Deuils, Eduardo Halfon

Le récit émouvant et parfois drôle d’une quête intime autour d’un secret de famille

Au Guatemala, le petit Salomón est mort noyé dans le lac d’Amatitlán à l’âge de cinq ans.  Enfin, c’est ce que raconte la légende familiale, mais est-ce exact ?

Salomón était le frère ainé du père d’Eduardo…. Il porte un prénom transmis de génération en génération et présent dans les familles des deux grands-pères, l’un juif arrivant de Pologne, l’autre du Liban. Mais depuis sa mort mystérieuse, il n’y a plus personne pour perpétuer ce prénom. Alors le narrateur cherche dans ses souvenirs à quel moment et en quels termes on a lui parlé de cet oncle disparu trop tôt. Et surtout à faire affleurer à sa conscience tous les non-dits, tous les secrets, les mystères qui entourent ce décès.

Les souvenirs défilent, ceux de l’enfance, ceux plus flous des conversations entre adultes écoutées  en cachette, ces mots devinés, extrapolés, impliquant des situations biaisées, des histoires que se racontent les enfants quand on ne leur dit pas simplement la vérité.

Mais la recherche de Salomón n’est-elle pas avant tout prétexte à revisiter tous les lieux où ont vécu les différents membres de cette famille rescapée de l’holocauste, et à tenter de comprendre pourquoi un silence aussi pesant entoure cette mort accidentelle.

De la Pologne au Guatemala puis de Miami à New York, un récit comme une quête intime. Courir après les mots enfouis dans les souvenirs de l’enfant, à la recherche de l’oncle ou de sa propre vie. Écrire pour mieux se connaitre. Chercher dans les racines pour comprendre d’où l’on vient. Refaire le voyage depuis l’enfer des camps jusqu’aux États-Unis. Communier avec cette famille d’exilés. Une écriture concise toute en sobriété rend le récit dynamique et vivant, émouvant et parfois drôle,  malgré les douleurs ainsi révélées. Le lecteur voyage dans les souvenirs et au fil des escales peut enfin comprendre les sentiments du narrateur.

Citation :

Mon père m’expliqua qu’en hébreu il existe un mot pour qualifier une femme qui a perdu son enfant. Peut-être parce que cette douleur est si grande et si spécifique qu’elle a besoin d’avoir son propre mot. Sh’Khol, c’est comme ça qu’on dit en hébreu, me confia-t-il.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury du Prix des Lecteurs du Livre de Poche 2020

Catalogue éditeur : La Table Ronde et Le livre de Poche

Il s’appelait Salomón. Il est mort à l’âge de cinq ans, noyé dans le lac d’Amatitlán. C’est ce qu’on me racontait, enfant, au Guatemala.

Le narrateur éponyme d’Eduardo Halfon voyage au Guatemala à la recherche de secrets qui le hantent. Il tente de démêler le vrai du faux parmi les histoires contradictoires et interdites de la famille de son père. Et plus particulièrement l’histoire de son oncle Salomón qui s’était noyé, enfant, dans le lac Amatitlán. De quoi Salomón est-il vraiment mort ? Plus il avance, plus le narrateur comprend que la vérité réside dans son propre passé enfoui, dans la brutalité du Guatemala des années 1970 et son exil en Floride.

Un roman profond et émouvant, qui appuie la réputation de son auteur, un de ces écrivains qui savent dire beaucoup en peu de mots.

Prix : 6,70€ / 128 pages / Date de parution : 15/01/2020 / EAN : 9782253237730

Tyler Cross tome 3, Miami. Brüno, Nury, Croix.

Sous le soleil de Floride, qui prend ici des airs bien sombres, découvrir Tyler Cross avec le troisième opus de la série Tyler Cross, Miami.

DOmi_C_Lire_Tyler_crossCe bandit a les moyens pour faire parler les malfrats, il faut avouer qu’ils ont moins d’envergure que lui !

Des dessins tranchés, des visages secs et coupés à la serpe, une ambiance de film noir avec des airs terriblement modernes, une belle impression de lecture. Et ça commence fort avec la jolie dame coulée dans le béton des fondations du futur complexe Eden Blue – quand je vous dis qu’on est dans le plus pur film noir américain.

Tyler Cross vient à Miami récupérer l’argent qu’il avait confié à son avocat véreux Sid Kabikoff. Mais il apprend que Sid est en affaires avec un roi de l’immobilier, Loomis à qui il a confié le magot. Problème, Loomis est dans la M… avec un découvert fabuleux à renflouer vite, très vite. Quoi de mieux que d’acheter à bas prix l’ile de Crab Key, au milieu des Keys, et de la revendre avec bénéfice pour renflouer ses dettes ?  Une belle magouille en perspective et de quoi s’immerger dans un milieu pas vraiment net.

Pas de problème pour Tyler Cross, il va embobiner Shirley Axelrod la secrétaire de Loomis, en lui faisant avaler des couleuvres, et l’embaucher avec Tommy Ray, son petit ami un peu déglingué du ciboulot. Embauchée peut-être, mais pas folle la guêpe, elle ne tient pas trop à finir elle coulée dans le béton et elle apprend vite !

Dessinateur, coloriste, et dialogue sont en symbiose, avec du noir bien noir tant dans les dialogues que sur les planches, avec cette  référence évidente aux grands films noir des années 50/60. La plupart des planches sont en bandes allongées, donnant un certain équilibre à l’intrigue, des personnages en gros plan ou des actions rythment également le tout par des plans plus hauts, plus étroits. On voit défiler l’action, on entend les dialogues et la voix off très présente, de gros plans en scènes en plan larges qui se succèdent pour le plus grand bonheur des amateurs du genre. C’est efficace, rythmé, maitrisé par les trois auteurs. Ah, n’allez pas chercher le sable fin et les belles couleurs lumineuses de Miami, apparemment elles n’entrent pas dans l’univers de Tyler Cross !

💙💙💙💙

Aux Quais du polar à Lyon, impressions sur l’exposition Tyler Cross, vue avant de lire la BD.

Au premier étage de la Bourse, une expo de planches de Tyler Cross nous plonge dans un univers graphique glauque à souhait. Miami sert de décor à une histoire sombre et ensanglantée.
Le dessin, très stylisé est résolument moderniste, sobre, épuré. Les plans se scindent comme dans un scénario de film entre plongée et contre-plongée. L’auteur privilégie le dessin, le style et l’harmonie stylistique des planches.

Chaque planche est présentée pour rendre un effet graphique d’ensemble. Nous sommes presque dans un tableau d’atelier d’artiste où le peintre reproduit les œuvres exposées au mur. Les dialogues ne semblent pas être du même tonneau, mais l’ensemble est une véritable réussite !

 


Catalogue éditeur : Dargaud

Nous avions quitté un Tyler Cross fatigué mais libre après son évasion du centre pénitentiaire d’Angola. Nous le retrouvons fringuant et en chemisette à fleurs sous le soleil de Floride. Entraîné malgré lui par son avocat véreux, Tyler s’immerge dans le monde poisseux de la promotion immobilière. Et se concentre sur un objectif alléchant : un braquage de 700 000 dollars. Dans cette nouvelle affaire criminelle, Tyler Cross rencontre une alliée surprenante en la personne de Shirley Axelrod, apparemment normale, mais qui apprend vite. Très vite.

Dessinateur : Brüno Scénariste : Fabien Nury Coloriste : Laurence Croix

Genre Polar / Thriller / Public Ado-adulte – à partir de 12 ans / 96 pages / Format : 240×320 / EAN : 9782205077032

 

La succession. Jean-Paul Dubois

Comment vit-on le départ de ses proches, de ses parents, lorsque l’on ne rêve que de pratiquer son sport de prédilection sous le soleil de Miami. Dans « La succession », son dernier roman, Jean-Paul Dubois explore avec beaucoup de légèreté et d’ironie en apparence, les relations familiales, la transmission et l’héritage moral.

DomiCLire_la_succession.jpgPaul Katrakilis a laissé à Toulouse son père médecin, seul rescapé d’une famille où de grand-père en belle fille, d’épouse en beau-frère, comme une tare indélébile et génétiquement transmissible, le suicide est la seule porte de sortie. Paul a été initié jeune à la cesta punta au pays basque. Tout juste achevées ses études de médecine, il part pratiquer la chistera sous le soleil de la Floride. Là, il s’entoure de très peu d’amis, d’une femme qu’il aime sans espoir, et d’un chien qu’il sauve des eaux. Jusqu’au jour où le décès brutal de son père le contraint à revenir à Toulouse.
C’est alors le difficile retour dans la maison lourde des départs mais également de la présence toujours prégnante des défunts. Il est délicat de se réadapter, de changer de métier, d’affronter les souvenirs, de vider la maison, et sans doute de comprendre enfin qui était ce quasi inconnu, son propre père. La découverte sera pour Paul bouleversement, sidération, interrogation, puis compréhension et acceptation. C’est aussi un long cheminement vers la famille, l’héritage, la fatalité, la recherche d‘un bonheur parfois si difficile à trouver.

De cet auteur, J’avais adoré Une vie française dans lequel l’ironie piquante cède le pas à une grande sensibilité et à une vision particulièrement corrosive de toute une époque. On retrouve ici cette plume à la fois critique, mordante, et sensible.  Comme toujours dans les romans de Jean-Paul Dubois, la légèreté n’est qu’apparente. Les sentiments émergent et ont finalement la part belle. Les questionnements sont bien plus profonds qu’il n’y parait de prime abord, le destin, le choix que l’on a ou pas, la vie que l’on choisit, autant de questions auxquelles il est bien compliqué de savoir répondre. Tragique, comique, sensible, ironique, un brin désespéré et certainement désabusé, voilà du grand Jean-Paul Dubois.

Envie de suivre Paul de Toulouse à Miami…


Catalogue éditeur : Editions de l’Olivier

Paul Katrakilis vit à Miami depuis quelques années. Jamais il n’a connu un tel bonheur. Pourtant, il se sent toujours inadapté au monde. Même la cesta punta, ce sport dont la beauté le transporte et qu’il pratique en professionnel, ne parvient plus à chasserle poids qui pèse sur ses épaules.
Quand le consulat de France l’appelle pour lui annoncer la mort de son père, il se décide enfin à affronter le souvenir d’une famille qu’il a tenté en vain de laisser derrière lui.
Car les Katrakilis n’ont rien de banal: le grand-père, Spyridon, médecin de Staline, a fui autrefois l’URSS avec dans ses bagages une lamelle du cerveau du dictateur; le père, Adrian, médecin lui aussi, est un homme étrange, apparemment insensible; la mère, Anna, et son propre frère ont vécu comme mari et femme dans la grande maison commune. C’est toute une dynastie qui semble, d’une manière ou d’une autre, vouée passionnément à sa propre extinction.
Paul doit maintenant rentrer en France pour vider la demeure. Lorsqu’il tombe sur deux carnets noirs tenus secrètement par son père, il comprend enfin quel sens donner à son héritage.

Parution 18 août 2016 / Livre 140 × 205 mm 240 pages / EAN : 9782823610253 / 19,00 €

Ma semaine aux USA pendant les élections présidentielles américaines…

C’était le 8 novembre, journée d’élections pour des millions d’américains. J’ai assisté en direct à cette soirée pour le moins inhabituelle si on la compare à celles de nos élections présidentielles et à leurs résultats quasi instantanés. Quelques impressions de cette journée, semaine devrais-je dire.

Soirée en famille devant le poste. Et quelle soirée ! Commencée vers 16h, terminée (par ko) à 1h du matin. Étrange veillée électorale où les résultats s’engainent pendant des heures à partir de 20h ET (Eastern Time, ne pas oublier que les bureaux de vote ferment parfois d’un côté du pays quand les résultats sont déjà en partie annoncés de l’autre !) et se finissent tard le lendemain. Deux états ont un système à la proportionnelle, pas les autres, ce qui fait que celui qui a la majorité des voix emporte l’ensemble des grands électeurs de l’état. Il y a également en plus de Hillary Clinton et Donald Trump, deux autres candidats dont on ne parle quasiment pas.
Toute la journée du lendemain, et pendant des jours, les résultats arrivent mais l’élection se joue avec le décompte des grands électeurs, même si le vote populaire peut être différent. Pour en avoir une idée Hillary a environ plus de 200.000 votes de plus dès le lendemain des résultats. D’ailleurs les gens protestent dans les rues de plusieurs grandes villes dès le 9 novembre au soir ! (Ce qui est très inhabituel ici !)
Les derniers résultats ne sont toujours pas validés quand je pars dormir.

Pour info, à Miami le temps moyen pour remplir un bulletin de vote est de 25 à 30 minutes car il y a 3 pages de sujets différents à élire, choisir, décider le même jour ! Une réglementation sur l’énergie solaire, changer les juges, etc. et accessoirement voter pour le président… Ils sont écrits en trois langues, anglais, espagnol et créole. Et les bureaux de vote étaient ouverts pendant les 15 jours précédant le 8 novembre, vous pouviez donc aller voter au moment qui vous convenait le plus. Ce n’est pas forcément pareil dans tous les états.

domiclire_electionsusa37 novembre : Élections Last Hours…#ClintonVsTrump ambiance #USA2016 demain on sera devant le poste pour une drôle de soirée !

8 novembre : Dans l’après-midi, ballade du côté de Winwod (un quartier de Miami) je tombe par hasard sur un bureau de mobilisation des volontaires pour la campagne démocrates. Ambiance ! Ils sont motivés et ils y croient.

 

Je suis donc à Miami, un des états clé, qui est pronostiqué devant basculer dans le camp Clinton. On est prêts. Et le verre de vin est indispensable pour attaquer cette longue soirée. Le amis et la famille réunis pour vivre en direct les longs, très longs décomptes et résultats…
Tout au long de la soirée, je prendrai des photos de l’écran de télé, pour me faire expliquer ensuite. Et je tenterai de comprendre les subtilités du système fédéral, qui accorde un nombre d’électeurs par état qui n’est pas forcément proportionnel au nombre de votants. Ceci pour respecter et permettre un certain équilibre dans la représentation des états moins peuplés, mais qui peut faire basculer les résultats dans un sens ou dans l’autre, à l’encontre parfois du vote populaire. Enfin, ça c’est si j’ai bien compris !

Premiers résultats on attend les résultats de la Floride ! Va-t-elle basculer ou pas ?
Si vous êtes à New York, l’Empire States qui s’éclaire aux couleurs du pays annonce les résultats. C’est parfois serré. Les électeurs s’ajoutent  en bas à gauche de l’écran quand l’état est gagné …
On arrive au bout de quelques heures aux résultats des états du centre des USA, largement républicains, mais ça ‘était prévu… beaucoup d’incertitudes…Pour moi, il est absolument étonnant de voir comment un État malgré les différences dans chaque conté (zones plus ou moins peuplées) passe d’un côté ou de l’autre.

 

Alors, à partir d’une certains heure, c’est pas bon, non ? Enfin ça dépend pour qui !
On voit souvent sur l’écran : « Too early to call », ça veut dire que pour certains états, on ne peut pas encore dire, c’est trop serré ! Les heures passent. les résultats changent parfois d’une minute à l’autre !

 

Ok ! Au bout d’un moment, sur la carte, c’est rouge de chez rouge non ?

 

domiclire_electionsusa149 novembre : au matin, le discours de Clinton. Intéressant, en particulier son passage pour les jeunes filles et les femmes.
Se dire qu’au final, elle a quand même gagné en nombre de voix du « popular vote » ! Et malgré tout perdu ! Elle aura environ plus de 2 millions de votes populaire de plus ! On assiste à des manifs dans quelques villes (mais pour le début, c’est bien plus calme qu’en France) pour réclamer le résultat du vote populaire. Le lendemain soir. Les votes montrent déjà la différence : Clinton a davantage de voix que Trump !

Au dernier décompte (22 novembre) elle est à 48,1% avec 64,227,373 voix et Trump à 46,6% avec 62,212,752 voix !

Voilà, c’était mes impressions d’une étonnante soirée, semaine, expérience…

Deux semaines après l’élection présidentielle américaine, remportée par Donald Trump, Hillary Clinton n’en finit plus de creuser l’écart : le nombre total de voix en faveur de l’ancienne candidate démocrate (64 223 958) dépasse désormais de plus de deux millions (soit 1,5 point de pourcentage) celui en faveur du président élu (62 206 395), après un dernier décompte réalisé dans les États du New Jersey, de l’Illinois, du Maryland et de Californie, selon le New York Times, qui rapporte les données compilées par le site Cook Political Report.