Les naufragées, Manon Hentry-Pacaud

Quatre moments déterminants de la vie d’une femme

Louise, mère et fille, se prépare à accueillir sa mère et sa fille pour un déjeuner dominical qu’elle souhaite être le premier d’une longue série Pendant cette mâtinée hors du temps, en feuilletant de vieux albums photos elle pense à cette grossesse non aboutie dont elle n’a jamais parlé. Faut-il en parler à sa fille, faut-il accepter enfin ce qui n’a pas été ?

Paula, mère et grand mère, se prépare à rejoindre sa fille et sa petite fille. Apprêtée, soignée, maquillée, elle se pose de nombreuses questions sur l’utilité de toujours correspondre aux critères établis auxquels elle s’est toujours confrontée et qu’elle a respecté à la lettre. Mais a t elle seulement su être elle-même une fois dans sa vie ? N’est-il pas temps de s’écouter et de se libérer ?

Inès, femme libre et amie, doit prendre seule La décision de sa vie, garder ou pas l’enfant qui n’est pas attendu. N’est-ce pas au contraire le moment de se confier, de parler, de dire, au lieu de s’enfoncer dans le silence et la solitude. Retrouver Louise, l’amie, la confidente, l’autre soi, pour enfin se sentir femme et libre de ses choix.

Louise, fille et petite-fille, amie de toujours, se prépare à rejoindre sa mère et sa grand-mère pour ce déjeuner dont elle sent déjà de façon implicite toute l’importance qu’il faudrait lui concéder. Mais d’abord, retrouver l’amie, celle qui avait disparu un temps, silencieuse et secrète, et qui sait renouer l’amitié si forte que rien ne doit briser.

Quatre femmes, quatre chapitres, quatre moments importants dans la vie d’une femme.

Un roman choral qui parle de recherche de soi, d’assertivité et de doute, d’entraide et de soutien, de secrets et de partage, de cette façon si intime de vivre sa féminité, d’affirmer sa personnalité, de se trouver ou de s’oublier en chemin. Étonnant premier roman.

Si je m’y suis souvent ennuyée, je comprends la démarche de l’autrice qui souhaitait mettre en avant la complexité de la vie des femmes à tous les âges de leur existence.

Sororité ? Féminisme ? Féminité ? Introspection ? Il y a de tout cela dans une approche très personnelle et pas inintéressante. L’écriture est précise, parfois un peu trop professionnelle dans son approche de la féminité, ce qui m’a empêché d’y adhérer totalement, mais elle a le mérite d’être et de poser certaines questions.

Un roman de la sélection 2023 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Frison-Roche Belles lettres

Un roman choral d’une justesse infinie, qui aborde sans tabou les nombreuses interrogations qu’implique le fait d’être une femme. Louise n’a jamais pu faire le deuil de sa ­première grossesse. Paula, sa mère, court éternellement après une jeunesse qui, les années passant, lui échappe. Anne, perdue entre l’adolescente qu’elle était et l’adulte qu’elle devient, s’efforce d’appréhender la multiplicité du féminin. Son amie Inès est, quant à elle, ensevelie sous le poids d’un avortement qu’elle a cru devoir dissimuler. En ce dimanche matin, à l’occasion d’un déjeuner familial, les parcours de ces quatre femmes se croisent, dans un apogée sororal aussi puissant que nécessaire.

Manon Hentry-Pacaud est originaire du Loir-et-Cher et étudie en master de Lettres modernes mention Études de genre et littérature francophone. Depuis toujours, la lecture et l’écriture font partie intégrante de sa vie. Les Naufragées est son premier roman.

Date de parution : 17/05/2022 / pages : 139 / EAN : 978-2492536250 / Prix : 19€

Les tourmentés, Lucas Belvaux

Atteindre la face la plus sombre de l’Homme pour enfin trouver la lumière

Le retour au monde des vivants n’est jamais chose simple pour d’anciens militaires qui ont connu de violentes et mortelles zone de guerre. C’est ce qui arrive à Skender. Cet ancien militaire efficace et dur dans la lutte sans merci pour sa vie est aujourd’hui un homme paumé, assailli de souvenirs qui le rongent et l’empêchent de vivre sereinement auprès de Morgan et de ses enfants.

C’est un quasi SDF que Max, l’ami de toujours, le boss, le compagnon de combats, le sauveur, retrouve et accompagne chez Madame, sa patronne. Car Max aussi est revenu du front, mais lui a réussi à s’en sortir auprès de Madame, riche veuve d’un grand chasseur, devenue elle même excellente chasseresse.

Et Madame propose à Skender un marché impossible à refuser pour un homme aux abois qui est prêt à tout pour l’amour et le bien de ses fils, Jordi et Dylan.

Étrange premier roman, le début m’a fait penser que j’allais retrouver l’ambiance du roman d’Anthony Buissonais (Un samedi soir entre amis). Mais non, ce roman choral dans lequel tour à tour Skender, Max, Madame, Morgan et Jordi prennent la parole est bien plus qu’un simple ou machiavélique thriller.

Chacun évolue au fil de ses pensées, de ses actions et sentiments, de ses rencontres et émotions. Chacun envisage les événements sous un angle qui lui est propre. Cela permet au lecteur attentif de voir se transformer les personnages et les relations qui les tiennent entre eux au fil des mois.

Plus roman psychologique que thriller, les sentiments de chacun sont à la fois explicités et terriblement exacerbés par cette lutte de chaque jour pour mener une vie « normale ». Leurs angoisses, leurs faiblesses, leurs attentes et leurs espoirs se révèlent et nous les font découvrir peu à peu, les rendant plus humains.

Loyauté, soumission, domination, amour, amitié, fidélité, fierté, espoir, déception, attente, ils passent par tous les stades et toutes les attentes pour un final à la hauteur des espoirs du lecteur.

Un roman de la sélection 2023 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : Alma éditeur

Dix ans que les deux hommes s’étaient perdus de vue et puis, d’un coup, ils se retrouvaient au détour d’une rue, face à face. Le hasard, paraît-il, fait bien les choses. S’il s’agissait de lui, il aurait mieux fait ce jour-là de se mêler de ce qui le regardait, mais il n’y était pour rien. Skender le comprendrait bientôt, ce n’est pas le hasard qui avait mis Max et Madame sur son chemin.
Il le comprendrait bientôt.

Né à Namur en 1961, Lucas Belvaux est acteur, réalisateur et scénariste. Pour le cinéma, il a réalisé plus d’une dizaine de films dont La Raison du plus faible (2006), Rapt (2009), 38 témoins (2012), Pas son genre (2014), Chez nous (2017), Des hommes (2020). Les Tourmentés est son premier roman.

20 € / 348 pages / Date de parution : 19 août 2022 / ISBN : 978-2-36279-608-1 / ISBN numérique : 978-2-36279-609-8

Cinq petits indiens, Michelle Good

Un roman choral bouleversant d’humanité, de douleur, d’espoir

Il y a Maisie, Clara, Lucy, Kenny et Howie et tous les autres, tous ceux qui ne sont plus là, disparus pour certains, silencieux pour la grande majorité d’entre eux.

Qui sont-ils ? Ce sont des indiens autochtones canadiens. Alors qu’ils n’étaient que des enfants, le gouvernement a décidé de les enlever à leurs familles pour ôter l’indien en eux, les faire vivre selon les préceptes de la religion catholique, dans des écoles qui devaient leur apprendre à devenir des blancs vivants à l’occidentale. Mais un indien reste à jamais indien, fort heureusement, et cet épisode douloureux de l’histoire récente du Canada signe l’échec de cette « invisibilisation » forcée des Premières Nations.

Michelle Good a voulu nous faire connaître leurs vies à travers le destin de cinq enfants devenus adultes. Leur prime enfance souvent heureuse, l’arrachement aux familles, les années noires du pensionnat, là où rien ne leur sera épargné, puis leur avenir à partir du jour où ils sont tout simplement mis à la porte du pensionnat à leurs 16 ans.

Chacun à son tour, les cinq petits indiens se racontent, du présent au passé, de l’enfance à l’adolescence, les peurs, les pleurs, la souffrance, les violences subies, les visites nocturnes du Père, tant aux filles qu’aux garçons, les silences de sœur Mary et sa cruauté, le soutien et l’entraide reçus de la part d’autres enfants.

Et le départ dans la vie, loin de la Mission, tellement difficile quand on a reçu ni amour, ni une éducation correcte pour pouvoir s’en sortir.

Un très beau roman, terriblement émouvant, empreint d’un réalisme qui fait mal tant les maltraitances sont flagrantes, la violence physique et morale destructrice pour ces adultes en devenir. Les dernières écoles ont fermé en 1996 à peine. De nombreux enfants sont passé par là, un grand nombre n’en est jamais revenu.

Des pratiques sordides que d’aucuns ont eues également ailleurs. En lisant ce roman on pense également aux enfants enlevés aux républicains par le gouvernement espagnol de Franco pour les élever dans la ligne du parti au pouvoir. Ici, c’est la nation indienne qui est niée en bloc. Fort heureusement, depuis des procès ont eu lieu, certains anciens pensionnaires ont pu s’exprimer au nom de tous ceux qui étaient passés par là, et une forme de reconnaissance essaye de voir le jour. Mais cela ne pourra jamais éclipser la cruauté de ce qu’ils ont subit pendant autant d’années.

J’ai aimé les écouter, les suivre, eu mal avec eux des outrages subits et de leurs difficultés à s’en sortir. J’ai suivi les traces de John Lennon et les pas des cinq petits indiens que je n’oublierai pas de sitôt.

Michelle Good, est une autrice crie qui appartient à la nation Red Pheasant. Elle a été l’avocate des survivants des pensionnats pendant de nombreuses années. Ce sont leurs voix qu’elle nous fait entendre, leurs douleurs, leurs vies. Certes romancées, mais le fonds est là, un roman choral bouleversant d’humanité, de tristesse, de douleur, mais aussi d’espoir et d’empathie.

Pour aller plus loin, lire par exemple l’article Découverte de corps d’enfants autochtones : comme si le Canada « se réveillait d’une longue amnésie »

« Ces pensionnats autochtones – on en dénombre officiellement 140 – ont été mis en place dans les années 1880. Le dernier a fermé en 1996″, »Le plus souvent gérés par l’Église catholique, leur objectif était de ‘civiliser’ les enfants des Premières Nations. »

Pendant près d’un siècle, l’État a ainsi arraché plus de 150 000 enfants amérindiens, métis ou inuits, à leur famille pour les assimiler à la culture blanche dominante », poursuit-elle. Un rapport publié en 2015 estime qu’entre 4 000 et 6 000 seraient morts dans ces institutions sous l’effet de maladies, de sous-nutrition, de maltraitances ou d’abus sexuels. 

Catalogue éditeur : Seuil, Voix autochtones

Traduit par : Isabelle Maillet

Canada, fin des années 1960. Des milliers de jeunes autochtones, libérés des pensionnats, essaient de survivre dans le quartier d’East Vancouver, entre prostitution, drogue et petits boulots.
Il y a Maisie, qui semble si forte ; la discrète Lucy, épanouie dans la maternité ; Clara, la rebelle, engagée dans l’American Indian Movement ; Kenny, qui ne sait plus comment s’arrêter de fuir, et, enfin, Howie, condamné pour avoir rossé son ancien tortionnaire.

D’une plume saisissante, Michelle Good raconte les destins entremêlés de ces survivants. Un roman choral bouleversant.

Michelle Good est une autrice crie appartenant à la nation Red Pheasant. Elle a travaillé comme avocate auprès des survivants des pensionnats autochtones pendant plus de 20 ans et elle a également publié de la poésie, des essais et des nouvelles dans de nombreux magazines et anthologies. Cinq Petits Indiens a reçu, entre autres, le prix du Gouverneur général 2020 et le prix du public Canada Reads de Radio-Canada.

Date de parution 10/03/2023 / 22.00 € TTC / 352 pages / EAN 9782021502626

Blizzard, Marie Vintgras

Se perdre dans le blizzard pour mieux se retrouver

Dans ce coin perdu de l’Alaska, il fait un froid à ne pas mettre le nez dehors. Pourtant Bess et l’enfant sont sortis dans le blizzard ; une minute d’inattention et Bess a lâché la main de l’enfant de Benedict. Elle part droit devant elle pour tenter de le retrouver avant le retour de Benedict. Bess est une jeune femme un peu paumée qui a débarqué dans ce coin d’hiver avec Benedict, un jeune homme taiseux, bourru, mais cependant très attachant, c’est surtout le père de Thomas.

Chacun des protagonistes révèle une partie de son histoire. Cole et Clifford, les hommes du village qui ont connu Benedict et son frère Thomas enfants ; Benedict qui n’a jamais compris pourquoi Thomas avait quitté sa maison sans espoir de retour ; Bess et ses blessures d’enfance, ses échecs, ses doutes et ses regrets ; Freeman dont personne ne sait pourquoi il a atterri dans ce trou paumé.

Dans le froid et la neige, au cours de cette quête où chacun espère retrouver l’enfant et celle qui l’a laissé partir vivants, la tension monte, des secrets se dévoilent, des liens se nouent, laissant la place à l’imagination, aux souvenirs, aux regrets, aux questionnements. Et les pièces d’un puzzle bien plus sordide qu’il ne paraissait de prime abord se mettent en place, les liens se créent, des secrets sont révélés. Dans ce huis-clos sous un ciel immense, les hommes pris dans le blizzard se retrouvent face à leurs révélations, à leurs pensées, à leurs actes.

Ce que j’ai aimé ?

La façon de présenter les personnages, de les isoler dans cette immensité blanche et glacée qui par ce blizzard devient un huis-clos oppressant, seuls face à eux même. L’écriture et le rythme, les chapitre courts qui donnent la cadence, font monter la tension, et attendre un dénouement digne d’un roman noir américain. Face au drame qui se noue, la disparition d’un enfant, les caractères, les émotions, les sentiments se dévoilent pour le pire comme pour le meilleur.

Un roman qui s’écoute d’une traite, court, cela permet de se mettre au rythme voulu par l’autrice. De nombreux thèmes sont abordés et parfois seulement suggérés par petites touches, mais toujours de façon à être compris par le lecteur en priorité, lui qui a toutes les versions, et donc toutes les clés, pour dénouer l’intrigue.

Blizzard est un roman choral dans lequel les personnages prennent la parole tour à tour. Dans cette version audio, quatre lecteurs tiennent chacun leur rôle, ce qui rend l’écoute particulièrement agréable et facilite la compréhension. Les voix sont adaptées à chacun. J’ai apprécié cette multiplicité de lecteurs. Cela donne vie à chacun, et rend l’écoute vivante et rythmée plus seulement par le blizzard, mais bien par le passé et les pensées de chacun. Cette lecture audio est ma deuxième lecture de ce roman, elle m’a permis de m’immerger encore d’avantage dans la tête de chacun des personnages principaux.

Un seul bémol à mon avis, il m’a semblé qu’il y avait des incohérences et des lacunes sur la connaissance du pays, du climat, de New-York. Mais dans cette version, les voix de chacun ont porté le texte, lui donnant une autre dimension, plus personnelle, plus intime.

Roman lu dans le cadre de ma participation au Jury Audiolib 2023

On ne manquera pas de lire les avis de Caroline Le murmure des âmes livres , Aude Bouquine , Les lectures de Claudia , Carobouquine

Catalogue éditeur : Audiolib, éditions de L’Olivier

Le blizzard fait rage en Alaska. Au cœur de la tempête, un jeune garçon disparaît.
Il n’aura fallu que quelques secondes, le temps de refaire ses lacets, pour que Bess lâche la main de l’enfant et le perde de vue. Elle se lance à sa recherche, suivie de près par les rares habitants de ce bout du monde. Une course effrénée contre la mort s’engage alors, où la destinée de chacun, face aux éléments, se dévoile.

Un premier roman à quatre voix, prix des Libraires 2022.

Lu par Stéphane Boucher, Alice de Lencquesaing, Patrick Mille, Sébastien Pouderoux

Parution : 10/08/2022 / Durée : 3h28 / EAN 9791035410070 Prix du format cd 19,50 € / EAN numérique 9791035410308 Prix du format numérique 17,45 €

Le bal des cendres, Gilles Paris

Quand passé et présent se rencontrent au pied d’un volcan

Guillaume de la Salle est le directeur d’un hôtel au pied du volcan Stromboli, sur l’île éolienne homonyme à quelques encablures de la Sicile.
Dans cet hôtel vont se côtoyer Mathéo, son ami de toujours, ancien militaire comme lui, confident, chaperon, protecteur ;
Giulia, sa femme disparue à la naissance de Giulia sa fille désormais adolescente un peu rebelle qui voudrait en savoir plus sur cette mère qu’elle n’a pas connue ;
Thomas, qui pleure Emilio son amour disparu en mer, et Lior, sa nouvelle conquête ;
Anton le séducteur médecin turc et Sevda, l’épouse trompée mais toujours amoureuse et résignée ;
L’américaine Abigale et son amant Eytan, qui chaque jour fidèlement téléphone à l’épouse restée au foyer ;
Sebastian et Ethel, un frère et une sœur qui se sont perdus de vue pendant des années et se sont enfin retrouvés ;
Cécile, la mère de Tom, Louise et Corentin, et Gris le grand frère disparu que ne voient que ceux qui savent ;
Elena, la comtesse italienne et sa discrète infirmière dame de compagnie, qui l’accompagne partout depuis l’accident qui l’a contrainte à vivre dans un fauteuil roulant et le décès de son époux ;

et tant d’autres qui comme eux se retrouvent à l’hôtel Strongyle pour quelques jours de vacances, d’amour, de rencontres, de bonheur, de repos.

Ces hommes et ces femmes nous racontent tour à tour une partie de leur histoire. En chapitres courts et rythmés, parfois déroutants, surtout au début quand la multiplicité des personnages m’a parfois légèrement perdue. Mais je me suis très vite familiarisée avec chacune de ces tranches de vies venues s’échouer dans le lobby de l’hôtel, sur la plage, dans les ruelles du village, sur les pentes abruptes et parfois si dangereuses du volcan.

Au fil des pages, des rencontres, des situations plus ou moins dramatiques, se dessinent un passé, des secrets, des espoirs et des attentes, des déceptions plus ou moins acceptées, des interactions entre ces protagonistes que pourtant rien ne semblait rapprocher au départ.

Un roman polyphonique dans lequel les relations se nouent, les masques tombent, les secrets se dévoilent, sur cette île au paysage à la fois idyllique et sec. Mais si le passé est parfois bien sombre, l’espoir renaît au bout du chemin, toujours porteur de lumière et d’espérance. J’ai aimé les descriptions de l’île, son influence sur le caractère de ses habitants, la chaleur, l’âpreté des paysages avec ce volcan toujours en éruption, mais aussi l’attrait inégalé pour les nombreux touristes qui y viennent chaque année, et dont on sent que l’auteur y a séjourné et les a lui même vécues. Et qui m’a terriblement donné envie d’aller les découvrir à mon tour !

Catalogue éditeur : Plon

Sur l’île de Stromboli, des couples savourent leurs vacances. Ils sont sensibles, lâches, infidèles, égoïstes, enfantins. Elles sont fortes, résilientes, légères, amoureuses. Le réveil du volcan va bouleverser leurs vies. Cet été de tous les dangers sera-t-il le prix à payer pour se libérer enfin ?

L’action se déroule au Strongyle, un hôtel de Stromboli où séjournent plusieurs couples et familles. Il y a aussi un enfant de 10 ans, Tom, qui ne se sépare jamais de ce mystérieux Gris qu’il est seul à voir avec son frère et sa sœur. Il y a enfin une adolescente, Giulia, grandie trop vite après la mort de sa mère.
Tous vont apprendre à se connaître, à s’apprécier, à s’aimer même pour certains, jusqu’à l’éruption du volcan qui décidera du sort de chacun dans ce roman choral. Lire la suite

EAN : 9782259263740 / Nombre de pages : 312 / Date de parution : 07/04/2022 / 19.00 €

Blizzard, Marie Vingtras

Au cœur des éléments déchaînés, dénouer les secrets

Blizzard est un roman choral dans lequel les personnages prennent la parole tour à tour.

Dans ce coin perdu de l’Alaska, il fait un froid à ne pas mettre le nez dehors. Pourtant Bess et l’enfant sont sortis dans le blizzard ; une minute d’inattention et Bess a lâché la main de l’enfant de Benedict. Elle part droit devant elle pour tenter de le retrouver avant le retour de Benedict. Bess est une jeune femme un peu paumée qui a débarqué dans ce coin d’hiver avec Benedict, le père de Thomas, un jeune homme taiseux, bourru, mais cependant très attachant.

Chacun des protagonistes révèle une partie de leur histoire commune. Cole et Clifford, les hommes du village qui ont connu Benedict enfant ; Benedict qui n’a jamais compris pourquoi son frère Thomas a quitté sa maison sans espoir de retour ; Bess et ses blessures d’enfance, ses échecs, ses doutes et ses regrets ; Freeman dont on se demande bien comment il est arrivé dans ce trou paumé.

Dans le froid et la neige, au cours de cette traque où tous espérent retrouver l’enfant vivant, et celle qui l’a laissé partir, la tension monte, des secrets se dévoilent, des liens se nouent, laissant la place à l’imagination, aux souvenirs, aux regrets, aux questionnements. Et les pièces d’un puzzle bien plus sordide qu’il ne paraissait de prime abord se mettent en place, les liens se créent, des secrets sont révélés. Dans ce huis-clos sous un ciel immense, les hommes pris dans le blizzard se retrouvent face à leurs révélations, à leurs pensées, à leurs actes.

Ce que j’ai aimé ?

La façon de présenter les personnages, de les isoler dans cette immensité blanche et glacée, comme s’ils étaient seuls face à eux même. L’écriture et le rythme, les chapitre courts qui donnent la cadence, font monter la tension, et attendre un dénouement digne d’un roman noir américain (après tout, nous sommes en Alaska!). Face au drame qui se noue, la disparition d’un enfant, les caractères, les émotions, les sentiments se dévoilent pour le pire comme pour le meilleur. J’ai lu ce roman quasi d’une traite, et je pense que c’est exactement ce qu’il fallait pour suivre le tempo voulu par l’autrice. Ce premier roman est une réussite, de nombreux thèmes sont abordés et parfois seulement suggérés par petites touches, mais toujours de façon à être compris par le lecteur en priorité, lui qui a toutes les versions et donc toutes les clés, pour dénouer l’intrigue.

Un roman de la sélection 2022 des 68 premières fois

Catalogue éditeur : L’Olivier

Le blizzard fait rage en Alaska.

Au cœur de la tempête, un jeune garçon disparaît. Il n’aura fallu que quelques secondes, le temps de refaire ses lacets, pour que Bess lâche la main de l’enfant et le perde de vue. Elle se lance à sa recherche, suivie de près par les rares habitants de ce bout du monde. Une course effrénée contre la mort s’engage alors, où la destinée de chacun, face aux éléments, se dévoile.

Avec ce huis clos en pleine nature, Marie Vingtras, d’une écriture incisive, s’attache à l’intimité de ses personnages et, tout en finesse, révèle les tourments de leur âme.

Parution 26 août 2021 / 192 pages EAN : 9782823617054 17,00 €

La bonne chance, Rosa Montero

Trouver le bonheur au milieu de nulle part, un roman lumineux à l’inventivité vivifiante

Alors qu’il est dans le tain pour donner une conférence à Cordou, un homme découvre par la fenêtre du wagon un village sinistre et désolé ; un balcon abandonné, une affiche indiquant à vendre, et le voilà qui descend à l’arrêt suivant, fait demi-tour et vient s’installer à Pozonegro.

Que se passe-t-il dans sa vie pour qu’il plante tout là, sur un coup de tête, et campe dans un appartement vide. Est-il coupable de quelque atrocité, est-il en fuite, recherché ? C’est la question que se posent tous ceux qui le côtoient, ceux qui lui ont vendu quelques mètres carrés dans cet immeuble sinistre sans comprendre son geste. À l’étage en dessous vit Raluca. La jeune femme est caissière au Goliat, l’un des seuls commerces du village, bavarde, célibataire, elle n’a pas sa langue dans la poche et a le cœur sur la main. Attendrie par ce beau gosse totalement paumé, elle décide de l’aider.

Cet homme mystérieux est en fait Pablo Hernando, un architecte reconnu de ses pairs, et attendu impatiemment par ses équipes à Madrid. Décidé à ne pas sortir de ce trou perdu, à ce que personne ne le retrouve, il utilise l’argent qu’il a sur lui pour vivre sans laisser de trace. Avec l’aide de sa voisine, il trouve même un emploi au Goliat. De quoi tenir sans faire de vague ni se faire remarquer. C’est un mystère ambulant qui intrigue tous ceux qu’il rencontre, et fait s’agiter ses collaborateurs qui le cherchent désespérément.

Il semble évident qu’il fuit un passé, quelqu’un qui lui veut du mal, et l’on comprend peu à peu de qui il s’agit. Pendant ce temps, alors qu’il est de prime abord rebuté par le look, le flot incessant de paroles, l’extravagance et l’attitude de Raluca, il s’en rapproche insensiblement. Peu à peu, la noirceur qu’il rejette vient perturber son quotidien, et l’on découvre de sombres groupes néonazis, des bandits de carnaval, des allusions à l’enfance maltraitée et au silence des témoins, et ce fils qu’il fuit encore plus que toute autre chose.

Ce que j’ai aimé ?

Découvrir un roman choral très attachant. Tour à tour, les différentes voix nous révèlent le passé des principaux protagonistes, dénouant les liens entre eux, le pourquoi de la fuite et du silence. Elles mettent en exergue ces moments où l’on se pose des questions sur son avenir, sur ce que l’on a fait de sa vie, sur sa propre utilité. Il en faut du temps et de l’énergie, ou au contraire une sacré dose de lâcher prise pour faire fi des apparences et des à priori, et vivre pleinement la vie que l’on souhaite. Un roman optimiste et empli d’espoir.

Le rythme très prenant, les chapitres courts, les personnages auxquels on s’attache immédiatement malgré leurs défauts, leurs silences, leur mystère. Au milieu de cette noirceur, et de ce paysage désolé d’une Espagne hors du temps, la bonté, la gentillesse, et le sens du partage éclairent ces pages, le lecteur a très envie de rencontrer Raluca, d’aider Pablo. Si beaucoup de sujets sont abordés, j’ai cependant apprécié cette réflexion sur nos choix de vie, notre façon de juger l’autre sans le connaître et souvent uniquement sur les apparences, qui éclaire d’un beau rayon de soleil le bout du chemin.

Catalogue éditeur : Métailié

Traduit par : Myriam Chirousse

Qu’est-ce qui pousse un homme à descendre d’un train à l’improviste et à se cacher dans un village perdu ? Il veut recommencer sa vie ou en finir ? Il fuit quelqu’un, ou quelque chose, peut-être lui-même ? Le destin l’a conduit jusqu’à Pozonegro, un ancien centre minier à l’agonie. Devant chez lui passent des trains qui peuvent être son salut ou sa perte, tandis que ceux qui le cherchent sont à l’affût.
Mais dans ce lieu maudit, où tout le monde a un secret, certains plus obscurs et dangereux que d’autres, cet homme rencontre des gens comme la lumineuse et généreuse Raluca, peut-être un peu cinglée aussi, qui croit que la joie est une habitude.
Une intrigue ensorcelante, d’une précision d’horlogerie, dévoile peu à peu le mystère de cet homme et, ce faisant, explore nos pulsions : la peur, la culpabilité, la haine et la passion.

Rosa Montero nous parle du Bien et du Mal, elle écrit un roman vivifiant et lumineux qui met l’amour, l’espoir et la rédemption au premier plan. La plume de Rosa Montero est un heureux antidote contre les temps qui courent.

Rosa Montero est née à Madrid où elle vit. Après des études de journalisme et de psychologie, elle entre au journal El País où elle est aujourd’hui chroniqueuse. Best-seller dans le monde hispanique, elle est l’auteur de nombreux romans, essais et biographies traduits dans de nombreuses langues, parmi lesquels La Fille du cannibale (prix Primavera), Le Roi transparent et L’Idée ridicule de ne plus jamais te revoir.

ISBN : 979-10-226-1149-7 / paru le 02/09/2021 / Pages : 288 / Titre original : La buena suerte

Âme stram gram, Christiane Legris-Desportes

Une comptine populaire pour parler d’amour, de vengeance, d’oubli et de pardon

Alors qu’il reçoit un appel lui annonçant le décès imminent de sa sœur, François comprend qu’il va être enfin libéré de ce poids qui l’oppresse depuis tant d’années. Car après le décès brutal de Marie, le seul véritable amour de sa vie, et parce que selon lui sa sœur en a été l’instigatrice, il a pris ses distances avec la famille, avec sa sœur, ses nièces. Et même l’annonce de ce deuil ne saurait le faire revenir sur sa décision de couper les ponts.

Pourtant, un courrier envoyé peu de temps après par la mère de Marie va bouleverser l’équilibre instable qu’il a instauré pour survivre à la douleur. Et cette révélation vient mettre à mal ses certitudes. Et si le décès de Marie avait une autre origine, et si, et si…

Chaque chapitre alterne les voix de différents personnages, sans jamais les faire interagir, chacun s’adresse à nous à la première personne du singulier pour nous dire le silence, les secrets, les difficultés à écouter et se comprendre, quand chacun, et François en particulier, s’enlise dans son incompréhension jusqu’au point de non retour. Où et comment trouver le pardon quand ceux que l’on a rejeté sont morts, quand le dialogue n’est plus possible. Pourtant, le bonheur, ou du moins une forme de sérénité et de résilience peuvent être au bout du chemin pour qui ouvre enfin son cœur et son esprit au pardon et à l’oubli, même après des années de silence et de ressentiment.

Sous une forme très singulière, ces différents textes, lettres, mails, post-it parlent au lecteur et à lui seul pour lui révéler les moments de vie, d’hésitation, de rancœur, de pardon, de résilience et de rechute face à la complexité des sentiments et des émotions qui surviennent lorsque François comprend qu’il s’est fourvoyé à jamais et n’a aucune possibilité de retour arrière.

Un roman court mais dense, qui est construit avec une précision et une économie de mots qui touchent au cœur par leur justesse et leur vérité. Et si l’on ne devait retenir que ça, Christiane Legris-Desportes nous montre à quel point il faut toujours communiquer, parler, s’ouvrir aux autres, au dialogue, ne jamais s’enliser dans le silence et l’incompréhension… Que l’on peut mettre en œuvre le pardon, la confiance en l’autre et en soi-même, l’écoute et le soutien. Tous ces mots que l’on oublie trop souvent et derrière lesquels il y a des actes et des sentiments si importants. Âme Stram Gram est une véritable leçon de vie.

J’avais lu ce roman une première fois en 2014, je le lis de nouveau avec plaisir dans cette version retravaillée par l’autrice et publiée par Les éditions d’Avallon.

Catalogue éditeur : Les éditions d’Avallon

Lorsque Marie, l’amour de sa vie, meurt dans des circonstances dramatiques, François rompt avec son passé, son milieu, sa famille, et surtout avec sa sœur qu’il tient pour responsable de cette disparition.
Persuadé qu’aucune femme ne pourra jamais remplacer Marie, François se jette à corps perdu dans les études. Il devient écrivain. Marie hante chacun de ses romans.
Un jour, une lettre lui parvient et le plonge dans l’incompréhension. Ses certitudes vacillent. Se serait-il trompé ?

Christiane Legris-Desportes, sémiologue et linguiste, est spécialisée dans l’analyse des tendances sociétales. Elle dirige une collection de sciences humaines et collabore à un magazine culturel. Elle a publié de nombreux articles universitaires et plusieurs essais.
Âme Stram Gram est son premier roman. Il a été, lors de sa première sortie, sélectionné au Salon du Livre et du Premier Roman de Draveil.

142 pages / ISBN : 9782491996277 / Date de parution : 11/02/2021 / 12,00 €

Comme des bêtes Violaine Bérot

Au pays des fées et des Ours, un roman émouvant et fort qui bouleverse nos certitudes

Mariette et son fils vivent dans la montagne, à l’orée du village. Un fils sans père, vite surnommé l’Ours par les enfants du village. Puisque dans ce coin reculé de montagne, c’est bien connu, les enfants sans père sont les enfants de l’ours. S’il est allé un temps à l’école, l’Ours n’a jamais réussi à s’intégrer ni à s’habituer aux contraintes. Lui qui ne s’exprime que par gestes ou grognements a besoin de l’espace et de la sérénité de la nature et des animaux pour vivre.

La mère et ce fils que d’aucuns trouvent différent, vivent en paix depuis des années près du village, au flanc de cette montagne sauvage et isolée. Jusqu’au jour où un randonneur plus curieux que les autres dénonce ce qu’il a découvert, et qui jusqu’alors ne faisait de mal à personne, une enfant qui vit nue dans la montagne, auprès d’un âne et de l’Ours. .

Le lecteur entre dans leur histoire à travers les interrogatoires de divers villageois, l’institutrice, le facteur, la pharmacienne, un voisin, Luc le coureur, et quelques autres. Mais aussi Mariette qui tente de faire comprendre à cette maréchaussée obtuse et bornée que les différences et un handicap ne sont pas forcément synonymes de dangerosité. Que son fils est un homme bon qui a eu peur du déploiement de force de ceux qui sont venus l’arrêter, qu’il ne peut pas s’exprimer ni comprendre. Mais surtout, tente de montrer que l’on peut accepter les différences, que le bonheur et la justice ne sont pas toujours où on croit.

Violaine Bérot nous propose là un roman choral subtil, qui déroule peu à peu une intrigue forte en émotion. La différence, le handicap, le viol, les peurs enfantines, les croyances, les fées protectrices, chaque élément qui compose cette intrigue apparaît peu à peu, le mystère se dévoile et nous montre qu’il faut ouvrir son cœur à l’autre pour l’accepter tel qu’il est.

J’ai aimé cette écriture et cette façon si poétique et en même temps si sobre de dire la douleur, la différence. Mais aussi de mettre en avant notre manière d’appréhender ces autres que l’on veut tellement conformes à nos idées, notre cadre de référence, notre propre façon de vivre et de penser. Comme des bêtes, un titre à double sens particulièrement bien trouvé. Car ici on peut se demander qui sont les bêtes, qui juge qui, et de quel droit ?

Du même auteur j’avais déjà apprécié le roman Nue, sous la lune et cette façon bien à elle appréhender de vrais sujets de société avec force et en si peu de pages.

Lire également la chronique de Joëlle du blog Les livres de Joëlle.

Catalogue éditeur : Buchet-Chastel

La montagne. Un village isolé. Dans les parois rocheuses qui le surplombent, se trouve une grotte appelée ’la grotte aux fées’. On dit que, jadis, les fées y cachaient les bébés qu’elles volaient.

A l’écart des autres habitations, Mariette et son fils ont construit leur vie, il y a des années. Ce fils, étonnante force de la nature, n’a jamais prononcé un seul mot. S’il éprouve une peur viscérale des hommes, il possède un véritable don avec les bêtes.

En marge du village, chacun mène sa vie librement jusqu’au jour où, au cours d’une randonnée dans ce pays perdu, un touriste découvre une petite fille nue. Cette rencontre va bouleverser la vie de tous…

Violaine Bérot, dans ce nouveau roman à l’écriture poétique, décrit une autre vie possible, loin des dérives toujours plus hygiénistes et sécuritaires de notre société. Un retour à la nature qu’elle-même expérimente depuis vingt ans dans la montagne pyrénéenne

Retrouvez également le blog de Violaine Berot

Parution : 01/04/2021 / Format : 13 x 19 cm, 160 p., / 14,00 EUR € / ISBN 9782283034873

Une fille sans histoire, Constance Rivière

Quand une jeune femme s’invente une vie pour enfin exister aux yeux du monde, « Une fille sans histoire » un roman choral glaçant qui oscille entre rêve et mensonge, et bouscule nos certitudes

Elle passe des heures à la fenêtre de son petit appartement tout à côté du Bataclan, cette salle de concert où elle voudrait aller un de ces jours, mais sa vie passe à côté d’elle, et jour après jour elle s’enferme dans sa solitude. Jusqu’à ce soir du 13 novembre 2015 où tout bascule. Le bruit, les sirènes, les secours, la peur et la violence sont sous sa fenêtre.

Elle, c’est Adèle.
Adèle doit trouver comment exister pour survivre, car depuis toujours elle est transparente aux yeux de tous. Enfant puis adolescente, personne ne la voyait, elle est insignifiante, d’un physique trop quelconque pour accrocher le regard ou l’intérêt des gens quelle côtoie. Et depuis qu’elle a perdu son père, elle n’existe plus pour personne. Aussi, lorsqu’elle voit la photo de Matteo, ce jeune homme qu’elle avait l’habitude de servir dans ce café où elle a travaillé quelques mois, elle décide de s’inventer une vie, et grâce à ce subterfuge trouve enfin une utilité à son existence.

Elle s’en persuade, elle vivait une histoire d’amour avec Matteo, cette relation naissance et secrète qu’elle va porter à bout de bras, exposer à tous et vivre dans sa tête, relation qui lui donne une consistance, lui permet d’être quelqu’un, d’être enfin utile. Cette appropriation, quelle sait injuste, ce mensonge dont elle n’anticipe pas le traumatisme qu’il va provoquer autour d’elle, la sauve du vide sidéral dans lequel elle évolue et lui donne enfin cette confiance en elle qui lui manquait tant.

Cette fille sans histoire prend la forme d’un roman choral. D’abord Saïd, l’un des tous premiers impliqués dans le soutien psychologique aux victimes, puis Francesca, la mère de Mattéo, et enfin plus brièvement Jacques, le patron du bar dans lequel Adèle a rencontré Matteo, chacun prend la parole à tour de rôle, et comme lors d’une déposition auprès de la police, explique la facette d’Adèle qu’il ou elle a connue.

Si j’ai parfois eu du mal à rentrer dans son histoire, tant elle parait incongrue et ignoble dans ces circonstances que l’on connait tous, j’ai eu envie de la comprendre, de l’aider à réaliser que même sans cela elle existe aux yeux des autres. Difficile pourtant d’avoir beaucoup d’empathie, une fois encore du fait de ces évènements dramatiques qui ont touché tant de familles. Est-ce crédible ? Et comment un mensonge aussi ignoble n’est-il pas détecté plus rapidement ? Comment ose-t-on s’approprier le chagrin des vivants ? Quand on sait que quelques fausses victimes ont été réellement détectées et condamnées, cela fait froid dans le dos, non ?
A la fois émouvant et glaçant, avec des personnages qui dérangent, « Une fille sans histoire » est un roman qui interroge et bouscule nos certitudes.

Roman lu dans le cadre de ma participation aux 68 premières fois

Catalogue éditeur : Stock

13 novembre 2015. Comme tous les soirs, Adèle est assise seule chez elle, inventant les vies qui se déroulent derrière les fenêtres fermées, de l’autre côté de la cour. Quand soudain, en cette nuit de presqu’hiver, elle entend des cris et des sirènes qui montent de la rue, envahissant son salon, cognant contre ses murs. La peur la saisit, elle ne sait plus où elle est, peu à peu elle dérive. Au petit matin apparaît à la télévision l’image de Matteo, un étudiant porté disparu, un visage qu’elle aimait observer dans le bar où elle travaillait. Sans y avoir réfléchi, elle décide de partir à sa recherche, elle devient sa petite amie. Dans le chaos des survivants, Adèle invente une histoire qu’elle enrichira au fil des jours, jouant le personnage qu’on attend d’elle. Les autres la regardent, frappés par son étrangeté, mais ils ne peuvent pas imaginer qu’on veuille usurper la pire des douleurs.

Une histoire contemporaine où l’on est happé par l’émotion et le trouble. Un roman nécessaire.

144 pages / Format : 138 x 217 mm / EAN : 9782234088221 / Prix : 17.50 € / Parution : 21/08/2019