. Et l’on se demande quel est le moyen d’en sortir, si ce n’est en répondant à tant de violence par la violence elle-même ?

Premier roman encensé par les critiques et les lecteurs, La vraie vie est un roman à l’écriture vive, acerbe et directe, qui évoque une situation familiale dramatique et difficile… Et le lecteur de s’attacher à cette narratrice tellement émouvante, dont on espère qu’elle arrivera à ses fins, forcément…

Petit bémol peut-être, ce père toxique m’a parfois semblé un peu trop caricatural, et donc ce parallèle que je n’ai pu m’empêcher de faire avec le roman de Gabriel Tallent. Mais Adeline Dieudonné reste une auteure à suivre, assurément.

Catalogue éditeur : L’Iconoclaste

Un roman initiatique drôle et acide. Le manuel de survie d’une guerrière en milieu hostile. La fureur de vivre.
Chez eux, il y a quatre chambres. Celle du frère, la sienne, celle des parents. Et celle des cadavres. Le père est chasseur de gros gibier. Un prédateur en puissance. La mère est transparente, amibe craintive, soumise à ses humeurs.
Avec son frère, Gilles, elle tente de déjouer ce quotidien saumâtre. Ils jouent dans les carcasses des voitures de la casse en attendant la petite musique qui annoncera l’arrivée du marchand de glaces. Mais un jour, un violent accident vient faire bégayer le présent. Et rien ne sera plus jamais comme avant.

Format 135 x 185 mm / prix 17 € / nombre de pages 270 /  EAN : 9782378800239

Outre-mère. Dominique Costermans

Une mère, une fille, la recherche d’un père absent après une guerre vécue difficilement aussi du côté de la Belgique.

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A la lecture de ce premier roman, j’ai eu l’impression que ce livre n’est pas destiné aux lecteurs, mais à cette famille éclatée, perdue, diverse et retrouvée, qui a besoin de ces mots pour se connaître, se comprendre, s’accepter.  Un peu comme si le lecteur était en trop, ou seulement utile pour faire passer le message sur des origines difficiles à accepter, une enfance compliquée tant pour la mère que pour les différents enfants de ce père qui s’avère rapidement criminel, égoïste, volage et absent.

Car Charles Morgenstern, le grand-père de Lucie, la narratrice, a travaillé pour la gestapo et s’est enfui en Allemagne après la guerre. Lucie a compris très tôt qu’il y avait un secret dans sa famille, que sa mère avait des silences, des absences qui venaient de loin, d’une enfance non dévoilée, d’aïeux inconnus. Tout cela forme un manque et un vide à combler pour cette petite fille qui a grandi avec le poids de l’absence et l’envie de comprendre. Elle va suivre les méandres des révélations, des silences surtout, des recherches qu’elle va entreprendre et de tout ce qu’elle va découvrir sur le passé de sa mère et de sa famille.

L’idée est intéressante, le parcours aussi, de cette fille qui se cherche une ascendance acceptable, qui tient absolument a retrouver les racines que sa mère lui cache. Secrets de famille lourds à porter, juifs ou collabos, traitres ou Justes, ramifications et répercussions jusque dans le présent de ces silences lourds à porter, de ce passé si dense, tout ceci est très significatif sur le besoin de recherche et de mémoire, mais l’auteur nous perd dans les méandres d’une famille tentaculaire et disparate. Bref, si j’ai par moment eu envie de connaître la suite, je crains de ne pas avoir ressenti assez d’émotions pour avoir envie de vibrer, de pleurer ou de rire avec Lucie.

Roman lu dans le cadre des 68 premiers romans : retrouvez les avis de Martine avec Les lectures de Martine (et plus) ou de Henri-Charles Ma collection de livres


Catalogue éditeur : Éditions Luce Wilquin

Outre-Mère est moins le récit de la véritable histoire de Charles Morgenstern, juif, bruxellois, enrôlé dans l’armée allemande puis indicateur au service de la Gestapo, que celui de son dévoilement, malgré le silence imposé qui règne encore dans sa famille deux générations plus tard. Que faire des secrets ? De la famille, de la guerre et de ses monstres ? Du silence de la mère ?
Ces questions provoquent tout autant l’enquête de Lucie que l’écriture envoûtante de ce texte.
Le paradoxe de ce roman, son paradoxe passionnant, c’est que le secret le plus crucial apparaît moins dans une révé­lation – vite livrée au lecteur – que dans les moments anxieux, obstinés et rebondissants de son dévoilement tentaculaire.
Il en résulte un étrange passage de la souffrance et du silence à la délivrance de la mère comme de la narratrice – et du lecteur.

14 x 20,5 cm, 176 pages / ISBN 978-2-88253-529-0 / EUR 17.-