Quand tu écoutera cette chanson, Lola Lafon

Une nuit au musée singulière et émouvante

Août 2021, Lola Lafon passe une nuit dans l’annexe, la partie du musée Anne Frank à Amsterdam. Cette annexe dans laquelle Anne Frank a passé sept cent soixante jours jusqu’à ce jour de l’été 1944 où elle sera arrêtée avec sa famille et où ils seront déportés vers le camp d’Auschwitz.

Une nuit pour parler de la jeune fille sans doute la plus connue de cette époque, du journal le plus lu, commenté, oublié aussi. Car qui d’entre nous, ayant lu le journal d’Anne Frank, se souvient de ses mots, de ses sentiments, de l’application et du soin qu’elle a mis à l’écrire, pensant qu’un jour, peut-être, il pourrait être publié, elle qui se rêvait autrice.

Tout au long de cette écoute, j’ai rencontré Anne et Margot, les sœurs Frank, mais aussi les parents, Otto Frank seul reviendra de l’horreur des camps nazis.

J’ai découvert qu’à la suite de ce qu’elle avait entendu, Anne a repris son journal pour en faire une véritable œuvre littéraire, puisqu’elle avant compris que tous les témoignages écrit par les habitants qui subissaient le joug des allemands seraient un jour utiles à l’Histoire. Depuis cette écoute, je sais qu’il serait bien de relire ce journal que j’avais découvert comme tant d’autres à l’adolescence, mais dont je n’avais jamais pris la réelle mesure.

J’ai apprécié tous les témoignages, la recherche qui est explicitée pour placer dans un contexte à la fois l’écriture du journal, et la façon dont par la suite il a été retrouvé, modifié, publié, et au fil de années les différentes approches qui en ont été faites à mesure que l’on s’éloignait de la fin de la seconde guerre mondiale. C’est à la fois consternant par certains côté, mais tellement caractéristique de notre façon d’appréhender l’Histoire et les événements qui nous ont touchés, avec parfois, souvent, une forme de rejet ou de dissimulation de certains faits trop difficiles à entendre sans doute.

J’ai découvert la propre histoire de Lola Lafon, dont javais lu à sa parution La petite communiste qui ne souriait jamais, sans me poser la question de la proximité de l’autrice avec la Roumanie. Le départ forcé des familles, pour fuir la politique et les geôles de Ceausescu. Cette histoire personnelle qui émerge du silence de la nuit dans l’Annexe.

Enfin, interrogative à propos du titre Quand tu écouteras cette chanson, découvrir là encore ce souvenir d’une famille de cambodgiens, et de leur fils qu’elle a rencontré en Europe avant qu’ils ne repartent tous se jeter dans les griffes et le rouleau compresseur de Pol Pot et des Khmer-Rouges. Et le souvenir qui reviendra à chaque fois qu’elle écoutera cette chanson.

La lecture audio par Irène Jacob donne une dimension supplémentaire à ce livre. Émotion, sentiments d’injustice, besoin de réparation, intensité des souvenirs, difficulté à s’approcher de l’Annexe et de tout ce qu’elle signifie, tout est là, tout passe par sa voix, c’est profond, intense parfois, il est impossible de s’y soustraire tant c’est dense et émouvant. C’est à la fois maîtrisé et porteur d’une forme d’attente, d’espoir, qui m’a touchée tout au long de cette nuit dans le musée. J’ai écouté ce livre en plusieurs fois, mais j’aurais pu l’écouter jusqu’au bout de la nuit tant j’avais l’impression d’être dans la tête de l’autrice, au plus près de ses doutes, de ses espoirs, de ses attentes, et de tout ce qu’elle nous dévoile d’elle.

Catalogue éditeur : Audiolib, Stock

« Le 18 août 2021, j’ai passé la nuit au Musée Anne Frank, dans l’Annexe. Anne Frank, que tout le monde connaît tellement qu’il n’en sait pas grand-chose. Comment l’appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment. Est-ce un témoignage, un testament, une œuvre ?
Celle d’une jeune fille, qui n’aura pour tout voyage qu’un escalier à monter et à descendre, moins d’une quarantaine de mètres carrés à arpenter, sept cent soixante jours durant. La nuit, je l’imaginais semblable à un recueillement, à un silence. J’imaginais la nuit propice à accueillir l’absence d’Anne Frank. Mais je me suis trompée. La nuit s’est habitée, éclairée de reflets ; au cœur de l’Annexe, une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. » Lola Lafon

Parution : 15/03/2023Durée : 4h30 / EAN 9791035412579 Prix du format CD 20,90 € / EAN numérique 9791035413026 Prix du format Numérique 18,95 €

2 réflexions sur “Quand tu écoutera cette chanson, Lola Lafon

  1. Matatoune février 26, 2024 / 08:26

    Un livre où on apprend autant sur cette écrivaine qu’était Anne Franck que sur l’ecrivaine Lola Lafon, comme le souligne cette chronique. En effet, Irène Jacob doit avec son talent donner une autre dimension ! Merci pour cette belle mise en lumière !

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    • Domi février 26, 2024 / 21:19

      un livre à conseiller encore et encore, je ne savais pas à quoi m’attendre mais j’ai tout aimé malgré le sujet qui aurait pu être plombant.

      Aimé par 1 personne

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