Thelma, Caroline Bouffault

Comment vivre son adolescence lorsque l’on se sent si différent

Thelma est une jeune fille de 15 ans qui pense être bien dans sa peau. Elle écoute chaque jour les conseils, non, les ordres de l’entraîneur pour tenir la ligne qu’elle s’est fixée, ne pas se laisser envahir de disgracieux bourrelets, et toujours courir, éliminer, afin de ne jamais prendre un gramme de trop. Thelma connaît toutes les astuces qui donnent l’illusion qu’elle a pris un peu de poids en particulier lorsqu’elle doit monter sur la balance du docteur. Il suffit parfois de boire des litres d’eau avant la visite hebdomadaire et tout va tellement vite qu’il ne se rendra compte de rien. Une seule obsession, rester en permanence à la limite de la barre fatidique qui pourrait l’envoyer directement à l’hôpital.

Thelma vit dans une famille aisée, parents aimants, petite sœur docile. Chez elle, plus personne ne vit normalement, les parents sont à l’affût, sa petite sœur Billie doit suivre les consignes pour tenter d’endiguer cette vague qui un jour va tous les emporter. Car il est si difficile de vivre auprès du adolescente qui se détruit à petit feu sans que personne ne puisse démêler l’origine de son mal, comprendre son but, ni savoir que faire pour que tout rentre dans l’ordre.

Seules quelques rare personnes la considèrent comme un être normal. Dans ceux-là il y a surtout son amie Violette, mais aussi Justin ou encore le prof de sport remplaçant.

Thelma est une brindille fragile que tous protègent comme si elle était en verre. Aussi lorsque le prof lui propose de s’entraîner pour un marathon, sa vie s’illumine. Est-ce enfin le moyen de faire définitivement taire l’entraîneur ? De rentrer dans le monde des autres, le monde normal ?

Le lecteur suit alors la progression de ce mal insidieux, sans que cela ne le mette jamais dans une position de voyeur. Thelma est forte, intelligente, déterminée, mais son entourage est aussi pugnace qu’elle. L’amitié, le sport, la famille tiennent une vraie place pour tenter d’endiguer cette destruction au quotidien.

J’ai vraiment aimé ce premier roman. Le style direct, la sensibilité, le réalisme qui ne s’apitoie jamais sur le sort de cette jeune femme anorexique qui vit en marge des autres mais cherche sa place. Intelligente, forte, combative, on ne peut qu’avoir envie de l’aider, mais pas de la plaindre, de la soutenir et d’essayer de comprendre l’incompréhensible. Et c’est justement ce qui est bien présenté tout au long du roman, jamais l’autrice ne cherche les origines du mal dont souffre Thelma, comme s’il était impossible de savoir, mais peut-être malgré cela, toujours possible de s’en sortir.

Catalogue éditeur : Fugue

Certains ont des amis imaginaires ; d’autres, des tyrans intérieurs. Celui de Thelma s’appelle l’Entraîneur. Il règne sur son quotidien, lui enjoint de compter les calories et lui impose une discipline de fer. Soumise à sa loi, la lycéenne épuise son entourage et flirte avec l’abîme. Mais avec l’appui de son amie Violette, une issue se dessine : du marathon ou de la séduction de son professeur de sport, quel projet déraisonnable saura la tirer des griffes de l’Entraîneur ?

Combative et lucide, fragile et ironique, Thelma tâche de s’inventer un chemin parmi des adultes aussi désorientés que leurs cadets.

La trajectoire de la jeune fille s’entrechoque à celle de ses proches, et le roman nous plonge tour à tour dans les aléas de la vie de couple, les passions des amitiés adolescentes, les paradoxes des fratries… Avec empathie, justesse et une irrésistible drôlerie, Caroline Bouffault signe avec Thelma une comédie dramatique intergénérationnelle, qui est aussi un premier roman émouvant et solaire.

256 pages / 20,00 € / 978-2-494062-03-0 / paru le 6 janvier 2023

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