Dans la chaleur de l’été. Vanessa Lafaye

« Tu es mort maintenant mon frère, mais qui, pendant la saison des ouragans en Floride t’a laissé sur les Keys où un millier d’hommes étaient déjà morts avant … » Ernest Hemingway

https://i0.wp.com/ecx.images-amazon.com/images/I/41Byh3qOK2L._SX210_.jpgAvec « Dans la chaleur de l’été », Vanessa Lafaye nous entraine en Floride pendant les années trente. Elle utilise en trame de son roman deux composantes essentielles de la vie à l’époque, la ségrégation raciale et les lois iniques qui cantonnent les Noirs dans leur condition d’avant la sécession, et les ouragans terribles qui sévissent régulièrement dans cette zone des USA.

Les hommes, célébrés par tous lorsqu’il sont partis en 1917 faire la guerre en France, sont rejetés par les populations et le pouvoir en place, pas de travail, pas d’indemnisation, pas de pension, ils survivent en marge de la société et parcourent le pays à la recherche d’un travail. Mais ce sont les années de la grande dépression, il y a tellement peu  de travail. Les vétérans ont enfin trouvé un emploi sur le chantier d’un pont, sur les Keys, au sud de Miami, en Floride. Un de leurs chefs n’est autre que Henri Roberts, un jeune noir du pays, parti fier et conquérant, la fleur au fusil comme tant d’autres, et qui depuis son retour en ville n’a jamais revu sa famille.

C’est le 4 juillet, et à Heron Key comme partout dans le pays, les habitants vont célébrer la fête nationale lors d’un grand barbecue sur la plage, journée clôturée comme chaque année par un feu d’artifice. Mais chacun restera de son côté, car une barrière invisible sépare les blancs et les noirs. Si tous célèbrent la fête nationale, l’unité raciale est impossible. Les différents protagonistes vont converger sur la plage, les familles de blancs aisés, celles des Noirs pour partie à leur service, et les vétérans, crains et rejetés par tous. Ces derniers sont habituellement cantonnés dans les baraquements du chantier, mais ce soir ils vont se mêler à la population locale. Bières et alcool coulent, chacun pressent le drame, les esprits s’échauffent, les ressentiments, les haines raciales et les tensions exacerbées vont aboutir à une bagarre générale, puis à l’agression d’une femme blanche. Chercher le coupable devrait être facile dans cet univers où les noirs sont lynchés pour moins que ça. Le shérif mène son enquête dans cette ambiance où la tension est palpable, où les esprits échauffés sont prêts à en découdre, et alors que l’un des plus puissants ouragans menace de dévaster l’ile.

On se laisse emporter par l’enquête autour de l’agression, mais aussi par la romance dans les relations entre Henry et Missy, par la force des sentiments, les douleurs et les luttes, et par les difficultés qu’ont blancs et noirs à vivre ensemble. On est submergé par la force des éléments, par cet ouragan qui détruit tout sur son passage et ne laisse qu’un spectacle de mort et de désolation. On découvre le retour difficile des vétérans, rejetés dans tout le pays, spoliés de leurs droits, ils ont vécu le pire et ont toutes les difficultés à se réadapter à une vie « normale ». On est affligés par l’indigence, l’incompétence et la nonchalance des autorités. Voilà un premier roman très prometteur. Étayé par des éléments historiques qui permettent de mieux appréhender, en même temps qu’une période de l’Histoire méconnue, quelle pouvait être la difficulté de vivre ensemble à une époque où les lois raciales iniques étaient encore approuvées par tous.


Catalogue éditeur : Belfond

Inspiré de faits réels, et notamment de l’histoire de l’ouragan le plus puissant jamais recensé en Floride, un premier roman impressionnant. Portée par une tension permanente, une histoire de passion et de survie, dans un Sud rongé par le racisme.
Depuis le départ de Henry en 1917 pour les tranchées françaises, Missy Douglas n’a jamais cessé de penser à lui. Dix-huit ans plus tard, après avoir survécu à l’enfer et erré en Europe, Henry est de retour à Heron Key. Mais si l’homme n’a plus rien du garçon désinvolte de l’époque, la ville, elle, n’a pas changé : les Noirs subissent une ségrégation d’une violence inouïe. Parqués dans un camp insalubre, Henry et ses camarades vétérans cristallisent les plus grandes craintes et les plus folles rumeurs. Lire la suite

Traduit par Laurence VIDELOUP / Parution le 19 mai 2016 / 320 pages / 21.50 €

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