Découvrir la vie tumultueuse et le talent d’un peintre méconnu avec Torrentius, le roman historique réaliste et truculent de Colin Thibert

Né en 1589 à Amsterdam, Johannes van der Beeck dit Torrentius est un peintre qui réalise les natures mortes les plus incroyables de son époque, grâce à une technique inédite qui lui permet d’obtenir une lumière unique. Un émissaire du roi d’Angleterre le remarque et lui passe commande d’une toile au nom du roi Charles Ier d’Angleterre.
Torrentius est un homme frivole qui aime les beaux habits et les bijoux, le vin et les filles. Ce libertin invétéré aime s’encanailler dans les auberges sans toujours y payer son écot, profiter de la vie dans tout ce qu’elle peut lui offrir, et clame haut et fort que son coup de pinceau est l’œuvre du diable. Il profite également de son grand talent pour réaliser quelques gravures pornographiques qu’il fait vendre sous le manteau. Mais vivre cette vie-là, c’est hélas oublier qu’aux Pays Bas à cette époque règnent les prédicants et l’austérité de la religion calviniste.
Arrêté par le bailli d’Harlem qui a juré sa perte, Torrentius est torturé, jugé puis condamné. Il sera sauvé in extremis par Charles Ier d’Angleterre mais la torture et la prison auront eu raison de sa passion et de son art… Il meurt le 17 février 1644 à Amsterdam.
Dans ce court roman, Colin Thibert fait efficacement ressentir à ses lecteurs l’ambiance délétère qui régnait dans cette Hollande du XVIIe siècle et dans les pays calvinistes. Quand la raison divine devient prépondérante, et que les diktats religieux font fi des relations humaines. Il décrit un homme certes libertin, mais surtout un génie de la peinture au caractère trempé et capable de résister aux épreuves infligées par l’Homme. Un roman qui fait réfléchir sur la nature de l’homme et sur les aberrations qui sont commises lorsque les religions deviennent prépondérantes sur les lois des hommes, et ce qu’elles qu’elles soient.
Si l’on se souvient bien des dégâts provoqués par l’inquisition aussi bien en France qu’en Espagne, on connait souvent moins bien cette chasse aux sorcières et aux mécréants qui a également frappé les provinces du nord. La prospère et bourgeoise Hollande du XVIIe siècle est aux mains des protestants qui prônent une vie aussi rigide qu’austère au service d’un Dieu bien peu compatissant.
Le roman de Colin Thibert m’a fait penser au roman Miniaturiste de Jessie Burton, qui se passe à Amsterdam en 1686, ou encore à La rose de Saragosse de Raphaël Jerusalmy, où l’on retrouve les folies criminelles de l’inquisition.

Le seul tableau de Torrentius qui a survécu à la destruction de toute sa production, Nature morte avec bride et mors, 1614, est conservé au Rijksmuseum d’Amsterdam.
Catalogue éditeur : Héloïse d’Ormesson
Sous le nom de Torrentius, Johannes van der Beeck peint les plus extraordinaires natures mortes de son temps et grave sous le manteau des scènes pornographiques qui se monnayent à prix d’or. Dans l’austère Haarlem du XVIIe, ce provocateur flamboyant, noceur invétéré et fornicateur insatiable, fascine autant qu’il dérange. Certains donneraient cher pour le neutraliser. Un bailli zélé mène l’offensive et le traduit en justice. Sous la menace de la torture, le blasphémateur acceptera-t-il de se renier ?
Aussi précis et raffiné que les toiles de ce génie oublié de la peinture flamande, Torrentius est le roman du destin contrarié d’un avant-gardiste. Recomposant le tableau de cette existence tumultueuse, la plume savoureusement anachronique de Colin Thibert nous invite à côtoyer cet hédoniste libertaire.
128 pages | 15€ / Paru le 22 août 2019 / ISBN : 978-2-35087-537-8
Photo de couverture © Paulette Tavormina, courtesy the artist and Robert Mann Gallery, New York