La soustraction des possibles, Joseph Incardona

Entre banquiers suisses et mafia corse, les aventures politico-érotico-financières de petits qui rêvent d’entrer dans la cour des grands

Genève, 1989. Aldo Bianchi, toujours célibataire à 38 ans, est un sémillant prof de tennis. Un peu gigolo sur les bords, il profite des avantages que lui offre Odile, sa maîtresse plus si jeune mais si bien pourvue grâce aux revenus très confortables de son mari. En mal d’activité et surtout de sources de revenus, Aldo accepte les missions bien rémunérées que lui confie le mari d’Odile, des aller-retour Lyon-Genève pour transporter discrètement quelques mallettes. Mais accéder au seuil de la cour des grands en faisant rapidement de substantielles économies donne des idées à Aldo qui voudrait en profiter pour faire fructifier la poule aux œufs d’or.

Dans leur entourage évoluent aussi, pour ne citer qu’eux…

Svetlana, une belle et jeune banquière arriviste et amoureuse ;
René, un mari éconduit qui retrouve un semblant de jeunesse au seuil de la retraite ;
Quelques mafieux corses qui ne savent pas s’arrêter de faire leurs affaires pour profiter d’une belle fin de vie sur l’île de beauté, l’ennui est mauvais conseiller ;
Quelques mafieux albanais ou russes pour faire bonne mesure, on n’est pas loin de la chute du régime soviétique, et dont les manières n’ont rien de celles d’enfants de cœur, où l’on apprend le triste parcours de ces prostituées que l’on retrouve déjà à cette époque dans les grandes capitales européennes ;
Quelques petits caïds de banlieue, déjà, qui tombent sur des pigeons à plumer mais s’attaquent aussi à plus malin et expérimenté qu’eux (une autre époque ?) ;
Quelques banquiers suisses qui se protègent et se cooptent, car finalement le pouvoir ça ne se partage pas, même au pays du paradis fiscal ;
Et des femmes amoureuses, de l’amour, du vrai et de celui qui se monnaye.

Ce que j’ai aimé ?

Les détails, sur la société, l’histoire, les personnages, comme les digressions sont érudits et intelligents. le lecteur ne se noie pas dans des circonvolutions alambiquées qui lui feraient perdre le fil mais au contraire retrouve une époque révolue et découvre un milieu pas si clair que ça. Si parfois l’intrigue semble un peu fouillis, beaucoup de monde évolue autour de ces quelques personnages principaux, l’intérêt est toujours habilement relancé et les événements se succèdent pour notre plus grand bonheur.

Un livre brillant et complexe sur l’amour, l’amour de l’argent, l’amour des autres, femmes ou hommes, l’amour de soi aussi, dans ce milieu de la finance où tout est autorisé pour arriver à ses fins.
Un roman noir détonnant, des personnages bien campés, des caractères affirmés et crédibles, une époque pas si lointaine que l’on aurait presque oubliée, celle de tous les possible et de toutes les trahisons.

Et un auteur qui intervient dans son roman pour parler à ses lecteurs, les apostropher avec ironie et à propos, cela surprend et interpelle habilement.

Cette version audio m’a tenue en haleine pendant quelques heures sans que je ne vois passer le temps. La voix du lecteur est bien adaptée aux différents personnages qu’il incarne avec justesse et parfois une pointe d’ironie. Même les accents et les protagonistes très caractéristiques ressortent avec justesse. J’y ai trouvé les intonations qui correspondent à cette critique acerbe et intelligente de la société que nous propose Joseph Incardona.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2021

Catalogue éditeur : Audiolib et Finitude

On est à la fin des années 80, la période bénie des winners. Le capitalisme et ses champions, les Golden Boys de la finance, ont gagné : le bloc de l’Est explose, les flux d’argent sont mondialisés. Tout devient marchandise, les corps, les femmes, les  privilèges, le bonheur même. Un monde nouveau s’invente, on parle d’algorithmes et d’OGM.
À Genève, Svetlana, une jeune financière prometteuse, rencontre Aldo, un prof de tennis vaguement gigolo. Ils s’aiment mais veulent plus. Plus d’argent, plus de pouvoir, plus de reconnaissance. Leur chance, ce pourrait être ces fortunes en transit. Il suffit d’être assez malin pour se servir. Mais en amour comme en matière d’argent, il y a toujours plus avide et plus féroce que soi.
De la Suisse au Mexique, en passant par la Corse, Joseph Incardona brosse une fresque ambitieuse, à la mécanique aussi subtile qu’implacable.
Pour le monde de la finance, l’amour n’a jamais été une valeur refuge.

Un livre audio lu par Damien Witecka

Parution : 16 Septembre 2020 / Durée : 12h07 / Prix public conseillé: 24.90 € / Format: Livre audio 2 CD MP3 / Poids (Mo): 508 / Poids CD 2 (Mo): 491/ EAN Physique: 9791035403621
Finitude : 2020 / 14,5 x 22 cm / 400 pages / ISBN 978-2-36339-122-3 / 23,50 euros

6 réflexions sur “La soustraction des possibles, Joseph Incardona

    • Domi juin 9, 2021 / 19:28

      j’avoue que j’étais un peu inquiète, mais au final une vraie réussite pour moi.

      Aimé par 1 personne

    • Domi juin 20, 2021 / 08:07

      j’ai été agréablement surprise, mais depuis j’ai lu quelques avis mitigés ou contraires, si tu le lis ça m’intéressera de connaître ton avis

      Aimé par 1 personne

  1. Ceciloule - Pamolico août 22, 2021 / 07:46

    J’ai été charmée par l’irrévérence de l’auteur, par l’audace de ce roman, et, comme toi, par l’époque et par l’intrigue, certes alambiquée mais nous permettant toujours de nous y retrouver.

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