À l’encre rouge, Marjorie Tixier

Un joli roman sur la relation parfois difficile entre une mère et une fille

Pendant que Pierre et Jeanne s’échinent à tenir l’auberge du petit village d’Hazebrouck, leur fille Lysiane se rêve déjà en Dolly Parton, chanteuse comme son idole qu’elle écoute à longueur de temps dans son walkman.

Le jour où le beau Fred Solange pousse la porte de l’auberge, elle est immédiatement séduite et s’enivre sur sa moto, elle vole avec lui vers Lille et la musique, le succès, enfin, le sien à lui, futur chanteur, et s’imagine qu’il pourrait l’aider à chanter. Et si cet amour de jeunesse était le vrai, le beau ? Hélas, ce qui s’avère n’être pour lui qu’une passade est une déchirure pour cette gamine de seize ans. La déception est grande. Lysiane est abandonnée, meurtrie, enceinte. Elle décide d’avorter, mais Jeanne implore.

Neuf mois plus tard, Jolene est là et la vie de Lysiane est bouleversée. Mais elle est belle Lysiane, avec ses cheveux blonds ses jolis ongles peints et ses envies d’ailleurs. Alors elle part et laisse son bébé aux mains de ses parents. Après tout, ils l’ont voulue, ils n’ont qu’à l’élever.

elle vit désormais à Lille, et c’est un courant d’air qui débarque chaque quinzaine pendant quelques heures dans la vie de l’enfant. Une femme exigeante, sans tendresse ni affection mais de plus en plus jalouse de cet amour qui éclaire la vie de ses parents et de sa fille. Années difficiles pendant lesquelles la petite fille trouve l’amour qui lui manque auprès de ses grands-parents. Mais Lysiane est une femme jalouse, meurtrie, blessée, une mère exigeante.

Elle arrache la gamine au cocon familial pour enfin espérer vivre ses rêves par procuration. S’ensuivent alors de longues périodes difficiles pour cette enfant mal aimée et ces grand-parents meurtris à qui on a enlevé le soleil de leur vie. Pourtant Jolene grandit, la quitte et s’épanouit loin de sa mère, loin de ses grands-parents, enfant meurtrie sauvée par la musique, enfin, pas par celle de Dolly Parton.

L’autrice aborde ici le délicat problème d’une maternité non souhaitée, de la difficulté d’être mère, de la relation toxique qu’il peut y avoir parfois dans les familles entre parents et enfants. Tout comme des forces et souvent des faiblesses qui s’affrontent et font que l’on ne sait pas ou ne peut pas protéger les enfants qui souffrent.

Un joli roman sur une relation difficile entre une mère exigeante et dure, et une enfant bien trop docile, parfois trop pour être réaliste tant on voudrait elle aussi la secouer pour lui dire de ne pas tout accepter pour moins souffrir. J’ai aimé suivre cette famille dans ce roman lu quasiment d’une traite, avec émotion et une certaine dose de plaisir.

Catalogue éditeur : Fleuve éditions

Lysiane n’a jamais voulu être mère, et Jolene n’a jamais considéré comme telle cette tornade blonde aux ongles rouges qui débarquait un lundi sur trois à l’auberge de ses parents pour lui couper les cheveux et faire des remarques acides.
L’enfant grandit loin dans sa paisible province pendant que la mère, partie à la ville, s’épuise à combattre des moulins. Jusqu’à ce qu’elle pose les yeux sur cette fille dont elle ne s’est jamais souciée. Et décide qu’elle sera sa revanche sur la vie.
EAN : 9782265156210 / Pages : 320 / 19.90 € / Date de parution : 05/01/2023

Mères indignes, Luce Caron

Voir les mères et la maternité avec un regard neuf et sincère

Huit nouvelles sur la difficulté d’être soi en devenant mère. Sur cet amour et cet altruisme que l’on attend des femmes comme une normalité culpabilisante lorsqu’elles ont enfanté. Sur cette capacité à entendre, donner, partager, prendre sur soi, et s’oublier qui paraît évidente aux autres mais qui est si difficile, exigeante, péremptoire, celle de ne plus exister dans le regard des autres que comme une mère.

J’ai aimé ces nouvelles si dérangeantes mais au fond si vraies, qui posent de bonnes questions sur le regard et le jugement d’une société qui exige sans contrepartie. Une société qui considère normal qu’une femme ait des enfants, que devenir mère c’est être enfin une femme accomplie. Un vrai regard neuf, direct, sans pathos ni faux-semblants.

Céline, restée seule à partir du moment où son ventre s’est arrondi, a de plus en plus de mal à supporter les pleurs de son bébé, comment réagir sans commettre le pire.

Aurélie est mère de trois garçons, mais elle n’en peut plus des pourquoi, des questions, de cet incessant besoin qu’ils ont tous d’elle et de sa présence active, souriante, disponible, et si la fuite était la solution pou être enfin tranquille.

Agnès est mère célibataire d’un ado en crise, enfin, en crise il l’est depuis longtemps, puisqu’il n’a envie de rien, ne travaille pas, et ne lui répond plus, et s’isole de plus en plus dans son monde virtuel. Mais existe-t-il une solution pour le ramener à la vraie vie.

Elsa retrouve son frère pour aller aux obsèques d’un proche, enfin un proche de sa mère en tout cas, drôle de famille, drôle d’enfance.

Olivia part aux obsèques de sa mère avec sa grand-mère. Sa mère, cette femme admirable ou cette mère perverse si peu aimante, qui était-elle au fond.

Caroline attend le départ de son fils chez le père pour s’adonner à son addiction favorite et dévastatrice, jusqu’au jour où elle dépasse certaines limites.

Sabine veux faire des efforts, note tout, se crée de alertes, mais Sabine est tellement étourdie qu’elle ne sait même plus pourquoi elle les a créées. Comment vivre sereinement avec fille et mari dans ce cas, comment ne pas lasser ceux qui l’entourent.

Retrouvez l’autrice sur le blog mères indignes

Catalogue éditeur : Chloé des Lys

ISBN : 978-2-39018-238-2 / parution : Décembre 2022 / 22,00 €

Faire corps, Charlotte Pons

Peux-t-on porter un enfant sans devenir mère ?

D’un côté, Sandra, jeune femme bien dans sa peau, sa vie, son emploi, sûre d’elle, aucune envie de devenir mère un jour, et un peu ras-le-bol de tous ceux qui sans cesse lui demandent, alors cet enfant, c’est pour quand ?

De l’autre côté, Romain et Marc. Romain l’ami d’enfance, celui avec lequel Sandra a le plus en commun, souvenirs, vécu, passé, et Marc, son mari pour la vie. Romain et Marc et leur envie folle d’être enfin pères, d’élever un enfant, d’être enfin un couple de parents accomplis. Des années qu’ils suivent toute la procédure, aux USA, pour avoir enfin un bébé avec une mère porteuse. Mais ils vont d’échec en échec et se désespérément. Jusqu’au jour où Sandra cède à la demande en toute amitié de Romain, ou qui sait si elle ne le lui propose pas au fond, il y a un peu des deux sans doute, et la voilà qui accepte de devenir cette mère porteuse qui va réaliser cette GPA pour son ami.

Porter un enfant, mais ne pas devenir mère, car cet enfant, elle n’en veut pas. C’est son credo, son cri, sa certitude. Un bébé contrat, neuf mois à le porter, puis à l’abandonner à ce couple qui l’attend de tout son cœur, de toute son énergie, de tout son amour. Commence alors une période entre deux, porter sans vivre vraiment, jusqu’au jour où elle reçoit ce courrier qui lui indique que dans cinq mois elle sera mère.

Mère, pas du tout, jamais ! Et pourtant ? Neuf mois et puis s’en vont, ou va-t-elle réellement devenir maman ?

Un roman d’amitié, d’entraide, de relation homme femme, de relation à l’autre, mais aussi à ce corps qui change, qui accueille une autre vie, cet autre qui est un étranger mais qui est un peu de vous aussi. L’analyse des personnages et la construction du roman autour de cette évolution, à la fois de la grossesse et des idées, sentiments, envies, angoisses est tout à fait bien explicité, montré à travers les doutes, les questionnements, les certitudes et les craintes de Romain futur et déjà père, comme de Sandra, porteuse mais pas encore mère. Et surtout, qu’est-ce qu’être mère, porter un enfant, le sentir dans son corps, l’élever, l’aimer, un peu de tout ça au fond, et sans doute plus encore.

Si j’ai eu quelques craintes à commencer cette lecture, je l’ai trouvé particulièrement intéressante, émouvante, constructive et forte en questionnements pour tous. L’autrice aborde de nombreux thèmes, pour ou contre parentalité, couple gai, mère porteuse, désir d’enfant, être mère ou pas, que de questions, que de doutes, que d’espoirs.

Un roman de la sélection 2022 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Flammarion

« Et votre projet, c’en est où ? » Voilà plusieurs années que Sandra observe Romain et son compagnon se confronter au parcours épineux de la GPA aux États-Unis. Ce désir d’enfant que rien ne semble faire vaciller l’intrigue, elle qui est catégorique depuis toujours: elle ne sera jamais mère. À bout, son ami va lui demander de porter son bébé. Commence alors un corps-à-corps avec un enfant qui ne sera pas le sien. Neuf mois de bouleversements physiques que la raison ne peut pas ignorer et qui font naître des sentiments d’une intensité insoupçonnée.
Dans ce deuxième roman à fleur de peau, Charlotte Pons met très subtilement en scène une femme qui consent, sans en mesurer toute la portée, à réparer le mal d’enfant de son ami. Jusqu’où son geste l’emportera-t-elle ?

Paru le 24/02/2021 / 240 pages / 138 x 211 mm / EAN : 9782081486225 / 19€

Revenir fils, Christophe Perruchas

Peut-on revenir fils lorsque l’on est devenu père, un roman qui déborde d’émotion et d’amour

1987. Le fils a quinze ans, ses belles années sont devant lui quand survient le deuil qui va tout changer. L’accident du père au volant de sa 504 entraîne peu à peu la folie de la mère. Elle sombre dans une mélancolie que rien ne pourra arrêter. Le choc est si intense que même la vie de son fils va s’estomper de sa mémoire. Remplacé bien étrangement par un autre fils, disparu lui aussi. Il faudra confier le fils à la famille, oncle et tante feront ce qu’ils peuvent pour l’élever.

2007. Le fils devenu père éprouve le besoin de revenir fils. De retrouver cette mère qui l’a effacé de sa vie des années auparavant pour sombrer dans la folie. Atteinte de la maladie de Diogène, elle vit toujours dans la même maison, désormais envahie de toute part par les accumulations de toute sorte qui la rassurent, la confortent, l’aident à survivre. Des boites de Nesquick aux aliments frelatés, des verres inutiles aux revues qui s’amoncellent, sa vie est un équilibre instable fait d’accumulation, de saleté, de solitude.

Peu à peu, alternant ces deux époques, l’auteur nous fait pénétrer dans le monde intérieur d’une mère perdue, d’un fils orphelin, d’un homme qui se cherche et veut donner ce qu’il n’a plus jamais reçu depuis l’accident qui a transformé leurs vies.

L’auteur a su aborder des thèmes difficiles et délicats avec beaucoup de tendresse, d’émotion, de véracité. La maternité, le deuil, la famille, la maladie, celle de Diogène évoquée ici est envahissante et traumatisante autant pour ceux qui la vivent que pour ceux qui la subissent.

Difficile chemin de ce fils devenu homme, mari, père et qui devra tout oublier pour enfin devenir fils. Ce roman est dense, fort, percutant et marquant. L’alternance des époques donne du rythme et du souffle face à la difficulté d’être, de vivre, d’accepter, de comprendre, et enfin d’aimer, en étant le fils de cette mère si singulière. Car il doit en affronter des murailles, au propre comme au figuré, dans cette maison devenue une véritable décharge et le creuset des immondices récoltées avec tant d’énergie par cette mère devenue souillon. Mais aussi des silences, des frustrations, pour tenter de percer la carapace et faire émerger l’amour. Quelle énergie, quel amour, quelle tendresse dans ces gestes, ces mots, ces sentiments du fils orphelin envers celle qui lui a donné la vie.

Un roman de la sélection 2022 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Rouergue

Depuis la mort de son père, le narrateur, un collégien de quatorze ans, vit seul avec sa mère, qui montre les signes grandissants d’un syndrome de Diogène : elle accumule les objets qui envahissent peu à peu la maison. Tandis que le fils adolescent continue de grandir et d’explorer, la mère se replie jour après jour dans un monde où un premier enfant, Jean, touché par la mort subite du nourrisson, reprend vie. Lire la suite…
Parution août 2021 / 288 pages / 20,00 € / ISBN  978-2-8126-2211-3

La petite ritournelle de l’horreur, Cécile Cabanac

Un thriller qui tient ses promesses : addictif et glaçant

Lorsque Pio et Maria Achensa ont acheté la petite maison isolée dans les bois, c’était pour y abriter la famille, d’autant que Maria attend leur quatrième enfant et qu’ils ne sont pas bien riches, elle lui a donc demandé de faire le nécessaire pour les loger le mieux possible. Mais lorsque Pio a commencé à démolir les murs pour agrandir, l’horreur qu’il a découvert l’a laissé sans voix, tremblant, sonné.

Lorsque Sevran et Briolet arrivent sur place, un corps d’enfant est découvert, puis deux, puis trois. L’enquête s’annonce rapidement à la fois violente et difficile. Qui a bien pu cacher les cadavres ici, qui sont ces enfants, qui sont le ou les Meurtriers.

Une enquête qui démarre fort, des suspects, mais surtout des révélations qui montrent la violence et la noirceur dont peuvent être capables les hommes et le femmes.

Une famille d’accueil, des services sociaux défaillants car dépassés, des enfants placés que tout le monde a oublié et abandonné, des abus, des excès, rien ne sera épargné aux enquêteurs comme au lecteur.

Ce que j’ai aimé ?

Les personnages, crédibles, humains pour la plupart, surtout lorsqu’il s’agit des policiers mais pas seulement. Pour d’autres, la cruauté et la violence dont peuvent être capables les humains envers leurs semblables laisse parfois sans voix. Cette journaliste pas seulement caricaturale de ce que peut être la profession, mais bien plus humaine qu’il n’y paraît de prime abord, vient ajouter un peu de piquant à l’intrigue.

Mais aussi cette équipe d’enquêteurs aux caractères bien trempés, aux personnalités si différentes, qui me semblent représentatifs de la profession et du monde qui nous entoure.

C’est rythmé, aucun temps mort, l’alternance des chapitres qui donnent les points de vue des différents personnages accorde au lecteur quelques respirations bienvenues face à tant de noirceur. Si de nombreux thèmes difficiles sont abordés, la cohérence et l’attrait du roman sont indéniables.

Catalogue éditeur : Fleuve éditions

Un appel au cœur de la nuit. Des gyrophares qui tournoient dans l’obscurité. Une vieille bâtisse à l’abandon. Quand la commandant Virginie Sevran arrive sur les lieux, les techniciens de l’identité judiciaire sont déjà à l’œuvre à l’intérieur. Ils font face à l’insoutenable. À la noirceur de l’âme humaine. Au cadavre d’une gamine dissimulé derrière une cloison que le nouveau propriétaire tentait d’abattre.
Là, au milieu de la campagne francilienne, le silence est oppressant. L’angoisse monte. Et, bientôt, les murs confient deux autres corps aux policiers. Deux autres enfants… Rapidement, la sidération laisse place à une enquête éprouvante. Certainement la plus sordide de toutes celles auxquelles la commandant et son binôme, Pierre Biolet, ont été confrontés durant leurs carrières. Une seule certitude, personne ne ressortira indemne de cette affaire…

Native du Pays basque, Cécile Cabanac a travaillé en tant que journaliste reporter d’images chez TF1. Elle a intégré par la suite « Le Magazine de la santé », puis « Les Maternelles » comme chroniqueuse, réalisant en parallèle des documentaires pour France 5 et plusieurs numéros de « Faites entrer l’accusé ». Elle est l’auteur de deux romans parus chez Fleuve Éditions : Des poignards dans les sourires (2019) et Requiem pour un diamant (2020)

Date de parution : 13/01/2022 / 19.90 € / EAN : 9782265155244 / Nombre de pages : 480

Je suis l’abysse, Donato Carrisi

Un thriller efficace et haletant

Quel est le lien entre l’homme qui nettoyait, la fille à la mèche Violette et la chasseuse de mouches ? Qui est ce mystérieux Micky derrière la porte verte ?
Qui est cet enfant de cinq ans que sa mère entraîne dans la piscine de cet hôtel désaffecté ?
Qui est cet homme qui traque les femmes blondes jusque dans leurs maisons ?
Quel rapport entre ces femmes blondes qui disparaissent et cette jeune fille qui tente de mourir ?

Pour le savoir, il faut découvrir ce roman qui démarre sur les chapeaux de roues, à la fois sombre et dur, au suspense garanti. Certaines scènes sont à la limite du supportable, mais elles sont indispensables à la bonne compréhension des rôles de chacun des protagonistes. Les flash-back dans le passé de l’enfant en particulier permettent habilement au lecteur de commencer à échafauder sa propre théorie, mais il est bien difficile malgré tout de savoir jusqu’où l’auteur veut nous mener.

J’ai aimé le chassé croisé entre ces trois, quatre avec le mystérieux Micky, personnages aux parcours parallèles qui subtilement vont être amenés à se croiser. Peu à peu, leurs personnalités prennent forme, le passé de chacun se dévoile avec ses blessures, ses failles, ses rêves et ses désillusions.

Le mal, l’amour maternel, les origines, les troubles de la personnalité, la maltraitance, et de nombreux autres sujets y sont abordés sans que cela n’enlève quoi que ce soit à l’intensité, au rythme ou à l’intrigue.
Vous l’aurez compris, c’est ma première lecture de cet auteur et je suis totalement emballée.

Un roman traduit de l’italien par Anaïs Bouteille-Bokobza. Et lu par Benjamin Jungers, un acteur qui donne toute leur intensité aux différents personnages.

Catalogue éditeur : Audiolib, Calmann-Levy

L’homme qui nettoie rôde autour de nous.
Parmi nos déchets, il cherche des indices sur nos vies.
En particulier sur celles des femmes seules.
Une femme lui a fait beaucoup de mal enfant : sa mère.
La chasseuse de mouches, elle,
tente de sauver les femmes en péril.
Et elles sont nombreuses…
Surtout quand l’homme qui nettoie rôde autour d’elles.

EAN 9791035407513 / Prix du format physique 23,90€ / EAN numérique 9791035407377 Prix du format numérique 21,45€ / Date de parution 10/11/2021

Montagnes Russes, Gwénola Morizur, Camille Benyamina

Vouloir être parents à tout prix, est-ce possible ?

Être parents à tout prix n’est pas donné à tous les couples. Le parcours peut s’avérer long, difficile et sans issue heureuse.

Aimée et Jean ne le seront sans doute jamais, malgré leur désir fou d’avoir un enfant, malgré leur amour si fort, malgré la science et ce qu’elle peut parfois apporter pour aider une nature trop capricieuse. Pour eux, point de FIV, de maternité heureuse, de ventre arrondi et de layette à choisir. Ni la nature ni le progrès et ses évolutions ni pourront rien. Il y a parfois bien des tensions dans ce couple si uni malgré l’épreuve, bien des regrets face à l’échec.

Aimée travaille dans une crèche. Un métier qu’elle aime, des enfants auxquels parfois elle s’attache. Comme avec ce petit Julio si craquant que sa mère a bien du mal à gérer. Une succession de retards et de manque d’attention de la part de sa mère, et Aimée commence à s’occuper un peu trop de ce petit garçon. Une forme d’amitié va même s’esquisser entre les deux femmes. Mais comme pour les montagnes russes, elle oscille entre confiance, défiance et jalousie, et bientôt les complications s’annoncent…

La douceur ou l’énergie du dessin et des couleurs, le graphisme dynamique et parfois sombre, mais surtout les situations qui semblent tellement justes, réalistes et humaines donnent une cohérence et un rendu particulièrement touchants. Le parcours du désir d’enfant, les espoirs déçus, la tristesse et la résignation, sont très bien décrits et aident à mieux comprendre ceux qui traversent une telle épreuve.


Catalogue éditeur : Grand Angle

Une histoire d’amour et d’amitié : de celles qui nous prennent par surprise, nous oxygènent et nous métamorphosent.  
Aimée et Jean rêvent d’avoir un enfant. C’est devenu une idée fixe et les échecs successifs de procréation médicalement assistée sont de plus en plus durs à accepter. Dans la crèche où Aimée travaille, elle fait la connaissance de Charlie, qui élève seule ses trois enfants, et vient inscrire Julio, son petit garçon. Lorsqu’Aimée prend sous son aile l’enfant de Charlie, un lien se tisse entre elles, plus grand et plus fort qu’elles ne l’auraient imaginé. Une histoire qui nous entraîne sur les montagnes russes, dans ces hauts et ces bas qui ressemblent à la vie, et les sensations fortes qui les accompagnent.  

Scénario : Gwénola MORIZUR Dessin, Couleur : Camille BENYAMINA

Paru le 02 Juin 2021 / 16,90 € / 80 pages / ISBN 978-2-81897-600-5

Matriochka, Laetitia Ayres

Quand les destins s’emmêlent comme s’emboîtent les matriochka, ces poupées russes qui souvent nous fascinent

Un roman en trois parties qui nous fait entrer dans la vie des trois personnages principaux que le lecteur découvre peu à peu.

Claire, divorcée, un enfant, une carrière à plat… comment peut-elle aimer la vie alors que rien ne lui réussi ? Actrice en mal de contrat, elle est aujourd’hui spécialiste du doublage de licornes dans les dessins animés. Jusqu’au jour où elle décroche une audition et devient la voix d’Alma, une comédienne argentine qui joue dans la série à succès Diosa . Dés lors, sa vie change du tout au tout. Au fil des épisodes de la série, elle découvre Alma et s’identifie à celle dont elle connaît ou croit connaître les moindres mimiques, gestes, sentiments, faiblesses.

Le succès est au rendez-vous pour Alma. Mais ce n’est pas au goût de tous car la voilà rattrapée par son passé qu’elle a tenté de rejeter, par l’enfance et la famille qu’elle avait décidé d’oublier. En réaction à ces attaques, elle fait une tentative de suicide et part se mettre au vert.

Claire panique. Que va-t-elle devenir si son double disparaît des écran ? Claire ne fait ni une ni deux et part au Brésil avec son fils Clément pour rejoindre incognito celle à travers qui elle a enfin trouvé une raison de vivre. Comment l’aborder, que lui dire, comment expliquer son voyage, sa quête… autant d’interrogations auxquelles elle refuse de répondre avant de la rencontrer.

Clément profite de ces vacances de rêve au Brésil, de ce cadeau d’anniversaire anticipé offert par sa mère. Pourtant il a des difficultés à comprendre les silences de Claire, la relation étrange qu’elle noue avec Alma, pourquoi tant de mensonges, même par omission.

A travers l’histoire de ces deux femmes, l’auteur aborde de nombreux thèmes importants, la maltraitance, l’enfance difficile qu’Alma a vécue dans cette famille qu’elle rejette de toutes ses forces, mais aussi le deuil, la séparation, et tous les non-dits qui rendent la vie si difficile.

Voilà un roman qui commence tout doucement, monte en puissance peu à peu et nous offre un final tout à fait inattendu. L’auteur a su créer une ambiance, avec des personnages intéressants par leurs failles et leurs faiblesses, et ces non-dits qui les entraînent peut-être au-delà de ce qu’ils auraient souhaité de façon à la fois subtile et sensible.

Catalogue éditeur : Michel Lafon

Deux femmes qui n’auraient jamais dû se rencontrer, deux destins qui vont s’entremêler.

Claire a les ailes coupées depuis qu’elle a sept ans.
Comédienne, elle double davantage de personnages de dessins animés dans l’ombre des studios qu’elle ne foule de scènes de théâtre. Sa vie est au point mort. Jusqu’à ce qu’elle rencontre, par écran interposé, l’actrice principale d’une série argentine au succès fulgurant dont elle devient la voix française.
Alma a toujours voulu s’envoler.
Elle a grandi dans un quartier pauvre de Buenos Aires, au sein d’une famille dans laquelle elle ne se reconnaît pas, comme si la vie avait commis une erreur de casting. Elle trouve son salut en devenant actrice. Mais le succès qui lui roule dessus pourrait bien finir par balayer ses ambitions.
C’est dans les dunes qui bordent l’Atlantique, au nord du Brésil, que Claire, son fils Clément et Alma vont se rencontrer. Leurs failles, leurs mensonges et leurs secrets de famille aussi.
Quelles sont les voix qui habitent nos silences ?

Laetitia Ayrès est chanteuse et comédienne. En 2019, elle est lauréate du prix littéraire Aufeminin en partenariat avec les éditions Michel Lafon. Matriochka est son premier roman. http://www.laetitiaayres.com

Parution : 28/01/21 / Prix :16.95 € / ISBN :9782749944944

Les lettres d’Esther, Cécile Pivot

Petit éloge de la lenteur et du regard porté à l’autre

Esther, libraire à Lille, organise un atelier d’écriture épistolaire. Les lettres, elle connaît bien, car elle en a rédigé des milliers qu’elle a échangé avec son père, un auteur connu qui vivait à quelques rues de chez elle.
Des lettres comme un pont, une porte ouverte entre eux, ces mots couchés sur ce papier qui permet de dire tout ce que l’on ne peut échanger par la parole. Manque de temps, mauvais moment, pas la bonne attitude, qu’importe les raisons, les mots dits ne sont pas les mots écrits, n’ont pas la même pondération, la même portée sur celui qui les émets comme celui qui les reçoit.

Dans cet atelier d’écriture, les participants ont tous les âges, tous les passés et tous un avenir, mais ils sont à un croisement de leur vie. Et cet échange aussi bouleversant que sincère et ouvert, va aider chacun à avancer.

On y trouve Juliette et Nicolas, un couple qui se déchire depuis la naissance de leur fille. Juliette ne se sent absolument pas mère et les angoisses causées par la naissance de sa fille vont peut-être briser son couple. Nicolas essaie de tenir, d’élever sa fille dans l’amour de cette mère en pleine dépression post-partum qui tente de mettre des mots sur le mal qui la ronge. Samuel, un adolescent qui cherche sa place dans sa famille anéantie par le décès de son frère mort d’un cancer, mais aussi Jeanne, une dame âgée veuve qui n’en peut plus de sa solitude. Et enfin Jean, un homme d’affaires hyper actif qui semble avoir perdu le goût des affaires, et cherche sans doute à donner un nouvel élan à son existence.

À travers les exercices donnés par Esther, chacun avance à petit pas sur le chemin du mieux-être. Ce regard posé sur eux-mêmes, ces pensées intimes qu’ils s’avouent puis dévoilent, sont aussi des moyens de progresser vers une introspection thérapeutique et salvatrice.

Petit éloge de la lenteur, de la pensée structurée, du regard porté à l’autre. Il y a beaucoup de sincérité et de douceur, un brin de nostalgie peut-être, et un grand bonheur à se poser, loin de l’immédiateté de notre monde en perpétuel mouvement, où chacun réagit à la seconde sans prendre le temps de vivre réellement avec cet autre que l’on côtoie trop souvent sans même le regarder ni l’écouter.

J’ai beaucoup aimé ce roman empreint d’humanité et de sincérité. J’apprécie également l’écriture de Cécile Pivot que je découvre avec « Les lettres d’Esther ».

On ne manquera pas de lire également les chroniques des blogs Les livres de K79, Doucettement et Encres vagabondes

Catalogue éditeur : Calmann-Levy

« Cet atelier était leur bouée de sauvetage. Il allait les sauver de l’incompréhension d’un deuil qu’ils ne faisaient pas, d’une vie à l’arrêt, d’un amour mis à mal. Quand j’en ai pris conscience, il était trop tard, j’étais déjà plongée dans l’intimité et l’histoire de chacun d’eux. »

En souvenir de son père, Esther, une libraire du nord de la France, ouvre un atelier d’écriture épistolaire. Ses cinq élèves composent un équipage hétéroclite : une vieille dame isolée, un couple confronté à une sévère dépression post-partum, un homme d’affaires en quête de sens et un adolescent perdu.
À travers leurs lettres, des liens se nouent, des cœurs s’ouvrent. L’exercice littéraire se transforme peu à peu en une leçon de vie dont tous les participants sortiront transformés.
Roman initiatique, pétri de tendresse et d’humanité, ces Lettres sont un éloge de la lenteur, une ode au pouvoir des mots.

EAN : 9782702169070 / Prix : 19.50 € / Pages : 320 / 135 x 215 mm / Parution : 19/08/2020 / EAN numérique : 9782702169452 / Prix Numérique : 13.99 €

Trois chemins vers la mer, Brit Bildoen

Un roman aussi émouvant qu’inoubliable

Les chapitres alternent trois récit, l’état, le corps, l’exil. Trois femmes entrent en scène tour à tour.
Une femme marche vers la mer ;
Une femme attend le courrier de l’administration qui va briser sa vie ;
Une femme tente de comprendre son ennemi.

Une femme est en exil sur cette partie de terre qui abrite un observatoire ornithologique. Chaque jour elle promène son chien, la vieille Isa qui lui tient compagnie. Car elle qui refuse toute autre relation, toute amitié, toute interaction avec les humains de son entourage. Les seuls qu’elle accepte sont ses collègues de l’observatoire. Dans le silence et la solitude de son intérieur, elle traduit un roman de Dany Laferrière. Elle se laisse bercer par les mots, elle a le goût de la précision, de la sonorité qui doit lui correspondre dans sa propre langue. Mais qui est vraiment cette femme secrète, solitaire, taiseuse.

Un femme marche, elle traîne une valise avec un chat dedans. Qui est-elle, et pourquoi va-t-elle si souvent dans la maison de celui qu’elle nomme l’état ? Quelle relation délétère et secrète entre cet homme et cette femme ? Que cherche-telle à démonter, jour après jour, nuit après nuit ?

Une femme attend depuis quatre ans le bonheur de pouvoir adopter un bébé. Fausse couche après fausse couche, tout espoir d’être un jour mère s’est envolé, son corps lui refuse le bonheur qui devrait être dû à chaque femme qui le souhaite. Avec son époux, ils sont en liste d’attente pour adopter un enfant chinois. Mais les années passent, le gouvernement doit renouveler leur agrément. Ils ne sont plus très loin sur la liste d’attente, sur le chemin de l’espoir, plus que quelques mois sans doute et ils auront enfin le bonheur de tenir un bébé dans leurs bras. Pourtant l’administration et les règlements en ont décidé autrement. S’engage alors pour le couple de quinquagénaires un long combat pour tenter de faire valoir ses droits.

Ces trois femmes ont un chemin de vie difficile, portées par un seul désir, celui d’être mère, et par une seule incompréhension face à l’inadmissible réponse de l’administration. Car dans ces trois récits, l’état, le corps, l’exil , il y a surtout l’espoir de devenir mère, la révolte face à l’administration, enfin l’apaisement et l’envie de vivre enfin.

Brit Bildøen ose mettre des mots sur la douleur extrême, sur l’incompréhension, sur la folie et le chagrin qui détruisent inexorablement les rêves d’une vie. Ce roman se lit d’un souffle, d’une traite. Peu à peu les personnage et l’intrigue se dessinent et s’emboîtent comme une évidence. Le chagrin devient si fort, l’espoir puis l’anéantissement de tous les rêves sont impossibles à accepter. Empathique, le lecteur entre en communion avec cette femme, ses interrogations et ses doutes, sa fuite et ses rêves.

Un roman que je vous conseille vivement, tant pour son écriture que pour cette atmosphère qui s’en dégage, à la fois dérangeante, bouleversante, douce et humaine.

Catalogue éditeur : Delcourt littérature

Une femme fait de longues promenades avec son chien sur la plage. Quand elle ne travaille pas à l’Observatoire ornithologique, elle traduit Dany Laferrière. Elle veut tout oublier de ce qui a été. Mais les remparts de la mémoire menacent de céder…
Une femme marche vers sa boîte aux lettres. À l’intérieur, il y a la lettre qu’elle attend depuis si longtemps. Une lettre qui pourrait changer sa vie : l’agrément d’adoption des Services sociaux à l’enfance.
Une femme déambule dans une zone résidentielle, traînant derrière elle une valise à roulettes. À l’intérieur, il y a un chat mort. C’est la même femme mais elle est différente. Une femme qui glisse insensiblement dans une folie violente. Jusqu’où ira-t-elle ?
Les migrations intérieures d’une femme chahutée par les tournants de la vie, jusqu’à l’échappée belle.

Née en 1962, Brit Bildøen rencontre son premier succès en 1998 avec Tvillingfeber couronné par le prix Oslo et le prix Nynorsk. Elle est l’auteur de huit romans (souvent primés), dont Sju dagar i august finaliste pour le Dublin International Award et élu en 2019 par le quotidien Dagsavisen comme l’un des quinze meilleurs romans de la dernière décennie. Également traductrice, Brit Bildøen vit aujourd’hui à Oslo.

Traduit du norvégien par Hélène Hervieu

Parution le 30 septembre 2020 / 180 pages / 19€